Il y a beaucoup de morceaux foibles & négligés dans les quinze volumes de Sermons, de Panégyriques, & de Discours Moraux, qu'il a donnés au Public. […] On peut dire cependant que si cet Orateur eût donné plus de temps à ses Productions, il eût tiré un parti plus avantageux de ses lumieres & de ses talens, soit pour l'édification du Public, soit pour sa propre gloire.
. — Indifférence aux affaires publiques. — Elles ne sont qu’une matière à bons mots. […] » Et l’on rit, l’on applaudit ; le lendemain tout Paris, en répétant la phrase, se console de la ruine publique. — Alliances, batailles, impôts, traités, ministères, coups d’État, on a toute l’histoire du siècle en épigrammes et en chansons. […] À ce compte, on peut prévoir qu’ils seront aussi insouciants dans leurs affaires privées que dans les affaires publiques. […] On leur fait réciter leur leçon en public, jouer dans des proverbes, figurer dans des pastorales. […] Moins familier et moins pittoresque, plus raffiné et plus élégant, il a quitté la place publique où le soleil lui manque, pour s’enfermer dans les salons où les lustres lui conviennent mieux.
Or il serait très dangereux que le poète à un public d’artistes imposât le décor tel qu’il le peindrait lui-même. […] Devant un grand public, différemment, n’importe quel décor artiste est bon, la foule comprenant non de soi, mais d’autorité. […] Et puis, pourquoi le public, illettré par définition, s’essaye-t-il à des citations et comparaisons ? […] J’ai voulu que, le rideau levé, la scène fût devant le public comme ce miroir des contes de Mme Leprince de Beaumont, où le vicieux se voit avec des cornes de taureau et un corps de dragon, selon l’exagération de ses vices ; et il n’est pas étonnant que le public ait été stupéfait à la vue de son double ignoble, qui ne lui avait pas encore été entièrement présenté ; fait, comme l’a dit excellemment M. […] Nous le savons par l’observation du public des quatre années de l’Œuvre : si l’on tient absolument à ce que la foule entrevoie quelque chose, il faut préalablement le lui expliquer.
Mais ce qui n’était d’abord qu’une simple plaisanterie, qu’une conjecture maligne, va devenir bientôt une affaire sérieuse, un décri formel et public, le sujet de tous les entretiens : C’est un scandale qui vous survivra, s’écrie Massillon ; les histoires scandaleuses des cours ne meurent jamais avec leurs héros : des écrivains lascifs ont fait passer jusqu’à nous les satires, les dérèglements des cours qui nous ont précédés ; et il se trouvera parmi nous des auteurs licencieux qui instruiront les âges à venir des bruits publics, des événements scandaleux et des vices de la nôtre. […] Un nouveau règne, un nouveau siècle, en effet, venait de naître : à côté des désordres qui faisaient irruption et scandale dans les mœurs publiques, une grande espérance se faisait sentir dans tout ce qu’il y avait d’âmes restées encore honnêtes. […] Ce n’est pas que le malin n’y reçût de temps en temps sa leçon au passage : dans ce même Petit Carême, Massillon, comme s’il eût présagé à l’avance l’auteur de La Pucelle, a dit : Ces beaux-esprits si vantés, et qui, par des talents heureux, ont rapproché leur siècle du goût et de la politesse des anciens ; dès que leur cœur s’est corrompu, ils n’ont laissé au monde que des ouvrages lascifs et pernicieux, où le poison, préparé par des mains habiles, infecte tous les jours les mœurs publiques, et où les siècles qui nous suivront viendront encore puiser la licence et la corruption du nôtre. […] Il ne vécut pas assez pour voir éclater, avec les scandales publics de Louis XV, toute l’ironie des chastes promesses et des vœux dont le Petit Carême avait salué cette royale enfance. […] (Journal général de l’instruction publique, du 25 juin 1853.)
Ces décisions des hommes de goût ne sont dans le fond que la voix publique que les hommes d’un tact supérieur devinent par instinct88 ; elles se modifient et se perfectionnent89 en passant de bouche en bouche. […] De retour à Berne, et en attendant son entrée dans la vie publique, Bonstetten passa quelques années de fin de jeunesse, très animées encore et très variées, qu’on suit à la trace dans ses correspondances. […] Ramené encore une fois à Berne après tous ces retards et tous ces longs tours, déjà averti de mûrir par la mort de son excellent père qui, en disparaissant, lui laissait ses recommandations plus présentes avec l’exemple de ses vertus, il se résigne enfin à cette vie publique dont l’heure pour lui a sonné. […] Cependant Bonstetten, sans trop raisonner son choix, était engagé, et il dut suivre jusqu’au bout cette carrière publique jusqu’à ce que des événements impérieux vinssent le délivrer. […] Les théories de bien public trouvaient, en tout ce qui dépendait de lui, leur prompte et loyale application.
