S’il en est ainsi, pour voir le monde revenir en arrière, nous n’avons plus besoin de l’œil infiniment subtil du démon de Maxwell, notre microscope nous suffit. […] Cela malheureusement ne suffit pas, et il faut des hypothèses complémentaires ; il faut admettre que les corps en mouvement subissent une contraction uniforme dans le sens du mouvement. […] C’est ce qu’on a appelé la pression Maxwell-Bartholdi ; elle est très petite et on a eu bien du mal à la mettre en évidence avec les radiomètres les plus sensibles ; mais il suffit qu’elle existe. […] Eh bien, ainsi que nous l’avons vu plus haut, pour rendre compte de ces résultats, Lorentz a été obligé de supposer que toutes les forces, quelle que soit leur origine, étaient réduites dans la même proportion dans un milieu animé d’une translation uniforme ; ce n’est pas assez, il ne suffit pas que cela ait lieu pour les forces réelles, il faut encore qu’il en soit de même pour les forces d’inertie ; il faut donc, dit-il, que les masses de toutes les particules soient influencées par une translation au même degré que les masses électro-magnétiques des électrons.
Quelques exemples suffiront. […] Il nous suffit de ces quelques exemples pour illustrer cette vérité que le domaine du beau s’élargit insensiblement, que le nombre des choses et des êtres admis par l’esthétique s’accroit de siècles en siècles, que des formes nouvelles et des manifestations inconnues de beauté surgissent à toute heure en dehors des champs clos, au cours de l’évolution humaine. […] C’est là ce qu’on peut appeler proprement une création, pour laquelle il ne suffit pas de posséder le goût et l’ingéniosité, mais surtout la puissance individuelle de concevoir. […] Qu’il nous suffise d’avoir noté notre impression personnelle et franche.
Moreau, pour répandre, dans les Sociétés, qu’il favorisoit le despotisme ; nous croyons devoir en citer ici quelques morceaux, qui suffiront pour prouver l’injustice de cette imputation, & convaincre de plus en plus le Public que la calomnie est l’arme favorite des faux Apôtres de l’humanité. […] La raison suffit pour nous convaincre que les Souverains furent donnés aux Peuples, & non les Peuples aux Souverains.
En ce qui est du texte seul, s’il semblait qu’il eût suffi de le rétablir couramment dans sa pureté sans avoir à en dire ses raisons, on se tromperait fort, et ce ne serait pas le moyen de convaincre que d’en agir de la sorte. […] Dans Cinna, acte I, scène iii, Cinna, racontant à Émilie comment il s’y est pris pour échauffer les conjurés et les animer contre le tyran, lui redit une partie de son discours et des sanglants griefs qu’il a étalés devant eux : d’abord le tableau des guerres civiles et de ces batailles impies, les horreurs du triumvirat et les listes de proscription, les plus grands personnages de Rome immolés ; puis il a ajouté : « ……… Toutes ces cruautés, La perte de nos biens et de nos libertés, Le ravage des champs, le pillage des villes, Et les proscriptions, et les guerres civiles Sont les degrés sanglants dont Auguste a fait choix Pour monter dans le trône et nous donner des lois. » Je vous le demande, suffira-t-il de rétablir « dans le trône », au lieu de « sur le trône », sans dire le pourquoi ? […] Selon lui, l’intention première de la pièce qu’on vient de lire était toute différente ; pour la bien saisir, il suffit de supprimer la dernière stance où il est parlé du grison, et qui lui semble « visiblement plaquée. » En lisant la pièce ainsi épurée et réduite, il devient, selon lui, évident que ces vers ne peuvent avoir été adressés que par une femme à une autre femme. […] L’action, l’arrangement dramatique, les caractères, les mœurs, la langue, tout enfin, les vers même offrent les défauts les plus graves ; et la barbarie d’un art qui commence à peine à se former ne suffit pas, il s’en faut, à les excuser. […] Il n’est pas nécessaire d’être poète pour la juger ; il suffit de connaître les hommes et les choses, d’avoir de l’élévation et d’être homme d’État. » Et s’animant par degrés : « La tragédie, disait-il, échauffe l’âme, élève le cœur, peut et doit créer des héros.
Il pense avec Dion Cassius « que tant que la République fut petite et son territoire médiocre, la forme républicaine pouvait suffire et qu’elle fut un bien, mais que, sitôt que Rome, se jetant au dehors de l’Italie et traversant les mers, eut rempli de sa puissance les continents et les îles lointaines, la République n’était plus qu’un mal. » Voyez Rome, en effet, au temps de César et avant qu’il mette la main à l’Empire, avant qu’il soit revenu des Gaules pour passer le Rubicon : quelle confusion ! […] Il avait eu affaire aux barbares ; il connaissait à fond l’état de Rome et sa corruption ; il prévoyait le moment où cet orgueilleux colosse romain ne pourrait plus suffire à sa propre défense, et il voulait y pourvoir en déblayant, pour ainsi dire, toute la banlieue de l’Empire, en l’environnant de l’effroi de ses armes et de la terreur du nom romain, en y plaçant sans doute des colonies militaires, comme des sentinelles avancées. […] Qu’il te suffise d’améliorer quelque peu les choses, et ne regarde pas ce résultat comme de mince importance. […] » On arrive à ce même dégoût par tous les chemins ; il suffit d’avoir longtemps vécu et d’avoir eu à se démêler de trop près avec l’espèce humaine. […] Il ne suffit pas d’élever des autels à la Bonté, et de les élever même dans son propre cœur : il faut des images plus parlantes aux foules.
Jusque dans ces dernières années, le petit pays dont je vous parle était, en grande partie, peuplé par de pauvres hères au teint blafard, à l’aspect souffreteux, au corps émacié, au visage d’une pâleur caractéristique et dont les téguments étaient empâtés d’une bouffissure spéciale ; on les aurait reconnus entre mille ; il suffisait de les avoir vus une fois… » « Pour les questions qui se rattachent à l’histoire pathologique de la lèpre, la contagion encore si controversée… l’impuissance presque absolue des moyens thérapeutiques contre cette bizarre maladie, etc., toutes ces notions ont été puisées, vous devez le penser, aux bonnes sources. […] Sans doute, j’ai outré un peu les choses, mais comme je ne visais qu’à la ressemblance, qu’à l’effet dramatique, cela me suffisait. » [sic]78 Cela suffisait donc à M. […] Mais l’érudition ne suffit même pas à l’ampleur de vues de M. […] Chose bien remarquable et qui à elle seule ferait reconnaître la fiction, le romancier est venu échouer sur le même écueil que les simulateurs ; eux aussi, afin de faire mieux croire qu’ils sont fous, multiplient les extravagances de toutes sortes dans leurs propos et dans leurs actes, sans se douter qu’ils se rendent coupables de dissonnances révélatrices et qu’il leur suffit d’afficher, au même moment, des formes de folie qui, chez les vrais malades, s’excluent mutuellement, pour montrer que chez eux la folie n’existe pas.
Mais cela ne suffit pas. […] Il suffit pour cela de se reporter aux définitions déjà données. […] Son nom suffit à la définir. […] Le raisonnement suffit aux mathématiques, sciences abstraites. […] Mais celle-là suffit à la réfuter.
Il ne suffit pas de croire avec les Stoïciens, que la douleur n’est point un mal ; il faut être convaincu qu’elle est un bien, pour s’y résigner. […] L’influence de la vérité sur le public est telle qu’il suffit d’attendre pour être mis à sa place. […] -C. dans ses discours remonte plutôt aux principes des actions qu’à l’application détaillée de la loi : mais ne suffit-il pas que l’esprit général de l’Évangile tende à consacrer la résignation ? […] Quel est l’homme malheureux qui par sa patience et sa résignation ne donnera pas un exemple qui émeuve les âmes et fasse naître des sentiments que jamais les meilleures leçons ne suffiraient pour inspirer ? […] Le caractère anglais est en général très actif et même très impétueux ; leur admirable Constitution qui développe au plus haut degré les facultés morales peut seule suffire à leur besoin d’agir et de penser : la monotonie de l’existence ne leur convient point, quoiqu’ils s’y astreignent souvent.
Pour répondre à la question, il suffit de jeter un coup d’œil sur l’évolution de la philosophie grecque. […] Mais, pour l’objet qui nous occupe, un coup d’œil jeté sur l’ensemble des doctrines suffira. […] Il y a des exceptions cependant, et le cas de Jeanne d’Arc suffirait à montrer que la forme est séparable de la matière. […] Remarquons qu’une émotion d’ordre supérieur se suffit à elle-même. […] Mais, pour l’objet qui nous occupe, il nous suffit de considérer ceux qui se sont avancés le plus loin.
Or, il suffirait d’énoncer une pareille proposition pour en découvrir l’absurdité. […] Mais, dans cette déduction, ni le réalisme ni l’idéalisme ne peuvent aboutir, parce qu’aucun des deux systèmes d’images n’est impliqué dans l’autre, et que chacun d’eux se suffit. […] Mais il ne suffit pas de tailler, il faut coudre. […] Comme, en pareil cas, l’objet a disparu tandis que le cerveau subsiste, on conclut de là que le phénomène cérébral suffit à la production de l’image. […] Il suffirait de diviser idéalement cette épaisseur indivisée de temps, d’y distinguer la multiplicité voulue de moments, d’éliminer toute mémoire, en un mot, pour passer de la perception à la matière, du sujet à l’objet.
. — La simple excitation des centres nerveux suffit pour provoquer la sensation. — Preuve par les hallucinations. — Cas observés par les aliénistes. — Hallucinations qui suivent l’usage prolongé du microscope. — Observations de M. […] Voyons donc de plus près cette action nerveuse, puisqu’il n’y a pas de sensation sans elle, et puisque, par elle seule, elle suffit à provoquer la sensation. […] Une portion assez restreinte de ces lobes suffit donc à l’exercice de leurs fonctions. […] Il suffit pour répondre de maintenir l’image pendant quelques secondes à ce poste privilégié. […] Or, pour fournir à cette opération, il suffit que les cellules du même type fassent un ou plusieurs cordons continus.
Lorsque l’âme est dégagée de l’empire des passions, elle permet à l’homme une grande jouissance ; c’est l’étude, c’est l’exercice de la pensée, de cette faculté inexplicable dont l’examen suffirait à sa propre occupation, si au lieu de se développer successivement, elle nous était accordée tout à coup dans sa plénitude. […] Elle vous fait parcourir une suite d’objets nouveaux, elle vous fait éprouver une sorte d’événements qui suffisent à la pensée, l’occupent et l’animent sans aucun secours étranger. […] Nul être vivant ne le secourt, nul être vivant ne s’intéresse à son existence ; il ne lui reste que la contemplation de la nature, et elle lui suffit ; c’est ainsi qu’existe l’homme sensible sur cette terre, il est aussi d’une caste proscrite, sa langue n’est point entendue, ses sentiments l’isolent, ses désirs ne sont jamais accomplis, et ce qui l’environne, ou s’éloigne de lui, ou ne s’en rapproche que pour le blesser.
Séduire, toucher, ravir, être exquis, gais, splendides, inventer Lélia et Mimi, mettre au monde Manon et Charlotte, ajouter Rodolphe à la terre et Elvire au ciel étonné, cela ne leur a point suffi. […] C’est une charmante et haute figure ; je ne puis pas l’examiner dans cette étude, mais je la décrirai un jour, il me suffit de dire maintenant quelle fut sa grandeur véritable et essentielle. […] C’est que pour faire toute l’œuvre immense des écrivains que j’ai cités, il suffit d’être un grand génie, et que pour prononcer une petite phrase humaine, il faut être une âme profonde.
Pour répondre, il suffit de considérer ce qui se passe en temps de guerre. […] Bornons-nous pour le moment à constater que cette attitude de l’âme, qui est plutôt un mouvement, se suffit à elle-même. […] En y regardant de près, on verrait que cette morale ne s’est jamais suffi à elle-même. […] Qu’une moralité de ce genre suffise à la rigueur, si elle est complète, cela n’est pas douteux. […] Si la société se suffit à elle-même, elle est l’autorité suprême.
Mais tous ces germes et toutes ces ébauches n’auraient pu suffire à engendrer le drame formé et complet, doué de l’action qui saisit et de l’illusion qui entraîne. […] L’initiative du génie grec à l’état normal, le rayon fécondant de l’esprit attique n’auraient pas suffi à une création si extraordinaire.
Il suffira de quelques conseils bien simples, bien évidents pour former le style ; quand l’esprit saisit bien, quand le cœur sent bien, quand on a échappé à la tyrannie paresseuse de la mémoire, on n’écrit jamais mal et l’on est tout près de bien écrire. […] N’allez pas croire qu’il lui suffise de connaître la mythologie et le poème du Tasse pour écrire la fameuse lamentation sur ses arbres abattus ; une mémoire d’écolier aurait teinté le sentiment de pédantisme, et tout était gâté.
Quelques phrases suffisent-elles maintenant pour prendre position d’historien dans l’historique patrie de Machiavel ? Si quelques sons plus ou moins agréablement combinés suffisent pour enivrer la musicienne Italie, nous aimons mieux Rossini et Verdi que ce Cantu qu’elle honore et cet autre déclamateur sonore qui vient de mourir, ce Gioberti, plus fort pourtant que Cantu, dans son ordre de préoccupations, mais bien chétif aussi, bien petit, quand on le lève debout dans la gloire exagérée qu’on lui fait !
. — Il suffit d’en admettre trois. — Théorie de Young et d’Helmholtz. — Confirmation expérimentale de la théorie. — Paralysie partielle de l’aptitude à éprouver les sensations de couleur. — Expériences qui portent au maximum la sensation du violet et du rouge. — Les trois sensations élémentaires sont celles du rouge, du violet et probablement du vert. […] Un accroissement de vitesse et une diminution de longueur dans les ondes suffisent pour déterminer toutes les variations que notre sensation de couleur subit du rouge au violet. […] Ce qui n’a pas lieu ; car au minimum inférieur du jaune on voit apparaître une nouvelle sensation distincte, celle du vert. — Il y a donc au moins trois sensations élémentaires, et, en étudiant la composition du spectre, on trouve qu’il suffit d’en admettre trois, l’une analogue à celle du rouge, l’autre analogue à celle du violet, la dernière analogue à celle du vert. […] En effet, il suffit, pour expliquer ces abolitions isolées, qu’il y ait trois sortes de nerfs ; cette solution parle aux yeux ; on est tenté de l’adopter. […] En attendant, la théorie des sensations est comme un édifice dont une partie est achevée et une partie indiquée. — Mais cette construction incomplète suffit pour nous donner une idée de l’ensemble.
Il suffit que nous bouchions nos oreilles au son de la musique, dans un salon où l’on danse, pour que les danseurs nous paraissent aussitôt ridicules. […] Il suffira, pour s’en convaincre, de remarquer qu’un personnage comique est généralement comique dans l’exacte mesure où il s’ignore lui-même. […] Il ne lui suffit pas de vivre ; elle tient à vivre bien. […] Si je le remarque, s’il suffit à me distraire, si je l’attends au passage et s’il arrive quand je l’attends, involontairement je rirai. […] Il suffit qu’on entre dans cette voie, en affectant, par exemple, de confondre la personne avec la fonction qu’elle exerce.
Il suffit de relever les procès-verbaux des assemblées provinciales tenues en 1787 pour apprendre en chiffres officiels jusqu’à quel point le fisc peut abuser des hommes qui travaillent, et leur ôter de la bouche le pain qu’ils ont gagné à la sueur de leur front. […] Elles le sont encore plus dans les rôles des paroisses, où l’on trouve une infinité de cotes faites sur des biens abandonnés que les collecteurs afferment et dont le produit souvent ne suffit pas pour le payement de l’impôt. » — De pareils chiffres sont d’une éloquence terrible, et je crois pouvoir les résumer en un seul. […] Cela suffit pour indiquer de quelle façon les perceptions indirectes sont conduites En second lieu, par la gabelle et les aides, l’inquisition entre dans chaque ménage. […] Bien mieux, il suffit aux privilégiés de prétendre que leur fermier n’est qu’un régisseur : c’est le cas, en Poitou, dans plusieurs paroisses ; le subdélégué et l’élu n’osent y regarder de trop près. […] Pourquoi suffit-il d’être le domestique d’un privilégié pour échapper au service Détruisez ces colombiers qui n’étaient autrefois que des volières et qui maintenant renferment parfois jusqu’à 5 000 paires de pigeons.
La connaissance de quelques langues un peu éloignées suffit à purger l’esprit de cette croyance naïve ; l’étude de la transformation du latin en français est encore assez bonne pour nous détromper ; et il n’est pas mauvais, si l’on veut acquérir un bon degré de scepticisme sur ce point, d’apprendre résolument la langue française elle-même. […] Ces ruisseaux si lourdement chargés de sable et de bois mort ont encombré la langue française : il suffirait de les dessécher ou de les dériver pour rendre au large fleuve toute sa pureté, toute sa force et toute sa transparence. […] Quant à la logique des féminins attribués aux mots en eur, il suffit de citer cantatrice, enchanteresse et chanteuse pour montrer que, dans cet ordre de finales, la langue se permet toutes ses fantaisies. […] Pour expliquer cruche, il suffit de citer bête, butor, andouille, brute, pioche, daim, tourte, jocrisse, mots qui, avant d’être à la fois des adjectifs et des substantifs, furent d’abord exclusivement des substantifs. […] Il ignore Stentor ; centaure lui est moins étranger : cela suffit pour influencer son oreille, ensuite sa langue.
Il se formoit de tout cela un certain air de douceur et de grandeur qui prévenoit agréablement et qui le faisoit aimer et respecter tout ensemble. » Avec une complexion très-délicate, on comprenait à peine qu’il pût suffire à des exercices aussi divers : il portait dès lors dans son activité aux choses disparates ce quelque chose d’excessif et d’infatigable qu’il a depuis poussé dans un seul sillon ; on aurait dit qu’il avait hâte d’exterminer le jeune homme en lui. […] Il connut de bonne heure Bossuet et s’était lié avec lui sur les bancs des écoles : « Il eut le bonheur, dit M. de Chateaubriand, de rencontrer aux études un de ces hommes auprès desquels il suffit de s’asseoir pour devenir illustre. » Le biographe s’est laissé aller à être modeste pour l’humble héros : Bossuet, on le verra tout à l’heure, s’exprimera plus librement ; c’est lui qui revendiquerait pour lui-même le bonheur et l’honneur de s’être assis à côté de Rancé, de cet homme dont il ne parlait jamais sans être saisi d’une admiration sainte. […] Je ne crois pas que je m’abuse, il me semble que la pensée divine, si elle se ménage l’entrée dans les cœurs mortels, doit le faire souvent par ces voies si paisibles et si unies, et qu’après les grands coups portés il lui suffit, pour gagner à elle, de ces simples et divins enchantements. […] Les pensées en sont remplies, les figures ménagées, les mots propres et choisis, les expressions nettes et les périodes harmonieuses. » Les traductions qu’il donne des Pères et qui sont presque continuelles dans son texte ont surtout suavité et largeur ; enfin il suffit de gravir, on recueille une abondance de miel au creux du rocher. […] « D’abord les lettres sont longues, vives, multipliées ; le jour n’y suffît pas : on écrit au coucher du soleil, on trace quelques mots au clair de la lune, chargeant sa lumière chaste, silencieuse, discrète, de couvrir de sa pudeur mille désirs.
