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691. (1889) La littérature de Tout à l’heure pp. -383

Théodore de Banville, ce n’est pas la qualité de sa pensée : c’est son style. […] En d’autres termes, ils ont, autant que possible, essayé d’abolir le Style lui-même. […] Elles sont encore vraies, pourtant : « Le style, c’est l’homme », et l’homme, c’est surtout son âme. […] Comme ils avaient décrété que l’homme n’a point d’âme, les Naturalistes tâchèrent de n’avoir point de style, en écriture, et toutefois gardèrent le contradictoire projet d’exprimer, dans cette écriture sans style, le style de la vie ! […] Renan, le style, riche sans faste, flotte autour de la pensée, nette ensemble et retorte.

692. (1882) Études critiques sur l’histoire de la littérature française. Deuxième série pp. 1-334

Le style, dit Buffon, c’est l’homme, et quelquefois c’est possible ; mais quelquefois aussi ne serait-ce pas le contraire de l’homme ? […] Pareillement, le style coupé, c’est quelquefois l’impuissance même de lier le style. […] C’est d’abord dans l’usage de ces expressions abstraites et de ces termes généraux qui sont un caractère manifeste et notable du style de Massillon. […] Qu’il ait eu maintement besoin d’un style nouveau, plus pénétrant, en quelque sorte, que le style classique de la comédie, pour analyser toutes les finesses, démêler tous les sophismes, et surprendre et fixer sous nos yeux tous les subterfuges du cœur féminin, quoi de plus naturel ? […] On peut écrire, comme Marivaux, dans un style dont les juges sévères diraient qu’il approche du galimatias, et cependant être naturel.

693. (1782) Essai sur les règnes de Claude et de Néron et sur la vie et les écrits de Sénèque pour servir d’introduction à la lecture de ce philosophe (1778-1782) « Essai, sur les règnes, de Claude et de Néron. Livre second » pp. 200-409

» ou en style moderne, de rois, de grands, de nobles, de roturiers, de paysans ? […] Ces grands effets exigent un style plein de chaleur et de force, tel que le sien. […] Le style de Sénèque est coupé, mais ses idées sont liées. […] A son avis, le style de Sénèque est corrompu : le sien n’a-t-il rien d’âpre et de barbare ? […] On en a trouvé le style haché, abrupt, incorrect ; et peut-être l’est-il.

694. (1894) Écrivains d’aujourd’hui

A ce point de vue, une étude des caractères propres au style de M.  […] La musique particulière à ce style est d’une sorte de plainte continue. […] Son style est plus précis qu’il n’est imagé. […] Un style qui se hâte, précipité, haletant. […] Il a le style d’un homme d’action.

695. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Mélanges de critique religieuse, par M. Edmond Scherer » pp. 53-66

Lamennais avait de bonne heure cultivé ce genre, il avait composé des hymnes Aux Morts, À la Pologne ; il avait terminé son livre Des maux de l’Église par un épilogue dans le même style. […] Son style est l’un des plus puissants et des plus magnifiques de la langue française. Ce style n’est point inférieur en ressources à celui de Chateaubriand, et il tend moins au pur effet littéraire.

696. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « L’abbé Prevost et les bénédictins. »

On pourroit faire revivre les Provinciales : il est injuste que les Jésuites en fournissent toujours la matière, et vous jugeriez si je réussis dans ce style-là. […] Ce Français de Berlin, qui visita en 1733 Paris et Londres, rencontra dans cette dernière ville Prévost, et avec son style plat il le peint sous des traits assez fidèles : « Je trouvai ce même jour, dit-il, M.  […] Tout le monde connoît les agréments de son style.

697. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre VIII. Jésus à Capharnahum. »

Les Juifs, n’ayant pas d’architecture propre, n’ont jamais tenu à donner à ces édifices un style original. […] Elles sont toutes construites en grands et bons matériaux ; mais leur style est assez mesquin par suite de cette profusion d’ornements végétaux, de rinceaux, de torsades, qui caractérise les monuments juifs 384. […] Elle est d’un style assez pur.

698. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre premier : M. Laromiguière »

Il raillait les métaphysiciens amateurs de métaphores, pour qui « l’entendement est le miroir qui réfléchit les idées », et qui définissent la volonté « une force aveugle guidée par l’entendement, éclairée par l’intelligence. » Mais au même instant il joignait l’exemple au précepte, et disait dans ce style choisi dont ses maîtres lui avaient donné le modèle : L’homme est porté à tout animer, à tout personnifier, à mettre quelque chose d’humain jusque dans les objets qui ont le moins de rapport à sa nature. […] Ces ornements employés avec tant de mesure et placés avec tant de goût ne sont point le principal charme de son style. […] Les grands auteurs font cercle autour de sa chaire ; il en descend le plus souvent qu’il peut et leur cède la parole ; il prétend qu’ils sont les meilleurs maîtres d’idéologie, et que leur style est toute une logique.

699. (1902) Le critique mort jeune

On pressent que le style coloré n’est pas son affaire. Mais le style languissant l’est encore moins. […] Le « grand art » protestera ; mais c’est un bon modèle de style utilitaire. […] Mais la lutte des avoués, animés par la chicane, est du meilleur style héroï-comique, le style, presque, du Lutrin. […] Il n’est pas jusqu’aux tics du style qui ne se retrouvent inchangés.

700. (1888) Journal des Goncourt. Tome III (1866-1870) « Année 1868 » pp. 185-249

Et il continue dans ce style, dans ce style, le portrait du mortel courageux allant à son travail, etc., etc., et le revêt de l’immortalité, que lui décernent les déesses, à la dernière ligne et au dernier mot de sa péroraison. […] Mais laissons là les grâces pendule-Empire de son style. […] … Voyez-vous, quand même le 3e acte nous reviendrait de la censure, il faudrait que cela se passât dans la rue… Des passants, du peuple, vous voyez ça… Et pas un endroit fermé… C’est très remarquable… du style, oh ! du style ! […] il possède l’épithète du grand écrivain et la vie du style ; il a fait deux ou trois chefs-d’œuvre d’articles.

701. (1857) Cours familier de littérature. III « XVIIe entretien. Littérature italienne. Dante. » pp. 329-408

Il s’était formé, de ses débris mêlés aux dialectes vulgaires des provinces romaines et de la Gaule méridionale, une langue usuelle, imparfaite, flottante, diverse, par laquelle on s’entendait tant bien que mal dans la conversation, mais sans pouvoir y graver ses pensées dans cette forme solide, convenue et uniforme, seule langue avec laquelle on puisse construire des monuments de style. […] « Mais le style dans lequel le Dante a écrit cette gazette de l’autre monde est impérissable. Réduisons donc ce poème bizarre à sa vraie valeur, le style. […] Fiorentino s’est naturalisé Français par la pureté de son style dans notre langue. […] XXIII M. de Lamennais, c’est-à-dire un souverain ouvrier de style, a consacré ses dernières années à une traduction littérale et mot à mot de la Divine Comédie.

702. (1864) Le roman contemporain

J’ai peur d’avoir deviné son secret dans cette phrase, où la flatterie boite d’une jambe et où le style boite des deux. […] Si le style qui, chez M.  […] Il construit, démolit, reconstruit, termine en style ogival ce qu’il avait commencé en style roman, transforme une chapelle en cabaret, un palais en bouge. […] Dumas fils ne manque ni d’entrain, ni d’un certain talent dans le récit, et son style a de la couleur. […] Son style a du nombre, de la précision, de la justesse, de l’harmonie, et, quand la matière y prête, il est savamment ciselé.

703. (1913) Les livres du Temps. Première série pp. -406

Son style est éloquent, fastueux, très imagé. […] Un style pantouflard, dit Wilde. […] Elle se sert, ainsi que Jeanne elle-même et qu’Hauviette, du style propre à M.  […] C’est un style bergsonien. […] Par la forme, par le style.

