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393. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) «  Œuvres de Chapelle et de Bachaumont  » pp. 36-55

On a eu des voyages en vers et en prose sur le même ton et d’après le même patron ; La Fontaine, Regnard, Hamilton, Le Franc de Pompignan, Desmahis, Voltaire, Bouliers, Bertin, Parny (j’en oublie encore), se sont mis à voyager en vers et en prose en se ressouvenant plus ou moins du premier modèle, et il en est résulté un genre artificiel et factice. […] Voltaire, adressant à sa nièce Mme Denis une lettre en vers et en prose qu’on intitule son Voyage à Berlin, disait : « N’allez pas vous imaginer que je veuille égaler Chapelle, qui s’est fait, je ne sais comment, tant de réputation pour avoir été de Paris à Montpellier et en terre papale, et en avoir rendu compte à un gourmand. » Le cadre n’y fait trop rien, et c’est par d’heureux détails que le joli Voyage réussit. Le début, à parler vrai, ne nous agrée plus guère ; ce mélange de vers et de prose, ces enfilades de rimes redoublées pouvaient sembler neuves alors ; aujourd’hui, c’est usé, et quand on lit au xviiie  siècle les lettres de Voltaire, par exemple, on est souvent étonné que cette même plume qui vient de dire très gentiment les choses en prose se mette tout d’un coup à les redire moins bien en assez mauvaises rimes.

394. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Le Livre des rois, par le poète persan Firdousi, publié et traduit par M. Jules Mohl. (3 vol. in-folio.) » pp. 332-350

C’est une belle et touchante histoire qui a couru le monde, qui a refleuri dans mainte ballade en tout pays, et que bien des poètes ont remaniée ou réinventée à leur manière, jusqu’à Ossian dans son poème de Carthon et jusqu’à Voltaire dans sa Henriade. Voltaire n’avait pas lu assurément Ferdousi, mais il a eu la même idée, celle d’un père, dans un combat, aux prises avec son fils, et le tuant avant de le reconnaître. La pensée de Voltaire est toute philosophique et humaine ; il veut inspirer l’horreur des guerres civiles.

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