Hugo pour Cromwell ne prend que deux jours ; deux suffisent à Dumas pour Henri III, deux à Vigny pour la Maréchale d’Ancre ; on ne saurait être plus discrètement révolutionnaire. […] Ces deux éléments, au reste, suffisent pour faire éclater le cadre étroit du poème dramatique. […] Cela suffirait à marquer combien l’invention psychologique de V. […] Il suffit que Rachel montrât dans toute la violence de leurs passions les « raisonnables » héroïnes du théâtre classique, pour rabattre l’extravagante excentricité du drame romantique. […] Le théâtre, pour lui, est un art qui se suffit ; il n’y a pas besoin de pensée, ni de poésie, ni de style : il suffit que la pièce soit bien construite.
Cela nous montre que la logique ne suffît pas ; que la Science de la démonstration n’est pas la Science tout entière et que l’intuition doit conserver son rôle comme complément, j’allais dire comme contrepoids ou comme contrepoison de la logique. […] Si vous assistez à une partie d’échecs, il ne vous suffira pas, pour comprendre la partie, de savoir les règles de la marche des pièces. […] Non ; le nom que lui donnent les mathématiciens suffirait pour le prouver. […] Mais il suffit que la chose soit douteuse pour que je sois en droit de reconnaître et d’affirmer une divergence essentielle entre les deux sortes d’intuition ; elles n’ont pas le même objet et semblent mettre en jeu deux facultés différentes de notre âme ; on dirait de deux projecteurs braqués sur deux mondes étrangers l’un à l’autre.
Son admiration d’elle-même est trop vive pour qu’elle s’abandonne au souci vulgaire de s’examiner : elle est la France, et cela lui suffit, le mot pouvant bien suppléer à la chose. […] Il suffit de constater son attitude d’orgueilleuse indifférence vis-à-vis de l’étranger, pour comprendre son instinctif dédain de tout ce qui n’est pas elle. […] Voilà deux points sur lesquels, en dehors de la politique des partis, des législateurs pourraient peut-être s’entendre… Quand on pense qu’il suffirait de quelques séances d’une Chambre patriote pour faire cette œuvre-là… » Ainsi nous voilà rassurés et renseignés. Le mal dont nous souffrons est léger puisque, quelques jours suffiraient pour en parachever la guérison.
Il aurait suffi à M. […] Mais ceci est certain, que le vers français, même régulier, n’est pas sorti du symbolisme tel qu’il y était entré, et qu’aujourd’hui le fait, pour un poète, d’écrire en vers comme si ni Verlaine, ni Mallarmé, ni De Régnier, ni Viélé-Griffin n’avaient existé, suffit à le déclasser. […] Que cette continuité et ces retours soient souvent discutables, je le veux bien, mais il me suffit que le vers libre ait produit telles scènes de Phocas le jardinier pour croire que si sa perfection est difficilement atteinte, elle n’est pas inaccessible. […] Timidité dans l’emploi d’un instrument nouveau, timidité devant la vie, à laquelle il ne suffit pas de mettre une majuscule, rétraction du poète sur lui, persistance à se contempler et à se dire, hésitation à engager la poésie dans les rets des ficelles dramatiques usuelles, que sais-je ?
Si vous dites, pour citer une théorie qui jouit aujourd’hui d’une faveur incroyable, non seulement parmi les pauvres sols tout éplorés qu’Alfred de Musset traîne à ses talons, mais auprès des esprits les plus graves de notre époque, si vous dites que le vrai poète doit être une espèce de don Juan fatal, victime prédestinée de cet insatiable besoin d’aimer qu’on appelle le génie, et semblable au pélican qui donne à ses petits son propre cœur en pâture, s’il vous plaît de répéter cette déclamation, nous vous laisserons faire, et, quand vous aurez fini, nous vous rappellerons simplement l’admirable possession de soi d’un Cervantes et surtout d’un Shakespeare, qui dans la force de l’âge et du talent, cesse tout à coup d’écrire et se met à cultiver son jardin, comme Candide, après avoir eu la tête traversée par un effroyable torrent d’idées et d’images, dont quelques flots auraient suffi pour faire perdre l’équilibre à la plus ferme de nos cervelles. […] Tout fait a sa cause, et toute littérature, toute œuvre d’art est un fait dont il suffît de chercher, dont il faut sans passion chercher la cause dans les mœurs, les idées et les goûts de la société qui l’a produite, dans l’esprit du siècle qui l’a inspirée, dans le génie de la nation qui lui a donné son caractère général, dans le tempérament, les habitudes et la vie de l’auteur original qui lui a imprimé son cachet particulier. […] Sainte-Beuve ; j’ai répondu que je n’en savais vraiment rien, et qu’il me suffisait de savoir que par son indépendance vis-à-vis de tout système, par la finesse de son goût et de sa psychologie, M.
Une infirmité naturelle suffit à faire dévier une intelligence et un talent ; un myope ne verra pas et, par conséquent, ne peindra pas les choses comme celui qui a la vue longue et perçante. […] Il suffit pour cela qu’elle agisse sur des êtres différents. […] Je n’ai pas à énumérer ici les divers procédés qui servent en ce domaine à la recherche des causes ; on les-trouvera indiqués dans les traités de logique ; il me suffit de montrer qu’ils peuvent conduire à des résultats précis.
Ces brèves indications suffisent à notre but : dans leur pauvreté même, elles révèlent la multiplicité des recherches qu’il faudrait entreprendre pour rassembler, des quatre coins de l’horizon historique, toutes les conditions des transformations sociales que nous avons classées. En un mot, si l’on voulait expliquer pourquoi nos sociétés occidentales sont devenues à la fois très unifiées et très compliquées, très hétérogènes et très homogènes, très denses et très étendues, c’est toutes les espèces de transformations qu’y ont subies les âmes et les corps, les choses et les personnes, la nature et l’humanité qu’il faudrait énumérer ; et il ne suffirait nullement de dire que les hommes y ont voulu vivre en égaux. […] Tant qu’on n’a regardé la conquête du monde occidental par les idées égalitaires que comme la fortune surprenante d’une théorie de philosophes qui, tombée du ciel dans le cerveau de quelques penseurs, en serait descendue de proche en proche jusqu’à l’âme des foules, on a pu croire qu’il suffisait pour l’arrêter, d’une discussion philosophique : réfutons Rousseau et l’égalitarisme est vaincu.
En effet, certains historiens de la poésie estiment qu’il suffit, pour en parler, de la science des dates et des sources, comme si, pour parler de peinture, il suffisait de connaître les lois de la perspective et celles des couleurs complémentaires ; ce n’est pas auprès de vous, chers amis, que je m’excuserai d’avoir aussi écouté les voix secrètes de la sympathie… Toute foi est faite de poésie ; et toute vie qui ne tend pas au seul pain quotidien est un acte de foi.
Mais le pardon de Dieu ne lui suffit-il pas ? […] Il a suffi longtemps dans la tragédie française. […] Il suffit que leurs vues concordent. […] — Cela ne suffit pas encore. […] Le mouvement, il suffisait qu’ils le sentissent en eux !
Il ne suffit pas que je dise : Ce jambon est fort bon ; je le trouve fort bon ; n’est-il pas en effet le meilleur du monde ? […] Le fond du discours d’Hamlet est dans la nature, cela suffit aux Anglais336. […] Il me semble que l’intelligence suffit. […] Nous pouvons placer en tête ou à la fin de nos ouvrages un hymne à la Nature ; mais il suffira de célébrer sa puissance et sa sagesse une fois. […] Si examiner et comprendre ne suffit pas à la critique grammaticale, examiner et comprendre suffit à la critique philosophique.
Sous la loi de nature, la plus insignifiante différence de structure ou de constitution suffit à faire pencher la balance presque équilibrée des forces, et peut ainsi se perpétuer. […] Cette loi naturelle peut nous aider à comprendre certaines grandes séries de faits que nulle autre ne suffit à expliquer. […] Les Abeilles agissent alors comme le pinceau du poil de Chameau avec lequel il suffit de toucher d’abord les anthères d’une fleur et ensuite le stigmate d’une autre pour assurer la fécondation. […] Il est probable même que le laps de temps écoulé entre la formation d’un type et son extinction ne suffit jamais à réaliser pour ce type toute la somme possible de progrès et de développement. […] Mais il nous suffit qu’un nombre de formes seulement varient à la fois, et nul ne contestera qu’il n’en soit ainsi.
Dans la tragédie il suffit de nommer Bayard, Tancrède, Nemours, Couci : Nérestan apporte la rançon de ses frères d’armes, et se vient rendre prisonnier, parce qu’il ne peut satisfaire à la somme nécessaire pour se racheter lui-même. […] » Pour juger de la différence qui se trouve entre les héros d’Homère et ceux du Tasse, il suffit de jeter les yeux sur le camp de Godefroi et sur les remparts de Sion.
Le pays des chimères est en ce monde le seul digne d’être habité : et tel est le néant des choses humaines, que, hors l’être existant par lui-même, il n’y a rien de beau que ce qui n’est pas… ……………………………………………………………………………………………… Une langueur secrète s’insinue au fond de mon cœur ; je le sens vide et gonflé, comme vous disiez autrefois du vôtre ; l’attachement que j’ai pour ce qui m’est cher ne suffit pas pour l’occuper : il lui reste une force inutile dont il ne sait que faire. […] Mon ami, je suis trop heureuse, le bonheur m’ennuie… ……………………………………………………………………………………………… Ne trouvant donc rien ici-bas qui lui suffise, mon âme avide cherche ailleurs de quoi la remplir ; en s’élevant à la source du sentiment et de l’être, elle y perd sa sécheresse et sa langueur : elle y renaît, elle s’y ranime, elle y trouve un nouveau ressort, elle y puise une nouvelle vie ; elle y prend une autre existence, qui ne tient point aux passions du corps, ou plutôt elle n’est plus en moi-même, elle est toute dans l’être immense qu’elle contemple ; et, dégagée un moment de ses entraves, elle se console d’y rentrer, par cet essai d’un état plus sublime qu’elle espère être un jour le sien… ……………………………………………………………………………………………… En songeant à tous les bienfaits de la Providence, j’ai honte d’être sensible à de si faibles chagrins, et d’oublier de si grandes grâces… ……………………………………………………………………………………………… Quand la tristesse m’y suit malgré moi (dans son oratoire), quelques pleurs versés devant celui qui console, soulagent mon cœur à l’instant.
Une création comme le père Grandet suffit à immortaliser un homme. […] Il suffit de quelques bons répertoires. […] Il suffît de savoir lire. […] Il voit humain, cela lui suffit. […] Il voit humain, cela lui suffit.
La gloire moderne n’eût pas suffi pour récompenser de tels efforts ; il ne fallait pas moins que la gloire antique, pour donner la force de soulever de si grands obstacles. […] Dès qu’un revers, une peine quelconque s’appesantit sur l’âme, il est impossible qu’elle repousse absolument toutes les superstitions de son siècle : l’appui qu’on trouve en soi ne suffit pas ; on ne se croit protégé que par ce qui est au dehors de nous. […] Aristote cependant, qui vécut dans le troisième siècle grec, par conséquent dans le siècle supérieur pour la pensée aux deux précédents, Aristote a mis l’esprit d’observation à la place de l’esprit de système ; et cette différence suffit pour assurer sa gloire.
Mais la religion, dans l’acception générale, suppose une inébranlable foi, et lorsqu’on a reçu du ciel cette profonde conviction, elle suffit à la vie et la remplit toute entière ; c’est sous ce rapport que l’influence de la religion est véritablement puissante, et c’est sous ce même rapport qu’on doit la considérer comme un don aussi indépendant de soi, que la beauté, le génie, ou tout autre avantage qu’on tient de la nature, et qu’aucun effort ne peut obtenir. […] Une dévotion ardente suffit à l’imagination exaltée des criminels repentants, et dans ces solitudes profondes où les Chartreux et les Trappistes adoptaient une vie si contraire à la raison, ces coupables convertis trouvaient la seule existence qui convint à l’agitation de leur âme ; peut-être même, des hommes dont la nature véhémente les eut appelés dans le monde à commettre de grands crimes, livrés, dès leur enfance, au fanatisme religieux, ont enseveli dans les cloîtres l’imagination qui bouleverse les Empires. Ces réflexions ne suffisent pas pour encourager de semblables institutions, mais on voit que, sous toutes les formes, l’ennemi de l’homme c’est la passion, et qu’elle seule fait la grande difficulté de la destinée humaine.
Il suffit de lire de suite à la table des matières les titres de quelques chapitre8 pour reconnaître que les Essais de Montaigne forment un assemblage des plus lâches et comme invertébré où l’idée dominante apparaît et disparaît presque au hasard. […] Un peu de patience suffit pour relever le nombre de mots que contient une tragédie. […] Tout cela ne suffira pas encore.
Il ne suffit pas aux peintres de concevoir des idées nobles, d’imaginer les compositions les plus élegantes, et de trouver les expressions les plus pathétiques, il faut encore que leur main ait été renduë docile à se fléchir avec précision en cent manieres differentes, pour se trouver capable de tirer avec justesse la ligne que l’imagination lui demande. […] Un travail souvent interrompu, et distrait encore plus souvent, ne suffit pas à perfectionner un artisan. […] La premiere ardeur que donne le génie, suffit pour apprendre les regles de la poësie ; ce n’est point par ignorance de regles, que tant de gens pechent contre les regles.
Pour encadrer le roman dans l’histoire, quelques rapides lectures ne suffisent pas. […] Quelques phrases pleines et concises suffisaient amplement. […] C’est un malheur qu’il suffit d’affirmer et qui se constate avec une invincible évidence. […] Guizot, une phrase de son discours suffirait pour nous ramener à notre conviction première. […] Or, si les événements suffisent au récit, ils ne suffisent pas au drame : les événements, en tant qu’événements, appartiennent à l’histoire ; l’action seule appartient au poète.
Chacun de ces êtres qui, durant le cours naturel de sa vie, produit plusieurs œufs ou plusieurs graines, doit être exposé à des causes de destruction à certaines périodes de son existence, en certaines saisons ou en certaines années ; autrement, d’après la loi de progression géométrique, l’espèce atteindrait à un nombre d’individus si énorme, que nulle contrée ne pourrait suffire à les contenir. […] Même l’espèce humaine, dont la reproduction est si lente, peut doubler en nombre dans l’espace de vingt-cinq ans ; et, d’après cette progression, il suffirait de quelques mille ans pour qu’il ne restât plus la moindre place pour sa multiplication ultérieure. […] On peut en toute sécurité en inférer que toutes les espèces de plantes ou d’animaux tendent à se multiplier en raison géométrique, que chacune d’entre elles suffirait à peupler rapidement toute contrée où il leur est possible de vivre, et que leur tendance à s’accroître selon une progression mathématique doit être nécessairement contre-balancée par des causes de destruction à une période quelconque de leur existence. […] Pour maintenir constamment en même nombre les représentants d’une espèce d’arbres, vivant mille ans en moyenne, il suffirait qu’une seule graine fût produite en ces mille ans, supposant que cette graine ne fût jamais détruite, et germât sûrement en lieu convenable : de sorte qu’en tous cas, le contingent moyen de chaque espèce animale ou végétale ne dépend que très indirectement du nombre des œufs ou des graines que peut produire chacun de ces individus. […] Batailles sur batailles se livrent constamment avec des succès divers ; et cependant l’équilibre des forces est si parfaitement balancé dans le cours des temps, que l’aspect de la nature demeure le même pendant de longues périodes, bien qu’il suffise souvent d’un rien pour donner la victoire à un être organisé au lieu d’un autre.
Chez d’autres, au contraire, la seule arrivée du médecin dans la salle suffit pour produire une assez longue suspension ». — Quand M. […] Il suffit à certaines personnes d’être dans une chambre obscure pour avoir des hallucinations. […] Il suffit souvent que le sujet soit dans un état d’excitation et d’attente pour qu’une sensation, qui, s’il était calme, serait accompagnée d’images médiocrement vives, communique aux images cette netteté et cette énergie extraordinaires41. […] D’autres fois, le groupe réducteur affaibli ne suffit pas pour réprimer une image même ordinaire. […] À chaque instant, les personnes d’imagination vive sont obligées de faire les réductions que ce vieillard ne faisait plus ; l’ordre général de leurs souvenirs, fortifié par l’adjonction de quelque remarque nouvelle, y suffit le plus souvent.
D’ailleurs, cela suffisait pour l’époque. […] D’ailleurs, il suffit d’aller aux Halles et de regarder. […] D’ailleurs, la pompe est inutile, la vérité suffirait. […] A quoi bon une thèse, lorsque la vie suffit ? […] Un peu d’intelligence pourtant suffirait.
Mais l’ordre m’eût suffi pour être content de mon sort. […] Serai-je ainsi isolé, et ces plus douces perceptions de l’infini me suffiront-elles dans ma faiblesse ? […] Il y a dans ce village un château, une grande manufacture et un pasteur estimable ; nous pourrons donc avoir des connaissances un jour, quand le bonheur ne nous suffira plus. […] Le produit annuel de ces châtaigniers suffit à nos besoins : je n’ai pas d’autre domaine.
Il suffit d’ailleurs de se rappeler combien rapidement nous fatiguent les statues qui lèvent le bras ou la jambe sans que l’on ait l’espoir de voir jamais retomber cette jambe ou ce bras. […] Maria de Hérédia sont un parfait modèle à ce point de vue et leur beauté inébranlable suffirait à faire grande l’école parnassienne, n’eût-elle produit que ce seul livre. […] Il suffit de citer les dernières œuvres de M. […] Souvent, chez celui-ci, quelques mots au détour d’une strophe, quelques comparaisons ou même une simple allusion suffisent à en fixer les lignes générales et en apportent le sentiment comme un parfum : la mer, la forêt, la plaine, passent à l’horizon de la pensée. — M.
Voilà en apparence une besogne bien humble, et à laquelle suffirait le dernier élève de l’École des Chartes. […] Il n’y a pas de travail qui exige un savoir plus étendu, et toutes nos sommités scientifiques, examinant les manuscrits dans le cercle le plus borné de leur compétence, suffiraient à peine à le faire d’une manière irréprochable. […] Grèce, Perse, Inde, judaïsme, islamisme, stoïcisme, mysticisme, toutes ces formes étaient nécessaires pour que la grande figure fût complète ; or, pour qu’elles fussent dignement représentées, il ne suffisait pas de quelques individus, il fallait d’énormes masses. […] Il n’est pas bien sûr qu’un tel travail amenât aucun résultat sérieux ; n’importe ; la simple possibilité d’y trouver quelque fine induction, qui, entrant comme élément dans un ensemble plus vaste, révélât un trait du système des choses, suffirait pour hasarder cette dépense.