Dès qu’on sort de son immobilité individuelle et qu’on prétend à une action publique en ces heures d’orage, force est bien d’en agir ainsi. […] Ils étaient accusés d’avoir, faisant partie de la garde urbaine, aidé la force militaire à repousser des émeutiers massacreurs le 27 juin 1815, c’est-à-dire dans l’espèce d’interrègne qui avait suivi la nouvelle de la perte de Waterloo ; ils avaient rempli leur devoir de citoyens et avaient été appelés régulièrement à faire partie de la force publique : ce furent les émeutiers, le lendemain triomphants, qui se vengèrent, les dénoncèrent, et auxquels la Cour prévôtale donna raison par une fiction rétroactive : condamnés à mort, ils furent presque immédiatement exécutés, le même jour, de nuit, à la lueur des flambeaux. […] A quelques lieues de Montpellier, dans la montagne et dans les bois, à un lieu qu’on nomme la Taillade de Gignac, s’étaient livrés de véritables combats entre les insurgés royalistes et les troupes ; les insurgés interceptaient au passage les courriers, les caisses publiques, et ils assassinaient le plus de soldats qu’ils pouvaient, de ceux qui rentraient dans leurs foyers après le licenciement. […] Ce pays-ci en effet, dans sa vie publique, va tellement par sauts et par bonds, les vainqueurs du jour y sont tellement vainqueurs, et les vaincus y sont tellement vaincus et battus, qu’au lendemain de la seconde rentrée il n’y avait eu d’action, d’influence et de zèle que de la part de l’opinion triomphante ; elle avait eu partout le champ libre, et personne ne lui avait disputé le haut ni le bas du pavé ; les opposants étaient comme rentrés sous terre et avaient disparu. […] Cette ressource a disparu pour la France ; et l’Ordonnance de dissolution du 5 septembre a plus fait sans doute qu’elle ne croyait faire. » Cette vue, on peut l’affirmer hardiment et d’après l’expérience, est fausse : il n’est pas exact de dire que l’état de mécontents, d’inactifs et d’émigrés à l’intérieur, entretenu et prolongé durant dix et quinze ans, ait jamais pu être une bonne préparation pour l’intelligence et le maniement des affaires publiques.
On a beaucoup dit que M. de Talleyrand ne faisait point lui-même les écrits qu’il signait, que c’était tantôt Panchaud pour les finances, des Renaudes pour l’instruction publique, d’Hauterive ou La Besnardière pour la politique, qui étaient ses rédacteurs. […] Le Directoire est content, le public enchanté. […] Un homme public, comme tous les hommes, a ses défauts, ses passions ou même ses vices ; mais il ne faut point, comme à Talleyrand, que ces vices prennent toute la place et occupent tout le fond de sa vie. […] C’est à cette laide affaire que sir Henry Bulwer fait allusion dans une note où il est dit : « Quant à ses habitudes à cet égard (à sa manière de s’enrichir), il ne sera peut-être pas mal d’avoir recours à la correspondance américaine, Papiers d’État et documents publics des États-Unis (t. […] Le flair merveilleux des événements, l’art de l’à-propos, la justesse et, au besoin, la résolution dans le conseil, M. de Talleyrand les possédait à un degré éminent ; mais cela dit et reconnu, il ne songeait, après tout, qu’à réussir personnellement, à tirer son profit des circonstances : l’amour du bien public, la grandeur de l’État et son bon renom dans le monde ne le préoccupaient que médiocrement durant ses veilles.
L’auteur put sourire tout bas : ce n’était pas, en effet, pour ce public ordinaire qu’il prétendait faire ses preuves dans le moment. […] Quand je dis qu’il nous l’a donné, je vais un peu loin pourtant : l’ouvrage (lit-on dans un avis qui précède), tiré à un petit nombre d’exemplaires, n’est pas destiné au public. […] Je conçois cela pour le mémoire sur les médailles italiotes qui forme appendice ; il y a là matière toute spéciale et demi-grimoire ; mais pour le récit, pour le corps même du volume, dussé-je parler par anticipation d’une seconde édition, je persiste à en juger d’après l’effet éprouvé, c’est à tout le public que l’excellent Essai s’adresse, c’est à travers tout ce public qu’il ira çà et là découvrir son juge entre cent lecteurs203. […] Dans un récit destiné au public, on pourrait désirer que quelques-unes de ces pages fussent détachées du texte qu’elles ralentissent, et allassent former une note ou supplément. […] Mérimée, même en préparant son histoire de Jules César, ne saurait demeurer sourd à ce cri universel du public : « Donnez-nous encore des Colomba !
