Les générations nouvelles, comme si elles étaient jalouses de leurs aînées, prétendent savoir mieux et à neuf ce qu’elles viennent d’apprendre à l’heure même et qui ne date que de leur moment : c’est toujours et surtout le dernier document qui compte et qui prime tous les autres. […] Telle est depuis longtemps mon idée sommaire de Marie-Antoinette, et rien de ce que je viens de lire dans les volumes nouveaux ne m’en a fait revenir et n’a réfuté en moi un jugement qui n’a rien d’ailleurs d’une accusation ni d’un reproche. […] L’image de ma bonne mère, de toute ma famille, de mes bonheurs d’enfance, me sera toujours présente en même temps que vos conseils seront toujours devant mes yeux ; — j’arriverai sans expérience dans un pays nouveau qui m’a adoptée sur votre nom, je tremble à l’idée que je ne répondrai pas à l’attente ; le peu que je pourrai valoir, c’est à vous que je le devrai ; mais maintenant je sens que je n’ai pas assez profité de vos leçons si tendres : que vos bontés me suivent, je vous en conjure ! […] Elle donne des différents princes et des princesses de la famille Royale, de ses nouveaux parents, d’assez agréables esquisses et qui ressemblent encore. […] Feuillet, me remerciant une quinzaine de jours seulement après que ce premier article eut paru, supposait, dans sa lettre, que dans l’intervalle j’avais dû recevoir son Introduction ou Avertissement, ce qui n’était pas ; il m’écrivait : « Après huit jours de repos à Trouville, j’arrive et je trouve votre article dont je vous remercie, bien que vous ne me trouviez pas nouveau : mais je suis abondant pour confirmer vos idées… Je présume que ma plomberie (l’imprimeur Plon) vous aura envoyé de ses œuvres et que vous avez eu, la semaine dernière, mon Avertissement que je n’ai voulu appeler ni Préface, ni Introduction encore moins : tout cela est bien solennel, etc. » Or, à l’heure où je recevais cette lettre, je n’avais pas encore cet Avertissement et j’en étais à mon troisième article.
Marie-Antoinette est connue, et tout en gagnant à cette familiarité tendre, respectueuse et soumise, où elle achève de se produire, elle ne se montre à nous par aucun aspect vraiment nouveau. […] Les premières lettres qui se rapportent au nouveau règne sont remplies d’effusions, et respirent la joie avec l’espérance. […] Le choix des nouveaux ministres paraît à Marie-Thérèse, comme à tout le monde, très-convenable : celui de M. de Maurepas seulement l’étonne. […] On nous épluche trop pour ne pas être toujours sur ses gardes. (2 juin 1775.) » A propos de parure, il y a une histoire de bracelets qui préoccupe avec raison la très-sage souveraine : « Toutes les nouvelles de Paris annoncent que vous avez fait un achat de bracelets de 250 mille livres ; que, pour cet effet, vous avez dérangé vos finances et vous êtes chargée de dettes, et que vous avez, pour y remédier, donné de vos diamants à très-bas prix ; on suppose après que vous entraînez le roi à tant de profusions inutiles, qui depuis quelque temps augmentent de nouveau et mettent l’État dans la détresse où il se trouve.
Jusqu’ici, depuis deux ans passés, il ne paraît plus qu’il existe aucun centre poétique auquel se rattachent particulièrement les essais nouveaux d’une certaine valeur. […] Ce volume nouveau contient une dédicace à M. […] Le plus beau passage du volume, ces stances du milieu de Namouna, que nul ne se chantera sans larmes, ce Don Juan vraiment nouveau, réalisé d’après Mozart, qu’est-ce encore, je le demande, sinon l’amas de tous les dons et de tous les fléaux, de tous les vices et de toutes les grâces ; l’éternelle profusion de l’impossible ; terres et palais, naissance et beauté ; trois mille71 noms de femmes dans un seul cœur ; le paradis de l’enfer, l’amour dans le mal et pour le mal, un amour pieux, attendri, infini, comme celui du vieux Blondel pour son pauvre roi ? […] Mais c’est épiloguer bien longtemps : quoi qu’il en soit des détails, un poëte nouveau, par cette éclatante récidive, nous est dûment acquis et constaté. […] Pour nous, critique, chargé d’enregistrer à temps ces choses nouvelles, nous tâcherons de n’y jamais manquer, et nous gardant, s’il se peut, de la précipitation enthousiaste qui prophétise inconsidérément des splendeurs par trop nébuleuses, nous ne serons pas des derniers à signaler les vraies apparitions dignes du regard.