Elle pouvait aimer comme elle faisait la liberté des entretiens et des jeux, la familiarité des intérieurs ; elle pouvait jouer à la vie de bergère ou de femme à la mode, il lui suffisait de se lever, de reprendre en un rien son air de tête : elle était reine. […] C’est la plainte perpétuelle qui revient sous la plume du comte de La Marck dans la Correspondance secrète qu’on vient de publier : La reine, écrivait-il au comte de Mercy-Argenteau (30 décembre 1790), la reine a certainement l’esprit et la fermeté qui peuvent suffire à de grandes choses ; mais il faut avouer, et vous avez pu le remarquer mieux que moi, que, soit dans les affaires, soit même simplement dans la conversation, elle n’apporte pas toujours ce degré d’attention et cette suite qui sont indispensables pour apprendre à fond ce qu’on doit savoir pour prévenir les erreurs et pour assurer le succès. […] Cela même ne suffirait pas : il faudrait encore que la reine reconnût la nécessité de s’occuper des affaires avec méthode et suite ; il faudrait qu’elle se fit la loi de ne plus accorder une demi-confiance à beaucoup de gens, et qu’elle donnât en revanche sa confiance entière à celui qu’elle aurait choisi pour la seconder. […] Les deux dernières années de la reine suffiraient pour racheter mille fois plus de fautes que n’en put commettre aux années légères cette personne de grâce et d’élégance, et pour consacrer dans la pitié des âges une semblable destinée.
Sans doute il ne lui suffit pas de raconter, il faut encore qu’il interprète et qu’il juge, et le critique doit s’unir en lui à l’érudit ; mais c’est là le propre de tout historien en tout genre. […] Il est de toute évidence que la philosophie est nécessaire à l’historien de la philosophie, car, pour comprendre les systèmes, il faut avoir approfondi la science elle-même, et l’érudition ne suffît pas ; mais une intervention indiscrète et exagérée de la philosophie dans l’histoire elle-même a un double inconvénient : le premier, c’est de fausser les systèmes, le second, c’est de rendre l’histoire inutile. […] En un mot, un ou deux philosophes me suffiront pour épuiser toute la philosophie, car tout est dans tout. […] Qu’il nous suffise de rappeler l’Essai sur la Métaphysique d’Aristote, de M.
Un tel recueil, s’il était fait avec choix, pourrait n’être pas immense, et le temps ordinaire des études suffirait pour se le rendre familier. […] Préjugé de traducteur à part, comme il est sans comparaison le plus grand historien de l’antiquité, il est aussi celui dont il y a le plus à recueillir ; mais ce que j’offre aujourd’hui suffira, ce me semble, pour faire connaître les différents genres de beautés dont on trouve le modèle dans cet auteur incomparable, qui a peint les hommes avec tant d’énergie, de finesse et de vérité, les événements touchants d’une manière si pathétique, la vertu avec tant de sentiment ; qui posséda dans un si haut degré la véritable éloquence, le talent de dire simplement de grandes choses, et qu’on doit regarder comme un des meilleurs maîtres de morale, par la triste, mais utile connaissance des hommes, qu’on peut acquérir par la lecture de ses ouvrages. […] Je ne parle point des critiques vagues, ineptes, infidèles, qui ne méritent aucune attention ; je parle d’une censure qui serait motivée, et même équitable en apparence, et je dis qu’en matière de traduction, elle ne suffirait pas. […] Ainsi, pour le critiquer avec justice, il ne suffit pas de montrer qu’il est tombé dans quelque faute, il faut le convaincre qu’il pouvait faire mieux ou aussi bien sans y tomber.
Encore cela ne suffirait point : il faut savoir non seulement d’où l’on vient et où l’on est, mais aussi où l’on va. […] Faute de préjugés on admet des fictions convenues : il ne s’agit pas de savoir si cette méthode est bonne, il suffit qu’elle soit inévitable ; on n’a pas de choix. […] Encore cela n’aurait pas suffi, s’il n’eût pas commencé par jouer avec soin le rôle d’un restaurateur des doctrines sociales. […] Le bruit en avait couru d’avance parmi les tribus désolées : c’était comme un vague pressentiment auquel on osait à peine se confier, et qui néanmoins suffisait déjà pour alléger le poids d’immenses calamités.
Que des facteurs tout physiques, comme certaines dispositions de races, héritées de père en fils, ou des facteurs tout physiques, comme certaines idées d’individus de génie, transmises d’âme en âme, suffisent à rendre compte du fait que nous avons établi, et la sociologie n’a plus rien à faire avec le succès de l’égalitarisme. — Et certes, nous n’avons pas prétendu qu’elle dût nous en donner une explication, intégrale ; par conséquent, nous n’avons pas, pour présenter une explication sociologique du mouvement égalitaire, à exclure d’autres explications qui peuvent concourir avec elle. […] Mais il faut bien dire qu’à notre goût scientifique elle offre, si elle prétend se suffire à elle-même et se passer du secours de la sociologie, peu d’aliment. […] Ainsi, pour l’explication du succès d’une idée sociale, ni la physiologie, ni la psychologie purement individuelle ne sauraient suffire. […] Cela ne suffirait-il pas à ruiner notre induction ?
La plupart possèdent cette intelligence rudimentaire qui suffit à faire vite reconnaître que les avantages vont aux apparences non aux réalités, aux diplômes non à la science, à l’intrigue non au talent. […] Il se suffit à lui-même et les enfants incurables au milieu desquels nous vivons ne peuvent rien pour nous ou contre nous : qu’ils nous les offrent ou nous les refusent, leurs joujoux nous font rire.
En tout temps et en tout pays, il suffit qu’un changement considérable s’introduise dans la conception de la nature humaine, pour que, par contre-coup, on voie aussitôt l’utopie et la découverte germer sur les territoires de la politique et de la religion Mais cela ne suffit pas pour que la doctrine nouvelle se propage, ni surtout pour que, de la spéculation, elle passe à l’application. […] Je compare le dix-huitième siècle à une société de gens qui sont à table ; il ne suffit pas que l’aliment soit devant eux, préparé, présenté, aisé à saisir et à digérer ; il faut encore qu’il soit un mets, ou mieux une friandise. […] Il semble qu’il suffise de les nommer ; l’Europe moderne n’a pas d’écrivains plus grands ; et pourtant il faut regarder de près leur talent, si l’on veut bien comprendre leur puissance Pour le ton et les façons, Montesquieu est le premier. […] Il semble qu’il n’y ait plus qu’elle au monde ; du moins elle est partout et elle inonde tous les genres littéraires ; on ne s’inquiète pas si elle les déforme, il suffit qu’ils lui servent de conduits. […] Il suffit toujours que la littérature se mette au service de la philosophie.
. — Au défaut des instincts nobiliaires les répugnances physiques suffisaient à l’en détourner. […] Il suffit à l’âme qui veille et s’agite d’apercevoir la nature qui sommeille pour se rendormir à demi. — Et ces objets lui plaisent d’autant plus qu’ils sont plus éloignés d’elle. […] Il y a chez lui des paysages flamands et des paysages antiques ; sa sympathie suffit à tout. […] Mais deux mots suffisent à La Fontaine. […] Le moindre bruit extraordinaire suffit pour qu’ils se précipitent et se serrent les uns contre les autres, et cette crainte est accompagnée de la plus grande stupidité, car ils ne savent pas fuir le danger.
(2) En premier lieu, il suffit, ce me semble, d’énoncer une telle loi, pour que la justesse en soit immédiatement vérifiée par tous ceux qui ont quelque connaissance approfondie de l’histoire générale des sciences. […] Il suffit, en effet, de faire de l’étude des généralités scientifiques une grande spécialité de plus. […] Quelques réflexions bien simples suffiront pour justifier ce qu’une telle qualification paraît d’abord présenter de trop ambitieux. […] Que ce soit à tort ou à raison, peu importe ; le fait général est incontestable, et il suffit. […] Quant à la doctrine, il n’est pas nécessaire qu’elle soit une ; il suffit qu’elle soit homogène.
Cette vie, je le sais, n’accomplit pas toutes les destinées de l’homme ; et la société, qui lui est si nécessaire, ne lui suffit point encore : il lui faut la certitude d’un avenir au-delà de ce monde. […] Remarquons bien que la faculté de parler n’aurait point suffi : dès l’origine il a dû nécessairement parler, puisque dès l’origine il a été nécessairement dans la société. […] Cet exemple suffit pour nous donner une idée a-la-fois et de l’union intime de la langue écrite avec la langue parlée et de la séparation de ces deux langues. […] Degérando croit qu’il suffit que l’homme ait été doué de la faculté de la parole pour qu’il ait pu s’élever successivement et graduellement à l’invention du langage. […] Je suis loin d’avoir ce qu’il faudrait de science pour me livrer à un tel travail ; mais la simple exposition du système auquel ces idées ramènent suffira, je crois : nous ne tarderons pas d’y arriver.
Mais les deux premières questions suffiront pour le moment. […] Cette image n’en existe pas moins, et il suffit d’un léger effort pour la ressaisir. […] Dans bien des cas une seule de ces opérations suffit ; dans d’autres, nous devrons combiner les deux. […] Cela suffit à dissiper la frayeur, ou plutôt à l’empêcher de naître. […] Il suffira d’indiquer les principales, et d’en marquer l’enchaînement.
Trente vers lui suffisent pour composer un tableau complet. […] Pour atteindre ce but, il lui suffit de raconter le règne d’un roi patriarche. […] Il suffit de nous montrer à l’œuvre le plus farouche, le plus cruel de tous, Dessalines. […] Un des deux billets écrits dans le premier acte suffit à réaliser ce projet. […] Cent cinquante-deux pieds ne suffisent pas à frapper de terreur.
Une pareille situation pousse à la vie maritime, surtout quand le sol pauvre et les côtes rocheuses ne suffisent pas à nourrir les habitants. […] A cent pas de l’enceinte sacrée qui l’entoure, on saisit la direction et l’accord de ses principales lignes. — D’ailleurs, elles sont si simples qu’il suffît d’un regard pour en comprendre l’ensemble. […] Combien plus de choses encore dans la toilette d’une femme, même de la condition moyenne ; deux ou trois armoires n’y suffisent pas. […] Il vit, cela lui suffit, et suffit au spectateur antique. […] Il suffit de lire Hérodote57 pour voir combien, dans la première moitié du ve siècle, la foi était encore vive.
Mais la société est un organisme extrêmement compliqué, et pour l’améliorer il ne suffit pas d’en signaler les faiblesses les plus évidentes. […] D’où vient donc que chez Victor Hugo ils se suffisent à eux-mêmes ? […] Quelquefois la moindre des choses, un sourire, une légende, un mystère, suffira à la soutenir et à l’exciter encore. […] Mais il suffit de les parcourir pour voir que l’auteur n’est point sorti de son domaine habituel. […] Cela ne suffit-il pas à marquer sa place parmi les contemporains ?
Il y eut un jour dans la Révolution française où l’on voulut remuer tout d’un coup le Champ de Mars et le dresser en amphithéâtre pour une solennité immense : les bras ne suffisaient pas ; chacun s’y mit, et l’on vit de belles dames elles-mêmes, de très-grandes dames de la veille, manier la pelle et la bûche. […] Bien des erreurs et des rigueurs suivirent sans doute de si favorables commencements et compromirent les destinées finales du règne ; mais l’élan, une fois donné, suffisait à produire de merveilleux effets ; les semences jetées au vent pénétrèrent et firent leur chemin en mille sens dans les esprits ; la politesse greffée sur la science s’essaya, et l’on en eut, sous cette race des Valois, une première fleur. […] Il ne suffirait pas de se rejeter sur l’état de la poésie française, à cette date du règne de François Ier, pour expliquer uniquement par cette imperfection générale les singulières faiblesses et le rocailleux plus qu’ordinaire de la veine royale. […] Qu’il suffise d’avoir saisi la teneur et l’habitude élevée d’une âme durant les longues et définitives années18. […] Quoi qu’il en soit, une honnête mesure d’exactitude et de finesse suffirait à l’œuvre.
Pour apercevoir, par exemple, dans la destinée de Napoléon autre chose qu’un objet d’amour ou de haine, qu’un phénomène politique utile ou funeste, pour y voir une force énergique, immense, majestueuse, qui saisit et subjugue, il n’est pas besoin d’être poète, et il suffit d’être homme, de même encore que cela suffit pour voir dans une belle nuit ou dans une tempête autre chose que du sec ou de l’humide, du vent qui rafraîchit ou de la pluie qui enrhume. […] Son activité s’imprime sans ménagement à tout ce qui tombe sous sa prise ; sa brusque imagination, pour une ou deux fois qu’elle rencontre avec bonheur, est vingt fois en défaut, froissant ce qu’elle ne devait que toucher, dépassant ce qu’il lui suffisait d’atteindre.
La brièveté consiste à prendre son point de départ où il faut, sans remonter trop haut ; à ne point énumérer les parties où il suffit de montrer le tout (souvent on peut se contenter de dire le fait sans entrer dans le détail ni dire le comment) ; à ne point prolonger la narration au-delà de ce qu’on a besoin de savoir ; à n’y point mêler de choses étrangères ; à faire entendre parfois ce qu’on ne dit pas par le moyen de ce qu’on dit ; à écarter non seulement ce qui nuit au récit, mais aussi cc qui ne lui nuit ni ne lui sert, à ne dire chaque chose qu’une fois ; à ne point recommencer ce qu’on vient justement d’achever de dire. […] » Un ne pouvait dire plus de choses en moins de mots : mais, comme il suffisait de dire : « Je ne le trouvai pas chez lui », le grand nombre des circonstances fait longueur… La clarté consiste à dire d’abord ce qui s’est fait dès le premier instant, à garder l’ordre des temps et des faits, à raconter les choses comme elles se sont passées ou auront pu se passer. […] Mais tenons-nous-en à l’usage commun de la langue : sans prétendre mesurer à la rigueur à quel point ce que nous nommons cause est vraiment cause, il suffit, pour notre sujet, que notre raison n’est pas satisfaite, tant qu’elle n’a pas expliqué bien ou mal pourquoi les choses sont comme elles sont et ce qui en résulte.
Dans un autre courant intellectuel que celui où je viens de pécher quelques noms, il me suffira de nommer Gautier, et surtout Baudelaire. […] Et il suffit. […] Un grand seigneur suffisait à faire vivre quelques artistes.
Oser ne suffit pas… et le livre d’Edmond et Jules de Goncourt prouve tout cela une fois de plus. […] Suffisait-il pour eux d’ouvrir les battants des salons de madame Helvetius, de madame de Genlis, de madame Panckoucke, de Julie Talma, du duc de Bedford, etc., et d’en nommer successivement les personnages ? […] Un mot aurait suffi, et nous avons même pensé un instant à ne dire qu’un seul mot, mais nous nous sommes ravisés, et puisque ces MM. de Goncourt ont le bonheur d’être jeunes, le hasard d’avoir du talent… quelquefois, et le projet d’écrire encore une histoire de la société sous le Directoire, nous avons cru utile et sympathique de leur rappeler que pour une œuvre si sévère et si grande il faut étreindre comme on embrasse ; — qu’il faut plus que de lier ou d’éparpiller des glanes d’anecdotes et d’être, après coup, les Tallemant des Réaux proprets et fringants d’une époque dans laquelle on n’a pas même le privilège d’avoir vécu.
Mais son orageuse amitié pour la duchesse de Choiseul, pour Mademoiselle de Lespinasse, avec laquelle elle rompit de toute la force de son attache, mais sa romanesque passion pour Walpole, qui la prit vieille et fut un incendie dans ses cheveux blancs, disent assez haut que la faculté de s’émouvoir jusqu’à la folie ne manqua point à cette ennuyée, à qui des sentiments pareils ne suffisaient pas ! […] — dans cet autre mot, qui n’est pas le seul de l’espèce : « Il me suffit d’être contente pour être heureuse. » Je n’aime point qu’elle écrive à toute page des phrases dans ce genre affreux : « La nature est le seul tyran dont il ne faille pas secouer le joug. […] Ce fut le bon sens et sa charmante fille, la plaisanterie, qui l’empêcha de tomber là-dedans, puisque ce ne furent point la religion et ses bons anges… Eh bien, cela suffirait, je ne dis pas à la gloire, mais à l’excuse de sa vie !
Ce grand attribut de toutes nos saines spéculations n’importe pas moins à leur utilité effective qu’à leur propre dignité ; car, l’exploration directe des phénomènes accomplis ne pourrait suffire à nous permettre d’en modifier l’accomplissement, si elle ne nous conduisait pas à le prévoir convenablement. […] Mais cette constance effective des liaisons naturelles nous est seule vraiment appréciable, elle seule aussi suffit pleinement à nos véritables besoins, soit de contemplation, soit de direction. […] Cette double indication de l’aptitude fondamentale de l’esprit positif à systématiser spontanément les saines notions simultanées de l’ordre et du progrès suffit ici pour signaler sommairement la haute efficacité sociale propre à la nouvelle philosophie générale. […] Il suffit ici d’indiquer sommairement l’application. de ce grand principe à la détermination rationnelle de la vraie hiérarchie des études fondamentales, directement conçues désormais comme les différents éléments essentiels d’une science unique, celle de l’Humanité. […] Mais, pour compléter la formule fondamentale, il suffit, en premier lieu, de placer, au début de ce vaste ensemble, la science mathématique, seul berceau nécessaire de la positivité rationnelle, aussi bien pour l’individu que pour l’espèce.
Par dédain pour les qualités tempérées qui suffisent aux conditions d’une société vieillie, il disait : « Mêlez un peu d’orgueil qui empêche d’oublier ce qu’on se doit, de sensibilité qui empêche d’oublier ce qu’on doit aux autres, et vous ferez de la vertu dans les temps modernes. » Mais pour les anciens, tout en sachant en quoi nous les surpassons, il les montre bien supérieurs en énergie, en déploiement de facultés de tout genre : forcés par la forme de leur gouvernement de s’occuper de la chose publique d’en remplir presque indifféremment tous les emplois de paix et de guerre, de s’y rendre propres et de s’y tenir prêts à tout instant, de parler devant des multitudes vives, spirituelles, mobiles et passionnées : Quelle devait être, dit-il, l’explosion des talents animés, stimulés par d’aussi puissants motifs ! […] S’il a, comme je l’ai dit, le sentiment de la fatigue et de l’épuisement des sociétés, de ce caractère blasé qui est le produit de l’extrême civilisation, il retrouve aussi en idée, et par saillies, cet autre sentiment de la jeunesse et de la vigueur première du monde, et il le reconnaît aux anciens dans tous les ordres de travaux et de découvertes : il sait que pour tout ce qui est de l’observation et de l’expérience, et dans les sciences qui en dépendent, les modernes l’emportent de beaucoup : Il me suffit, ajoute-t-il, d’avoir remarqué que les anciens ont été plus promptement éclairés que les modernes, qu’ils ont volé dans la carrière où les autres se sont traînés. […] Si M. de Meilhan avait eu chance réellement de devenir contrôleur général, cela eût suffi pour le perdre du coup. […] On ne connaît bien, Aladin, que les chemins par lesquels on a passé. » — « Mais n’est-il pas quelque maxime générale qui puisse faire éviter de tomber dans l’erreur, si elle ne suffit pas pour démêler la vérité ? […] Il vient un moment pourtant où, dans l’intérêt et pour le salut de la société, les ânes, même les meilleurs, ne suffisent pas, et où il faut recourir dans le péril au coursier généreux.
