Le spiritus graiæ tenuis camœnæ fut merveilleusement senti des excellents poëtes de Rome, mais ne put être toujours et tout entier ressaisi par eux. […] Un peu après Méléagre, immédiatement après lui en date, un Grec sorti précisément de la même ville, de Gadare, un poëte non moins délicat, et dont il serait agréable aussi de parler un jour, Philodème, vint à Rome, y vécut en épicurien poli ; on le trouve fort loué de Cicéron.
Que le lecteur considère quelques-unes de ces grandes créations de l’esprit dans l’Inde, en Scandinavie, en Perse, à Rome, en Grèce, et il verra que partout l’art est une sorte de philosophie devenue sensible, la religion une sorte de poëme tenu pour vrai, la philosophie une sorte d’art et de religion, desséchée et réduite aux idées pures. […] Si enfin l’homme réduit à des conceptions étroites et privé de toute finesse spéculative, se trouve en même temps absorbé et roidi tout entier par les préoccupations pratiques, on verra, comme à Rome, des dieux rudimentaires, simples noms vides, bons pour noter les plus minces détails de l’agriculture, de la génération et du ménage, véritables étiquettes de mariage et de ferme, partant une mythologie, une philosophie et une poésie nulles ou empruntées.