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2705. (1903) Articles de la Revue bleue (1903) pp. 175-627

Mais, à quelque temps de là, ayant entendu lire ces vers à haute voix par un ami qui avait pénétré leur harmonie intime, je fus aussi surpris et aussi charmé que j’avais été auparavant déçu, en découvrant en eux des rythmes nouveaux d’une candeur ingénue et d’une mélancolie impressionnante.

2706. (1901) L’imagination de l’artiste pp. 1-286

Quand on étudie leur vie ; quand on parcourt les lettres où ils font à quelque ami la confidence de leurs espoirs ou de leurs déceptions ; quand on les entend parler de leur art, on ne peut manquer d’être frappé de l’excitation presque continue de leurs sentiments. […] Deux amis qui ont fait ensemble, il y a bien longtemps, un beau voyage, aimeront à s’en rappeler l’un à l’autre les incidents ; et pendant qu’ils parlent, des images qui semblaient à jamais effacées reparaissent tout à coup ; dans un éclair de vision mentale ils revoient la falaise que battaient les vagues, le château en ruines, le glacier aux crevasses bleuâtres, la pente vertigineuse où l’un aurait glissé si l’autre ne l’avait retenu par le bras, la figure d’un voisin de table d’hôte. […] Ne dessiner que sur une intense vision de la nature ; se représenter chaque fleur dans son milieu naturel, l’iris jaune au bord de la rivière, l’églantine sur la lisière des bois, le nénuphar endormi sur l’eau sombre de l’étang, l’anémone frileuse tremblant au vent des hauts sommets ; se faire l’ami de la plante et son confident ; lui donner une âme et entrer en sympathie avec elle ; s’intéresser à ses timidités, à ses coquetteries, à ses langueurs, à ses nostalgies, et nous les redire ; y voir le symbole de la vie triste ou joyeuse, débile ou puissante, contrainte ou librement épanouie : être poète en un mot, voilà le véritable secret.

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