L’usage de ce qui se passe dans le monde et l’experience de nos amis au défaut de la nôtre, nous apprennent qu’une passion contente s’use tellement en douze années, qu’elle devient une simple habitude. […] Quand il se chargea de cette tâche, l’ami, dont les conseils lui furent tant de fois utiles, étoit absent. Despreaux a dit plusieurs fois qu’il eut bien empêché son ami de se consommer sur un sujet aussi peu propre à la tragedie que Berenice, s’il avoit été à portée de le dissuader de promettre qu’il le traiteroit.
Les deux inquisitions le menacent à la fois ; ses amis lui conseillent de prévenir sa condamnation par la fuite, il quitte Venise pour jamais. […] Quelques jours après, il accepta un logement dans la maison de son ami Dusseck, située à l’extrémité d’un faubourg pittoresque qui dominait la ville. […] La veille de la première représentation, Mozart passa gaiement la soirée avec quelques amis. […] « Ce jour-là tous les parents et tous les amis de la maison se réunissent dans la soirée pour passer quelques heures ensemble en veillées de famille et en divertissements innocents. […] « Nous revînmes insensiblement à la gaieté ; j’allai rendre visite à toutes les personnes qui étaient venues nous visiter la veille au soir ; je revis quelques-unes de mes anciennes amies de jeunesse, qui m’accueillirent avec une joie et une courtoisie tendre, pareille aux sentiments que j’éprouvais moi-même à les revoir ; et ce ne fut qu’à l’heure du dîner, l’après-midi, que je prévins la famille et les amis que je devais partir, dès le lendemain, pour Trévise et peut-être pour Venise.