Le poète qui, jusque-là, n’avait chanté que l’amour, l’amitié, tous ses sentiments personnels, et qui forçait son génie à tenir archaïquement dans des vers que par le contour, la grâce et la perfection grecque, on pouvait croire du pays de sa mère, devint un prosateur à la phrase carrée du xviie siècle, balancée dans le mouvement, continu et contenu, de l’orateur. […] Au xixe siècle, Chateaubriand, Lamennais, Bonald et Louis Veuillot, qu’il faut nommer après eux, eurent du christianisme dans leur génie, et le Christianisme tient tant de place dans les choses humaines qu’il est impossible à des hommes qui se mêlent aux choses de ce monde de s’en passer sans se diminuer, quand ils sont les combattants de tous les jours dans la bataille des idées, en attendant celle des hommes ! […] Elle vibre dans tous les esprits, depuis qu’elle a été pour la première fois entendue, cette poésie faite de colère, d’ironie, de mépris et de tout ce qui peut tenir de passions, d’imprécations et de toute-puissance dans cet infini d’une âme d’homme !
Que si on tient absolument à fourrer de la couleur locale partout, comme les femmes fourrent des épingles, je dirai qu’il peut y avoir de la neige dans les œuvres de ce Suédois, mais que je n’y ai jamais vu briller les arcs-en-ciel qui parfois étincellent, comme une pluie d’escarboucles, sur les glaçons de son pays. […] Matter, ou du moins ce dont il n’a tenu nul compte. […] » Prosaïsme bouffon, qui prouve, du reste, que le naturaliste et le médecin tenaient, en Swedenborg, plus de place que le poète… qui n’y fut jamais !
Mais le bonheur de Goethe tient surtout à l’insensibilité de son âme, tandis que sous la croix pectorale de Bossuet il y avait un cœur qui pouvait être déchiré… Cette incroyable félicité de Bossuet commença pour lui avec la vie. […] Bossuet, reconnu sans conteste pour le plus grand écrivain et le plus grand orateur du grand siècle Bossuet, l’Ézéchiel ou l’Isaïe de l’histoire, n’a, a-t-on dit, que les dons qui tiennent à la grandeur, à l’élévation, à la véhémence. […] Il ne s’est pas contenté de répondre par d’admirables citations à l’opinion qui rapetisse Bossuet en ne faisant tenir son talent d’orateur que dans les Oraisons funèbres (c’était l’opinion de cet ignorant et fat xviiie siècle, qui estimait aussi que tout Massillon était dans son Petit Carême) ; l’auteur des Études est allé plus loin.
Seulement, si le caractère sacerdotal, qui est pour nous le grand caractère de son livre, n’était pas tenu pour ce qu’il est par les têtes de linottes littéraires, elles seraient pourtant bien obligées, les charmantes cervelles ! […] Ôtez par hypothèse cette aide surnaturelle, mais évidente, d’un Dieu qui versait en son serviteur ce qui abrège tout en faisant voir tout, Vincent certainement ne suffira plus aux choses prodigieuses qu’il a accomplies, et ces choses, trop grandes ou trop nombreuses, déborderont de toutes parts, sans pouvoir y tenir, la coupe profonde des quatre-vingts ans qu’il vécut ! […] », tel est le conseil du sophiste caché sous la petite leçon du littérateur… Mais que l’abbé Maynard se tienne bien tranquille et n’écoute pas ces pointus dont nous ne voyons que trop la pointe, malgré leurs précautions pour la cacher.
