Âme cynique dans son enfance, vicieuse dans sa jeunesse ; soif de la gloire, par le paradoxe dans sa vie d’écrivain ; recherche dédaigneuse de la société aristocratique dans son âge mûr ; affectation de la popularité démocratique par le cynisme du désintéressement et par la pauvreté volontaire dans ses dernières années ; démence évidente et suicide problématique à la fin. […] L’âge et la sauvagerie de Rousseau pris en flagrant délit de ridicule, il découvrit que la curiosité de madame d’Épinay allait jusqu’à corrompre Thérèse pour avoir communication de la correspondance mystérieuse entre madame d’Houdetot et lui. […] Forcée par l’âge de renoncer à l’empire de la beauté, elle avait aspiré à l’empire de l’esprit, dont elle était assez digne. […] Mais, prématurément sensé, je croyais et je crois encore que, pour devenir législateur des sociétés humaines, il fallait un long et grave noviciat d’âge, d’études, de fréquentation des hommes, de pratique des affaires, de voyages parmi les peuples, les lois, les mœurs, les caractères des diverses contrées ; le spectacle des choses humaines parmi les hommes, en ordre ou en anarchie ; en un mot, une éducation complète et appropriée à l’auguste emploi que l’on se proposait de faire de sa sagesse, après l’avoir apprise ; j’y ajoutais encore la vertu, cette sagesse pratique sans laquelle il n’y a pas d’inspiration divine dans le législateur. […] On conçoit que des esprits sains, exercés par de longues années de vie publique, écrivent dans leur maturité des tables de la loi, des codes sociaux, des commentaires sur les gouvernements des nations, appropriés aux caractères, aux mœurs, aux traditions, aux âges, à la situation géographique des États, aux circonstances, même politiques, des peuples dont ils éclairent les pas dans la route de leur civilisation.
La raison en est simple : les peuples, avant leur âge de parfaite civilisation, n’ont ni assez de loisir, ni assez de richesse, ni assez de luxe public pour élever à leurs poètes ces édifices vastes et splendides, ces institutions de plaisir public qu’on appelle des théâtres et des scènes. […] À chaque âge son genre de poésie, mais le plus parfait, sinon le plus émouvant de ces genres, est certainement celui qui n’a pas besoin de tous ces auxiliaires et de tous ces accessoires étrangers à la poésie elle-même et qui ne demande, comme le poète épique ou le poète lyrique, qu’une goutte d’encre au bout d’une plume de roseau. […] La représentation d’Andromaque de Racine, donnée sur le théâtre de Saint-Cyr, ne tarda pas à démontrer le contraste fâcheux et presque corrupteur entre l’innocence de ces jeunes actrices et les rôles d’amour et de passion qui juraient avec leur pureté et avec leur âge. […] L’occasion était unique, Racine pouvait enfin consacrer à la religion un talent qu’elle lui avait commandé d’étouffer avant l’âge, et sanctifier sa gloire en ne se glorifiant que pour Dieu. […] Que son nom soit béni, que son nom soit chanté ; Que l’on célèbre ses ouvrages Au-delà du temps et des âges, Au-delà de l’éternité !