L’imitation, l’émulation et l’industrie étant partout au comble, les genres et les manières qui pouvaient sembler les plus réservés jusqu’à présent, et qui eussent peut-être suffi autrefois pour marquer la qualité du talent, ne sont plus une garantie, s’ils l’ont jamais été ; tout le monde s’en mêle, et assez bien. […] L’ancien répertoire, servi par d’admirables acteurs, sembla plus que suffire. […] Six semaines d’un voyage en calèche à travers la Belgique ou le long du Rhin, glaces ouvertes, lui suffisent d’ordinaire pour son plus long chef-d’œuvre, pour la pièce en cinq actes et sans collaborateurs. […] Mais, ainsi qu’on l’a dit plus haut, il suffit que l’épingle soit bien placée et bien portée. […] Scribe achève de prouver qu’il suffit à toutes les conditions de la scène française où il a pied désormais plus que personne.
Il portait dans la critique non écrite, mais parlée, à cette fin du xviiie siècle, quelque chose de l’école première d’Athènes ; l’abbé Arnaud ne lui suffisait pas et lui semblait malgré tout son esprit et son savoir en contre-sens perpétuel avec les anciens. […] Je ne puis ni rester oisif, ni suffire à mes mouvements. […] Il suffisait, nous disent ceux qui ont eu le bonheur de le connaître, d’avoir rencontré et entendu une fois M. Joubert, pour qu’il demeurât à jamais gravé dans l’esprit : il suffît maintenant pour cela, en ouvrant son volume au hasard, d’avoir lu. […] Espérons, à tant de titres, qu’elle aura cours désormais, qu’elle entrera en échange habituel chez les meilleurs, et enfin qu’il vérifiera à nos yeux sa propre parole : « Quelques mots dignes de mémoire peuvent suffire pour illustrer un grand esprit160. » 1er Décembre 1838.
A partir du xvie siècle, grâce surtout à la découverte de l’imprimerie, massacres et bûchers ne suffisent plus à étouffer la rébellion. […] Mais il ne suffit pas de constater vaguement le mouvement qui emporte la société dans l’un ou dans l’autre sens. […] « C’est aux académistes de bien parler, dit Saint-Cyran ; il suffit que le style n’ait rien de choquant ». […] On prête à Voltaire ces paroles : « Je m’ennuie d’entendre dire que douze hommes ont suffi à établir le christianisme ; je veux prouver qu’un seul homme peut suffire à le détruire. » Il est possible que ces mots, comme tant d’autres mots historiques, n’aient jamais été prononcés.
Nous suffira-t-il, pour découvrir leurs vrais traits d’union, d’examiner le premier venu, — ou nous faudra-t-il interroger ceux qui font profession de réfléchir, les penseurs, les faiseurs de systèmes ? […] On dira peut-être que, si les classes ne se laissent plus définir ni civilement, ni juridiquement, ni politiquement, l’inégalité économique suffit à les distinguer ? […] Il suffit de rapprocher un instant l’ordre social moderne du féodal, par exemple, pour faire jaillir cette vérité, que le succès de l’égalitarisme est chose nouvelle sous le soleil. […] L’anthropologie, apportant — une confirmation inattendue des visions de Rousseau, nous prouverait « scientifiquement » qu’il suffit de remonter aux origines des sociétés humaines pour reconnaître, dans toute sa pureté, l’égalitarisme. […] Quant aux faits qu’on allègue, et qui se manifesteraient identiques dans les milieux précisément les plus différents, il suffit de les examiner un à un pour reconnaître que cette identité n’est que superficielle, ou même apparente : au fond, rien n’est plus différent du troc primitif que le clearing-house des banques d’Angleterre, du communisme archaïque, que le collectivisme à la moderne20.
. ; il suffit qu’il y en ait de forts piquants, en effet, et que l’auteur y fasse preuve en courant d’une grande science ironique des choses. […] le Charivari ne suffisait pas ; nous aurons mouches et cousins par nuées.
Il n’est pas possible qu’une langue littérairement aussi vivante ait perdu sa vieille puissance verbale ; il suffira sans doute que l’on proscrive à l’avenir tout mot grec, tout mot anglais, toutes syllabes étrangères à l’idiome, pour que, convaincu par la nécessité, le français retrouve sa virilité, son orgueil et même son insolence. […] Le c et le qu suffisent à noter tous les sons qui peuvent incomber au k ou au ch dur.
Gustave Brocher nous répond, par exemple, dans la Revue générale de bibliographie française (10 février 1904) : « Le travail ne suffit pas. » (Nous n’avons jamais dit que le travail suffisait ; nous avons toujours dit qu’il faut aussi le don, la vocation, la verve, l’inspiration.) « Un méchant écrivain ne deviendra pas un styliste en changeant cent fois la forme d’une phrase… » (C’est notre avis, et nous n’avons jamais prétendu le contraire.
Mais cette condition ne suffit pas. […] Il suffit qu’il soit possible de la suivre, et cela n’est pas douteux. […] Les artistes ne disent pas tout, ou parce qu’ils n’en ont pas le droit, ou parce qu’il leur suffit d’indiquer une ligne pour que la courbe se prolonge à l’infini dans l’esprit du lecteur intelligent. […] Pour avoir cette ambition noble et pour la croire possible, il suffit de se rappeler que, au-delà du début de la vie, il y a une égalité au moins parmi les hommes : qu’ils ont tous souffert, qu’ils ont tous crié, et que, si variées que soient les peines et les plaintes, tout se résume dans le même besoin d’une infinie justice.
Suffit-il de les montrer partout comme nobles, héroïques, généreux, pleins d’éloquence, de vertu et de génie ? […] Et, pour cela, l’on n’a pas besoin d’une longue explication ; souvent une phrase suffit ; un seul mot, comme un éclair, déchire le voile obscur du temps, ramène en pleine lumière les figures cachées, rallume dans leurs yeux ternes la divine flamme de la vie. […] Cette belle classification des témoignages, cette critique de la capacité des témoins, ce renvoi exact aux bonnes éditions et à la page précise, cette méthode de jurisconsulte et de savant, suffit-elle pour vous convaincre ? Elle ne suffit pas à M.
Mignet : qu’il nous suffise de signaler quelques points. […] Thiers, il n’était pas besoin de tels sacrifices pour satisfaire les mânes du jeune Féraud : il suffisait des honneurs touchants rendus à sa mémoire. » La Convention décréta pour loi une séance funèbre. […] Rien n’était plus juste : des victimes aussi illustres, quoiqu’elles eussent compromis leur pays, méritaient des hommages ; mais il suffisait de jeter des fleurs sur leur tombe ; il n’y fallait pas du sang.
Cette maxime, que nous ne prétendons pas étendre à tous les genres, mais qui, bien approfondie, suffit seule pour conserver la couronne poétique à Fénélon, se trouve développée dans les Ouvrages de cet Ecrivain, par des raisons aussi lumineuses que solides. […] Il suffit de dire que la piété ne fut jamais accompagnée de plus de lumieres, de plus d’onction, de plus de douceur, de plus de persuasion, de plus de charmes, de plus de ressources enfin, pour se faire goûter. […] Cette anecdote impertinente a été démentie sur des preuves sans réplique ; & quand ces preuves nous auroient manqué, il eût suffi de dire : « Philosophes, Fénélon eût été votre plus grand adversaire, ne lui imputez pas votre langage ».
Après avoir dit que la philosophie n’est pas faite pour les masses, on reconnaît cependant que la philosophie peut suffire à quelques-uns, et ce sont les philosophes de profession ; or je me retourne de ce côté et je dis qu’elle ne peut pas suffire même à ceux-là. […] Plus nous avons réfléchi à ces graves problèmes, plus nous sommes resté persuadé que la grande religion qui a nourri l’Europe pendant tant de siècles peut encore et peut seule suffire aux nécessités de la crise que nous traversons.
Il suffit d’un assemblage de couleurs, ou de quelques accords plaqués sur un piano, pour me donner une jouissance particulière, où je ne ressens ni terreur, ni colère, ni pitié, et qui n’est pas une émotion ordinaire transformée. […] Si l’on veut estimer la « valeur d’art », il ne suffit point de noter la qualité ou la quantité des émotions accessoires que suscite l’œuvre, et il ne s’agit pas seulement de savoir si elle provoque en nous un sentiment de vive sympathie ou d’ardent patriotisme ; il faut étudier la langue même de l’émotion, le rapport choisi entre les perceptions qui en sont l’instrument, la « mise en œuvre ». […] La connaissance des premières têtes suffira dès lors pour connaître le troupeau, la connaissance de la tête pour connaître l’individu.
Dernièrement, madame de Surville, la sœur de Balzac, a dit son petit mot de sœur, escompté par les éditeurs de son frère, à la tête de la vraie vie de Balzac, racontée par lui-même (et qui suffisait), dans sa sublime Correspondance. […] les frères ne suffisent pas toujours. Est-ce que je suffirais, moi !
Mais, pour atteindre cette formule, suffit-il d’étudier les faits purement littéraires, dont la liaison étroite n’a pas besoin d’être démontrée ? […] Il nous suffit de constater que, en un temps et en un pays donnés, l’art, la littérature, le costume, l’habitation, l’état politique et religieux sont rattachés par des traits d’union que nul ne songe plus sérieusement à contester.
C’est comme si il suffisait de s’habiller en soldat pour être brave. Ainsi il ne suffit pas de s’habiller en romancier et en pathéticien pour être profond. Et il ne suffit pas de s’habiller en critique pour être clair. […] On croit généralement qu’il suffit qu’une idée soit neuve pour qu’elle soit nouvelle. On croit qu’il suffit qu’une idée soit neuve pour qu’elle n’ait jamais servi.
Une conception schématique suffira provisoirement. […] La conservation, même consciente, d’un souvenir visuel ne suffit donc pas à la reconnaissance d’une perception semblable. […] Les tendances motrices suffiraient donc déjà à nous donner le sentiment de la reconnaissance. […] Cela suffit-il pour que je les entende ? […] Pour le comprendre, il suffit d’en réaliser l’essentiel, juste assez pour le distinguer des autres mouvements possibles.
Dans ce cas il suffirait qu’un discours soit écrit en vers pour se ranger dans la cohorte sainte des œuvres poétiques. […] La chaîne d’associations d’idées au long de laquelle court leur esprit, ils ne s’attardent pas à la dérouler à nos yeux, ils nous en montrent les deux bouts, cela leur suffit. […] L’étude attentive des manifestations poétiques de l’heure actuelle m’a procuré tous les éléments de cet Essai ; il m’a suffi de les dégager sans violence. […] Mais ceux qui m’auront suivi jusqu’ici m’auront compris, et cela suffit. […] Il se peut qu’un vers l’emporte sur une tragédie et qu’un mot suffise à enfermer le cri de l’humanité.
Pour ébranler sa confiance, pour la déraciner, deux ou trois orages ne suffisent pas. […] Qu’il nous suffise de rappeler que les prémices sur lesquelles s’appuie M. […] Il lui suffit de pleurer avec elle et de lui parler de son amour. […] Un seul mot suffit en effet à caractériser tous les romans de M. […] Reste à savoir si ces qualités qui ont suffi au succès d’une tragédie romaine pouvaient suffire au succès d’une fable dramatique prise dans l’histoire de la France au moyen âge.
Une place modeste dans une administration publique suffisait à ses besoins ; il la garda jusqu’au jour où il s’aperçut que son indépendance allait en souffrir. […] Soulève enfin ton front cicatrisé… Avec Béranger il suffit de donner la note, chacun achève. — Le Cinq Mai ou Napoléon à Sainte-Hélène, Le Vieux Sergent, Le Vieux Drapeau, Le Chant du Cosaque, Waterloo, quels plus beaux hymnes, quels accents plus vibrants sont-ils jamais sortis en aucun temps d’une âme nationale et guerrière !
Il suffit de savoir lire le latin, pour être frappé de l’harmonie lugubre de ces vers. […] Si l’on dit qu’un auteur grec ou romain eût pu faire un Tartare aussi formidable que l’Enfer du Dante, cela d’abord ne conclurait rien contre les moyens poétiques de la religion chrétienne, mais il suffit d’ailleurs d’avoir quelque connaissance du génie de l’antiquité, pour convenir que le ton sombre de l’Enfer du Dante ne se trouve point dans la théologie païenne, et qu’il appartient aux dogmes menaçants de notre Foi.
Section 44, que les poëmes dramatiques purgent les passions Il suffit de bien connoître les passions violentes pour desirer sérieusement de n’y jamais être assujeti, et pour prendre des résolutions qui les empêchent du moins de nous subjuguer si facilement. […] Or la peinture fidelle des passions suffit seule pour nous les faire craindre, et pour nous engager à prendre la résolution de les éviter avec toute l’attention dont nous sommes capables.
Ainsi, il ne suffit pas au législateur d’avoir rendu les fortunes égales, il faut qu’il leur ait donné de justes proportions. […] Regardera-t-on si, toute faible qu’elle est, elle peut suffire cependant à gouverner l’État, ou même à former par elle seule une cité complète ? […] « Ces considérations suffisent pour montrer quel est le meilleur gouvernement, et ce qui en fait l’excellence. […] Aujourd’hui même, il y suffit du décret d’un seul magistrat pour que tous les membres du gouvernement soient tenus de se réunir en assemblée générale ; et, dans cette constitution, l’archonte unique est un reste d’oligarchie. […] Il suffit d’une exclusion politique, d’une injustice, d’une insulte, pour causer une insurrection et un bouleversement dans la constitution, sans que les fortunes des citoyens soient en rien délabrées.
La société romaine était sans doute profondément distincte de la société moderne ; l’industrie seule et la place restreinte qui lui était faite, en comparaison du rôle qu’elle remplit dans notre civilisation, suffiraient à marquer la différence. […] L’amour du pouvoir (potentiæ cupido) suffit à lui seul pour expliquer toutes les révolutions de Rome, les dissensions des patriciens et des plébéiens, la turbulence des tribuns, la prépotence de consuls, le farouche Marius sorti des rangs du bas peuple (e plebe infima), Sylla le plus cruel des nobles, Pompée plus hypocrite qu’eux deux, et non pas meilleur ; enfin César, Antoine, Auguste, et tout le sang romain versé dans les champs de Pharsale et de Philippes. […] Il ne tient pas à lui qu’on ne croie qu’il ne suffisait à César que de vouloir dans un autre sens pour faire renaître la République romaine plus florissante et plus intègre que jamais.
Le xive et le xve siècle auraient fait la Renaissance, si l’antiquité seule avait suffi pour donner au génie français l’impulsion efficace et définitive. […] La Renaissance française est un prolongement et un effet de la Renaissance italienne : la chronologie seule suffirait à l’indiquer. […] Il suffit que le mouvement général soit justement indiqué ; on devra du reste se reporter aux tableaux chronologiques pour comprendre et la légitimité essentielle et les exceptions nécessaires de nos divisions.
Les intérêts, cependant, suffisent-ils à faire une nation ? […] Rien de matériel n’y suffit. […] Nous venons de voir ce qui ne suffit pas à créer un tel principe spirituel : la race, la langue, les intérêts, l’affinité religieuse, la géographie, les nécessités militaires.
Madame de Montespan, qui avait satisfait longtemps à ses deux besoins, n’y suffisait plus ; plus de jeunesse dans sa figure, ni dans sa taille : son esprit même avait vieilli : plus de ces saillies qui étonnent, qui égalent, qui font étincelle au milieu d’une cour. […] Les complaisances de la reine suffisaient sans doute à l’orgueil de madame de Montespan, mais non à son amusement ni à sa vanité. […] Il suffirait d’ailleurs, pour la justification de Bossuet, d’observer que madame de Maintenon est la seule de tous ses contemporains qui se soit permis, en cette occasion, de donner comme un témoignage de mollesse, ou comme un défaut d’esprit de la cour, une conduite pleine de bienséance et conforme aux maximes de la prudence chrétienne.
Pour ne pas être tenté de revenir à la vie, quand on est mort, il suffirait de regarder à ses descendants. […] Elle l’a sacrée non pas seulement reine de beauté — les hommes suffisaient pour ce sacre-là — mais elle l’a sacrée, comme une « ingénuité céleste », et elle était, elle, en ingénuité, plus que l’égale de son amie, car l’ingénuité du génie (le plus grand ingénu que je sache) s’ajoutait à l’ingénuité de son âme… Femme d’esprit par-dessus le génie, qui manque d’esprit quelquefois, Mme de Staël, qui pouvait dialoguer avec Rivarol, n’a peut-être pas eu dans toute sa vie la cruauté d’une épigramme à se reprocher. […] Son ruisseau de la rue du Bac, dont on a tant parlé, n’y suffirait pas !
Saint-Bonnet se distingue par une chose d’un mérite absolu et impérissable comme la métaphysique elle-même, et cette chose, fût-elle seule, suffirait pour classer très haut l’écrit où elle paraît pour la première fois. […] Mais, enfin, l’éducation qui avait suffi jusque-là ne suffisait donc plus pour que Voltaire devînt… ce qu’il est devenu, malgré ses maîtres, et que le dix-huitième siècle fût possible ?
Un tact très fin, et pour lequel l’esprit ne suffit pas, a pu seul lui indiquer cette mesure. […] Fontenelle pensait que, pour mériter un éloge, il ne suffisait pas d’avoir fait inscrire son nom dans une liste ; que les hommes du plus grand nom, quand ils ne portaient pas des lumières dans une compagnie savante, devaient du moins y porter du zèle ; que des titres seuls ne peuvent honorer un corps où l’on compte les Cassini, les Leibnitz et les Newton ; et qu’enfin, s’il y a des lieux où un rang et des dignités suffisent pour que la flatterie soit toujours prête à prodiguer l’éloge, ce n’est pas à une compagnie de philosophes à donner cet exemple : il avait donc alors le courage de se taire ; et il serait à souhaiter que dans les mêmes occasions on rendît toujours la même justice.
Leurs bucoliques et leurs cantiques suffisent à nourrir l’âme enfantine des grandes tribus. […] La poésie contenue dans ses évangiles et dans ses liturgies suffisait. […] Il ne suffit pas, comme semble le croire M. […] Madeleine ne lui suffit pas, il est sans cesse poussé à d’autres aventures. […] Les belles campagnes menées par quelques petites revues ont suffi à changer la direction de nos esprits.
et cela ne lui suffisait pas davantage. […] Pierrot n’est qu’un fantoche qui pouvait suffire à Watteau et à son siècle de pastel, mais qui ne doit pas lui suffire. […] Il est, LUI, lui seul, et cela doit suffire. […] Une vapeur, une goutte d’eau, disait Pascal, suffit pour tuer le roseau qui pense. […] Catulle Mendès doit suffire.