Guizot, qui ne dit pas son dernier mot dans ce livre, car il n’y a pas de dernier mot pour cette loquacité, tenace et vivace ; Guizot, qui ne tient pas moins, dans ce livre, à faire solennellement la cène protestante et à chanter, non pas son cantique de saint Siméon, mais de Marot, en l’honneur du protestantisme, devait laisser là saint Louis et saint Vincent de Paul, qui n’ont que faire et qui détonnent un peu dans des litanies protestantes, et, s’il n’y a pas quatre grands hommes pour lui dans les rangs du protestantisme, se contenter fièrement de deux ! […] Voilà les raconteurs de la vie publique de Calvin, — de ce dur commissaire de police religieuse, dont je n’ai pas de mal à dire, car j’aime les commissaires de police, et qui tint Genève sous sa griffe pendant des années, mais dont l’action énergique, le croira-t-on jamais ? […] Audin, lui, pourrait se vanter d’avoir fait une Vie complète de Calvin, à laquelle tous les partisans de Calvin sont tenus maintenant de répondre.
Il pouvait tenir tout.. […] C’est là, en effet, qu’elle se tient pour ceux qui ne savent pas fièrement l’attendre dans la contemplation des choses divines et la conscience d’un talent qui devrait faire leur sécurité ! […] III À son originalité dans la conception de son livre qui tient à ses idées premières, aux assises mêmes de son esprit, et qu’il met audacieusement, pour la première fois, sous cette forme difficile du conte, pour les faire mieux briller sous cette forme vivante, comme on retourne et l’on fait jouer un diamant à la lumière du jour pour l’épuiser de tous ses feux, Ernest Hello ajoute aujourd’hui une originalité qui n’est plus celle de ses idées, mais de leur expression et de la vie spéciale qu’il sait leur donner, et il obtient ce résultat superbe que l’exécution de l’artiste vaut la conception du penseur !
Après de tels langages, voilà Rousselot tenu, impérieusement tenu d’avoir du génie. […] pour rouler, comme le vent roule une feuille, ce rêve qui tient en quatre mots, sans l’abandonner jamais et en le renouvelant toujours, le long d’un volume tout entier, une vigueur de projection et de propulsion peu communes.
Promettre est un et tenir est un autre ! […] Galt, dans son Histoire, ne nous a pas donné un détail que nous ne tenions de lord Byron lui-même, et s’il y a des vides dans ses Mémoires qui embrassent la haute société de l’Angleterre contemporaine du poète, c’est le lâche Moore, épouvanté par les noms propres, c’est le lâche Moore qui les a faits ! […] J’ai tenu à signaler ce léger détail de nos mœurs littéraires plus encore qu’à parler au long de la littérature d’Alfred de Musset, qui d’ailleurs n’a pas besoin de moi.
une Corinne dont les cheveux ne tiennent plus et s’affaissent, et dont le voile, moins drapé que celui qui flotte aux vents du cap Misène, a été déchiré par les mains convulsives qui le ramènent sur un visage brûlant de pleurs. […] Quel que soit, en effet, son talent, que nous mesurerons tout à l’heure, on est fondé à établir la supériorité absolue sur toutes les espèces de poésies, de celle-là dans laquelle l’âme tient tant de place qu’elle semble déborder les mots ! […] Dieu tient dans sa main les clefs qu’on croit perdues De tous les secrètes lui seul sait la valeur.
Tenez ! […] Dont les éternités tiennent dans des nacelles. […] Talent spontané, trop vrai et trop fort pour ne pas échapper à l’espèce d’endiguement où il ne peut pas tenir et où il étouffe, de temps en temps il passe sublimement par-dessus.
Charrière, qui a pour Gogol les bontés d’un homme d’esprit pour la personne qu’il a pris la peine de traduire, n’hésite pas à mettre les Ames mortes à côté de Gil Blas, et, si cela lui fait bien plaisir, nous ne dérangerons rien à cet arrangement de traducteur, car la réputation de Gil Blas, — ce livre écrit au café entre deux parties de dominos, — a dit le plus fin et le plus indulgent des connaisseurs, — n’est pas une de ces gloires solides qui aient tenu contre le temps. […] Il n’a point de personnalité, comme son pays, du reste, qui les a toutes, et qui, pour cela, n’en a aucune, aucune dont on soit fondé à dire : Tenez ! […] Il n’a pas la sincérité du talent, mais tout se tiendrait-il ?
