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540. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre XVI. Les derniers temps de la comédie italienne en France » pp. 311-338

Mais quand tout vous rit, et que le monde est bien infatué de vos richesses, il faut prendre à toute main l’argent qu’on vous offre, faire grande dépense à l’ordinaire ; et puis un beau matin, après avoir mis tous vos meilleurs effets dans une cassette, déloger à petit bruit, et donner ordre à votre portier de dire à tout le monde qu’on ne sait où vous êtes allé. […] Il faut parler toujours sans rien dire pour sembler spirituelle ; rire sans sujet pour paraître enjouée ; se redresser à tout moment pour étaler sa gorge ; ouvrir les yeux pour les agrandir, se mordre les lèvres pour les rougir ; parler de la tête à l’un, de l’éventail à l’autre ; donner une louange à celle-ci, un lardon à celle-là ; enfin, badiner, gesticuler, minauder60. » L’arrivée du printemps, qui amène le départ des officiers, jette le désarroi dans le monde des promeneuses, et les force à se rabattre sur les robins et les petits collets fort peu demandés en hiver : Heureux les bourgeois de Paris, Quand le plumet court à la gloire !

541. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « La Religieuse de Toulouse, par M. Jules Janin. (2 vol. in-8º.) » pp. 103-120

Il s’est fait un style qui, dans ses bons jours et quand le soleil rit, est vif, gracieux, enlevé, fait de rien, comme ces étoffes de gaze, transparentes et légères, que les anciens appelaient de l’air tissé. […] Elles garderont, était-il dit, un juste tempérament, qui ne fasse pas rire les fous et qui ne contriste pas les sages, qui ne les fasse pas remarquer par la légèreté de la mode, ni par le ridicule d’un usage passé… Elles seront bien propres sans curiosité, nettes sans délicatesse, et bien mises sans afféterie.

542. (1874) Premiers lundis. Tome I « Mémoires sur Voltaire. et sur ses ouvrages, par Longchamp et Wagnière, ses secrétaires. »

Elles sont affligeantes, elles sont profondément immorales, ces sortes d’orgie d’un beau génie en délire ; et quand, dix années plus tard, aux approches d’une mort inévitablement prochaine, on voit éclater de point en point la contrepartie de ces scènes indécentes, quand un prêtre en habit court, introduit dans la chambre du moribond, l’obsède de ses dévotes violences, quand le même Wagnière caché, comme autrefois, derrière une porte, non plus pour rire d’un moine imbécile, mais pour sauver son maître d’un moine hypocrite, écoute tremblant, la main sur son couteau, et s’élance aux cris du vieillard, on tire d’un rapprochement si naturel et si terrible une condamnation plus sévère encore de ces jongleries philosophiques qui provoquent et semblent absoudre les persécutions religieuses.

543. (1874) Premiers lundis. Tome I « M. de Ségur. Mémoires, souvenirs et anecdotes. Tome II. »

Étant descendu de voiture à quelques lieues de Brest, pour gravir une montagne assez longue, je le vois tout à coup sauter, danser, chanter, et rire aux éclats. « Quelle est donc, Aza, lui dis-je, la cause de ces folies ? 

544. (1892) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Cinquième série « Le théâtre annamite »

Le rire innocent et cordial des bons nègres, les jaunes ne l’ont point.

545. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre premier. » pp. 5-11

Peut-être Molière, entraîné par cette sympathie si vive en lui, ne s’appliqua-t-il pas assez à discerner, dans les mœurs dont le public était disposé à rire, le vrai du faux, l’exagération d’avec le naturel noble et choisi, et les affectations hypocrites d’avec un juste éloignement pour l’impudence du vice.

546. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Clément Marot, et deux poëtes décriés, Sagon & La Huéterie. » pp. 105-113

On mange, on cause, on rit.

547. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Bathild Bouniol »

Pour une raison ou pour une autre : nature d’esprit, blessure au cœur, manque de bonté dans la vertu, tous les satiriques ont été cruels plus ou moins, soit dans leur rire, soit dans leur colère, soit dans leurs larmes ; or, pour la première fois, en voici un qui ne l’est pas, et dans les coups duquel on sent la pitié… Oui !

548. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XII. Des panégyriques ou éloges des princes vivants. »

Il faut avouer que cette espèce de maladie épidémique est bien honteuse pour l’esprit humain ; on serait tenté d’en rire, s’il n’était plus naturel encore de s’en indigner.

549. (1886) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Première série

Et il rit ! […] Malheur à ceux qui rient ! […] Ce rire, je l’ai déjà entendu dans l’Odyssée : c’est le rire involontaire et lugubre des prétendants qui vont mourir. […] Sa gloire lui rit dans tous les regards. […] Dès lors il n’est guère possible qu’on rie toujours.

