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206. (1889) Histoire de la littérature française. Tome II (16e éd.) « Chapitre deuxième »

Que chercheront Pascal, La Rochefoucauld, Bossuet, Bourdaloue, La Bruyère, Fénelon ; et, dans la poésie, Racine, Molière, La Fontaine, Boileau, sinon, dans les genres les plus divers, des parties de la vérité universelle ? […] Mais Molière dut en être touché plus directement et plus tôt que les autres. […] Pourquoi cet ordre admirable de Descartes, cette simplicité toujours noble, cette exactitude sans recherche, cette profonde connaissance de l’homme, qui perce à chaque instant sous la discussion métaphysique, n’auraient-ils pas aidé Molière à connaître son naturel ? C’est Descartes que je sens dans une des plus étonnantes beautés du théâtre de Molière, dans cette logique du dialogue si libre dans ses tours, et toutefois si serrée. Il serait puéril d’ôter à Gassendi, pour la donner à Descartes, la gloire des premières impressions que reçut le génie de Molière ; mais il est vrai de dire que tous les deux y ont eu part, Gassendi par son attachement même pour les vérités d’expérience, qui sont le fond de la comédie ; Descartes par sa méthode, qui donnait, pour tous les genres d’ouvrages, les règles de l’art, c’est-à-dire de l’expression durable.

207. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre I. Les origines du dix-huitième siècle — Chapitre I. Vue générale »

Corneille, Racine, Molière, La Fontaine, Boileau, chacun a sa « morale », c’est-à-dire une conception des règles qui doivent déterminer la conduite de l’individu, et des fins auxquelles s’adaptent ces règles. […] Ces premières affirmations seront de vagues extraits du substantiel naturalisme de la Renaissance, des résidus équivoques de toutes les philosophies et de toutes les religions du passé, ou des négations arbitraires de l’opinion traditionnelle et populaire : ainsi cette maxime que « l’homme est bon » ; on peut y voir un vestige du naturalisme de Rabelais et de Molière, et en même temps une hostile contradiction du dogme de la chute.

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