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843. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre II. La première génération des grands classiques — Chapitre II. Corneille »

Il n’a pas usé non plus des reconnaissances ; il a fait parfois revenir des gens qu’on croyait morts comme Sévère dans Polyeucte : mais l’espèce de reconnaissance de Sévère et de Pauline pose le problème psychologique de la pièce, elle est nécessaire, naturelle ; elle produit des évolutions de sentiments, non des ricochets d’intrigue. […] Par une certaine amplification des effets, Corneille relie aux causes morales des crimes tragiques qu’elles ne devraient pas produire. L’analyse est exacte ; mais il faut rabattre la moitié du produit extérieur pour rester dans la réalité.

844. (1911) La valeur de la science « Première partie : Les sciences mathématiques — Chapitre III. La notion d’espace. »

Il est inutile d’ajouter que deux objets différents, quoique l’un et l’autre très petits, pourront produire des impressions extrêmement différentes, mais je n’insiste pas sur cette difficulté qui exigerait pourtant quelque discussion. […] Les mouvements que nous imprimons à nos membres ont pour effet de faire varier les impressions produites sur nos sens par les objets extérieurs ; d’autres causes peuvent également les faire varier ; mais nous sommes amenés à distinguer les changements produits par nos propres mouvements et nous les discernons facilement pour deux raisons : 1° parce qu’ils sont volontaires ; 2° parce qu’ils sont accompagnés de sensations musculaires. […] Seuls les changements internes qui satisferont à cette dernière condition, seront susceptibles de corriger le changement externe produit par le déplacement de cet objet.

845. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre XII. La littérature et la religion » pp. 294-312

C’est alors que se produit le grand schisme ; la tunique sans couture est déchirée ; il existe à la fois deux et trois papes qui se foudroient mutuellement. […] Le souci de la forme est rejeté comme indigne d’un chrétien ; tout est sacrifié à une préoccupation unique, celle du résultat moral à atteindre, de l’effet salutaire à produire sur les âmes. […] Chez toutes les sectes, quoiqu’elles aient gardé certains traits constants, il s’est produit des variations analogues dans la façon de concevoir les rapports de l’homme avec le divin et par suite avec la vie et l’art.

846. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Émile Augier — CHAPITRE VII »

C’est une surprise émouvante que cette rencontre subite, et la simple antithèse qu’elle met en scène produit l’effet d’un coup de théâtre. […] Le théâtre n’est pas un laboratoire : le fracas d’un isthme percé, d’un tunnel creusant l’Océan, d’un aérostat fendant l’air, y produirait moins d’effet que le simple battement d’un cœur amoureux. […] Sachez donc que M. de Sainte-Agathe, qui assistait à la soirée du géographe, a surpris de son œil oblique l’impression produite sur l’héritière par le voyageur, et que, pour écarter ce dangereux rival, il n’a rien trouvé de mieux que de le renvoyer au plus vite au fond du Soudan.

847. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Œuvres de Condorcet, nouvelle édition, avec l’éloge de Condorcet, par M. Arago. (12 vol. — 1847-1849.) » pp. 336-359

Refaire le cœur humain à neuf, telle est la prétention exorbitante de cette école finale du xviiie  siècle, issue de l’Encyclopédie, et dont Condorcet, je l’ai dit, est le produit extrême et comme le cerveau monstrueux. […] Écoutons Condorcet rendant compte de ces mouvements précurseurs, dans la Chronique de Paris du 18 juin : Plusieurs sections de Paris se sont présentées à la barre ; leurs pétitions avaient toutes le même objet en vue, celui d’écarter les dangers qui menacent la chose publique… Ce sont les mêmes hommes qui en 89, et à peu près à cette époque, délibéraient avec autant de calme que de fermeté sur les moyens de réprimer l’insolence de la tyrannie… Mais, familiarisés aux principes politiques par trois années de révolution, ce n’est plus par le sentiment seul que produisent les événements qu’ils se laissent entraîner. […] L’impression qu’il produit sur tout lecteur d’un goût délicat et prompt est bien celle-là.

848. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Correspondance entre Mirabeau et le comte de La Marck (1789-1791), recueillie, mise en ordre et publiée par M. Ad. de Bacourt, ancien ambassadeur. » pp. 97-120

Je ne ferai que peu de remarques sur ce premier effet que Mirabeau produisit sur les convives, et qui nous est si visiblement rendu ; je ne me permettrai que d’expliquer et de commenter deux ou trois traits, ainsi que l’expression de ridicule qui échappe quelques lignes plus bas, et qui est appliquée à l’extérieur de Mirabeau. […] Lucas-Montigny avait été admis à les consulter, et en avait produit des extraits fidèles dans les deux derniers tomes de son ouvrage ; M.  […] Jusqu’à présent, on connaissait de Mirabeau l’orateur ; ici, dans cette suite de vues et de considérations, le conseiller et l’homme d’État en lui se produisent et se confondent.

849. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Le comte-pacha de Bonneval. » pp. 499-522

Tandis qu’à la même époque, tous les désirs, tous les caprices passionnés ou sensuels s’exprimaient hautement avec impudence, il est touchant de voir ici un sentiment vrai, un attachement sincère qu’autorise le devoir, n’oser se produire qu’avec tremblement et pudeur, et une crainte marquée d’être repoussé : Je vous embrasse de tout mon cœur, malgré votre cruel silence. Songez pourtant que j’ai besoin d’être soutenue par vous dans la situation où me met le péril où vous êtes, que je me retrace sans cesse ; car je vous aime, mon cher cousin, avec de ces sentiments que l’inclination a formés, qu’elle entretient, et dans lesquels elle insinue tout ce qui a jamais produit l’union la plus tendre et la plus solide. […] Ces articles du lundi ont souvent provoqué des éditions et réimpressions d’ouvrages dont j’avais parlé avec éloge ; cette fois ça été mieux, et il en est sorti toute une aimable inspiration, tout un roman : La Comtesse de Bonneval, histoire du temps de Louis XIV, par lady Georgina Fullerton, livre délicat dans lequel une plume toute française, qu’on dirait contemporaine des personnages qu’elle produit, s’est plu à retracer, à restituer l’enfance de Judith de Biron, à nous raconter les sentiments de la jeune fille ayant son mariage avec le comte de Bonneval, de telle sorte que les lettres qu’on a d’elle n’en soient plus qu’une suite naturelle et qu’on y arrive tout préparé.

850. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Armand Carrel. — II. (Suite.) Janvier 1830-mars 1831. » pp. 105-127

Là où il est sur son terrain, dans l’ordre de sa vocation, et véritablement maître, c’est quand, à propos du Manuscrit de 1814 du baron Fain (25 avril 1830), il parle des choses de la guerre, de l’art et du génie qui y président : Dans une belle opération de guerre, il y a une partie de savoir et de calcul qui n’est pénétrée que par quelques esprits ; mais il y en a une autre qui produit dans toutes les imaginations l’émotion du beau, et qui est toute en spectacle. […] Je ne prétends point ici faire de la politique rétrospective : j’ignore ce qu’eût produit un tel baptême immédiat d’élections et ce qui en aurait rejailli sur l’institution de Juillet ; la grande habileté parut être, durant dix-huit ans, d’avoir évité cette épreuve périlleuse ; mais on ne saurait se dissimuler aujourd’hui que ce manque de consécration à l’origine a toujours pesé plus ou moins sur la dynastie déchue, et lui a ôté de son autorité morale. […] Le procès des ministres, en excitant les passions, fait dévier Carrel de sa ligne ; non pas qu’il ne déteste le désordre et que la vue des émeutes de décembre ne produise sur lui une impression pénible.

851. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Beaumarchais. — II. (Suite.) » pp. 220-241

Ce fameux Mariage était fait depuis longtemps et ne pouvait se produire au grand jour. […] En attendant, l’effet était produit, et ç’avait été pendant quelques jours, dans le grand monde, une nouvelle réclame en faveur de ce Figaro qui en avait si peu besoin. […] On peut juger de l’éclat et de l’étonnement que produisit cette nouvelle dans le public.

852. (1899) Esthétique de la langue française « Le cliché  »

Littérairement, ces deux mémoires réunies sont la condition d’un talent original  ; isolée, la première est représentative de ces hommes qui ont vu, senti, pensé et qui ne peuvent cependant se traduire clairement ; la seconde répond à ce qu’on appelle vulgairement la « mémoire » en style pédagogique ; elle ne peut produire qu’un talent purement oratoire ou abstrait, nécessairement limité, superficiel et sans vie . […] Le vers français se fait par le procédé que les régents enseignent avec fruit pour le vers latin ; on a des principes ; on sait que « les épithètes sont destinées à rendre le discours plus énergique » et « qu’elles produisent un ornement sensible dans le style, pourvu qu’elles soient bien ménagées et qu’on en use avec discrétion, sans émousser le goût en les multipliant trop ». […] Quant à l’idée historique, une et complexe, qu’évoque ce mot — succédané du mot royaume, dans les hommes de race, elle n’a pas produit de clichés.

853. (1888) La critique scientifique « La critique et l’histoire »

Une direction, un type, un entreprenant, un but, peuvent apparaître seuls et sans suite : une force, une variété animale, une masse d’hommes actifs, une volonté ne peuvent être conçus indéterminés ; le rapport qui unit ces deux facteurs est le même que celui qui relie la forme et la substance d’Aristote ; c’est un rapport de plasticité, de formation, d’assimilation, d’imitation enfin ; des facteurs que cette relation unit en un ensemble, c’est le premier en fonction de temps qui est le générateur et qui participe le plus largement à l’existence ; comme un nombre produit ceux qui le suivent et se multiplie en eux, un grand homme s’agrège la foule et grandit par sa masse. […] Car la manifestation des caractères qu’il produit peu à peu rend les hommes compatissants pour tous les autres hommes et les empêche de haïr sauvagement qui que ce soit. […] D’autre part, ces moyens et ces effets ne pouvant être étudiés qu’en vue de l’émotion qu’ils produisent, conduiront à des notions ressortissant à la psychologie.

854. (1864) William Shakespeare « Deuxième partie — Livre I. Shakespeare — Son génie »

Sa tragédie est artificielle et sa comédie n’est qu’instinctive. » Johnson confirme le verdict : « Sa tragédie est le produit de l’industrie et sa comédie le produit de l’instinct. » Après que Forbes et Johnson lui ont contesté le drame, Green lui conteste l’originalité. […] Cette réaction a déjà produit quelques spécimens de poètes rangés, bien élevés, qui sont sages, dont le style est toujours rentré de bonne heure, qui ne font pas d’orgie avec toutes ces folles, les idées, qu’on ne rencontre jamais au coin d’un bois, solus cum sola, avec la rêverie, cette bohémienne, qui sont incapables d’avoir des relations avec l’imagination, vagabonde dangereuse, ni avec la bacchante inspiration, ni avec la lorette fantaisie, qui de leur vie n’ont donné un baiser à cette va-nu-pieds, la muse, qui ne découchent pas, et dont leur portier, Nicolas Boileau, est content.

855. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Le Prince » pp. 206-220

Tout est bien imaginé, bien ordonné, les figures bien placées, les objets bien distribués, les effets de lumière tout prêts à se produire ; mais point de peinture, point de magie ; il faut que l’artiste soit faible ou paresseux, et qu’il lui soit pénible de finir. […] Quel est le travail de l’imagination qui les produit ? […] Substituez aux figures de Le Prince des français ajustés à la mode de leur pays, et vous verrez combien les mêmes tableaux exécutés de la même manière perdront de leur prix, n’étant plus soutenus par des détails, des accessoires aussi favorables à l’artiste et à l’art. à la jolie petite femme du concert substituez une de nos élégantes avec ses rubans, ses pompons, ses falbalas, sa coëffure ; et vous verrez le Bel effet que cela produira, combien ce tableau deviendra pauvre et de petite manière.

856. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « M. Pommier. L’Enfer, — Colifichets. Jeux de rimes. »

En effet, citer quelques vers trisyllabiques détachés et enlevés d’un ensemble étendu n’est donner un exemple satisfaisant ni de la difficulté surmontée ni de l’effet produit sur l’imagination par ces vers trisyllabiques se succédant, se balançant, courant et tombant les uns sur les autres, comme ces petites vagues qui sont la houle et puis toute la mer, et qui, quand on en tient dans le creux de sa main ce qu’on en peut prendre, ne donnent guère certes la moindre idée du bleu et du grand Océan dans lequel on vient de les puiser. […] Et comme cette poésie de l’expression enivrée, ne saurait, sans entrer dans une sphère qui ne serait plus la sienne, être dépassée, fût-ce par celui qui l’a produite avec cette supériorité d’exécution, de verve et de souplesse, il faut nécessairement s’arrêter et ne plus vouloir y ajouter encore par des tentatives qui fausseraient la conception de cette poésie, et même de toute poésie. […] Il y a mieux que de produire l’ivresse dont j’ai parlé comme l’ayant éprouvée, car il y a toujours un peu d’étourdissement dans l’ivresse.

857. (1868) Curiosités esthétiques « VII. Quelques caricaturistes français » pp. 389-419

Il a dépeint ce qu’il a vu, et le résultat s’est produit. […] A première vue, le produit apparaît comme extraordinaire ; mais quand tout Monsieur Prudhomme a été dit, Henri Monnier n’avait plus rien à dire. […] Il a beaucoup produit, mais il manque de certitude.

858. (1884) Propos d’un entrepreneur de démolitions pp. -294

Il se recommandera d’elle, toujours, quand il lui faudra produire un atome de sa liberté, comme les prisonniers se recommandent de leurs chaînes pour enfoncer les portes de leur prison. […] Je veux dire, la surprenante, l’extrême individualité de l’artiste, individualité tellement expansive que tout ce qu’il écrit se sature de lui jusqu’à produire la ressemblance physique. […] En réalité, AUCUN poète, dans aucun siècle, n’avait produit une telle idée de ce primordial sentiment. […] Un monsieur Francis Poictevin produit un roman sous le titre de Ludine, et les journaux lui font une réclame énorme. […] C’est le sérieux de l’humilité, de la désarmante, de l’adorable humilité, telle que pourraient la concevoir et la produire les plus magnifiques âmes du monde.

859. (1894) Écrivains d’aujourd’hui

D’autre part, il est bien des causes qui produisent la tristesse, sans compter les physiologiques. […] En vérité, c’est là, — indépendamment des conséquences matérielles et des événements extérieurs, vengeances, meurtres, scandales, qui peuvent aussi bien se produire ou ne pas se produire, — c’est ce qui fait que l’amour illégitime est toujours et forcément tragique. […] C’est aujourd’hui l’un des genres où se produit le mouvement le plus intéressant. […] La Prusse est un produit de la volonté, une création non de la nature, mais des hommes. […] Mais relisez quelques-uns des discours les plus fameux de Lacordaire, et demandez-vous quel effort ils produisent sur le lecteur d’aujourd’hui.

860. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — A — Angellier, Auguste (1848-1911) »

Angellier est né dans la ville qui a produit Sainte-Beuve : Boulogne-sur-Mer, cité curieuse et diverse qui établit une transition et un lien entre la France et l’Angleterre… Il y a, en Sainte-Beuve, à le bien chercher, un cottage environné de roses de mer.

861. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — M — Meurice, Paul (1818-1905) »

En même temps qu’il s’est occupé avec un zèle de tous les instants des publications du poète de France, il n’a cessé de produire lui-même.

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