La femme du vernissage par son air de toqué, par sa tenue excentrique, par le coup de pistolet de sa toilette une créature tout à fait inclassable, et si énigmatique, qu’on ne sait pas si elle est honnête ou malhonnête, si elle est Parisienne ou étrangère. […] On sent dans ces lettres, qu’en ce pays de chaleur torride sans air, en ce pays d’anémie et d’épidémie, en ce pays au mois d’octobre meurtrier, en ce pays, où un Européen ne peut guère vivre que trois ans, et encore avec des séjours dans la montagne ; on sent que contre le voisinage de cette mort, c’est au moyen du champagne, du bal, du flirtage, d’une vie mondaine enragée, que ces hommes et ces femmes en chassent la pensée. […] Le gardien regardait en l’air : « Oh ! […] Lundi 8 septembre Le soir, quand vous êtes assis à une table de café, le défilé sur le boulevard, ce défilé incessant, continu au bout de quelque temps d’attention, n’a plus l’air d’un défilé de vivants. […] Cette interdiction m’a tout l’air d’avoir été amenée par des passages de mon Journal, pendant mon séjour à Munich chez Lefebvre de Béhaine… Est-ce que j’appelle la guerre ?
L’air populaire qui court les rues en sortant du Vaudeville, et que les bornes apprennent d’elles-mêmes à force de l’entendre répéter par les orgues ambulants, est un véhicule nécessaire pour porter la poésie narquoise ou politique de porte en porte, comme le facteur quotidien y porte une lettre, à cent mille adresses. L’air musical est nécessaire aussi pour graver le couplet dans la mémoire du peuple par l’obsession d’un écho qui redit un million de fois le même refrain. […] On entend malgré soi la mélodie banale, semblable à la voix du crieur public ; souvent même on répète soi-même, en dépit de soi, l’air dont on est obsédé et les paroles qui répugnent à vos opinions. Telle est la puissance de la chanson sur le peuple illettré des capitales en France : c’est l’enseignement mutuel de la borne et du pavé ; l’air monte souvent jusqu’au grenier du pauvre ; il pénètre même dans le salon du riche ; mais son théâtre par excellence est le café. […] Ce mode bachique d’ajuster sa poésie sur un air des rues était donc déjà familier comme une habitude à Béranger avant qu’il en eût fait un système.