Tel livre devra son insuccès aux vues nouvelles dont il est plein et qui lui vaudront au bout d’un siècle la réparation d’une gloire tardive. […] Telle œuvre est supérieure, parce qu’elle exprime et éveille beaucoup de sentiments tempérés (Gil Blas) ; telle autre, parce qu’elle peint une passion déchaînée dans toute sa violence (Manon Lescaut, le Père Goriot) ; celle-ci, parce qu’elle suscite des émotions nobles, comme la pitié pour les faibles, l’amour de la justice, la sympathie pour la vie universelle (les Misérables) ; celle-là, parce qu’elle va toucher au fond du cœur des fibres secrètes, rarement ou jamais atteintes jusque-là, parce qu’elle donne, comme on l’a dit, un nouveau frisson (les Fleurs du mal). […] L’intensité avec laquelle l’auteur voit et fait voir l’invisible ; la variété des tableaux fantastiques qu’il évoque ; la largeur des symboles qu’il conçoit ; la somme de nouveau que ses rêves ajoutent aux aspirations des autres hommes ; voilà autant de facteurs (et il s’en faut que nous les ayons énumérés tous), qui, isolés ou réunis, constituent la supériorité cherchée. […] Mais, dans le classement nouveau que l’on pourrait tenter d’après ce principe, il faut s’astreindre à de sévères précautions. […] Nous voici de nouveau, semble-t-il, perdus dans un chaos inextricable !
Un jour Grimm, qui écrivait à plusieurs souverains du Nord des nouvelles de la littérature et des beaux-arts, demanda à Diderot de lui faire un compte rendu du Salon de 1761. […] Ce faire étonnant, qui est la condition sans laquelle l’idée elle-même, après tout, ne peut vivre, cette exécution à part et supérieure qui est le cachet de tout grand artiste, quand Diderot la rencontre chez l’un d’eux, il est le premier à la sentir et à nous la traduire par des paroles étonnantes aussi, singulières, d’un vocabulaire tout nouveau dont il est comme l’inventeur dans notre langue. […] Diderot, dans ses Salons, a trouvé la seule et vraie, manière de parler aux Français des beaux-arts, de les initier à ce sentiment nouveau, par l’esprit, par la conversation, de les faire entrer dans la couleur par les idées. Combien, avant d’avoir lu Diderot, auraient pu dire avec Mme Necker : « Je n’avais jamais vu dans les tableaux que des couleurs plates et inanimées ; son imagination leur a donné pour moi du relief et de la vie ; c’est presque un nouveau sens que je dois à son génie. » Ce sens nouveau et acquis s’est fort développé chez nous depuis lors ; espérons qu’il nous est devenu tout à fait naturel aujourd’hui29.