La curiosité spontanée, l’instinct des belles choses y suffisaient. […] Or les résultats de la haute science ne sont pas de ceux qu’il suffit d’énoncer. […] Il suffira d’une maladresse, d’un faux pas, pour qu’ils vous poussent, vous renversent et vous écrasent. […] Chaque individu, venant au monde, trouvait, outre la famille, qui ne suffit pas pour faire l’homme, la nation, dépositaire d’une autre vie plus élevée. Le christianisme, qui a détruit la conception antique de la nation et de la patrie, s’est substitué chez les peuples modernes à cette grande culture nationale, et longtemps il y a suffi.
Ce sont là des inconséquences ou des distractions qu’il suffit de signaler et qui sont à réparer sans aucun doute. […] Ne l’admettons pas dans le Dictionnaire, dira-t-on ; ne lui donnons point le droit de cité ; émouvoir suffit. — A quoi je réponds : Non, émouvoir ne suffit pas ; car il est des cas où j’emploierai émotionner et où j’en aurai besoin. […] Sans doute il a raison et mille fois raison ; mais depuis quand a-t-il suffi dans les choses humaines, et même dans les choses littéraires, d’avoir cent mille fois raison ?
Quant à la langue, elle suffit à tout ce que l’esprit français, enfermé dans ce cercle, lui demande d’exprimer. […] Certes, nous sommes bien ambitieux pour elle, puisque la gloire de ces commencements ne nous suffit pas, et que nous appelons quelque époque féconde qui mette en possession de sa vraie destinée cette langue à laquelle, du nord au midi, l’Europe rendait hommage. […] Pour se convaincre soi-même, ou se persuader qu’on avait convaincu les autres, il suffisait de réunir deux de ces axiomes sous forme de prémisses, et d’en faire sortir, à titre de conclusion, le principe qu’on voulait établir. […] Les grands hommes dans l’ordre des choses de l’esprit ne peuvent naître que dans une société qui a des idées générales, à l’expression desquelles la langue nationale suffit.
. — Il suffit de rappeler l’espèce de géographie à la fois physique et morale dont Michelet a rempli le livre III de son Histoire de France ; c’est un effort hardi pour retrouver les liens qui rattachent à leur sol natal les grands hommes de chaque région. […] Il ne suffit pas d’observer les diverses conceptions du monde extérieur qui se concilient ou se heurtent dans une société. […] La peur seule d’un cataclysme a suffi parfois. […] Il suffit de quelques degrés de plus ou de moins dans la moyenne de la température pour qu’une époque s’éclaire d’un rayon de gaieté ou s’embrume de tristesse. « Si les glaciers reculent, écrit Michelet57, l’été est fort, la moisson abondante, les subsistances faciles et l’aisance assure la paix.
Nous sommes déjà si loin de ces temps, que, pour bien juger d’un homme, d’un auteur qui y a vécu, il ne suffit pas toujours de lire ses productions, il faut encore les revoir en place, recomposer l’ensemble de l’époque et l’existence entière du personnage ; en un mot, il faut déjà faire un peu de cette étude et de cet effort qu’on fait pour les anciens. […] Elles nous suffisent pour découvrir déjà en Chaulieu un sentiment de fierté qu’il eut toujours depuis, ce que Saint-Simon appelait de l’audace, mais qui méritait un meilleur nom, et qui partait de ce sentiment réfléchi par lequel un esprit indépendant se juge soi-même et les autres. […] Mais Chaulieu, qui n’avait guère besoin de cet apprentissage de franc buveur, revient surtout de là avec l’expérience consommée que la vie de société ne suffit pas à donner, et qu’on ne puise que dans le maniement d’une première affaire, même lorsqu’on n’y a pas réussi. […] Il a suffi d’un simple changement à la surface pour qu’on les vît déborder.
Ce grand citoyen, dans le ravissement de voir enfin ses maîtres honorer le plus utile établissement de leur présence, après neuf ans d’une attente vaine et douloureuse, m’embrassa les yeux pleins de larmes, en disant tout haut : Cela suffit, cela suffit, mon enfant ; je vous aimais bien ; désormais, je vous regarderai comme mon fils : oui, je remplirai l’engagement que je viens de prendre, ou la mort m’en ôtera les moyens. […] Selon cette théorie d’un faux bon sens ennemi du grand goût, il suffirait de transporter purement et simplement toute action émouvante et attendrissante de la vie bourgeoise sur le théâtre pour avoir atteint le plus haut point de l’art : Si quelqu’un est assez barbare, assez classique (il est piquant de voir ces deux mots accolés par Beaumarchais et pris comme synonymes), pour oser soutenir la négative, il faut lui demander si ce qu’il entend par le mot drame ou pièce de théâtre n’est pas le tableau fidèle des actions des hommes. […] Il suffît que l’ensemble et nombre de parties restent agréables, riantes et vives.
Croce verra combien mon « système » diffère de la classification rigide encore en usage) que la satire n’est pas un « genre », pas plus que l’idylle, ou le poème héroï-comique, ou le roman champêtre… Ces combinaisons variées, dont nul ne saurait fixer le nombre ni la forme, naissent parfois de la fantaisie d’un génie et meurent avec lui, car les imitations qu’elles suscitent ne sont le plus souvent que de mauvaises copies et ne révèlent qu’une mode sans âme ; — d’autres fois, ces combinaisons (celles-là surtout qu’on essaie de grouper en « genre didactique »), sont tout simplement des œuvres de morale ou de science ; leur style agréable ne suffit pas à en faire des œuvres littéraires ; il s’agit d’un domaine intermédiaire, comme il y en a tant dans la vie où tout n’est que transition ; dans ces cas-là, qu’on commence par rendre courageusement à la morale et à la science tout ce qui n’est pas œuvre d’art ; il y a des documents d’une grande valeur psychologique qui sont sans « forme » au sens précis du mot, donc sans art ; il faut les connaître, les utiliser, en dire l’intention, la signification ; mais, loin de les mettre au nombre des œuvres d’art, dire pourquoi ce ne sont pas des œuvres d’art. […] Il ne suffit pas d’exprimer en style correct des idées nobles et profondes pour faire œuvre d’art ; l’art n’est le plus souvent que secondaire pour les moralistes ; il est pour eux un moyen et non un but ; c’est une différence essentielle, qui devrait assigner aux moralistes une place particulière dans l’architecture d’une histoire littéraire. […] Elles suffisent à montrer que ma méthode, si elle est juste, présente un gros danger, qui est aussi une garantie : elle se refuse à toute application machinale. […] Je ne donne que des noms connus, les plus connus ; ils doivent suffire pour un premier essai.
Un philosophe écrivant pour des philosophes, un archéologue écrivant pour des archéologues, un savant écrivant pour des savants, n’ont qu’à appliquer aux choses les termes techniques de leur science spéciale : ils ne veulent pas être compris de tout le monde, et il leur suffit d’être entendus de ceux qui connaissent ces vocabulaires particuliers, et plus ils mettront de rigueur dans cet emploi des mots techniques, plus ils préciseront leur pensée et éclairciront leur sujet. […] Mais dans les occasions où l’on veut être lu de tous, où l’on n’exclut d’avance aucune catégorie d’esprits de l’intelligence de ce qu’on écrit, cette clarté spéciale ne suffit plus.
dit un de ses personnages, nous sommes pareils à ces cristaux puissants où dort, en Orient, le pur esprit des roses mortes, et qui sont hermétiquement voilés d’une triple enveloppe de cire, d’or et de parchemin. » Une seule larme de leur essence conservée ainsi dans la grande amphore précieuse (fortune de toute une race et que l’on se transmet par héritage, comme un trésor sacré tout béni par les aïeux) suffit à pénétrer bien des mesures d’eau claire. Et celles-ci, à leur tour, suffisent pour embaumer bien des demeures, bien des tombeaux, durant de longues années !
III Qu’il soit malade, cela va sans dire et il suffit de regarder. […] Pour satisfaire le plus grand nombre, les faits-divers suffiraient avec le courrier des tribunaux.
Suffit-il de mettre côte à côte ces études particulières, de présenter dans un ordre vaguement chronologique un monceau de vérités de détail sans lien entre elles ? […] Suffit-il qu’il ait du génie ?
Pour que le jugement affirmatif se produise, il suffit que l’intermédiaire se produise ; peu importe que l’antécédent existe ou n’existe pas. […] Ici encore, la présence du dernier intermédiaire suffit pour faire naître la perception ; peu importe que les antécédents existent ou n’existent pas. […] Bref, sauf obstacle ultérieur, pour que la perception ou jugement affirmatif se produise, il faut et il suffit que la sensation ou action des centres sensitifs se produise. — En ceci, les opérations mentales ressemblent aux opérations vitales. […] Cette action des centres sensitifs, en d’autres termes cette sensation visuelle spontanée, suffit pour évoquer en lui une tête de mort apparente, apparemment située à trois pas de lui, douée en apparence de relief et de solidité, fantôme interne, mais si semblable à un objet externe et réel que le malade pousse un cri d’horreur. — Telle est l’efficacité de la sensation visuelle proprement dite ; elle la possède si bien qu’elle la manifeste même en l’absence de ses antécédents normaux. […] Examinons tour à tour les mots et les images qui composent nos pensées ordinaires. — À l’état normal, nous pensons tout bas par des mots mentalement entendus ou lus ou prononcés, et ce qui est en nous, c’est l’image de tels sons, de telles lettres ou de telles sensations musculaires et tactiles du gosier, de la langue et des lèvres. — Or il suffit que ces images, surtout les premières, viennent à s’exagérer, pour que le malade ait des hallucinations de l’ouïe et croie entendre des voix. — « Au milieu de ma fièvre, dit Mme C…8, j’aperçus une araignée, qui, au moyen de son fil, s’élançait du plafond sur mon lit.
suffit. […] « En quelque manière qu’on puisse se mettre à l’abri des coups, fût-ce sous la peau d’un veau, je ne suis pas homme qui y reculât : car il me suffit de passer à mon aise ; et le meilleur jeu que je puisse me donner, je le prends, si peu glorieux au reste et exemplaire que vous voudrez239. » Montaigne est de sa nature plus sensible à la douleur physique qu’à la douleur morale : il nous le dit. […] Il ne s’embarrasse pas de faire un système, ni de savoir si les fondements de ses idées sont solides en bonne logique : il lui suffit que nature les ait mises en lui. […] Le chapitre de l’Institution des Enfants240 suffirait pour marquer la mesure du scepticisme de Montaigne. […] L’humanité a reconnu en lui un exemplaire de sa commune nature ; et pour l’attester il suffira de nommer Bacon qui fait ses Essais à l’imitation de notre gentilhomme périgourdin, Shakespeare, à qui Montaigne peut-être a révélé la richesse psychologique et dramatique de Plutarque, qui à coup sur lisait, annotait, transcrivait parfois Montaigne ; le vieux Ben Johnson même l’avait entre les mains.
Comme elle n’a plus recours à une opposition entre l’agréable et le bien moral, une seule et même inclination suffit à expliquer tous les actes. […] Mais cela ne leur suffit pas et ils veulent avoir encore le mérite de leur vertu et de leur bonheur. […] Il suffit, pour expliquer comment se forme l’illusion d’un moi unique, de montrer le jeu de ces instincts divers dans la conscience. […] Il suffit donc de noter ici que l’on trouvera, dans le troisième volume du Monde comme volonté et comme représentation, au chapitre sur la Métaphysique de l’amour, les développements fournis par ce philosophe en ce qui touche à cette forme du Bovarysme. […] Il est aisé de vérifier cette loi en en considérant les effets dans la sensibilité d’un même individu : il suffit de le choisir tel que durant la brève période de sa vie, la fortune l’ait soumis à des conditions diverses et contraires.
Il suffit que le succès détermine un courant. […] Quelques exemples suffiront. […] Le livre est de lui, cela suffit. […] Il suffit d’une phrase pour créer. […] Il suffit que cela soit vrai.
Une indication, un mot, un hasard même auraient donc pu suffire à le pousser dans la voie où il devait rencontrer son chef-d’œuvre. […] Et pour qu’il s’y introduise, en effet, et s’y joigne, il suffira qu’il ait reçu de la vie l’éducation qui lui manque. […] — Et ne suffit-il pas de s’en faire un plaisir extrême ? […] Deux mots ici suffiront : une rare ignorance et un grand contentement de soi. […] car la vie des autres, en vérité, ne suffira pas pour lire l’histoire de la sienne.
Mais il ne suffit pas que la résolution résulte du caractère et porte ainsi la marque de notre tempérament physique et moral, pour être libre. […] Contentons-nous de dire : il est donné ou il est ; cela suffit. […] Il ne suffit pas, comme on l’a prétendu, d’envelopper dans une même unité de conscience le déterminant et le déterminé pour qu’ils soient par là identiques et qu’on en puisse conclure la détermination par soi, conséquemment la liberté. […] Il est bien clair qu’il ne suffit pas de s’attribuer une puissance quelconque pour la créer de toutes pièces en soi ; par exemple, il ne me suffit pas de me persuader que j’amènerai 100 au dynamomètre pour obtenir ce chiffre. […] Au contraire, je sais parfaitement que je ne tuerai pas un homme pour lui voler sa fortune : suffit-il, comme dans l’exemple de Cicéron, de lever le petit doigt pour faire disparaître l’homme et avoir ses millions, je prévois, de prescience certaine, que je refuserais de lever le doigt.
Leur imagination suffit à leur présenter l’image voulue, sans autre secours qu’une simple esquisse. […] Mais pour voir cela il ne suffît pas d’avoir des yeux ; il faut avoir le don de poésie. […] Il lui suffira de marquer en quelques coups de crayon la silhouette de l’objet auquel il veut nous faire penser ; la figure la plus sommaire suffira, pourvu que nous puissions y mettre le nom de la chose. […] Si j’essayais de reproduire tous les détails que mon œil y perçoit, ma vie n’y suffirait pas. […] Nous nous figurons qu’il suffirait d’un petit effort pour les mettre au point.
Le triomphe du nominalisme marque la fin du système théocratique qui, de même que le système féodal, a rempli sa mission, s’est épuisé et ne suffit plus aux œuvres de l’avenir. […] Plusieurs ont dit : « Le moyen âge n’a pas connu le souci de l’art. » Erreur profonde, que l’architecture, la poésie des Provençaux, Chrétien de Troyes, Dante, suffisent à réfuter. […] L’intérêt que tout drame à thèse offre aux contemporains ne suffit pas à expliquer de pareils succès ; il y a autre chose : le goût du théâtre. […] Je devais toucher, en passant, à ce problème d’esthétique ; il importait de constater que la vision dramatique, à elle seule, ne suffit pas pour qu’on fasse œuvre d’art. […] Quoi qu’il en soit, la mode fût-elle prouvée, je n’en fais pas état ; la vogue du roman suffit à ma démonstration.
Il me suffit d’avoir fait un livre de vérité — ou du moins ce qui m’apparaît tel. […] Il nous suffira de noter au passage quelques traits importants de la vie spirituelle de nos pères. […] On a fait une révolution verbale et cela suffit à notre ambition. […] Un simple regard jeté sur le monde suffit à l’établir. […] Il est des vérités fixes et intangibles, qu’il suffit de grouper et de développer.
Deux, trois, quatre pinces y suffisent. « Le temps, pour l’opéré, c’est la vie. » Simplification de la technique opératoire, suppression de toutes les manœuvres inutiles, ablation rapide et, autant que possible, sans morcellement, puis sutures minutieuses et aussi lentes qu’on voudra ; hardiesse à « tailler », soin extrême à « recoudre » : voilà la vérité. […] Enfin, comme il s’agit ici, après tout, de choses qui se voient et se touchent, il suffit au spectateur le plus ignorant de connaître le but poursuivi pour s’intéresser aux gestes de l’opérateur.
Delavigne n’a pas l’audace qu’il faut pour enfourcher l’indocile Hippogriffe ; mais, s’il court moins de risques, il ne voit pas non plus se déployer sous lui, comme une carte immense, la figure du monde et l’infini des horizons ; il ne peut pas, au détour d’un nuage, entrer en conversation avec un ange qui monte, ni passer sa main dans les cheveux d’or des étoiles ; le moindre mur, la plus petite colline bleue suffisent à masquer sa perspective… M. […] Bienveillant par nature, exempt de toute envie, il ne put jamais admettre ce qu’il considérait comme des infractions extrêmes à ce point de vue primitif auquel lui-même n’était plus que médiocrement fidèle ; il croyait surtout que l’ancienne langue, celle de Racine, par exemple, suffit ; il reconnaissait pourtant qu’on lui avait rendu service en faisant accepter au théâtre certaines libertés de style qu’il se fût moins permises auparavant et dont la trace se retrouve évidente chez lui, à dater de Louis XI.
La difficulté n’est pas de rimer bien (un dictionnaire de rimes y suffit), mais de faire vivre le vers par le nombre, l’éclat, l’harmonie. […] Mais il ne nous suffisait pas de vouloir imposer la « rime pour l’oreille ».
Pour prouver ce que j’avance, il suffira de citer les paroles d’un grand mathématicien. […] Il suffirait de citer, pour le prouver, les essais malheureux qu’il en a faits. […] Mais cette connaissance nous suffit pour étendre notre puissance sur la nature. […] Il suffit, pour se convaincre de ce que j’avance, d’ouvrir le premier venu des traités de pathologie. […] C’est là une erreur ; la connaissance clinique ne suffit pas plus au médecin que la connaissance des minéraux ne suffirait au chimiste ou au physicien.
Le Breton n’a pas pensé que cela pût suffire à nous intéresser. […] Mais il suffit que le fait soit certain. […] vos mérites ne sauraient suffire à vous justifier devant Dieu ! […] Un seul mot d’elles suffit pour déconcerter la science toute neuve de M. […] Il lui suffit qu’elles soient.
» À ce compte, un scénario devrait suffire et nous aurions cet embryon de drame qu’est la Commedia dell’Arte. […] Le talent, le génie ne sauraient y suffire : il faut encore le bonheur. […] Le génie mis à part, qui ne suffit jamais tout seul, Molière a une scène et une compagnie ; Molière a un public. […] Il ne suffit pas d’opposer entre eux les éléments extrêmes qui composent la vie, pour créer de la vie. […] En partie seulement ; ils ne suffiraient pas à remplir chaque soir même une salle minuscule.
Trois ou quatre vers, rencontrés au hasard de la page ouverte, souvent même quelques lambeaux de vers ont suffi. […] Et qui suffirait à prouver que les démarches de la poésie ne sont pas celles de la raison. […] la réaction artiste. — ni l’inspiration ne suffit, ni la lime. […] Mes citations ne suffisent-elles pas d’ailleurs amplement à montrer une fois de plus que je n’ai rien inventé ? […] Cela suffit pour qu’on voie que nous nous retrouvons sur le même point au débouché de la forêt.
