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443. (1889) Essai sur les données immédiates de la conscience « Chapitre II. De la multiplicité des états de conscience. L’idée de durée »

Sans doute on comptera les moutons d’un troupeau et l’on dira qu’il y en a cinquante, bien qu’ils se distinguent les uns des autres et que le berger les reconnaisse sans peine ; mais c’est que l’on convient alors de négliger leurs différences individuelles pour ne tenir compte que de leur fonction commune. […] Mais cela ne revient-il pas à reconnaître que l’idée même du nombre deux, ou plus généralement d’un nombre quelconque, renferme celle d’une juxtaposition dans l’espace ? […] En interrogeant soigneusement la conscience, on reconnaîtra qu’elle procède ainsi toutes les fois qu’elle s’abstient de représenter la durée symboliquement. […] On définit donc la vitesse d’un mouvement uniforme sans faire appel à d’autres notions que celles d’espace et de simultanéité. — Reste le mouvement varié, celui dont les éléments AM, MN, NP, …, ont été reconnus inégaux entre eux. […] Ce n’est pas là illusion pure ; car si l’impression d’aujourd’hui était absolument identique à celle d’hier, quelle différence y aurait-il entre percevoir et reconnaître, entre apprendre et se souvenir ?

444. (1886) Le roman russe pp. -351

Pourquoi un maître là-haut, alors qu’on n’en reconnaissait plus ici-bas ? […] Ces petits deviennent hommes, et l’on reconnaît en eux les enfants de la tempête. […] Non, je le reconnais encore. […] Vieux cadres, portraits nouveaux, où la Russie va enfin reconnaître son esprit et sa physionomie. […] Nous reconnaîtrons cet homme, nous le reverrons partout.

445. (1913) Poètes et critiques

On s’émut, reconnaissons-le, et l’on s’indigna sur sa tombe. […] Bellessort a cru reconnaître chez les étudiants de l’Université d’Upsal. […] Plus d’un lecteur pourrait y reconnaître des qualités d’homme mûr. […] Bourget » — reconnaît-il — s’est peu à peu « dégagé de M.  […] Et l’on reconnaît là l’humeur plaisante, ironique et légère, qui est le trait distinctif de ce charmant esprit.

446. (1891) La bataille littéraire. Quatrième série (1887-1888) pp. 1-398

Le portrait, d’ailleurs, était au fond si peu ressemblant que beaucoup de gens s’y reconnurent, et que M.  […] Dallas le reconnaissait. […] Tous étaient en grande tenue, sans fusils ; — je reconnaissais les officiers […] On toucha aux îles ; on reconnut le phare de l’Enfant-Perdu ; on approcha de Cayenne. […] Ceux qui ont vu Baudelaire dans l’intimité reconnaissent qu’il a commencé par « poser ».

447. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Étienne de La Boétie. L’ami de Montaigne. » pp. 140-161

Il a laissé peu d’écrits, et ces écrits, productions de première jeunesse, ne représentent que très imparfaitement sa forme intime et définitive, et cette supériorité qu’il faut bien lui reconnaître, puisque Montaigne l’a si hautement saluée en lui. […] Oui, tous bientôt vont passer devant cette ruine, devant cette chapelle et cet autel détourné, devant ce site sauvage et mystérieux dont on savait presque seul les sentiers et dont on avait, l’un des premiers, reconnu le caractère. […] Lorsqu’on lit les réflexions et fragments de cet autre généreux écrivain enlevé comme lui dès le début, de Vauvenargues, et qu’on en pénètre l’esprit, l’inspiration secrète, on voit certes un homme de pensée, mais on reconnaît encore plus un homme de caractère et d’action qui a manqué sa destinée et qui en souffre. […] Les herbes ont chacune leur propriété, leur naturel et singularité ; mais toutefois le gel, le temps, le terroir, ou la main du jardinier y ajoutent ou diminuent beaucoup de leur vertu : la plante qu’on a vue en un endroit, on est ailleurs empêché de la reconnaître.

448. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Histoire du règne de Henri IV, par M. Poirson » pp. 210-230

Comment aurait-il pu de si loin se faire reconnaître des seigneurs catholiques, lui qui eut tant de peine de près à les enlever, et qui éprouva aussitôt de leur part tant de défections ? […] C’était bien le cas à un contemporain, témoin de ces hontes, de s’écrier avec douleur : Malheureux serez-vous, noblesse, Église, peuples, villes, qui vous trouverez parmi ces démembreurs, si leurs desseins succèdent ; vous ne serez plus de la France : qui sera Espagnol, qui tiendra de Lorraine, qui reconnaîtra la Savoie, qui sera du gouvernement du duc de Joyeuse, érigé en comté de Toulouse, qui de la république d’Orléans, qui du duché de Berry, qui des cantons de Picardie. […] Jamais homme qui lui ait dit une parole vraie ne s’en repentit, quoiqu’elle fût hardie, principalement s’il reconnaît qu’elle parle d’amour et d’affection. […] J’ai vu, un quart d’heure après les batailles gagnées, les ennemis tellement parmi nous qu’on ne les pouvait plus reconnaître.

449. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « La femme au XVIIIe siècle, par MM. Edmond et Jules de Goncourt. » pp. 2-30

Réellement, elle est changée en bien, à ne la pas reconnaître. […] Elle a beaucoup d’esprit et de gaieté ; elle est constante dans ses engagements, fidèle à ses amis, vraie, discrète, serviable, généreuse ; enfin, si elle était moins clairvoyante, ou si les hommes étaient moins ridicules, ils la trouveraient parfaite. » Ce qu’elle avait dit alors un peu par politesse et flatterie de société, elle fut obligée à la fin de le reconnaître exact et vrai dans la maréchale vieillie. […] Tous ceux qui ont parlé d’elle, les Ségur, les Lévis, le prince de Ligne, Mme de Genlis, sont unanimes à lui reconnaître cet empire absolu et sans appel sur tout ce qu’il y avait de distingué dans la jeunesse des deux sexes ; elle contenait les travers, tempérait l’anglomanie, l’excès de familiarité, la rudesse, ne passait rien à personne, ni une mauvaise expression, ni un tutoiement, ni un gros rire ; « la plus petite prétention, la plus légère affectation, un ton, un geste qui n’auraient pas été exactement naturels, étaient sentis et jugés par elle à la dernière rigueur ; la finesse de son esprit, la délicatesse de son goût ne lui laissaient rien échapper » ; attentive à ce qu’il ne passât aucun courant d’air de la mauvaise compagnie dans la bonne, elle retardait, pour tout dire, le règne des clubs et maintenait intacte l’urbanité française, à la veille du jour où tout allait se confondre et s’abîmer. […] Je dois dire pourtant que, dans la pensée de l’auteur, ce portrait de la maréchale d’Estouteville se rapportait bien plus en réalité à la maréchale de Beauvau ; il n’est pas défendu de croire que la maréchale de Luxembourg, qu’on crut généralement y reconnaître, y était pour quelques traits.

450. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « Le comte de Ségur »

Mais on est heureux lorsqu’à travers cette variété d’emplois et de talents on arrive de tous les côtés, on revient par tous les chemins au moraliste et à l’homme, à une physionomie distincte et vivante qu’on reconnaît d’abord et qui sourit. […] Les gentilshommes faisaient comme ces princes qui se donnent les agréments de l’incognito, certains d’être d’autant plus reconnus et honorés. […] Un jour, en avril 1822, M. de Ségur reçut une lettre timbrée de Montpellier dont voici quelques extraits : « Monsieur le comte, Souffrez qu’un inconnu vous rende un hommage qui doit au moins avoir cela de flatteur pour vous, que vous y reconnaîtrez, j’en suis sûr, le langage de la vérité. […] Je reconnus aisément avec vous que les maladies de l’âme, plus cruelles que celles du corps, nous ôtent toute tranquillité ; je ne l’éprouvais que trop.