Les sciences exactes accompagnent quelquefois, mais ne supposent pas toujours ces arts brillants qui tiennent à l’imagination et au génie. […] Son amour pour la gloire était plutôt une coquetterie inquiète, qui tenait à l’esprit, qu’un de ces sentiments profonds qui subjuguent l’âme et la remplissent : aussi obtint-elle plus de célébrité que de gloire. […] Leurs ouvrages seront une espèce de production équivoque, qui ne tiendra à rien, ne peindra rien, et restera à jamais sans caractère et sans couleur.
Toutes les comédies de Molière dédaignent la finesse qui tiendrait à des faits : la comédie pour lui est tout entière dans l’observation. […] Puisque j’ai prononcé ce mot de « dévots », je tiens à le définir. […] Bien tenir son ménage, coudre et filer. […] On a dit de Molière que son seul livre bien médité, bien lu, bien considéré, pouvait tenir lieu d’expérience. […] Et ne devrait-elle pas se tenir pour satisfaite !
Il n’était pas très-riche, et une jolie pièce (insérée dans les Débats et le Siècle de dimanche dernier) apprend qu’il avait été obligé de vendre une campagne appelée la Madeleine, à laquelle il tenait. […] L'inconvénient de ces sortes de travaux est de trop abonder dans un sens et de voir partout des ressemblances et des influences au lieu de s’en tenir aux seuls courants généraux, les seuls après tout qui agissent un peu grandement.
Durant plusieurs générations, les seigneurs de Mauréac, du Parlement de Bretagne, ont occupé une des quatre charges de présidents aux enquêtes, presque toujours « ordonnés pour tenir la Tournelle », — honneur redoutable que justifiaient d’ailleurs des travaux successifs sur les édits criminels, par suite une connaissance héréditaire des âmes scélérates et une pratique familiale de la question « selon l’usage de Rennes », c’est-à-dire de la torture par brûlement des pieds et des jambes. […] Je tiens donc son livre pour excellent.
Je vous dirai le fait tel que je le tiens de madame de Noailles. […] Jusqu’ici il a tenu parole.
« Toutefois, il avait soixante-trois manières d’en trouver tousjours à son besoin, dont la plus honorable et la plus commune étoit par façon de larrecin furtivement faict ; malfaisant, pipeur, buveur, batteur de pavez, ribleur s’il en étoit à Paris ; au demeurant le meilleur fils du monde et toujours machinoit quelque chose contre les sergeants et contre le guet. » Et après ce portrait sommaire, viennent à la débandade, les mille aventures drolatiques où ce véritable héros de Rabelais se dessine à gros traits, menant à Paris le train bouffon de l’écolier de l’époque, puis partant pour les pays de la fable contre le roi des Dipsodes, puis s’embarrassant dans cette épineuse question du mariage, et parcourant pour s’amuser dans son dessein tout l’archipel d’îles peuplées à souhait des innombrables êtres allégoriques dont Rabelais tenait à rire ; en somme la plus durable et la plus humaine des caricatures énormes qui s’étalent dans le bréviaire des « beuveurs très illustres et et vérolez très prétieux ». […] On s’était un peu ému dans une lutte sans grandes défaites ; on s’en va à ses affaires, sans plus tenir à ses négations, que le voisin à ses affirmations.
Avant que de se lever, Honneur harangue la compagnie, & dit aux convives : De paix devriez être bons amateurs, Vivre en amour comme frêres & filz De Minerve, disant de Discord, sy ; Et vous tenir d’Apollo le begnin Vrays zélateurs, déchassant tout venin. […] Jodelle lui fit cette épitaphe : Quercy, la cour, le Piémont, l’univers Me fit, me tint, m’enterra, me connut ; Quercy mon los, la cour tout mon temps eut, Piémont mes os, & l’univers mes vers.
Le professeur de morale eut dû s’en tenir à son métier, & déclarer simplement la lecture de cet ouvrage, dangereuse. […] Pour avoir été réfuté vivement, il ne se tint pas battu.