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1168. (1859) Cours familier de littérature. VIII « XLVIIe entretien. Littérature latine. Horace (1re partie) » pp. 337-410

Les peuples ont leurs saisons comme la terre ; le peuple romain, peu littéraire et peu poétique de sa nature, a eu une saison productive très courte, mais dans cette saison très courte ce peuple semble avoir concentré en quelques années la vie et les œuvres des trois plus beaux génies de la latinité, Cicéron, Horace et Virgile. […] Lui, propriétaire d’un très petit domaine, il ne voulut pas m’envoyer à l’école de Flavius, où des enfants, nés d’honorables centurions, se rendaient, cassette et tableau suspendus au bras gauche, payant à huit ides chaque année le modique salaire des leçons. […] Toute la jeunesse aristocratique de Rome y passait quelques années, occupée à entendre les cours de philosophie, de poésie, d’éloquence, de la bouche des plus célèbres pédagogues. […] Odes, épîtres, satires, épodes, toute sa poésie dans ses premières années n’est que le calendrier anecdotique des amours et des scandales célèbres de Rome. […] Voltaire, dans ses dernières années, fut aussi spirituel dans ses vers familiers qu’Horace ; mais, quoiqu’il fût plus grand que le solitaire de Tibur, il ne fut jamais aussi gracieux ni aussi aimable.

1169. (1864) Cours familier de littérature. XVIII « CVIIe entretien. Balzac et ses œuvres (2e partie) » pp. 353-431

Il exploitait cent arpents de vignes, qui, dans les années plantureuses, lui donnaient sept à huit cents poinçons de vin. […] “L’hiver sera rude, disait-on, le père Grandet a mis ses gants fourrés : il faut vendanger. — Le père Grandet prend beaucoup de merrain, il y aura du vin cette année.” […] Lors de la fameuse année 1811, dont la récolte coûta des peines inouïes, après vingt ans de service, Grandet résolut de donner sa vieille montre à Nanon, seul présent qu’elle reçut jamais de lui. […] “Allons, régale-toi, Nanon”, lui disait-il dans les années où les branches pliaient sous les fruits que les fermiers étaient obligés de donner aux cochons. […] Le seul aspect de son cousin avait éveillé chez elle les penchants naturels de la femme, et ils durent se déployer d’autant plus vivement qu’ayant atteint sa vingt-troisième année, elle se trouvait dans la plénitude de son intelligence et de ses désirs.

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