704. (1920) Essais de psychologie contemporaine. Tome I

L’imagination d’un écrivain se manifeste plus particulièrement par son style. […] Ce style est d’une qualité unique aujourd’hui, et très rare dans toute l’histoire de notre littérature. […] je les aurai connues », soupire-t-il, « les affres du style. […] Taine comprend le plus vivement, et quels styles il goûte avec la plus visible sympathie. […] Les sentiments ne furent point partagés, et le style ne fut point goûté.

705. (1906) La rêverie esthétique. Essai sur la psychologie du poète

Son style, qui nous semblera figuré à outrance, ne fera que rendre strictement l’allure normale de sa pensée. […] De là d’ordinaire la grâce et l’aisance de son style. […] C’est même chez eux que l’on retrouverait la suprême aisance de style. […] Rivarol a donné de forts arguments en faveur du style direct, utilitaire. […] Le style de H.

706. (1889) Histoire de la littérature française. Tome II (16e éd.) « Chapitre sixième »

Qu’est-ce qu’un style chargé de tropes et d’images ? Un visage enflé et coloré, comme celui des anges qui sonnent de la trompette, ou des quatre vents qui soufflent aux quatre coins des cartes géographiques. » Il n’épargnait pas les épigrammes aux poètes à la mode, qu’avait portés, disait-il, vers le genre nouveau « un calcul qui leur a réussi ; car, dans le style ancien, ils n’eussent jamais été poètes, dans le nouveau ils le sont devenus du jour au lendemain. » Il appelle plaisamment le nouveau style cultidiablesco. […] Il n’y faut voir qu’une bouffonnerie sans invention, sans style, où manque même le gros sel pour tenir lieu d’esprit, et que, faute de termes entre le mauvais et le pire, on ne peut pas juger par comparaison. […] A la vérité, invention, genres, style, il veut que tout se subordonne à la raison. […] A défaut d’apologies écrites dans le style des Satires. ils publient contre Boileau des libelles diffamatoires, calomnient sa vie, sèment de faux bruits sur sa personne.

707. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Essai de critique naturelle, par M. Émile Deschanel. »

Le passage du style parlé au style écrit était réputé des plus délicats et des plus périlleux. […] Malgré ces heureux ravitaillements, il est bien clair qu’auprès de la plupart, en cette société moderne, l’école du style, soit académique, soit non académique, perd en crédit, en importance, qu’on l’apprécie moins et qu’on s’en passe ; qu’à voir tant de gens se jeter à l’eau d’abord et apprendre ensuite d’eux-mêmes à nager, on en estime moins les préceptes de la natation, et qu’un moment viendra où (je le répète), sans être pourtant insensible à un certain tour et à un certain éclat d’expression, on ira surtout aux faits, aux idées, aux notions que portera le bien dire ou le style.

708. (1902) L’œuvre de M. Paul Bourget et la manière de M. Anatole France

Mais au moins, après avoir senti que c’est principalement à son style que M.  […] Qu’arrive-t-il, dès lors, au style de M.  […] France offre à la sienne, il n’y a pas aussi loin que du style de M.  […] Non que ce dernier ait explicitement prétendu être plus qu’un dilettante ; mais, si sa pensée s’en flatte à son insu, il ne devient que plus malaisé de voir comment son style, qui est voué à l’art, seconde cette illusion.

709. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Chansons de Béranger. (Édition nouvelle.) » pp. 286-308

La Bacchante, pièce célèbre dans cette première manière, et qui vise déjà à l’ode, offre des défauts de style qui ne tiennent pas du tout au désordre de l’égarement ni à la flamme. Je passe les atours, reste de vieux style :  …… Pourquoi ces atours Entre tes baisers et mes charmes ? […] La conception, d’ordinaire, la composition de ces petits cadres, le motif est délicieux, poétique ; c’est l’expression, le style souvent qui s’étrangle ou qui fléchit. […] Et j’ajouterai, en passant, qu’il ne cesse à la rencontre de donner aussi des chiquenaudes à André Chénier, ce jeune maître si hors d’atteinte par le souffle et la largeur de l’inspiration et par le tissu du style.

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