Je n’exagère pas : il suffit de recueillir et de savoir écouter les témoignages des contemporains. […] Elle ne suffirait pas pour rectifier un équivoque, mais elle est plus que suffisante pour rectifier la calomnie, quand on est persuadé qu’il y va du service de Dieu. […] Je n’ai pas à entrer dans l’exposé du dogme et de la morale de Bourdaloue : qu’il me suffise de dire que son mérite et sa vertu comme son grand art est de professer un juste milieu en théologie. […] Je dis sévère : car il ne faut pas croire que Bourdaloue, en exposant à son auditoire ces portraits fidèlesl, y mêlât de ces nuances, de ces inflexions marquées de débit et d’accent qui en eussent fait des peintures trop agréables et de trop fines satires : il restait lui-même, c’est-à-dire grave, uni en parlant, sérieusement digne ; il n’avait pas de ces tons familiers, insinuants, touchants, que lui demandait Fénelon ; il maintenait le caractère d’enseignement et de précepte, même dans ses censures ; enfin, il lui suffisait d’être frappant, utile et instructif, il n’était pas enchanteur.
Arago soutenait une thèse, celle des sciences contre les langues anciennes savantes : tant qu’il parlait science il avait raison, et il ne devenait choquant que lorsqu’il attaquait à outrance ce qu’il eût suffi de circonscrire et de limiter. […] J’en pourrais citer mille exemples, mais un seul me suffira. […] Sous le précédent Empire, il y a près de cinquante ans déjà, lorsque l’Université eut sa fondation et sa renaissance, bien des débris vivaient encore, bien des germes fermentaient qu’il suffisait de rapprocher et de mettre en contact pour qu’il en sortît des productions variées et puissantes. […] Les habitudes les plus futiles et les plus inutiles ont d’immenses racines dans le passé, et, quoique de prime abord il semble qu’il suffise d’un souffle pour les détruire, elles résistent souvent et aux convulsions des sociétés, et aux efforts d’un grand homme. » Cette opinion personnelle du prince, qu’on vient de voir si formellement exprimée, étant telle et si en accord avec celle de Franklin, il est plus facile encore d’apprécier la haute impartialité que le même prince devenu empereur, et pouvant tout, a apportée dans la solution pratique, et combien il s’est montré l’homme de son nouveau rôle et de sa destinée, publique, lorsque, dans l’œuvre de conciliation, il a laissé faire une si large part à l’opinion opposée.
Ce livre sur les Grotesques suffirait, indépendamment de ce qu’on sait de lui d’ailleurs, pour poser M. […] Il suffit d’ouvrir, de feuilleter, de lire çà et là ces volumes, pour prendre aussitôt du vieux Colletet une idée plus complète, plus vraie ; on ne le connaît qu’alors dans toute sa bonhomie et toute sa culture gauloise. En même temps le moindre examen suffit pour s’assurer qu’il n’est nullement à souhaiter qu’on imprime cette histoire, ce serait faire double emploi à la Bibliothèque françoise de l’abbé Goujet. […] Gautier de le relire, tant il le trouve coriace (c’est, je crois, son mot) ; mais il suffirait qu’il eût entendu chanter, l’hiver dernier, ces nobles stances mises en musique par Reber : N’espérons plus, mon Ame, aux promesses du monde, etc.
Néanmoins nous avons à tenir compte de ce que Boileau fut en effet cartésien, comme son Arrêt burlesque suffit à le montrer, et son cartésianisme, manifestement, n’a pas été étranger à la forme définitive qu’il a donnée à la doctrine classique. […] Mais, de plus, Boileau et Racine, et La Fontaine, et Molière étaient des artistes : ce que n’étaient ni les Chapelain, ni les Scudéry, ni les Desmarets, ni les Cotin, ni tous les prétentieux rédacteurs d’emphatiques épopées, ni tous les ingénieux rimeurs de petits vers, ni tous les pédants qui estimaient que l’usage des règles, par une vertu secrète, suffit sans la matière et sans le génie à la perfection des œuvres, ni enfin tous les inspirés qui écrivaient en courant, sans réflexion et sans retouches, au hasard de leur fantaisie. […] L’Académie avait des séances orageuses : c’était un jour de triomphe pour les modernes, quand on recevait Fontenelle ; mais les anciens avaient leur revanche, quand ils faisaient entrer La Bruyère : tous ces incidents du débat sont connus, et il suffit de les rappeler. […] Ce qui intéressait le public contemporain, et ce qui nous intéresse encore aujourd’hui le plus dans les Parallèles, c’est de voir la façon dont Perrault s’y prend pour établir qu’en matière de belles-lettres comme en tout, les anciens étaient des enfants, tandis que les modernes représentent la maturité de l’esprit humain ; et que là aussi il suffit de venir le dernier pour être le plus grand.
Quoiqu’il ne soit pas de ces écrivains destinés jamais à devenir populaires, la publication première de ses deux volumes de Pensées et de Lettres, en 1842, a suffi pour le classer, dès l’abord, dans l’estime des connaisseurs et des juges ; il ne s’agit que d’étendre un peu le cercle de ses lecteurs aujourd’hui. […] Aussi la plus simple parure suffisait à une pensée élégante pour leur plaire, et la vérité pure les satisfaisait dans les descriptions. […] En fait d’expression, il préfère encore le sincère au beau et la vérité au simulacre : La vérité dans le style est une qualité indispensable, et qui suffit pour recommander un écrivain. […] s’écriait-il, cela est long, cela est rare, cela cause un plaisir extrême ; car les pensées achevées entrent aisément dans les esprits ; elles n’ont pas même besoin d’être belles pour plaire, il leur suffit d’être finies.
Il l’aborda de préférence par le genre des pastorales et des nouvelles, et lui emprunta Galatée (1783), qu’il traita avec liberté d’ailleurs, et qu’il accommoda selon le goût du temps, en y donnant une teinte plus récente de Gessner : « J’ai tâché, écrivait-il à ce dernier, d’habiller la Galatée de Michel Cervantes comme vous habillez vos Chloés : je lui ai fait chanter les chansons que vous m’avez apprises, et j’ai orné son chapeau de fleurs volées à vos bergères. » Ce roman pastoral, mêlé de tendres romances, réussit beaucoup : toutes les jeunes femmes, tous les amoureux en raffolèrent ; les sévères critiques eux-mêmes furent fléchis : « C’est un jeune homme d’un esprit heureux et naturel, écrivait La Harpe parlant de l’auteur de Galatée, et qui aura toujours des succès s’il ne sort pas du genre où son talent l’appelle. » Il est vrai que, peu de temps auparavant, le chevalier de Florian avait adressé au même M. de La Harpe des vers d’enthousiasme, au sortir de la représentation de Philoctète : Je ne sais pas le grec mais mon âme est sensible ; Et, pour juger tes vers, il suffit de mon cœur ! […] Ces plaisirs étaient purs, vifs, aimables ; ils suffisaient à parer le présent des plus douces, des plus riantes couleurs. […] Après une critique judicieuse du sujet, de la fable et de la composition, Rivarol y relevait la monotonie de la manière, le défaut absolu de mouvement et de variété : « On a dit que la pureté et l’élégance ne suffisaient pas dans un ouvrage de cette nature : il n’y a que les expressions créées qui portent un écrivain à la postérité. […] Là où l’esprit et la grâce peuvent suppléer à la poésie, là où il suffit de bien conter et d’égayer le récit par un trait agréable, Florian s’en tire à merveille, comme lorsqu’il nous montre, dans la querelle entre le hibou, le chat et l’oison, ce rat arbitre, Rat savant qui rongeait des thèmes dans sa hutte !
Je laisse à de plus osés de mettre la main au feu pour des questions de ce genre : il me suffit, et il doit suffire à ceux qui cherchent avant tout le caractère du personnage, que Mme de Maintenon ait eu dans l’ensemble une ligne de conduite pleine de réserve et de convenance. […] Il lui suffit, pour tous les autres, d’être un personnage à part, non défini et d’autant plus respecté, jouissant de sa grandeur voilée sous le nuage et du sens merveilleux d’une destinée qui perçait assez, comme dit Saint-Simon, sous sa « transparente énigme ». […] Qu’il suffise de rappeler aujourd’hui, à l’honneur de Saint-Cyr, qu’il fut, en naissant, l’occasion d’Esther et d’Athalie.
Pour qu’un corps constitué naisse de leur agglomération, il ne suffit pas qu’ils entrent en relations, a fortiori qu’ils se juxtaposent, il faut encore que leurs relations soient définies et réglées par une certaine communauté d’obligations reconnues, de sentiments approuvés, d’intérêts sentis. […] La progression annuelle des budgets des États suffirait à le prouver200. […] C’est un Zollverein qui a posé la première pierre de l’unité allemande. — Mais cette limitation de la généralisation de Spencer ne saurait nous suffire ici. […] Que l’unification soit due au militarisme, et la complication à l’industrialisme, ce qu’il y a de sûr c’est que l’une et l’autre se développent parallèlement dans les sociétés occidentales, et c’est ce qui suffit à notre thèse.
Maltère doit lui suffire avec ses deux femmes, de tête et de sens, ou sinon il est bien difficile. — Mais n’y a-t-il pas aussi trop de contact entre Barrès et son lecteur, et celui-là ne se préoccupe-t-il pas à l’excès de celui-ci ? […] Elles suffiraient à nous prouver, ce que nous savions déjà, que Paul Adam est le plus fort de nous tous. […] La stagnante béatitude des ateliers modèles ne suffit pas.
Ainsi, une fois la classification établie sur ce principe, pour savoir si un fait est général dans une espèce, il ne sera pas nécessaire d’avoir observé toutes les sociétés de cette espèce ; quelques-unes suffiront. Même, dans bien des cas, ce sera assez d’une observation bien faite, de même que, souvent, une expérience bien conduite suffit à l’établissement d’une loi. […] Au surplus, nous n’avons pas à entrer dans ces détails, il nous suffit d’avoir posé le principe de la classification qui peut être énoncé ainsi : On commencera par classer les sociétés d’après le degré de composition qu’elles présentent, en prenant pour base la société parfaitement simple ou à segment unique ; à l’intérieur de ces classes, on distinguera des variétés différentes suivant qu’il se produit ou non une coalescence complète des segments initiaux.
S’il est vrai, comme je le crois, que la divergence des opinions diverses qui se disputent aujourd’hui l’empire de la société commence immédiatement à l’origine de la pensée, nous allons être obligés de creuser jusque-là pour expliquer cette divergence ; car, je ne puis assez le répéter, la lutte des intérêts contraires, quelque active qu’on puisse la supposer, ne suffirait pas toute seule pour amener les résultats dont nous sommes témoins. […] J’ai cru m’apercevoir que le phénomène de la pensée ne s’opérait pas de la même manière dans tous les hommes de cet âge, et cela me suffit, la supposition que je fais devant ensuite être remplacée par ce que je crois être la vérité, ou même par tout autre système que mes lecteurs voudraient lui substituer. […] Il n’est aucun de mes lecteurs qui ne puisse compléter une telle série de faits : il me suffit de l’avoir mis sur la voie.
D’un autre côté, vainement l’Église lui a-t-elle appris cette charité chrétienne qui a suffi au monde depuis l’Évangile, il ne s’en est pas moins laissé mordre par la brebis enragée de la Philanthropie moderne, et comme l’école tout entière du dix-huitième siècle qu’il essaie de combattre, mais qui le tient sous elle comme un vaincu, il se préoccupe, à toute page de son livre philanthropique, du droit de chaque homme vis-à-vis de la société, et il va chercher ce droit individuel dans des notions incomplètes ou fausses, pour l’exprimer dans de nuageuses définitions que le dix-huitième siècle n’aurait certes pas repoussées ! […] Mais cela ne suffit pas, sans l’intuition première, sans le point de départ bien arrêté et dominateur. La logique même, qui conduit l’esprit du point de départ au point d’arrivée, ne suffirait pas davantage, et M.
Ce prince avait des droits assez légitimes par sa femme, mais cela n’eût pas suffi. […] Il suffirait, pour prouver qu’en dépit de certains actes et de certains travers, Napoléon fut le continuateur et le champion de la Révolution française en face de l’Europe, de remarquer cet hommage unanime et cette piété du peuple envers sa mémoire au moment du triomphe de la liberté.
Un quatrième volume suivra plus tard les trois qui se trouvent publiés aujourd’hui, et suffira, nous le croyons, à compléter l’ouvrage. […] Dans l’Avertissement placé en tête des second et troisième volumes de cet ouvrage24, qui parurent en 1836, j’ai dit, et il m’avait semblé, en effet, qu’un quatrième volume me suffirait pour épuiser les noms d’auteurs que je tenais à traiter encore.
Il le faudrait surtout, lorsque, recherché du public, on peut, en quelques semaines de travail, se procurer ce qui eût suffi à l’année d’un grand écrivain frugal d’autrefois. […] On rencontre un personnage, un caractère dans une situation ; il suffit, s’il n’est pas le personnage essentiel, qu’il soit bien saisi : il aide à l’effet, et on ne se soucie pas de le suivre ensuite à perpétuité dans ses recoins.
I Ils sont les successeurs et les exécuteurs de l’ancien régime, et, quand on regarde la façon dont celui-ci les a engendrés, couvés, nourris, intronisés, provoqués, on ne peut s’empêcher de considérer son histoire comme un long suicide : de même un homme qui, monté au sommet d’une immense échelle, couperait sous ses pieds l’échelle qui le soutient En pareil cas, les bonnes intentions ne suffisent pas ; il ne sert à rien d’être libéral et même généreux, d’ébaucher des demi-réformes. […] À leur tête, le roi, qui a fait la France en se dévouant à elle comme à sa chose propre, finit par user d’elle comme de sa chose propre ; l’argent public est son argent de poche, et des passions, des vanités, des faiblesses personnelles, des habitudes de luxe, des préoccupations de famille, des intrigues de maîtresse, des caprices d’épouse gouvernent un État de vingt-six millions d’hommes avec un arbitraire, une incurie, une prodigalité, une maladresse, un manque de suite qu’on excuserait à peine dans la conduite d’un domaine privé Roi et privilégiés, ils n’excellent qu’en un point, le savoir-vivre, le bon goût, le bon ton, le talent de représenter et de recevoir, le don de causer avec grâce, finesse et gaieté, l’art de transformer la vie en une fête ingénieuse et brillante, comme si le monde était un salon d’oisifs délicats où il suffit d’être spirituel et aimable, tandis qu’il est un cirque où il faut être fort pour combattre, et un laboratoire où il faut travailler pour être utile Par cette habitude, cette perfection et cet ascendant de la conversation polie, ils ont imprimé à l’esprit français la forme classique, qui, combinée avec le nouvel acquis scientifique, produit la philosophie du dix-huitième siècle, le discrédit de la tradition, la prétention de refondre toutes les institutions humaines d’après la raison seule, l’application des méthodes mathématiques à la politique et à la morale, le catéchisme des droits de l’homme, et tous les dogmes anarchiques et despotiques du Contrat social Une fois que la chimère est née, ils la recueillent chez eux comme un passe-temps de salon ; ils jouent avec le monstre tout petit, encore innocent, enrubanné comme un mouton d’églogue ; ils n’imaginent pas qu’il puisse jamais devenir une bête enragée et formidable ; ils le nourrissent, ils le flattent, puis, de leur hôtel, ils le laissent descendre dans la rue Là, chez une bourgeoisie que le gouvernement indispose en compromettant sa fortune, que les privilèges heurtent en comprimant ses ambitions, que l’inégalité blesse en froissant son amour-propre, la théorie révolutionnaire prend des accroissements rapides, une âpreté soudaine, et, au bout de quelques années, se trouve la maîtresse incontestée de l’opinion À ce moment et sur son appel, surgit un autre colosse, un monstre aux millions de têtes, une brute effarouchée et aveugle, tout un peuple pressuré, exaspéré et subitement déchaîné contre le gouvernement dont les exactions le dépouillent, contre les privilégiés dont les droits l’affament, sans que, dans ces campagnes désertées par leurs patrons naturels, il se rencontre une autorité survivante, sans que, dans ces provinces pliées à la centralisation mécanique, il reste un groupe indépendant, sans que, dans cette société désagrégée par le despotisme, il puisse se former des centres d’initiative et de résistance, sans que, dans cette haute classe désarmée par son humanité même, il se trouve un politique exempt d’illusion et capable d’action, sans que tant de bonnes volontés et de belles intelligences puissent se défendre contre les deux ennemis de toute liberté et de tout ordre, contre la contagion du rêve démocratique qui trouble les meilleures têtes et contre les irruptions de la brutalité populacière qui pervertit les meilleures lois.
Mais les faits que j’explique sont certains, et ces faits, quoique nous n’en concevions pas bien la raison, suffisent pour appuïer mon systême. […] Il lui suffit que ces maîtres lui puissent enseigner une pratique, qu’on ne sçauroit ignorer quand on a professé cet art durant quelques années.
— nous voulons, du moins, parler de son succès, s’il en a un, comme dit la musette, et l’expliquer par Voltaire lui-même, qui suffit tout seul pour l’expliquer. Il Voltaire, en effet, suffit seul, — et ceci, entendez-le bien !
Ces indications rapides peuvent sans doute suffire. […] Mais ce qu’il faudra qu’ils reconnaissent, et ce qui suffirait à prouver que M. […] Chacun répond selon son tempérament moral, et cela suffît. […] En morale même, il me suffit que nous soyons responsables. […] Ils n’ont besoin ni de le vouloir, ni de le savoir : il leur suffit de s’y développer.
Il suffit d’être protégé et de passer un examen insignifiant. […] Autant dédaigner la forme lyrique des poètes étrangers, sous prétexte qu’une traduction française suffit. […] Cela peut bien aider à comprendre un homme, mais cela ne suffit pas à juger une œuvre. […] Une étude entière ne suffirait pas à exposer seulement la question. […] Il nous suffira de rapprocher René des Mémoires pour voir jaillir la lumière.
Il suffit de prononcer leur nom pour amener le sourire sur les lèvres. […] Il suffit donc d’ouvrir l’histoire pour juger la théorie de M. […] L’étude et la clairvoyance suffisent amplement. […] Le plus léger prétexte lui suffit pour provoquer son gendre. […] La sérénité laborieuse de sa vie suffit à ses ambitions.
. — Pour en trouver la raison, il suffit de les comparer à celles qui nous appartiennent également et que pourtant nous ne nous attribuons point, celles de couleur et de son. […] Il suffit que les trois images viennent chevaucher l’une sur l’autre, pour que les deux refoulements s’opèrent dans le sens indiqué ; le mécanisme qui les situe joue pour les aligner aussitôt que la loi d’évocation mutuelle les éveille ensemble. […] Voilà le fait brut ; pour se l’expliquer, il suffit de se reporter aux opérations de la mémoire. — Il y a deux sensations qui n’ont jamais manqué de se succéder en nous : d’un côté, celle d’une obscurité de plusieurs heures ; de l’autre côté, celle d’un globe lumineux surgissant au bord oriental du ciel. […] L’enfant et l’animal prévoient que cette eau les désaltérera, que ce feu les brûlera ; il suffit pour cela que l’expérience et l’habitude aient accouplé dans leur esprit telle sensation et telle représentation ; à présent, chez eux, la vue de l’eau éveille toujours l’image de la soif éteinte, et la vue du feu éveille toujours l’image de la brûlure. […] Il en est de même pour la plupart de nos prévisions ordinaires ; l’homme adulte et réfléchi est enfant et animal dans toutes ses actions habituelles et machinales, et cela lui suffît pour la conduite et la pratique. — Mais il peut dépasser cet état ; et en effet, petit à petit, il le dépasse.
