Un homme impartial qui lira attentivement les écrivains du siècle de Louis XIV s’apercevra bientôt que rien n’a échappé à leur vue ; mais que, contemplant les objets de plus haut que nous, ils ont dédaigné les routes où nous sommes entrés, et au bout desquelles leur œil perçant avait découvert un abîme. […] Les écrivains modernes se sont fort étendus sur la puissance de l’opinion, et c’est Pascal qui le premier l’avait observée. […] Les lois fondamentales changent, le droit a ses époques ; plaisante justice qu’une rivière ou une montagne borne ; vérité au-deçà des Pyrénées, erreur au-delà. » Certes, le penseur le plus hardi de ce siècle, l’écrivain le plus déterminé à généraliser les idées pour bouleverser le monde, n’a rien dit d’aussi fort contre la justice des gouvernements et les préjugés des nations.
Enfin, pour résumer ce qu’il faut attendre de ces écrivains sans rhétorique, voici ce que nous disions de Voltaire, qui représente ce genre de style : « Ma conviction profonde est que même ce style-là est assimilable par le travail et qu’un esprit littéraire ne peut sortir d’une longue lecture de Voltaire sans en retenir le ton. […] La Bruyère donne l’exemple trop souvent imité des théories imaginées par les écrivains pour se mettre en paix sur leurs défauts. […] Ou nous répond que de très grands écrivains ont lu à tort et à travers et n’ont même pas lu du tout, comme si nous n’avions pas répété cent fois qu’un Cours de littérature n’est pas fait pour des hommes de génie.