550. (1893) Impressions de théâtre. Septième série

Pourquoi ces innocences ne nous feraient-elles pas encore rire ? […] Ces vaudevillistes sont terribles quand ils cessent de rire. […] Nous aurions pu ne pas rire. Mais nous avons ri. […] Mystère Elles nous ont fait rire : et c’est à cela que nous avons reconnu qu’elles étaient gaies.

551. (1891) Journal des Goncourt. Tome V (1872-1877) « Année 1875 » pp. 172-248

Je ne suis peut-être pas le premier littérateur russe en Russie, mais à Paris, comme il n’y en a pas d’autre, vous m’accorderez que c’est moi, eh bien, dans ces conditions, savez-vous comment j’ai été placé à table ; j’ai eu la quarante-septième place, j’ai été placé après le pope, et vous savez le mépris dont jouit le prêtre en Russie. » Et un petit rire slave remplit les yeux de Tourguéneff, en forme de conclusion. […] Aussitôt c’est un recueillement religieux, puis bientôt de petits rires bienveillants, des applaudissements caressants, des ah ! […] Dans cette boutique aux étrangetés, si joliment façonnées et toujours caressées de soleil, les heures passent rapides, à regarder, à manier, à retourner, ces choses d’un art agréable au toucher, et cela, au milieu du babil, des rires, des pouffements fous de la joviale créature. […] Il cause d’une manière bonhomme, charmante, s’amusant de ce qu’il raconte, et coupant quelquefois son récit d’un rire sonore, qui se répète deux fois dans sa bouche. […] ” L’on rit, et l’étymologie fut acceptée.

552. (1924) Critiques et romanciers

Scribe une occasion de se pavaner ou de rire. […] Ce tragédien qui fait rire ne serait-il pas un comédien ? […] … » Pas du tout : désormais, on ne rira plus de Tito Bassi le bouffon ! […] Mais, du capuchon fuse un rire clair ; et la foule éclate de rire. […] Chacune rit, pleure, parle.

553. (1903) Propos de théâtre. Première série

Elle « fait rire les honnêtes gens. » De qui ? […] rit-on à Tartuffe ? Y rit-on vraiment ?  […] On riait pour bien moins, à cette époque aussi bien qu’à la nôtre. […] Le roi rit, la cour éclata, toute la France devait suivre.

554. (1874) Premiers lundis. Tome I « M. Tissot. Poésies érotiques avec une traduction des Baisers de Jean Second. »

Mais bientôt de graves pensées survinrent ; aux fêtes des salons succédèrent les orages de la place publique, et les ris étincelants des amours s’éteignirent par degrés dans l’immense clameur populaire.

555. (1761) Salon de 1761 « Peinture —  Deshays  » pp. 134-138

Vous en rirez, mais qu’est-ce que cela fait ?

556. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Hallé » pp. 71-73

Une ligne d’exagération de plus, et vous auriez eu une assemblée de figures à Calot qui vous auroient fait tenir les côtés de rire.

557. (1882) Hommes et dieux. Études d’histoire et de littérature

Le peuple tend le dos et ne fait qu’en rire. […] Un bouffon vint ensuite, et ses contorsions firent éclater de gros rires. […] Ce rire sardonique est le symptôme des grandes crises : lorsque la vie se fait trop laide, l’homme n’y tient plus et la répudie ; Tant de catastrophes avaient ébranlé les nerfs de l’humanité. […] Puis elle va à la Reine, au Cardinal, à l’Évêque, au Prince de l’empire. — Quand il arrive à l’Abbé, le spectre devient bouffon, et un gros rire luthérien disloque sa mâchoire. […] Lorsqu’il gît à terre entre les fleurs flétries et les flambeaux éteints du bal terminé, le masque ne cesse ni de grimacer ni de rire.

558. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Quelques documents inédits sur André Chénier »

De là souvent un peuple qui aime à rire ne voit que diable et qu’enfer. » Il se réservait pourtant de grands et sombres tableaux à retracer : « Lorsqu’il sera question des sacrifices humains, ne pas oublier ce que partout on a appelé les jugements de Dieu, les fers rouges, l’eau bouillante, les combats particuliers. […] » Disant ces mots, il sort… Elle était interdite ; Son œil noir s’est mouillé d’une larme subite ; Nous l’avons consolée, et ses ris ingénus, Ses chansons, sa gaieté, sont bientôt revenus. […] On a quelquefois trouvé bien hardi ce vers du Mendiant : Le toit s’égaie et rit de mille odeurs divines ; il est traduit des Noces de Thétis et de Pélée : Queis permulsa domus jucundo risit odore.

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