J’entends par là qu’ils sont parvenus à un public qui en juge sans compétence particulière, qui n’y cherche aucune instruction technique, qui s’en fait, plus ou moins frivolement ou grossièrement, des moyens de culture générale, de plaisir intellectuel. […] Je me fais seulement public, et je ne veux que désigner les œuvres qui ont fait sortir du cercle restreint des spécialistes les idées, les notions, les hypothèses, les acquisitions récentes de la philosophie, de la science et de l’érudition. […] Cependant, je saisis trois traces de son passage : c’est d’abord la curiosité si universellement éveillée sur les choses religieuses, le goût des artistes et du public pour les restitutions des plus singuliers effets de la foi, pour les analyses psychologiques de la sainteté ou de la dévotion. […] Quelques personnages considérables de notre temps, toutefois, ont déjà fait parvenir au public leurs souvenirs, presque toujours leurs apologies : ainsi Chateaubriand, Guizot et Tocqueville. […] Il semble que le public soit las de fictions et savoure la certitude de la réalité des récits et descriptions que ces sortes d’écrits lui offrent.
Cette dernière partie de l’ouvrage, tirée seulement à cent cinquante ou deux cents exemplaires, a été très recherchée et est dès longtemps épuisée, à ce point que les deux derniers exemplaires qui ont passé en vente publique ont été adjugés, l’un à 48 francs et l’autre à 52. M. de Laborde se propose de faire réimprimer l’ouvrage, et de tirer de cet appendice, d’abord destiné aux seuls bibliophiles et dont ils se montrent si friands, tout ce qui est réellement significatif, à la fois piquant et convenable, pour l’offrir à cette portion plus considérable du public à laquelle il faut toujours penser. […] Quant à l’intérieur de la France, à l’administration et aux finances, il ne paraît y avoir porté aucune vue d’amélioration générale, aucune pensée de bien public ; loin de là, il ne cessa vilainement d’y poursuivre son propre gain et son profit. […] Sachons apercevoir le mépris public qui se glissait à travers et qui croissait chaque jour, ce mépris qui, comme une fièvre lente, mine les pouvoirs et les États. […] Il avait, dans les dernières années, froissé celle-ci par ses duretés et ses négligences, depuis qu’il se voyait à l’abri de toute atteinte ; car, selon le témoignage de sa nièce Hortense, « jamais personne n’eut les manières si douces en public, et si rudes dans le domestique ».
Le ministre de l’Instruction publique, M. […] Villemain particulièrement, auquel il devait sa première entrée dans l’instruction publique, M. […] On ne saurait dire non plus que cette retraite, qui prive les listes semestrielles de la faculté des plus beaux noms qui les décoraient, soit « un malheur public pour la jeunesse des Écoles » qui n’entendra plus désormais ces voix éloquentes ; car il y a vingt-deux ans que ces illustres maîtres avaient cessé de professer, et qu’ils ne remplissaient plus leurs chaires que par leurs lieutenants. […] Guizot, qui eut lieu à la suite de la révolution de Février, achève et clôt une belle et brillante époque, la plus belle qu’ait eue l’enseignement public en France. […] Un léger tort, qui tient de près au savoir-faire, c’est, en réimprimant ces morceaux, d’en dissimuler l’origine et la destination première, et de laisser croire que c’est du nouveau pour le public, un fond de portefeuille inédit.
Michelet entraîne d’ordinaire plus vivement son public. […] Pour les autres, c’est-à-dire pour ces gens d’imagination moyenne qui est l’imagination publique, il ne faut ni de trop grands titres, ni de trop grands sujets. […] car c’est le poisson qui est le fond du livre de Michelet, je ne crois pas que cela passionne le public comme l’Oiseau, malgré les amateurs de poissons rouges en bocal qui, à ce qu’il paraît, sont une classe de citoyens très nombreux. […] Et cependant, malgré tout cela, ce livre de la Mer n’élèvera pas Michelet d’un degré de plus dans la considération publique. […] Michelet produit un effet moins sombre sur le public.
Le représentant de la Grèce à la cour du roi d’Épire doit être investi de l’estime publique et jouir d’une excellente réputation. […] Quand un poète fait une comédie, c’est une comédie que le public lui demande : le public s’embarrasse fort peu si les bons mots d’une comédie sont d’Aristophane, et n’a nul désir de savoir si des plaisanteries grecques ont bonne grâce sur la scène française. […] était-ce la confiance publique qui l’avait rendu, en sa qualité de prêtre, dépositaire des secrets des familles ? […] Comment l’admiration publique n’a-t-elle pas défendu qu’on représentât la Phèdre de Pradon ? […] Le goût était autrefois dans les auteurs plus que dans le public ; aujourd’hui le public en a plus que les auteurs.