Elle impute à cet individu ce méfait : cela suffit pour qu’elle se débarrasse du gaillard. […] Mais les exemples suffisent. […] Pour s’en apercevoir, il suffit de regarder les œuvres auxquelles fut consacré leur labeur. […] Il suffit d’un arbre qui se mire sur l’eau ; il suffit des chaumières qui, le soir, s’endorment ; il suffit des labours qui boivent la pluie. […] Il n’abuse pas de leur faiblesse pour les tourmenter ; il ne les pousse point à la caricature, le portrait suffit ; il ne complique pas leur châtiment, il n’aggrave pas leur « douloureuse », la vérité suffit.
Si la force n’y suffit point, il y emploie la violence. […] La forme de Boileau lui suffit pleinement. […] Cela suffit. […] Non seulement l’honneur ne suffit pas à remplacer les autres principes ; mais il ne se suffit pas à lui-même. […] Cela suffit.
Il ne suffit pas que leur âme soit énergique, elle doit être simple. […] Cela ne suffit pas encore au curieux qui a minutieusement étudié les complications de sa faculté visuelle. […] Un désordre organique suffit-il en effet à expliquer cet appétit déréglé du sublime ? […] Il ne lui suffit pas d’écrire juste, il veut écrire d’une manière rare. […] De tels exemples suffisent à démontrer la fécondité de cette fusion entre les deux types de pensée.
On connaît les premiers ; quant aux autres, il nous suffira pour aujourd’hui, si l’on le veut bien, que M. […] Quelques lignes, en effet, lui suffisent pour pousser plus avant qu’aucun de ses maîtres avant lui, que M. […] Si l’absolue sincérité ne suffit pas à faire les Phidias ou les Raphaël, elle ne saurait donc suffire davantage à faire les Dante ou les Shakespeare ; — et non pas même les Taine et les Renan. […] Il a presque suffi à M. […] mais il suffit que ce fût quelque chose de plus divertissant que les articles de Diderot et de d’Alembert.
Il disait à la bourgeoisie : « Je voterai pour l’enseignement moderne, parce que la suppression de la culture classique, à laquelle, personnellement, je suis de tout mon cœur attaché, vous portera le coup le plus funeste. » Et il concluait en ces termes : « Lorsqu’il y a cinquante ou soixante ans, sous Louis-Philippe, la bourgeoisie est arrivée au pouvoir, au gouvernement, aux affaires, elle avait compris alors que le prestige de la seule richesse ne lui suffirait pas, et elle essayait, en appelant à sa tête des hommes imprégnés de la culture antique, en la défendant partout, d’ajouter pour elle au prestige grossier de l’argent le prestige d’une noble culture. […] Quant à la crise du français, il me suffit à moi de lire les journaux et les livres d’aujourd’hui pour en être convaincu, et d’entendre parler ceux qui se disent appartenir à des partis de progrès. […] Louis de Gramont 1º Pour constater le péril qui menace la langue française, ne suffit-il pas de lire les journaux ? […] Cette lutte doit suffire à nous faire comprendre en quel extrême péril vont se trouver ceux qui n’ont pas été nourris au sein de la « madre Roma ». […] Une suite d’émotions vives leur suffit.
§ 2 Seulement cela ne suffit pas du tout à résoudre la question. […] Il me suffit d’indiquer à peu près dans quel esprit il conviendrait de les étudier, pour leur trouver des solutions approximatives et nouvelles selon les temps, les civilisations, les âges et les individus. […] Il suffit pour tout concilier que cette faiblesse passe inaperçue, qu’on se la cache à soi-même, qu’on en fortifie, au contraire, son orgueil. […] Croirait-on vraiment qu’il suffit de ne plus penser à notre cruauté pour la supprimer ? […] Ce qui précède suffit à indiquer la voie.
D’avoir battu en brèche, sans relâche, avec une énergie extraordinaire, dans sa critique et dans son œuvre, le vieux spiritualisme ; de s’être insurgé contre le meurtrier dualisme chrétien de l’âme et du corps, d’avoir brutalement revendiqué la vie de la terre et de la matière, réentendu la nature et l’instinct, voilà ce qu’il est impossible de lui contester, et ce qui suffirait à légitimer sa gloire. […] Oui, le petit peuple de la rue, le peuple de l’usine et de la ferme, le bourgeois qui lutte pour garder le pouvoir, le salarié qui exige un partage plus équitable des bénéfices, toute l’humanité contemporaine en transformation, c’est là le champ qui suffit à mon effort. […] Qu’il nous suffise de citer, en art, la glorieuse école « impressionniste » française, succédant au réalisme quelque peu étroit de la première heure. […] Il nous aura suffi de montrer que la doctrine scientifique et philosophique à laquelle Zola s’est pleinement rattaché au début, est actuellement dépassée, et que lui-même, demeurant étroitement fidèle à sa pensée première et s’immobilisant au milieu des idées en marche, se présente à nous maintenant comme l’un des fidèles d’une foi morte ou du moins en pleine décadence, la foi matérialiste. […] Je crois qu’Emile Zola pourrait méditer longuement et avec profit ces quelques lignes du poète américain Walt Whitman, cette vérité des vérités dont la révélation suffirait à la gloire d’un homme : En acceptant joyeusement de marcher sous la conduite de la science moderne, je n’en reconnais pas moins un fait supérieur à tous les faits quelle peut mettre en lumière.
Suffit-il de nous laisser aller à une rêverie quelconque pour nous sentir en état poétique ? […] Si nous voulons savoir jusqu’où peut aller le plaisir de rêver, il nous suffira de relire J. […] Mais cette poésie de la vingtième année ne saurait lui suffire. […] Mais cela même ne suffit pas. […] L’oreille, semble-t-il, doit suffire.
Il suffit de songer à ce qu’on observe chez nos diverses races de Chiens. […] D’autre part, cependant, l’habitude peut quelquefois suffire. […] Parfois les habitudes contraintes de la réclusion et de la domesticité ont suffi pour déterminer chez certains individus des instincts nouveaux qui se sont ensuite transmis héréditairement à leur postérité ainsi modifiée. […] Car, tandis qu’elles s’étaient emparées avec précipitation des nymphes des Fourmis noir-cendré, au contraire elles parurent tout d’abord terrifiées au seul aspect de celles de Formica flava, et même les parcelles de terre enlevées au nid de celles-ci suffisaient à les effrayer et à les faire fuir en toute hâte dès qu’elles les rencontraient sous leurs pas. […] Car il suffit de supposer qu’elle fasse ses cellules complétement sphériques et d’égale grandeur, ce qui n’aurait rien de très surprenant, puisqu’elles sont déjà à peu près telles, et puisque tant d’insectes parviennent à creuser dans le bois des trous parfaitement cylindriques, apparemment en tournant sur eux-mêmes autour d’un même point fixe.
Mais certains états de l’âme nous paraissent, à tort ou à raison, se suffire à eux-mêmes : telles sont les joies et les tristesses profondes, les passions réfléchies, les émotions esthétiques. […] Si les mouvements saccadés manquent de grâce, c’est parce que chacun d’eux se suffit à lui-même et n’annonce pas ceux qui vont le suivre. […] Or, il suffit de s’observer attentivement soi-même pour aboutir, sur ce dernier point, à une conclusion que M. […] Il suffira, pour s’en convaincre, de lire la remarquable description que le même auteur a donnée du dégoût : « Si l’excitation est faible, il peut n’y avoir ni nausée ni vomissement… Si l’excitation est plus forte, au lieu de se limiter au pneumo-gastrique elle s’irradie et porte sur presque tout le système de la vie organique. […] Pour résumer ce qui précède, nous dirons que la notion d’intensité se présente sous un double aspect, selon qu’on étudie les états de conscience représentatifs d’une cause extérieure, ou ceux qui se suffisent à eux-mêmes.
Mais vous me flattez, cela suffit pour m’arrêter sur vos louanges ; et puis, je ne fais point une épître dédicatoire. […] Si la réponse était non pas de Mirabeau, mais de tout autre, on dirait qu’elle était bien du genre alors à la mode, genre Maurepas, genre Cléon, genre méchant, auquel Gresset bientôt attachera l’étiquette ; mais avec le marquis de Mirabeau, l’humeur du personnage suffit pour expliquer le trait, sans invoquer le bon air. […] Vauvenargues fait bonne défense et, sans d’abord se découvrir, il accepte en partie le rôle qu’on lui fait, il l’explique et s’en excuse : Je ne veux pas vous faire entendre que je me suffise à moi-même, et que toujours le présent remplisse le vide de mon cœur ; j’éprouve aussi, souvent et vivement, cette inquiétude qui est la source des passions. […] Est-il besoin de remarquer qu’il suffirait d’un mot lâché par lui sur sa plaie secrète, sur ce qui l’empêche d’aller à Paris, pour que Mirabeau, qui sans doute ne demanderait pas mieux et qui semble provoquer la confidence, lui offrît sa bourse ?
Lors de la renaissance des lettres, ce culte pour les prédécesseurs s’est renouvelé sous plus d’une forme, parfois singulière, et il suffit de rappeler ce noble vénitien Naugerius qui, dans son adoration pour Catulle, brûlait chaque année quelques exemplaires de Martial en son honneur. […] On retrouverait en lui partout et dans le meilleur sens l’élève des jésuites et du Père Du Cerceau ; quand les jésuites ne se mêlaient pas de théologie, mais seulement de littérature, ils avaient de ce genre d’esprit dont Gresset représente la fleur la plus brillante et la plus mondaine : il suffit de nommer Commire, Cossart, Rapin, Porée, Bougeant et tant d’autres. […] — Gresset se trompe, il n’est pas si coupable36 Un vers heureux et d’un tour agréable Ne suffit pas ; il faut de l’action, De l’intérêt, du comique, une fable, Des mœurs du temps un portrait véritable, Pour consommer cette œuvre du démon ! […] En combien d’endroits de ses lettres Cicéron se montre préoccupé de ce je ne sais quoi si réel et si indéfinissable, soit que, du fond de la Cilicie, il écrive à un de ses amis plus heureux, qui vit, comme il dit, à la lumière : « Urbem, urbem, mi Rufe, cole et in ista luce vive 39, » soit qu’il écrive à cet autre qui se plaignait de lui, et qui tout d’un coup, en arrivant à Rome, change de ton : « Il a suffi du seul aspect de la ville pour te rendre ta première urbanité, adspectus videlicet urbis tibi tuam pristinam urbanitatem reddidit 40 !
On s’épand trop aujourd’hui en écrivant comme en vivant ; le cœur ni l’esprit n’y suffisent plus. […] Toute âme, en avançant, subit toutes les atteintes, tout le déchet dont elle est capable. « Tous les hommes, a dit le noble et bienveillant Vauvenargues, naissent sincères et meurent trompeurs ; » il lui eût suffi de dire, pour exprimer sa pensée amère, qu’ils meurent détrompés. […] En vain se répète-t-elle le plus qu’elle peut et avec une grâce parfaite : « Je veux de l’ombre ; le demi-jour suffit à mon bonheur, et, comme dit Montaigne, on n’est bien que dans l’arrière-boutique ; » sa forte nature, ses facultés supérieures se sentent souvent à l’étroit derrière le paravent et dans l’entresol où le sort la confine. […] Sophie, Sophie, juge à quel point je ressens l’amitié, puisque c’est chez moi le seul sentiment qui ne soit pas captif. » Mais Sophie seule, même en amitié, ne suffit plus ; vers le milieu de cette année 1776, on aperçoit quelque baisse, on entend quelque légère plainte : « Sophie, Sophie, vos lettres se font bien attendre… » En même temps que d’un côté on pensait à La Blancherie, de l’autre, à Amiens, on pensait au cloître ; Sophie avait eu l’idée, un momeni, de se faire religieuse.
Trente ans de distance ont suffi pour laisser tomber bien des bruits et pour apaiser bien des émotions. […] Elle venait d’être mère ; mais cette tendresse, qu’elle éprouvait pourtant avec bien de la vivacité, ne lui suffisait pas. […] De grâce, ne manquez pas votre vocation : il ne tient qu’à vous d’être la plus heureuse et la plus adorable créature qu’il y ait sur la terre, pourvu que vous ne fassiez plus marcher l’opinion des autres avant la vôtre, et que vous sachiez vous suffire à vous-même. […] Or, pour arriver à cet heureux résultat, il a suffi d’élaguer tout ce qui ne tenait pas nécessairement aux mémoires, de substituer aux deux cents premières pages, dénuées d’intérêt dans le manuscrit, une courte introduction qui mit le lecteur au fait des événements antérieurs au mariage de Mlle d’Esclavelle avec M. d’Épinay ; de supprimer entièrement un dénouement tout à fait romanesque, en le remplaçant par une simple note ; enfin d’ajouter çà et là, dans le courant du texte, quelques phrases servant à rapprocher les passages entre lesquels il avait été fait des coupures indispensables : en sorte que, nous pouvons l’affirmer, c’est bien le manuscrit copié sous les yeux de Mme d’Épinay, et apostillé de sa main, qui a été mis entre celles des imprimeurs, et qu’ils ont suivi exactement dans tout ce qui a été conservé.
A ceux qui nous affirment : La cité est un tout, donc elle se suffit à elle-même, nous répondons : Évidemment, la cité est un tout. Mais l’individu aussi est un tout ; et l’individu se suffit-il à lui-même, s’il veut vivre et non végéter ? […] La cité antique — à son origine du moins — se suffisait à elle-même et ses relations commerciales avec l’étranger se bornaient à un minimum d’objets de nécessité secondaire ; la cité moderne, dont les besoins se sont immensément accrus, dépend du monde entier. […] Des hommes de tous pays ont pensé : « Nous, travailleurs, de nationalités différentes, dans le but de défendre nos droits, qui sont semblables, malgré la diversité de nos origines, nous nous unissons par dessus les frontières, pour témoigner de l’unité de nos intérêts et créer une solidarité qui nous est nécessaire. » C’est un lien d’humanité partielle qu’ils ont établi, non pour dénouer le faisceau que constitue chacune de leurs nationalités, mais pour renforcer leur individualité, à l’expansion de laquelle la solidarité du seul corps social n’a pas suffi. « L’Internationale !
La base principale d’un tel lien, l’ascendant du devoir et de la nature, ne peut être anéanti ; mais dès qu’on aime ses enfants avec passion, on a besoin de toute autre chose que de ce qu’ils vous doivent, et l’on courre, dans son sentiment pour eux, les mêmes chances qu’amènent toutes les affections de l’âme : enfin, ce besoin de réciprocité, cette exigence, germe destructeur du seul don céleste fait à l’homme, la faculté d’aimer, cette exigence est plus funeste dans la relation des parents avec les enfants, parce qu’une idée d’autorité s’y mêle, elle est donc par la même raison plus funeste et plus naturelle ; toute l’égalité qui existe dans le sentiment de l’amour suffit à peine pour éloigner de son exigence l’idée d’un droit quelconque ; il semble que celui qui aime le plus, par ce titre seul, porte atteinte à l’indépendance de l’autre ; et combien plus cet inconvénient n’existe-t-il pas dans les rapports des parents avec les enfants ? […] Souvent l’homme, inconséquent dans ses vœux, s’éloigne seulement, parce qu’il est trop aimé, et se voyant l’objet de tous les dévouements et de toutes les qualités, confesse que l’excès même de l’attachement suffit pour effacer la trace de ses bienfaits.
Les passions rehaussent beaucoup plus toutes les valeurs, mais quand ce tarif de modération est fixé, il subsiste pour tous les âges ; chaque moment se suffit à lui-même, une époque n’anticipe point sur l’autre, jamais les orages des passions ne les confondent, ni ne les précipitent. […] Rien cependant n’inspire autant d’horreur que la possibilité d’exister uniquement, parce qu’on ne sait pas mourir ; et comme c’est le sort qui peut attendre toutes les grandes passions, un tel objet d’effroi suffit pour faire aimer cette puissance de philosophie, qui soutient toujours l’homme au niveau de la vie, sans l’y trop attacher, mais sans la lui faire haïr.
c’est l’affaire des historiens de nous l’expliquer en détail : deux mots suffisent ici. […] A mesure que la pensée et la science élargissent ces étroits cerveaux et en éveillent l’activité, à mesure aussi que les lettrés prennent l’habitude d’user de la langue vulgaire, la première provision de mots préparée par le peuple ne suffira plus.
Kahn a, je crois, un système théorique complexe ; mais ses vers suffisent à montrer le fondement de sa doctrine. […] Charles Morice Gustave Kahn a compris que, pour les projets qui s’imposent, ni la prose seule, ni les vers seuls ne suffisent.
. — Éviter le solennel et prendre la vie à la blague. » * * * Étrange société où connaître les gens qui font « la fête » suffit pour conférer un titre d’excellence. […] Je sais bien que sous cette veulerie apparente, la qualité de la race subsiste et qu’il a suffi d’un coup de clairon en 1914 pour redresser tous les courages et faire craquer ce masque d’indifférence et de niaiserie.
L’Angleterre, je le sais, comme autrefois à quelques égards l’ancienne France, suffit à presque tout par des fondations particulières, et je conçois que, dans un pays où les fondations sont si respectées, on puisse se passer d’un ministre de l’Instruction publique. […] Il faut encore moins espérer que les riches, qui sont exempts de ce souci, puissent jamais suffire aux besoins de la science.
Toute une série de mots anglais ont gardé en français et leur orthographe et leur prononciation, ou du moins une certaine prononciation affectée qui suffit à réjouir les sots et à leur donner l’illusion de parler anglais. […] Il suffirait évidemment de donner un nom anglais aux boules, à la marelle, ou au cerceau pour voir ces jeux innocents faire leur entrée dans le monde82.
A cet avantage tâchons, mon ami, d’en ajouter un second, plus précieux peut-être : qu’il ne vous suffise pas d’avoir éclairci les passages les plus obscurs du philosophe ; qu’il ne me suffise pas d’avoir lu ses ouvrages, reconnu la pureté de ses mœurs, et médité les principes de sa philosophie : prouvons que nous avons su, l’un et l’autre, profiter de ses conseils.
Ce n’est rien moins que Cervantès, et dans son Don Quichotte ; et si la citation ne vous suffisait pas, M. […] Il ne suffit pas pour connaître l’épopée d’avoir lu Virgile et Homère, comme ce n’est point assez, en fait de tragédie, d’avoir lu Sophocle et Euripide. […] Mais la contradiction n’est qu’apparente, et pour la concilier, il suffit d’une distinction. […] Il me suffit qu’elle y soit, qu’elle ne pût pas manquer de frapper les esprits, et qu’elle fût d’ailleurs féconde en applications ultérieures. […] Pour le moment, il suffit que vous sachiez, dans la critique et dans l’histoire, l’importance de cette notion ; et il suffit, si sans doute Augustin Thierry ne l’a pas débrouillée, ni surtout aperçue le premier il suffit que le premier du moins il en ait fait l’application en grand, pour ainsi dire, à l’un des grands événements de l’histoire moderne ; qu’il l’ait poursuivie, cette application, jusque dans le dernier détail, pendant quatre volumes ; et qu’enfin, par son exemple, il en ait montré la fécondité.
