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783. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XXVIII. Des obstacles qui avaient retardé l’éloquence parmi nous ; de sa renaissance, de sa marche et de ses progrès. »

Mais, entre ces deux écrivains, il y a pour la langue même une différence marquée. […] Après ces deux écrivains, qui tous deux, pour le style même, sont encore célèbres, la langue tendit insensiblement à un nouveau caractère. […] Dans la suite, elle devait réparer une partie de ces pertes, par les ouvrages des grands écrivains du siècle de Louis XIV, et par ce don puissant qu’ont les hommes de génie de féconder les langues, en jetant dans le public une foule d’expressions neuves et pittoresques, que les hommes médiocres ou froids ne manquent pas de censurer d’abord, parce qu’ils sont gouvernés par l’habitude, et qu’il est plus aisé en tout genre de critiquer que d’inventer. […] Newton même, selon la remarque d’un écrivain philosophe67, Newton était éloquent sur ces objets. […] Des écrivains lui avaient donné la richesse et l’harmonie, d’autres la précision et la force.

784. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Quatrième partie. Élocution — Chapitre II. Du sens et de la valeur des mots »

De même que la définition d’une espèce ne donne que les caractères communs à tous les individus de l’espèce, et de même que ces caractères communs ne peuvent jamais se présenter isolés, mais s’accompagnent toujours de caractères individuels qui sont infiniment variables, de même la définition d’un mot ne donne que la portion de sens commune à tous les emplois que les écrivains ont fait de ce mot : à cela vient s’ajouter une valeur spéciale, qui résulte de la combinaison particulière où le mot est entré. […] Mais il n’offre pas à l’écrivain sa richesse ; il la cède : il ne faut point compter sur son soutien ; il faut le maîtriser et le dompter.

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