Il y a le Fontenelle bel esprit, coquet, pincé, damoiseau, fade auteur d’églogues et d’opéras, rédacteur du Mercure galant, en guerre ou en chicane avec les Racine, les Despréaux, les La Fontaine ; le Fontenelle loué par de Visé et flagellé par La Bruyère ; et à travers ce Fontenelle primitif, à l’esprit mince, au goût détestable, il y en a un autre qui s’annonce de bonne heure et se dégage lentement, patiemment, mais avec suite, fermeté et certitude ; le Fontenelle disciple de Descartes en liberté d’esprit et en étendue d’horizon, l’homme le plus dénué de toute idée préconçue, de toute prévention dans l’ordre de la pensée et dans les matières de l’entendement ; comprenant le monde moderne et l’instrument, en partie nouveau, de raisonnement exact et perfectionné qu’on y exige, s’en servant avec finesse, avec justesse et précision, y insinuant l’agrément qui fait pardonner la rigueur, et qui y réconcilie les moins sévères ; en un mot, il y a le Fontenelle, non plus des ruelles ni de l’Opéra, mais de l’Académie des sciences, le premier et le plus digne organe, de ces corps savants que lui-même a conçus dans toute leur grandeur et leur universalité quand il les a nommés les états généraux de la littérature et de l’intelligence. […] Racine et Boileau riaient de ce nouveau débarqué, de ce Normand précieux et en retard, qui arrivait exprès par le coche pour se faire siffler avec une tragédie musquée, ou pour se faire applaudir avec un sonnet d’Oronte. Cependant, dès le premier ouvrage en prose qu’il publia (les Nouveaux dialogues des morts, 1683), l’esprit philosophique de Fontenelle commençait à se produire et à donner des gages de ce qu’il serait un jour. […] Pourtant, avant de prononcer tout à fait contre La Bruyère, je prierais qu’on voulût bien lire, au tome premier des Nouveaux mélanges de Mme Necker, l’extrait d’une conversation de Mme Geoffrin sur Fontenelle. […] [NdA] Sur les débuts et sur la famille de Fontenelle et sur toute sa vie en général, on trouvera quelques détails précis et nouveaux dans la Biographie de Fontenelle, par M.
Le seul expérimentateur, en une certaine mesure, c’est le poète ou le romancier qui, lorsqu’il a le don de vie, nous fait voir et toucher des caractères se développant dans un milieu nouveau, qu’il varie à sa volonté. […] Désormais nous serons soutenus par l’idée que le fidèle accomplissement de notre tâche ajoutera un nouveau maillon à la grande chaîne du savoir humain… (1er janvier 1883.) » — L’hiver passé : — « Adieu, San-Mayen (c’est le nom de l’île où l’expédition scientifique a hiverné)… Après nous il viendra d’autres hommes pourvus d’instruments meilleurs, comme nous sommes venus prendre la place des sept Hollandais qui, il y a deux cent cinquante ans, ont payé de leur vie leur tentative d’hivernage. […] Mais à ce sentiment se mêle ici quelque chose de nouveau, l’amour sincère de la science, la curiosité de l’intelligence abstraite et non pas seulement des yeux en quête de paysages. […] Ceux qui savent discuter ainsi par 17° de froid sur un chiffre n’éprouveront pas un jour cette usure de la sensibilité qu’on rencontre chez tant d’artistes, ce sentiment d’une vie passée tout entière à la reproduction vaine des choses, non à la création de rien de nouveau. […] En outre, l’avènement de la démocratie et des nouvelles « couches sociales » se fait sentir dans l’art, comme dans toutes les autres manifestations de la vie sociale.
Le 20 juillet enfin, je les retrouvai au Labrador, en me demandant de nouveau comment ils avaient fait pour atteindre ces rivages perdus et d’un si difficile accès. […] Les vieux oiseaux, mettant le temps à profit, commencèrent aussitôt à préparer de nouveau le nid. […] Il avait été arraché de la voûte, et le nouveau était fixé un peu au-dessus de la place qu’occupait l’ancien. […] Leurs débris servirent à élever un nouveau barrage dans le perkioming. […] Bientôt il s’agit de chercher une habitation commode pour le nouveau ménage.
D’abord il fut convenu que le vague était le fin du fin. « Ta pensée, garde-toi de la jamais nettement dire128 », ordonnait un des pontifes de l’art nouveau. […] Evolution semblable à celle de la littérature actuelle, qui, dégagée peu à peu des formes et des traditions du passé, essaie en tâtonnant de créer des moules nouveaux pour la pensée. […] Il est vraisemblable que la pensée humaine de l’avenir trouvera de nouvelles occasions et de nouveaux moyens de s’incarner dans des édifices qui auront aussi leur signification et qui symboliseront, à leur manière, les tendances des moments où ils seront élevés. […] On arrivait au moment où, suivant la coutume, un nouveau style dégénère entre les mains des imitateurs et des outranciers en un pitoyable jargon. […] Et en effet le jour où la société polie naît en France, le jour où la vie mondaine s’organise, il faut un nouveau genre d’habitation qui réponde aux besoins nouveaux.