451. (1886) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Deuxième série « Anatole France »

Si tel chef-d’oeuvre reconnu me choque, me blesse ou, ce qui est pis, ne me dit rien ; si, au contraire, tel livre d’aujourd’hui ou d’hier, qui n’est peut-être pas immortel, me remue jusqu’aux entrailles, me donne cette impression qu’il m’exprime tout entier et me révèle à moi-même plus intelligent que je ne pensais, irai-je me croire en faute et en prendre de l’inquiétude ? […] La petite femme, devenue princesse russe, reconnaît le bienfait du vieux savant en lui offrant un livre précieux dont il avait envie : et voilà la Bûche  Notre vieux savant s’intéresse à une orpheline dont il a aimé la mère, l’enlève de sa pension, où elle est malheureuse, la marie à un élève de l’École des chartes : et voilà le Crime de Sylvestre Bonnard. […] J’ajouterai, sans crainte de me tromper, qu’elle était fort belle et de mine fière, car mes études iconographiques m’ont habitué de longue date à reconnaître la pureté d’un type et le caractère d’une physionomie. […] Et, pour la reconnaître, elle la marqua, d’une croix avec son poinçon à broder.

452. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre II — Chapitre premier »

C’est là une de ces grâces où l’esprit français se reconnaît sans pouvoir les définir. […] Qui reconnaîtrait le beau passage, Os homini sublime dédit, etc., dans cette version Et neanmoins que tout aultre animal Jecte toujours son regard principal Encore bas, Dieu à l’homme a donné La face haulte, et luy a ordonné De regarder l’excellence des cieux, Et d’eslever aux estoiles ses yeux. […] Nous nous reconnaissons dans Marot à d’autres traits encore. […] Cependant, on ne lit pas longtemps Marot sans reconnaître la justesse de ce mot d’un contemporain célèbre41 : « L’esprit sert à tout, mais ne suffit à rien. » Cet esprit marotique tourne dans un cercle étroit.

453. (1889) Histoire de la littérature française. Tome III (16e éd.) « Chapitre douzième. »

C’est par ces traits communs à l’espèce humaine que chaque individu se reconnaît dans tous les caractères. […] Je défierais le critique le plus exercé, s’il ne sait pas l’endroit de mémoire, de reconnaître à qui appartient une pensée exprimée en perfection. […] Je ne puis souffrir un portrait qui ressemble à une biographie ; et, quant au faux dévot, je persiste à ne le reconnaître que dans Tartufe. […] Les critiques contemporains n’avaient pas manqué de reconnaître, la prévention aidant, par où péchaient les Caractères.

454. (1902) L’œuvre de M. Paul Bourget et la manière de M. Anatole France

Et il n’y eut pas que cette aptitude ; ou plutôt, cette aptitude même l’a de bonne heure admirablement secondé ; et ses propres puissances s’en sont de bonne heure aussi fortifiées, pour se faire assez prématurément reconnaître. […] n’a pas engendré qu’une déroute de principes : on l’a bien senti au flot de désespérance qui a envahi l’âme contemporaine, quand elle a dû, en présence de sa nudité misérable, se reconnaître tardivement le jouet du plus stérile orgueil de l’esprit. […] Le public superficiel, incapable d’y reconnaître le geste désabusé d’un artiste trop épris de naturel et d’harmonie, a pu y découvrir un signe d’immoralité foncière. […] Et qu’il aurait aimé le reconnaître si un peu de philosophie franche, virilement admise et positivement envisagée, l’eût, contre tout prétexte d’idiosyncrasie, dissuadé de trouver la vie si drôle et le fait ordinaire si irrémédiablement pitoyable, tant dans sa psychologie spécifique que dans sa connexité avec les entités naturelles.

455. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Émile Augier — Chapitre II »

Musc et ail, concetti et lazzi, drogues et dragées, épices et fadeurs, une casserole de parfums, une sauce aux mille fleurs… Maintenant, toute part faite à la critique, et nous l’aurions voulue moins entière, il serait injuste de ne pas reconnaître, dans la comédie de M.  […] Dans la tragédie de Rodogune, il y a de beaux vers qui sonnent, comme un chœur de clairons, cette impétueuse victoire de l’amour triomphant de l’amitié : c’est dans la scène où les deux princes reconnaissent avec effroi qu’ils aiment également leur captive. […] L’art n’est-il pas aujourd’hui une noblesse acceptée et reconnue par tous ? […] J’ai peine aussi, je l’avoue, à reconnaître un baron de vieille roche allemande dans ce grec de succession qui fait l’héritage, comme on fait le foulard, et une margrave de margraviat dans la douairière intrigante qui parie pour lui.

456. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Lettres de Goethe et de Bettina, traduites de l’allemand par Sébastien Albin. (2 vol. in-8º — 1843.) » pp. 330-352

Cependant j’ai dit que Bettina s’était éprise d’amour pour Goethe, et on pourrait demander à quels signes cet amour se reconnaissait. […] Il reconnaît qu’il lui doit un rajeunissement d’esprit et un retour à la vie spirituelle. […] Il paraît, au reste, reconnaître lui-même cette supériorité d’une nature riche et capricieuse, qui se produit chaque fois sous une forme toujours surprenante, toujours nouvelle : « Tu es ravissante, ma jeune danseuse, lui dit-il ; à chaque mouvement, tu nous jettes à l’improviste une couronne. » C’est qu’aussi elle le comprend si bien, elle sait si bien l’admirer ! […] C’est un don rare et une preuve de génie aussi, il faut le reconnaître, que de savoir, à ce degré, apprivoiser les génies.

457. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Monsieur de Broglie. » pp. 376-398

Dans les diverses occasions qu’il eut d’approcher du maître d’alors et de l’entendre, soit au Conseil d’État, soit ailleurs, il fut frappé des défauts plus que des qualités ; il vit et nota surtout, de cette grandeur déclinante, les éclats, les écarts, les brusqueries, sans apercevoir assez les éclairs de génie et de haut bon sens qui jaillissaient et se faisaient jour : c’était là de sa part une prévention que lui-même reconnaît aujourd’hui. […] On y reconnaît un esprit grave, élevé, méthodique, précis et net dans ses déductions, et qui se joue parfois dans le détail, non sans agrément. […] Il était arrivé à ce jour où l’on reconnaît, bon gré, mal gré (et dût-on le lendemain tâcher de l’oublier encore), que la morale humaine n’est pas ce que les sages et les nobles esprits se la font dans les spéculations de l’étude et du loisir, au haut du cap Sunium ou dans les jardins de l’Académie. […] Ses amis particuliers auraient seuls le droit de dire si, sous une réserve un peu froide, sous une écorce un peu uniforme, ils n’ont pas souvent reconnu en lui toutes les délicatesses du cœur.

458. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Biographie de Camille Desmoulins, par M. Éd. Fleury. (1850.) » pp. 98-122

n’hésita pas à se reconnaître, et dans son numéro 41, attaquant les hommes de la Société de 1789 qui se séparaient du club des Jacobins, il parla de leur manifeste comme de l’ouvrage « de je ne sais quel André Chénier qui n’est pas celui de Charles IX ». […] Il dit : Voyez comme on nous traite, voyez ce qu’on dit de nous.  Cette naïveté de conscience m’a paru plus plaisante que rien de ce que j’avais vu de lui jusqu’à ce jour, et vous-même, si vous l’avez lu, vous n’aurez pu sans doute vous empêcher de rire comme moi, qu’un homme, trouvant dans un livre où personne n’est nommé une grande quantité d’auteurs qui, d’après leurs écrits, d’après des faits, d’après une longue suite de preuves, sont traités de perturbateurs séditieux, de brouillons faméliques, d’hommes de sang, aille se reconnaître à un tel portrait, et déclarer hautement qu’il voit bien que c’est de lui qu’on a voulu parler. […] Il dit agréablement de Brissot : « Je m’en veux d’avoir reconnu si tard que Brissot était le mur mitoyen entre Orléans et La Fayette, mur comme celui de Pyrame et Thisbé, entre les fentes duquel les deux partis n’ont cessé de correspondre. » C’est avec ces gentillesses qui seraient à peine à leur place dans un feuilleton de théâtre, que l’insensé Camille aidait de plus en plus à dépraver l’opinion et à chasser les victimes sous le couteau. […] La Liberté, c’est le bonheur, c’est la raison… Voulez-vous que je la reconnaisse, que je tombe à ses pieds, que je verse tout mon sang pour elle ?

459. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Madame de Lambert et madame Necker. » pp. 217-239

Un jour, au siège devant Gravelines, les maréchaux de Gassion et de La Meilleraye, qui commandaient, avaient eu querelle, et leur démêlé allait jusqu’à partager l’armée : leurs troupes étaient près d’en venir aux mains lorsque le marquis de Lambert, alors simple maréchal de camp, se jeta entre les deux partis et ordonna aux troupes, de la part du roi, de s’arrêter : « Il leur défendit de reconnaître ces généraux pour leurs chefs. […] Elle fut très considérable à ses origines et dans les premiers temps de son institution : le monde et la littérature, malgré quelques révoltes çà et là, reconnurent en elle la régulatrice de la langue et du bel usage, et même un tribunal souverain du goût. […] Dès ce premier écrit adressé à son fils, on distingue aisément en elle et on lui reconnaît des qualités mâles, fières et fines, une manière de voir qui suppose beaucoup de discernement et d’analyse, et une manière de dire qui sort toujours du commun. […] Pour nous, qui sommes moins susceptibles, et que ces nouveautés d’il y a cent ans effleurent à peine et certainement ne scandalisent plus, nous reconnaîtrons que son style est tout rempli de mots très heureux, d’une acception nette et vive.

460. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Madame Necker. » pp. 240-263

Mme Du Deffand, juge si sévère et si redoutable, et qui se lia plus tard avec les Necker, goûtait fort le mari et reconnaissait à la femme de l’esprit et du mérite ; elle disait de lui pourtant qu’au milieu de toutes ses qualités il lui en manquait une, et celle qui rend le plus agréable, « une certaine facilité qui donne, pour ainsi dire, de l’esprit à ceux avec qui l’on cause ; il n’aide point à développer ce que l’on pense, et l’on est plus bête avec lui qu’on ne l’est tout seul ou avec d’autres ». […] On reconnaît ici même cet abus d’abstraction dont elle parle et qu’elle blâme chez d’autres. […] Il serait injuste de ne pas reconnaître aussi tout à côté ce qui est naturel chez elle, et par où elle se distingue des autres femmes en ce siècle de corruption et de fausse sensibilité. […] Nos goûts sont changés, nos pensées sont affaiblies, le témoignage et l’affection d’un autre sont les seules preuves de la continuité de notre existence ; le sentiment seul nous apprend à nous reconnaître ; il commande au temps d’alléger un moment son empire.

461. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Rollin. » pp. 261-282

Après avoir reconnu ses mérites de facilité, d’enchaînement, de divulgation et d’abondance, nous n’essaierons pas de les faire valoir plus que nous ne les sentons en le relisant. […] Nous ajouterons seulement que la feuille même, qui s’indigne de cette visite domiciliaire, reconnaît qu’elle doit de la reconnaissance à M.  […] Rollin, dans sa confusion d’humilité, ne faisait que reconnaître que, par le succès prodigieux de ses Histoires, il avait obtenu un peu plus qu’il ne lui était dû. […] Guéneau de Mussy, en terminant une Vie de Rollin, a peint cette jeunesse qui succédait, et il a trouvé des accents où l’on reconnaît l’ami de Bonald en même temps que celui de Fontanes et de Chateaubriand : Où sont, s’écriait-il avec gémissement, où sont les éducations sévères qui préparaient des âmes fortes et tendres ?

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