Un seul, l’art plastique, a suffi pour tous. […] Il leur a suffi, pour cette fin, de faire renaître les sensations visuelles. […] Et la musique des sons ne suffirait-elle pas à traduire toute l’émotion ? Elle n’y suffirait nullement. […] Son « double », apparemment, ne lui suffisait pas comme reproduction de sa figure mortelle !
Il suffit qu’un tyran y pense dans sa fête. […] Non certainement ; et tous les traits que je viens d’assembler suffiraient à m’en empêcher si j’en avais pu concevoir le dessein. […] C’est ce qu’une seule citation suffira pour montrer. […] Elles ne l’ont pas d’ailleurs que l’homme se suffise à lui-même, ni surtout l’institution sociale à sa propre durée. […] c’est Voltaire qui le prétend, et nous ne sommes pas tenus de l’en croire ; mais il suffit ici que ce fût une « autre » philosophie.
Aussi lui demanda t-il davantage : la foi ne lui suffit plus, il tomba dans la superstition. […] Il s’est proclamé savant, et cela lui a suffi. […] Les autres n’en ont pas besoin : l’espace leur suffit, ils s’y meuvent à l’aise. […] Dumas ont l’air d’y penser tellement, que cela seul suffit à les ternir. […] A ses yeux, ce sont là des mérites insignifiants ou négatifs, qui ne suffisent point à sauver les accusés.
Il suffit que ce soit la sienne. […] Il suffira qu’il sache dans quelle mesure et à quelles conditions il peut en profiter. […] Il y suffirait d’une occasion. […] Le crime passionnel se suffit à lui-même et trouve sa fin en lui. […] Il suffit que ce soient les « siennes ».
Mais n’y aurait-il au monde qu’un seul et unique thème, et que cela fût Daphnis et Chloé, il suffirait. […] Il nous suffira d’avoir à faire la critique du néronisme mental, plus clairement appelé le narcissisme. […] Quelques distractions violentes suffisent, aux jours de beau temps. […] Alors le pêle-mêle des langues prendra fin : une seule suffira. […] Or, il y a vingt ans la connaissance de l’anglais était absolument indispensable à Jersey ; aujourd’hui le français suffit.
Les hommes en jugent à leur façon, mais ma conscience me répond que le Ciel en juge autrement, et cela me suffit. […] Un petit-neveu de l’abbé Prevost avait démenti cette anecdote par une lettre adressée à la Décade philosophique (20 thermidor an XI) ; il lui avait suffi de rappeler que le père de l’abbé Prevost n’était mort qu’en 1739, c’est-à-dire à une date où son fils, âgé de quarante-deux ans, avait eu le temps de sortir du cloître et d’épuiser bien d’autres aventures. […] Il suffirait, pour combattre le mauvais effet des paroles de Collé, et pour prouver que Prevost resta digne jusqu’à la fin de la société des honnêtes gens, d’opposer le témoignage de Jean-Jacques, qui, dans ses Confessions (partie II, livre VIII), parle de l’abbé qu’il avait beaucoup vu, comme d’un homme très-aimable, très-simple ; Jean-Jacques seulement ajoute qu’on ne retrouvait pas dans sa conversation le coloris de ses ouvrages.
En effet, quand l’amour-propre est arrivé à un certain excès, il se suffit assez à lui-même pour ne pas s’inquiéter, pour ne pas douter de l’opinion des autres ; c’est presque une ressource qu’on trouve en soi, et cette crédulité dans son propre mérite a bien quelques-uns des avantages de tous les cultes, fondés sur une ferme croyance. […] Mais c’est dans la marche intérieure de la révolution, qu’on peut observer l’empire de la vanité, du désir des applaudissements éphémères, du besoin de faire effet, de cette passion native de France, et dont les étrangers, comparativement à nous, n’ont qu’une idée très imparfaite. — Un grand nombre d’opinions ont été dictées par l’envie de surpasser l’orateur précédent, et de se faire applaudir après lui ; l’introduction des spectateurs dans la salle des délibérations a suffi seule pour changer la direction des affaires en France. […] C’est une importante question qu’il faut soumettre aux philosophes et aux publicistes, de savoir si la vanité sert ou nuit au maintien de la liberté dans une grande nation ; elle met d’abord certainement un véritable obstacle à l’établissement d’un gouvernement nouveau ; il suffit qu’une constitution ait été faite par tels hommes, pour que tels autres ne veuillent pas l’adopter ; il faut, comme après la session de l’assemblée constituante, éloigner les fondateurs pour faire adopter les institutions, et cependant les institutions périssent, si elles ne sont pas défendues par leurs auteurs.
Nous rechercherons ensuite l’origine et les inventeurs de cette pratique, damnable ou recommandable ; quelques mots suffiront pour contenter ou orienter les curiosités sur ce second problème, après tout secondaire. […] À plus forte raison, quand il s’agit de textes littéraires, tout gonflés de substance et riches de nuances, où les intentions se croisent et se superposent, et dont les possibilités de signification ne sont en quelque sorte limitées que par la capacité des esprits qui s’y appliquent, il ne suffît pas, pour les bien lire, d’avoir appris à lire à l’école. […] Si la culture des Universités ou des Collèges prépare l’homme à la vie dans son milieu et dans son temps, il ne suffit pas de connaître la valeur historique des textes ; il faut en rechercher la valeur présente.
J’ai bataillé souvent moi-même sur ce sujet avec un ami chroniqueur d’art : il est circonspect avec son plaisir comme ces enfants peureux de casser leurs joujoux en en cherchant les rouages : mais il suffit de notions de mécanique pour les démonter sans danger. […] Il suffit de s’intéresser à la qualité des esprits plus qu’à leur espèce. […] Le père Thierry me conseillait l’indulgence systématique, non par habileté, mais par équité. « Vous serez tout de même complaisant pour vos amis : la justice veut donc que vous le soyez pour tous. » Il suffit, pensai-je, d’être juste même pour les compagnons.
Il a dévoré dans ses ambitions solitaires plusieurs destinées dont une seule suffirait à remplir sa vie ; il a vécu des siècles dans sa mémoire, et il n’est encore qu’au seuil de ses années. […] Une fois engagé dans la voie préférée, l’emploi légitime de ses forces suffirait à l’occuper. […] Si Adolphe cédait naïvement au besoin d’aimer, il ne marquerait pas si haut le but de ses espérances ; il choisirait près de lui un cœur du même âge que le sien, un cœur épargné des passions, où son image pût se réfléchir à toute heure sans avoir à craindre une image rivale ; il comprendrait de lui-même, il devinerait cette vérité douloureuse, et qui n’est jamais impunément méconnue, c’est que l’avenir ne suffit pas à l’amour, et que le cœur le plus indulgent ne peut se défendre d’une jalousie acharnée contre le passé ; il ne s’exposerait pas à essuyer sur les lèvres de sa maîtresse les baisers d’une autre bouche ; il tremblerait de lire dans ses yeux une pensée qui retournerait en arrière et qui s’adresserait à un absent.
L’avarice, que les synoptiques donnent pour motif au crime dont il s’agit, ne suffit pas pour l’expliquer. […] Cela ne suffit pas encore. […] Un léger dépit suffisait pour faire d’un sectaire un traître.
La rime ne fait que localiser à la fin du vers l’assonance et, par la consonne d’appui, l’allitération ; mais cette localisation obligatoire ne suffit pas plus à faire de bons vers que l’obéissance aux lois, décrets et règlements, ne suffit à faire un honnête homme. […] Il est étrange de penser que ce qui est le Tout ne puisse point se suffire. […] Mais maintenant l’univers ne peut se suffire. […] Cette méditation sur son existence, cette pensée qui se prend elle-même pour objet poétique, elle suffit à Valéry. […] Il suffirait même d’intervertir dans le premier vers de Valéry le sujet et le complément de brûler pour obtenir un vers tout racinien.
L’esprit humain les a en quelque sorte éprouvées pendant de longs siècles, puisque d’Aristote à Galilée c’est le Péripatétisme seul qui lui a suffi. […] Les affections mêmes de la famille, qui suffiraient à la commencer, ne suffiraient point à la maintenir. […] Il n’y a donc point à rétablir un équilibre qui n’est pas rompu, comme on se plaît à le répéter ; et il ne faut pas que la vertu, si elle veut rester pure, pense trop à un salaire dont la préoccupation suffirait à la flétrir. […] Elle suffit à expliquer et à conduire l’homme. […] Il suffira d’en prendre quelques-uns, Platon, Aristote et Kant.
Mais l’insuffisance extrême des documents géologiques suffit, je crois, à la résoudre. […] À l’égard des débris de Mammifères, un seul coup d’œil jeté sur la table historique publiée dans le Supplément du Manuel de Lyell, suffit à prouver, beaucoup mieux que de longues pages de détail, combien leur conservation est rare, et dépendante des circonstances locales. […] Ces intervalles n’ont-ils pas dû suffire à la multiplication des espèces sorties d’une ou de plusieurs souches mères, espèces qui apparaîtront tout d’un coup comme un groupe soudainement créé ? […] Mais, pour répondre à cette objection, il suffit de citer les Manchots de la mer du Sud qui ont justement les membres antérieurs dans cet état intermédiaire, où ils ne sont « ni de véritables bras, ni de véritables ailes. » Cependant ces oiseaux maintiennent victorieusement leur place dans la bataille de la vie ; car ils existent en grand nombre et sous beaucoup de formes spécifiques diverses. […] Il est presque inutile de rappeler que nous connaissons à peine un poisson fossile provenant du sud de l’équateur ; et il suffit de parcourir la Paléontologie du professeur Pictet, pour voir qu’il y a plusieurs formations européennes dont nous ne connaissons qu’un très petit nombre d’espèces.
L’inspection des valvules veineuses n’a-t-elle pas suffi à Harvey pour lui indiquer dans quel sens se fait la circulation ? […] Il suffit, pour s’en rendre compte, de comparer le poids de cette glande chez le cheval et chez le chien. […] Il suffit de citer ces expériences avec quelques détails, pour montrer le peu de valeur des résultats qu’on en déduit. […] Il suffira de citer les faits, leurs résultats parleront d’eux-mêmes, sans qu’il soit besoin d’aucun commentaire. […] Cette faculté existe aussi dans le sérum du sang, et le contact de l’amidon avec une muqueuse quelconque suffit pour la déterminer.
Si le sang est frais, il suffira même d’y ajouter une fois ou deux son poids d’eau acidulée avec un peu d’acide acétique, et de filtrer pour obtenir un liquide limpide et incolore. […] Il vous suffira, pour juger de la généralité de la fonction glycogénique dans le règne animal, de jeter les yeux sur la liste suivante, que j’ai fait écrire sur le tableau. […] Le charbon animal suffit toujours ; seulement il faut l’ajouter en très grande proportion. […] Cette expérience suffirait à elle seule pour faire admettre, comme conclusion naturelle et nécessaire des faits, que le sucre se produit dans le foie. […] Le goût sucré d’ailleurs d’un foie provenant d’un animal sain ou malade suffit pour établir une différence dans sa composition sucrée.
Il suffit que l’on voie ce qu’elles ont voulu faire. […] Et, en effet, il nous suffirait d’avoir pu mettre ici le plus important en lumière. […] Nous ne leur demandons pas d’être très grands, il nous suffit qu’ils soient originaux. […] La clarté suffit-elle ? […] Un seul pourtant eût pu suffire, mais il eût fallu savoir en tirer ce qu’il contenait.
Royer-Collard parlait magnifiquement et avec admiration comme de la plus haute à laquelle il eût assiste, que des débris et des lambeaux épais, incomplètement recueillis ; ils suffisent à donner une idée et surtout un regret de ce noble orateur qui s’égara vers la fin et se dévora. […] Un jour, non pas en 1815, mais depuis, sur une question assez peu importante, il monta à la tribune, et débuta ainsi tout à coup : « Que ne suis-je né dans un pays où il suffit de dire : La loi le défend ! […] Un jour, le grand capitaine Spinola demandait à lord Herbert qui dînait à sa table, de quoi était mort sir Francis Vere (un officier anglais de distinction). — « De ce qu’il n’avait plus rien à faire », répondit lord Herbert. — « Cela suffit pour tuer un général », ajouta Spinola. Cette inaction et ce pied de paix forcée auquel il était réduit, avait suffi de même pour tuer cet autre combattant et cet athlète des luttes oratoires brûlantes, M. de Serre.
Établissez après cela des lois générales, et venez trancher sur des questions qu’il eût suffi d’une découverte imprévue et inespérée pour résoudre en sens contraire ! […] Il s’adresse avec un regard de satisfaction à l’objet insensible de ses feux, mais dont il se voit vengé, car il a suffi d’une ou de deux saisons pour lui ôter sa grâce première : « Tu te souviens sans doute, tu te souviens que je t’ai dit cette parole sacrée : La jeunesse est la plus belle chose, et la jeunesse est aussi la plus fugitive ; le plus rapide des oiseaux dans l’air ne vole pas plus vite que la jeunesse. […] Une autre fois, c’est un simple portefaix, l’honnête Miccalion, qui fait son offrande aux dieux : « Cette statue, ô Passant, est une consécration du portefaix Miccalion ; mais elle n’a pas échappé à Mercure, la piété du portefaix qui, dans son pauvre métier, a trouvé moyen de lui faire une offrande : toujours et partout l’homme de bien est homme de bien. » Mais la fleur des épigrammes de Léonidas en faveur du pauvre monde me paraît être l’épitaphe qu’il composa pour la bonne ouvrière Platthis, morte à quatre-vingts ans : « Soir et matin, la vieille Platthis a bien souvent repoussé le sommeil pour combattre la pauvreté ; elle a chanté aussi sa petite chanson à la quenouille et au fuseau, son compagnon d’ouvrage, jusqu’au terme de la blanche vieillesse ; se tenant à son métier jusqu’à l’aurore, elle parcourait avec les Grâces le stade de Minerve, dévidant d’une main tremblante, autour de son genou tremblant, l’écheveau qui devait suffire à la trame, l’aimable vieille ! […] C’est un vieillard qui se contente de peu, à qui suffit du sel, deux pains d’orge, et qui vit sans se plaindre, comme ont vécu ses pères.
Les amoureux sont aisément crédules ; elle est tentée de voir là-dedans un signe et une intention de la Providence : « Je ne veux point pénétrer les desseins du Ciel, je ne me permettrai pas de former de coupables vœux ; mais je le remercie d’avoir substitué mes chaînes présentes à celles que je portais auparavant, et ce changement me paraît un commencement de faveur. » Elle est extrêmement attendrie ce jour-là (7 juillet) ; les épanchements de la journée ne lui ont pas suffi ; elle s’y remet dans la soirée encore ; son âme déborde ; elle laisse échapper l’hymne intérieur comme dans un couplet mélodieux ; elle a beaucoup lu Thompson, elle l’imite ; elle a de sa prosodie scandée, elle a de la simplicité avec pompe : « Douce occupation, communication touchante du cœur et de la pensée, abandon charmant, libre expression des sentiments inaltérables et de l’idée fugitive, remplissez mes heures solitaires ! […] Il eût suffi, en cet endroit, d’un goût littéraire plus sévère et plus vrai pour empêcher Mme Roland de se laisser aller à une phrase, à une simple inadvertance déclamatoire, qui ressemble à un manque de tact moral. […] Ce qu’il y a à dire de mieux de lui comme ministre, c’est qu’on pouvait lui reprocher « le pédantisme de toutes les vertus qu’il avait. » Ces deux mots de Daunou suffisent à son épitaphe. […] Il suffit qu’il n’y ait eu qu’une voix alors sur la noble attitude de la victime et que sa générosité rayonnante ait éclaté à tous les yeux.
Elle fut coiffée à la française, on lui mit du rouge, comme si le rose de ses joues fraîches ne suffisait pas. […] Si longtemps immobile près du dauphin, si mobile depuis chez le roi, dans les courses, les chasses, les secousses de voitures rapides, elle avait pu être blessée… » Suffit-il donc qu’une femme soit princesse pour qu’on se croie autorisé à parler d’elle en des termes aussi peu congrus et que rien d’ailleurs ne justifie ? […] En ce qui est de la bataille de Raucoux livrée l’année précédente, à ceux qui trouveraient que le maréchal ne l’a pas assez complètement gagnée, il suffit d’opposer le compte rendu qu’il en a fait dans une lettre au roi de Prusse, si bon juge (lettre du 14 octobre 1746, dans le Recueil de Grimoard, tome III, page 242). — Les officiers qui ne voient qu’un point de l’action peuvent trouver à dire (ainsi Rochambeau, en ses Mémoires, tome I, page 48) ; mais le général en chef qui embrasse l’ensemble est obligé de tenir compte de tout et de régler, s’il le faut, les ardeurs de l’un sur les retards de l’autre. […] Gêner un cœur, ce n’est pas ma façon… Et quant à ces grands mots de « la dignité de son art » et de « l’honneur de son nom », appliqués à une agréable actrice (car j’ai décidément sur le cœur toute cette morale à côté dont on nous inonde), j’ajouterai encore qu’il suffît de lire le Manuscrit trouvé à la Bastille, et dans ce Manuscrit certaine page 28, en ayant soin d’y rectifier une coquille typographique, pour s’assurer que les relations entre le maréchal et l’aimable Chantilly n’étaient pas guindées, il s’en faut de beaucoup, sur un si haut ton.
En accueillant ces images qui étaient de mise à cette date dans les genres réputés nobles et que paraissait réclamer en particulier la dignité de l’histoire, Jomini ne faisait que suivre le courant public et les exemples d’alentour : il eût fallu de sa part un grand effort d’artiste pour atteindre, en 1820, à la simplicité d’Augustin Thierry ; il lui suffisait, quand il tâchait, d’écrire comme Lacretelle. […] Quoiqu’il n’y eût pas mis son nom, il ne défendait pas qu’on le devinât ; et comment ne pas le deviner tout d’abord quand il disait : « A les en croire, il suffirait désormais des caprices du Conseil aulique de Vienne ou du comité militaire de Paris pour qu’un injuste agresseur décidât de l’existence d’une nation de deux millions de braves, qui peut mettre plus de soldats sur pied que Frédéric le Grand n’en avait en montant sur le trône de Prusse. […] Il pouvait d’ailleurs faire faire de temps en temps à l’illustre mort quelques concessions et des aveux de fautes, lui prêter un peu de la sérénité élyséenne et de l’impartialité d’au-delà du Styx ; et enfin il suffisait de quelques petites notes jetées çà et là au bas des pages pour remettre les choses au vrai point. […] Dans sa charmante retraite de Passy, il était intéressant à visiter : il aimait la conversation, et bien qu’un cornet acoustique fût nécessaire, il suffisait d’y jeter quelques mots pour amener sur ses lèvres des récits vivants et où l’âge ne se faisait sentir que par plus d’à-propos et d’expérience.