dis-moi de leurs nouvelles, Gris messager de la nuit ; Sous l’églantier rose ont-elles, Au printemps, trouvé ton nid ? […] Quelques mois après, son neveu m’écrivit de nouveau pour m’apprendre la mort de son oncle ; il avait vécu, ou plutôt il avait pensé et prié jusqu’au-delà de quatre-vingts ans ; pur esprit qui ne laissait pas une pensée à la terre : elle n’avait été pour lui qu’un marchepied de son autel. […] Le gouvernement le favorisait sous main ; M. de Fontanes était le lien caché entre le trône nouveau et l’antique autel. […] Bonaparte, devenu Napoléon, fut présenté comme un nouveau Cyrus au monde, dans l’exorde du discours à l’Académie française de M. de Chateaubriand. […] Bientôt nous sourîmes de nouveau aux suaves peintures de l’industrie des oiseaux, si supérieurement décrite depuis par Audubon, Wilson, Toussenel, madame Michelet, ces historiographes de l’intelligence et de l’amour des animaux.
Plusieurs volumes, nouvelles et romans, l’ont suivi. […] Ses nouvelles surtout sont charmantes. […] Les décentes nouvelles de Filon, souvent, sont des merveilles d’ironie. […] » Au lieu de s’anéantir dans la tourmente, le génie français y a pris des forces nouvelles, pour de nouvelles destinées : il continue sa durée glorieuse et bienfaisante. […] Il avait son dessein, différent de ce qu’un nouveau romancier se proposerait.
Quelles nouvelles apportes-tu ? […] Prends soin de lui ; il apporte de grandes nouvelles ! […] Eh bien, quelles nouvelles ? […] Le regarder de nouveau ! […] Quel est le malheur le plus nouveau ?
Ni dans la langue, ni dans le vers, ni dans les thèmes, il n’y avait là rien de bien nouveau. Ce qui était nouveau, c’était cette intense spontanéité, cette sincérité qui, à chaque page, découvrait l’homme. […] Nouvelles Méditations, 1823. […] Nouvelles Confidences, 1831. in-8 ; Graziella, 1852, in-12. […] Voir ses Contes et Nouvelles.
Ainsi il s’agit d’un art nouveau. […] Un des pontifes de la routine, le greffier Beckmesser, flaire un rival dans ce nouveau venu. […] L’art nouveau qui s’est révélé au vieux poète ne sera pas étouffé ! […] [NdA] Alors, les musiciens nouveaux sont venus. […] Fourcaud cherche une forme classique renouvelée par un souffle nouveau.
De nouvelles discussions se sont élevées récemment sur ce sujet toujours actuel ; la situation respective des divers partis semble s’être précisée. […] Mais nous refusons de nouveau à l’indétermination nouménale le nom de liberté, pour lui laisser seulement ce nom d’x que Kant lui donne avec raison quand il est conséquent avec lui-même. […] Le maintien ne serait quelque chose de nouveau que si l’intensité qui le produit sortait tout d’un coup du néant. […] C’est donc par un véritable paradoxe que l’école de Lotze identifie le libre avec le nouveau, avec le changeant, avec l’hétérogène. […] Ce sera, en d’autres termes, un déterminisme modifié par l’idée de son propre contraire et de ses propres limites, façonné par l’idée d’une puissance d’indétermination, prenant ainsi un aspect nouveau sans changer d’essence rationnelle.
