/ 2380
894. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre II. L’époque romantique — Chapitre III. La poésie romantique »

Ce n’est pas une action comme chez Vigny, c’est un tableau que V. […] Et surtout de l’action, toujours de l’action. La chanson de Béranger est récit ou drame ; et chaque couplet met en lumière un des moments principaux de l’action. […] En un sens même (poésie à part, et idées, et style), la chanson de Béranger est populaire par le même mérite qui a fait la popularité de La Fontaine : parce qu’elle est toute action.

895. (1896) Les origines du romantisme : étude critique sur la période révolutionnaire pp. 577-607

La Fatalité, cette interprétation religieuse des phénomènes dont on ne sait découvrir les causes ; la Fatalité dont les Romantiques de 1830 usèrent et abusèrent si libéralement, était alors autre chose qu’un expédient littéraire, fraîchement retrouvé des Grecs : si Racine se servait des Romains et des Grecs pour déguiser les courtisans de Versailles, qui sont les personnages de ses tragédies, il ne recourait pas à la Fatalité pour expliquer leur actions. Les événements de la révolution avaient été si imprévus, leur succession si soudaine et leur action sur la vie et la fortune des individus si violente et si brusque, que les notions ordinaires sur l’ordre des choses étaient bouleversées. […] Les hommes aimaient l’action et recherchaient le mouvement, ceux qui agissaient par la pensée étaient des énergiques de la trempe de Julien Sorel, de le Rouge et le Noir et non des énervés et des affadis, comme Obermann, Amaury de Volupté et Didier de Marion de Lorme. […] Jugeant l’humanité à l’aune capitaliste, ils s’écrient triomphalement : « L’homme est et restera toujours égoïste ; si vous lui retirez comme unique mobile de ses actions l’intérêt privé, vous détruisez la société, vous arrêtez le progrès et nous retournons à la barbarie. » L’âme humaine, ainsi que les autres phénomènes de la nature est, au contraire, en un perpétuel état de transformation, acquérant, développant, et perdant des vices et des vertus, des sentiments et des passions. […] Dans cet ouvrage, que Taine a pillé honteusement, sans toujours comprendre la portée de ce qu’il dérobait, Mme de Staël émet des vues géniales sur l’action exercée par le milieu social pour déterminer la forme littéraire.

/ 2380