L’univers et l’homme leur apparaissent sous un jour nouveau plus éclatant, plus chaud, plus harmonieux. […] Elle nous apparaît comme le néfaste héritage d’un passé qui cherche encore de sa main de squelette à nous attirer vers la fosse ou il descend. […] Voilà pourquoi il nous apparaît aussi sacré.
Désormais le temps nous apparaîtra comme le déroulement d’un fil, c’est-à-dire comme le trajet du mobile chargé de le compter. […] Prenons donc cette durée pour ce qu’elle est, pour une négation, pour un empêchement sans cesse reculé de tout voir : nos actes eux-mêmes ne nous apparaîtront plus comme un apport de nouveauté imprévisible. […] Si le temps a une réalité positive, si le retard de la durée sur l’instantanéité représente une certaine hésitation ou indétermination inhérente à une certaine partie des choses qui tient suspendue à elle tout le reste, enfin s’il y a évolution créatrice, je comprends très bien que la partie déjà déroulée du temps apparaisse comme juxtaposition dans l’espace et non plus comme succession pure ; je conçois aussi que toute la partie de l’univers qui est mathématiquement liée au présent et au passé — c’est-à-dire le déroulement futur du monde inorganique — soit représentable par le même schéma (nous avons montré jadis qu’en matière astronomique et physique la prévision est en réalité une vision).