Son dix-septième volume, qui est peut-être le plus beau de tous, et qui est certainement le plus émouvant, le plus poignant d’intérêt pour tout cœur français, comprend les événements des deux derniers mois de 1813 et des quatre premiers de 1814 : il ne reste plus à l’auteur, pour clore entièrement son œuvre, qu’à écrire l’histoire des Cent-Jours, cette histoire pénible, où d’autres, avides de désastres, se sont jetés avant lui, où lui il n’arrive qu’à regret et comme par nécessité, et où, venant le dernier, il saura apporter, sur des points encore controversés, des lumières, à quelques égards nouvelles et peut-être décisives. […] Au milieu des plus formidables difficultés et dans une situation extrême, la netteté des vues, leur promptitude, leur multiplicité (chaque jour et chaque heure en demandant de nouvelles), l’à-propos et la perfection de l’exécution avec des moyens tels quels, tronqués et insuffisants ; le nerf et la vigueur dans leur dernière précision, une célérité qui suppléait au nombre ; une vigilance de tous les instants ; l’infatigable prodigalité de lui-même ; non seulement la constance, cette vertu des forts, mais l’espérance, ce rayon de la jeunesse, tout cela lui était, je ne dirai pas revenu (car tout cela appartenait de tout temps à sa nature), mais rendu au complet et à la fois, s’était renouvelé, réexcité en lui, et se couronnait d’une suprême flamme. […] C’est un problème qui se déplace, qui se pose à chaque instant en des termes nouveaux ; et chaque fois il s’improvise, dans la tête militaire la plus inventive qui ait jamais été, une manière de solution nouvelle. […] Et s’il est arrivé que, lui sorti de la scène politique, la France n’ait point dépéri ; que cet être collectif, cet être idéal et redoutable qu’on appelait la coalition, et qui est demeuré pendant tant d’années un grand spectre dans l’imagination des gouvernants, ait été conjuré enfin par un enchanteur habile et puissant ; que la France soit redevenue elle-même tout entière sur les champs de bataille anciens et nouveaux et dans les conseils de l’Europe ; si, à cette heure même où nous écrivons, une province, une de ses pertes, est recouvrée par elle et lui est acquise, moins à titre d’accroissement que de compensation bien due, et aussi comme un gage manifeste de sa pleine et haute liberté d’action, on est sûr qu’en cela du moins le cœur de l’historien du Consulat et de l’Empire se réjouit ; que si une tristesse passe sur son front, c’est celle d’une noble envie et de n’avoir pu, à son heure, contribuer pour sa part à quelque résultat de cet ordre, selon son vœu de tous les temps ; mais la joie généreuse du citoyen et du bon Français l’emporte.
Le nouveau volume que vient de publier M. de Laprade, et où se trouve son discours de réception, est un recueil de prose ; il se compose d’une douzaine de morceaux de diverse provenance et dont plusieurs paraissent avoir été de premières leçons, des discours d’ouverture de Faculté. […] Quand il arrive à Voltaire, « auquel l’histoire de l’ironie s’arrête, car on a atteint le sommet », vous jugez s’il énumère de nouveaux meurtres. […] Le plus clair, en définitive, c’est que M. de Laprade a peur qu’on ne rie, qu’on ne plaisante, qu’on ne crée de nouveaux fils à Voltaire. […] Quant à la poésie véritable, qui ne consiste pas uniquement dans la description des formes, elle saura naître des merveilles de ce monde moderne, elle saura s’en accommoder ou même s’en inspirer, si d’aventure elle rencontre uneâme et un talent faits à sa mesure et d’un tour nouveau : c’est le secret de l’originalité.
