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358. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre troisième. L’esprit et la doctrine. — Chapitre III. Combinaison des deux éléments. »

Aux approches de 1789, il est admis qu’on vit « dans le siècle des lumières », dans « l’âge de la raison », qu’auparavant le genre humain était dans l’enfance, qu’aujourd’hui il est devenu « majeur ». […] Mais, du même coup, elle a cessé d’être critique et clairvoyante ; elle ne tolère plus les contradictions ou le doute, elle n’admet plus les restrictions ni les nuances ; elle ne sait plus ou elle apprécie mal ses preuves. […] On refuse d’admettre que la raison et la tradition puissent ensemble et d’accord défendre la même citadelle ; dès que l’une entre, il faut que l’autre sorte ; désormais un préjugé s’est établi contre le préjugé  À la vérité, Voltaire « le patriarche » ne veut pas se départir de son Dieu rémunérateur et vengeur395 ; tolérons en lui ce reste de superstition en souvenir de ses grands services ; mais considérons en hommes le fantôme qu’il regarde avec des yeux d’enfant. […] Il est admis, non seulement qu’en elle-même la tradition est fausse, mais encore que par ses œuvres elle est malfaisante, que sur l’erreur elle bâtit l’injustice et que par l’aveuglement elle conduit l’homme à l’oppression.

359. (1869) Cours familier de littérature. XXVIII « CLXVIe entretien. Biographie de Voltaire »

Deux de ses nièces, madame de Fontaine et madame Denys, quelques amis de son enfance tels que Thiriot, d’Argental, étaient seuls admis dans sa retraite. […] Voltaire admettait cette Providence pour les généralités de la création ; pour les individualités, il supposait Dieu aussi faible que l’homme ; il attribuait à l’intelligence infinie les procédés et les généralisations qui soulagent l’intelligence bornée et l’attention restreinte de l’homme ; il soutenait que Dieu gouverne par les ensembles et non par les détails ; c’était méconnaître la première des attributions et des forces de Dieu : l’infini. […] Il n’admettait pas cette vérité de convention, admise très-légèrement de nos jours, que les persécutions et les bûchers favorisent les doctrines qu’on tue ou brûle ; l’histoire dément à toutes ses pages ce sophisme de l’impuissance des persécutions pour éterniser ou pour ajourner les philosophies ou les religions nouvelles.

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