Scribe a pour système de suivre le public plutôt que de lui commander, et de chercher à lui plaire en obéissant à ses goûts plutôt que de le dompter en lui imposant les siens. […] Sa nouvelle comédie, La Tutrice, doit prendre place parmi ces agréables croquis toujours bien reçus du public, pour lequel ils semblent écrits expressément, et qui occupent dans le répertoire si varié de l’auteur une place bien distincte à côté de ses productions plus sérieuses, Bertrand et Raton, l’Ambitieux et la Camaraderie. […] Quant au public, le drame moderne ne l’a pas changé : le peuple d’Athènes aimera toujours la comédie.
Section 25, du jugement des gens du métier Après avoir parlé des jugemens du public sur un ouvrage nouveau, il convient de parler des jugemens que les gens du métier en portent. […] Cependant Monsieur Despreaux avoüoit que très-souvent il étoit arrivé que les jugemens qu’ils portoient après une discussion methodique son ami et lui, sur les divers succès que devoient avoir differentes scénes des tragédies de cet ami, avoient été démentis par l’évenement, et qu’ils avoient même reconnu toujours après l’expérience, que le public avoit eu raison de juger autrement qu’eux. […] Ils veulent que le public croïe voir une grande distance entr’eux et ceux de leurs contemporains qui paroîtront les suivre de plus près.
… Il faut que nous soyons bien indignes de nos spirituels aïeux pour que le public du théâtre de Corneille, de Racine, de Molière, de Regnard et de Beaumarchais, ait, pu prendre un moment Émile Augier pour le successeur naturel de ces auteurs charmants et superbes ! […] Un marquis tarte à la crème, deux caillettes, dont l’une n’est que la Bélise de Molière servilement copiée, et un type d’Henri Monnier, à présent commun comme la borne, voilà les épouvantables éléments dont se compose le cléricalisme qui fait trembler, et auquel Augier, cette tête de linotte dramatique, oppose, pour l’aplatir, Giboyer le vénal, monsieur son bâtard et la demoiselle Fernande, née de l’adultère… La critique, cette courtisane de tous les publics dont elle devrait être l’institutrice, a battu des mains comme un simple Gringalet du lustre, et fait ensuite, sur le tremplin du lieu commun, sa pirouette mélancolique en l’honneur des partis vaincus. […] Le public, qui se reconnaît dans ces élégances, s’applaudit, en ayant l’air d’applaudir l’auteur.
Comment ne pas nommer en tête celui qui, par son talent, par sa verve, par la curiosité infinie de ses recherches, et par je ne sais quelle flamme qu’il a l’art de communiquer à ce qui en d’autres mains ne serait resté que des papiers, a forcé le public, je ne parle plus du public érudit et lettré, mais le public des salons et qui décide des modes, à s’occuper de ces belles du temps jadis et à en disserter d’après lui ? […] Le duc de Nivernais Le duc de Nivernais a déjà eu deux biographes à qui j’emprunterai beaucoup : l’un, François de Neufchâteau, qui lut l’éloge de cet ancien confrère à une séance publique de l’Institut, le 26 août 1807, et l’autre, M. […] Les ambassades du duc de Nivernais sont la partie principale de sa carrière publique ; obligé de renoncer au militaire, il se tourna de cet autre côté. […] Avoir le roi pour soi et même quelques-uns de ses ministres n’était qu’une partie du succès, si le public était contre. […] Mais ce procédé de la noblesse qui faisait une sorte de réparation de gentilshommes à gentilhomme, les égards particuliers que toutes les personnes de distinction témoignaient à l’ambassadeur, n’empêchaient pas le public et les meneurs influents de demeurer très peu favorables à l’idée de paix.
Combien d’œuvres doivent leur naissance à ces solennités et à ces largesses que rend seul possibles le bon état des finances publiques ! […] Tantôt il les signale comme un danger public (La contagion). […] Ton seigneur et maître, c’est le public qui te paie ; écris selon son goût, non selon le tien. […] C’est qu’ils se sont fait un public immense. […] Or il ne faut pas que les mots fassent illusion : il y a toujours en réalité, non pas un public, mais plusieurs publics coexistant côte à côte.
Le zele du bien public lui a fait entreprendre beaucoup d’Ouvrages ; c’est d’abord un sujet d’éloge. […] Nous ne l’envisageons ici que comme un Auteur utile à beaucoup d’égards, & en cela bien plus louable que tant d’autres, qui ne repaissent le Public que de futilités, qui plus souvent cherchent à l’égarer par des productions dangereuses.