Mais il revenait quelquefois, il réagissait contre son goût et son humeur, et son second mouvement était alors de profiter, à son tour, de ces documents nouveaux pour pousser plus avant lui-même l’étude des savants illustres. […] Biot donna cours, dans l’examen qu’il en fit au Journal des Savants (mai 1833), à un sentiment qui, sous sa forme discrète et son expression modérée, ne peut être qualifié au fond que de dénigrant et de malveillant : « Les éditeurs de semblables recueils, disait-il en commençant, lorsqu’ils n’ont que des intentions honorables, ce qui est certainement le cas actuel, doivent bien examiner, avant de les émettre, si la gloire des hommes célèbres qu’ils ramènent ainsi sur la scène s’accroîtra par ces publications qu’eux-mêmes n’avaient point prévues ; ou si l’expression, pour ainsi dire surprise, des idées qu’ils n’avaient pas exposées au grand jour, aura une utilité générale, soit en ajoutant de nouvelles et réelles richesses à la masse des connaissances déjà acquises, soit en détruisant des erreurs que des hommes célèbres auraient accréditées ; soit, enfin, en redressant des injustices qui se seraient propagées sous l’influence de leur nom : car, si aucun de ces résultats ne doit être obtenu, la gloire de ce nom risque d’en être affaiblie plutôt qu’augmentée, ne fût-ce que par l’évanouissement du prestige de perfection qui s’y attachait. » C’est donc au nom d’un prestige que M. […] J’ai dit, en me faisant l’écho des voix les plus autorisées, que l’invention n’était pas son fort ; mais il était très curieux et très empressé a se porter du côté où s’annonçaient des découvertes nouvelles. […] Il était fier, et avec raison, de cette découverte : « Auparavant, disait-il, les chimistes ressemblaient à des architectes qui, pour connaître un édifice, auraient commencé par le démolir et auraient prétendu ensuite juger de sa structure intérieure d’après la nature, le nombre et le poids des matériaux bruts, au lieu que maintenant, dans bien des cas, on peut saisir la constitution intime des corps sans les endommager, et distinguer les propriétés essentielles des particules mêmes en situation. » — Se plaignant que les chimistes tardassent trop à user de ce nouveau moyen d’investigation délicate : « Les chimistes ne sont que des cuisiniers, disait-il encore ; ils ne savent pas tirer parti de l’admirable instrument que je leur ai mis entre les mains. » Mais, enfin, il y eut de jeunes et habiles chimistes qui en essayèrent et qui donnèrent à M.
L’esprit de parti est exempt de craintes, non pas seulement par l’exaltation de courage qu’il peut inspirer, mais par la sécurité qu’il fait naître : les Jacobins et les Aristocrates, depuis le commencement de la révolution, n’ont pas un instant désespéré du triomphe de leur opinion, et au milieu des revers qui ont frappé si constamment les Aristocrates, il y avait quelque chose de béat dans la certitude avec laquelle ils débitaient des nouvelles, que la foi la plus superstitieuse aurait à peine adoptées. Il y a cependant quelques nuances générales qui, sans application, particulières la révolution de France, distinguent l’esprit de parti de ceux qui défendent les anciens préjugés, d’avec l’esprit de parti de ceux qui veulent établir de nouveaux principes. […] Les hommes d’esprit qui, dans toute autre circonstance, cherchent à se distinguer, ne se servent jamais alors, que du petit nombre d’idées qui leur sont communes avec les plus bornés d’entre ceux de la même opinion : il y a une sorte de cercle magique tracé autour du sujet de ralliement que tout le parti parcourt et que personne ne peut franchir ; soit qu’on redoute, en multipliant ses raisonnements, d’offrir un plus grand nombre de points d’attaque à ses ennemis ; soit que la passion ait également dans tous les hommes plus d’identité que d’étendue, plus de force que de variété ; placés à l’extrême d’une idée comme des soldats à leur poste, jamais vous ne pourrez les décider à venir à la découverte d’un autre point de vue de la question, et tenant à quelques principes comme à des chefs, à des opinions, comme à des serments, on dirait que vous leur proposez une trahison quand vous voulez les engager à examiner, à s’occuper d’une idée nouvelle, à combiner de nouveaux rapports. […] Mais depuis que ces transactions ont existés entre le présent et l’avenir, entre le sacrifice de la génération actuelle et les dons à faire à la génération future, il n’y a point eu de bornes qu’un nouveau degré de passion ne se crut en droit de franchir ; et souvent des hommes, enclins au crime, croyant s’enivrer des exemples de Brutus, de Manlius, de Pison, ont proscrit la vertu, parce que de grands hommes avaient immolé le crime ; ont assassiné ceux qu’ils haïssaient, parce que les Romains savaient sacrifier ce qu’ils avaient de plus cher ; ont massacré de faibles ennemis, parce que des âmes généreuses avaient attaqué leurs adversaires dans la puissance, et ne prenant du patriotisme que les sentiments féroces qu’il a pu produire dans quelques époques, n’ont eu de grandeur que dans le mal, et ne se sont fiés qu’à l’énergie du crime.