/ 1543
352. (1914) Boulevard et coulisses

Je reconnus immédiatement Arthur Meyer, car l’image avait déjà popularisé ses traits, et d’ailleurs l’émotion qui m’agita soudain ne pouvait me laisser aucun doute. […] L’un est trop surexcité par la presse, porté avec trop de précipitation de spectacle en spectacle, d’émotion en émotion, pour avoir le loisir d’un jugement littéraire désintéressé et indépendant. […] Sous l’influence de son éducation, de ses traditions, le public français cultivé réclame à la littérature des émotions à la fois délicates et profondes ; il les lui réclame sous une forme dépourvue de grossièreté et de pédantisme également, ou alors, l’excellent reportage des journaux et le cinématographe lui suffisent. […] Mais elle aime mieux ça que de rentrer à l’atelier ; et, auprès de ses anciennes camarades, quand elle va les revoir, elle se vante des émotions de la vie de théâtre et de la gloire de la rampe.

353. (1900) Le rire. Essai sur la signification du comique « Chapitre III. Le comique de caractère »

Le comique, disions-nous, s’adresse à l’intelligence pure ; le rire est incompatible avec l’émotion. […] En général, un sentiment intense gagne de proche en proche tous les autres états d’âme et les teint de la coloration qui lui est propre : si l’on nous fait assister alors à cette imprégnation graduelle, nous finissons peu à peu par nous imprégner nous-mêmes d’une émotion correspondante. On pourrait dire — pour recourir à une autre image — qu’une émotion est dramatique, communicative, quand tous les harmoniques y sont donnés avec la note fondamentale. […] Au contraire, dans l’émotion qui nous laisse indifférents et qui deviendra comique, il y a une raideur qui l’empêche d’entrer en relation avec le reste de l’âme où elle siège. […] Le rire, nous le savons, est incompatible avec l’émotion.

/ 1543