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591. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XXX. Saint Anselme de Cantorbéry »

Son passé, son ancienne élévation ministérielle, ses relations de monde et d’école, son titre littéraire d’académicien, tout, jusqu’à sa position de vaincu politique, — car, en France, c’est parfois une assez belle position que celle-là, — facilite merveilleusement la diffusion actuelle de ses idées et de ses écrits. […] Car tel est le but, sinon atteint, du moins visé, du nouvel ouvrage de M. de Rémusat Maintenir le fondement de la philosophie rationaliste, de cette philosophie qui n’est pas autre chose que le protestantisme en métaphysique, mais échapper aux conséquences panthéistiques de cette philosophie, devant lesquelles le monde, plus chrétien encore qu’il ne pense, se cabre encore avec effroi, tel est le but que s’est proposé M. de Rémusat dans sa monographie intellectuelle de Saint Anselme. […] Est-ce la chose en soi qui l’a révolté, ou l’effet actuel de cette chose sur le monde, qui lui a paru compromettant ? […] Nous avons dit plus haut : Toute philosophie gît dans une seule question, l’existence de Dieu en face de l’existence du monde, et il serait aisé de montrer que, quelque solution qu’on adopte sur cette question, et toutes peuvent se ramener à deux principales ; en d’autres termes, soit que Dieu et la matière soit congénères, soit que Dieu l’ait tirée de lui-même, le panthéisme inévitable et menaçant revient toujours ! […] Grâce à cette théocratie, que M. de Rémusat condamne dans son livre par la raison très philosophique que l’opinion de l’Europe moderne, qui a la tête déformée par les philosophes, lui est, en ce moment, hostile, l’influence du monde chrétien avait pris le monde musulman et pénétré l’Asie et l’Afrique.

592. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « Raymond Brucker. Les Docteurs du jour devant la Famille » pp. 149-165

Seulement, ce monde, lâché une minute, elles l’ont repris, et avec quel détestable avantage ! […] On glorifia dans ce temps-là Montalembert et Lacordaire à pleines volées, mais Brucker, qui n’eût, d’ailleurs, jamais sa part dans ce monde ingrat, ne l’eut pas davantage dans ce bruit. […] pour rappeler au monde ignorant et frivole un des plus grands esprits de ce siècle, — à présent disparu ! […] le grand intérêt de ce livre, c’est la question de la Paternité et de la Famille, qui est une question aujourd’hui et qui n’en était pas une autrefois ; car c’était le principe, l’indiscutable principe de l’organisation de toute société, et quelque chose comme l’âme du monde. […] Eh bien, c’est cette force de la Paternité, dont Brucker n’avait pas seulement que l’idée dans la tête, mais dont il avait aussi le sentiment dans la poitrine, c’est cette force de la Paternité qu’il résolut de réapprendre au monde, en la lui peignant… Et puisqu’il avait accepté la forme du roman dans son ouvrage, il y introduisit un père comme on n’en connaissait plus, un père qui relevait la Paternité de tous les avilissements qu’elle subissait, depuis des siècles, dans les mœurs et dans les comédies !

593. (1909) Les œuvres et les hommes. Philosophes et écrivains religieux et politiques. XXV « Edgar Quinet »

Quand on veut donner une notion nouvelle de la Création et du Créateur, quand on croit tenir le secret du monde, la plume et la langue peuvent fourcher. […] Armé de cette puissance qui est la somme de vie de tous les êtres apparus sur le globe, je défie la mort, je brave le néant… Lorsque je vois cette lente progression, depuis le tribolite, premier témoin effaré du monde naissant, jusqu’à la race humaine, et tous les degrés vivants de l’universelle vie s’étayer l’un sur l’autre, et tous ces yeux ouverts, ces pupilles d’un pied de diamètre qui cherchent la lumière, toutes ces formes qui s’étagent l’une sur l’autre, tous ces êtres qui rampent, nagent, marchent, courent, bondissent, volent au-devant de l’esprit, comment puis-je croire que cette ascension soit arrêtée à moi, que ce travail infini ne s’étende pas au-delà de l’horizon que j’embrasse ? […] La conception du monde n’est pas, dans le livre de Quinet, le devenir d’Hegel, la seule conception que la philosophie puisse opposer, pour l’heure, à l’idée biblique et chrétienne, les autres étant trop indécemment sottes pour compter. […] » Dans le crâne plus élevé d’Engis, il trouve « derrière ce front bosselé un petit monde d’idées déjà hautes, premières lueurs entrevues d’une société durable, — (quoiqu’elle n’ait pas duré, ) — premier instinct de l’art du dessin, pressentiment d’un dieu naissant, crainte et stupeur du fétiche… » Il n’a, lui, crainte ni stupeur de la bêtise. « Physiologie, — dit-il en se résumant, avec une sécurité grave, — physiologie du monde quaternaire. […] Elle ressemble à celle des Indiens, qui mettent le monde sur un éléphant, l’éléphant sur un œuf, l’œuf sur rien.

594. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre V. Les contemporains. — Chapitre II. Le Roman (suite). Thackeray. »

Attendez pour juger le monde que vous ayez vu le monde, et ne vous croyez pas maîtres quand vous êtes écoliers. […] Comme nous savons, lorsqu’elle vient nous rendre visite, découvrir l’occasion d’apprendre à nos amis sa position dans le monde ! […] Pas le moins du monde. […] le monde imaginaire ne suffit pas aux âmes blessées, et le désir de l’idéal, pour s’assouvir, se rabaisse enfin jusqu’aux êtres de la terre. […] Elle le dénonce aux créanciers avec une indignation vraie et le foudroie de la meilleure foi du monde.

595. (1903) La pensée et le mouvant

Elle ne commencerait pas par définir ou décrire l’unité systématique du monde : qui sait si le monde est effectivement un ? […] Ne fût-ce que parce que ses extrémités devront s’appliquer exactement sur celles de la science positive, notre métaphysique sera celle du monde où nous vivons, et non pas de tous les mondes possibles. […] Pourquoi le monde n’est-il pas incohérent ?  […] Mais ce monde n’est qu’une abstraction. […] Ravaisson aimait le monde.

596. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre cinquième. La Bible et Homère. — Chapitre premier. De l’Écriture et de son excellence. »

Ne dirait-on pas que tout est grand et simple dans Moïse, comme cette création du monde, et cette innocence des hommes primitifs, qu’il nous peint ; et que tout est terrible et hors de la nature dans le dernier prophète, comme ces sociétés corrompues, et cette fin du monde, qu’il nous représente ? […] Or, il est certain qu’on trouve dans l’Écriture : L’origine du monde et l’annonce de sa fin ; La base des sciences humaines ; Les préceptes politiques depuis le gouvernement du père de famille jusqu’au despotisme ; depuis l’âge pastoral jusqu’au siècle de corruption ; Les préceptes moraux applicables à la prospérité et à l’infortune, aux rangs les plus élevés, comme aux rangs les plus humbles de la vie ; Enfin, toutes les sortes de styles ; styles qui, formant un corps unique de cent morceaux divers, n’ont toutefois aucune ressemblance avec les styles des hommes.

597. (1907) Propos littéraires. Quatrième série

Les montagnes, la mer, pas le moins du monde ! […] Il y a du bien dans le monde et du mal. […] Le monde évolue. […] Ainsi va l’opéra, ainsi va le monde. […] D’abord le monde prolétaire et socialiste.

598. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Benjamin Constant et madame de Charrière »

Il voit le monde de Mme Suard, il suit les cours de La Harpe au Lycée, il dîne avec Laclos. […] « J’ai le plus joli appartement du monde. […] car il est vraiment aimable, vu avec beaucoup de monde. […] Savez-vous, ma chère grand’mère, que je vais dans le grand monde deux fois par semaine ? […] Je vois, j’écoute, et jusqu’à ce moment je n’envie pas les plaisirs du grand monde.

599. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Sismondi. Fragments de son journal et correspondance. »

Pour bien apprécier et goûter, comme je le fais, cette Correspondance de Sismondi, il faut absolument se déplacer un peu, se figurer la situation des correspondants telle qu’elle était, les revoir dans leur monde et à leur point de vue. […] Elle l’accusait de trop de jeunesse dans les impressions, de voir le monde trop en beau, de juger trop indulgemment les hommes ; il lui répondait de Paris, le 2 mars 1815 ; « Notre dissentiment tient à ce que vous vous attachez aux personnes, et moi aux principes. […] La vie politique était encore trop agitée pour que les hommes d’un esprit supérieur dirigeassent leurs spéculations vers le monde des esprits. […] Il était homme de cabinet et homme du monde, sans que l’un nuisît à l’autre. Il se mettait au travail à six heures du matin, travaillait jusqu’à midi ; le reste du jour se passait en visites et dans le monde.

600. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Chateaubriand — Chateaubriand, Mémoires »

Qu’il en soit du monde moral comme il en est aujourd’hui de l’univers et du ciel physique. […] Faisons quelque chose d’analogue dans le monde de l’esprit et de la société. […] Après le xviiie siècle, qui est en général sec, analytique, incolore ; après Jean-Jacques, qui fait une glorieuse exception, mais qui manque souvent d’un certain velouté et d’épanouissement ; après Bernardin de Saint-Pierre, qui a bien de la mollesse, mais de la monotonie dans la couleur, M. de Chateaubriand est venu, remontant à la phrase sévère, à la forme cadencée du pur Louis XIV, et y versant les richesses d’un monde nouveau, les études du monde antique. […] Et pour ce qui est des contradictions, des luttes, des alternatives entre cet esprit chrétien, une fois ressaisi, et le monde avec ses passions, ses doutes et ses combats, qui de nous ne les a éprouvées en son cœur ? […] (Ici, dans la Revue des Deux Mondes du 15 avril 1834, suivait l’extrait indiqué, trop long, par malheur, pour être reproduit en ce lieu.)

601. (1867) Cours familier de littérature. XXIV « CXLIVe entretien. Mélanges »

Telle était au juste ma demi-célébrité dans un monde où elle m’avait pour ainsi dire devancée ; cela me valait un accueil peu répandu, mais charmant. […] Rien de tout cela ne me plaisait, mais je le regardais comme un homme d’une autre chair et d’une autre âme, destiné à jouer un grand rôle dans un monde à part ; ce monde de la haine et de la colère, le jacobin noir de la révolution posthume du dix-neuvième siècle. […] Ce jacobinisme par versets bibliques, c’était Babeuf en Ephod hébraïque, Proudhon socialiste faisant un tremblement de terre pour égaliser tout le monde par la ruine de tout ce qu’on appelait société, un chaos de débris pour un monde réformé par le radicalisme. […] Cintrat, le chef des archives, en le priant de chercher avec bienveillance un emploi de chancelier consulaire, fût-ce même dans la cinquième partie du monde, dans cette Océanie où l’Angleterre avait appelé à Sidney des consuls européens. […] Il avait épousé l’actrice d’un petit théâtre, objet de sa passion, et elle n’avait pas hésité à suivre au bout d’un autre monde la destinée qui s’était perdue pour elle dans ce monde-ci.

602. (1888) Revue wagnérienne. Tome III « I »

Gasperini, et après lui Jullien et d’autres, cite cette phrase de Tristan : « C’est moi-même qui suis le monde. » Mais est-ce là du Schopenhauer ? […] Dans ces écrits il a examiné l’art d’abord, sous tous les points de vue possibles, absolus et contingents, et ensuite le monde — l’état, la religion, la société, etc. — Au point de vue exclusif de l’artiste, donnant ainsi une théorie complète du monde, non point philosophique, mais artistique. […] Deux philosophes ont seuls exercé de l’influence sur lui, Feuerbach et Schopenhauer, et tous deux en tant seulement qu’ils abandonnaient le domaine de la philosophie pure, c’est-à-dire d’une théorie logique et mathématique du monde. […] Enfin, ce n’est pas la théorie philosophique en tant qu’explication abstraite du monde et basée sur ces déductions logiques, qui « gagna » Wagner, mais la théorie de l’art, notamment celle de la musique, ainsi que la morale (comme on vient de le voir par la phrase citée). […] La lecture de ses textes est une véritable révélation pour le compositeur et principalement de son ouvrage le plus connu  : Le Monde comme volonté et représentation, publié en 1818 et remanié en 1844.

603. (1897) Un peintre écrivain : Fromentin pp. 1-37

Non seulement il était peintre, mais encore il était homme du monde. […] Je ne dis pas qu’il suffise d’être du monde pour en parler, mais il est difficile d’en parler si on n’en est pas. […] Quel monde de héros s’est ainsi, d’âge en âge, superposé au monde des vivants et des morts ! […] Elle ne consiste pas à admirer, en homme du monde et pour des hommes du monde, la peinture des maîtres flamands ou hollandais, ce qui est un exercice littéraire, et le mode en général adopté ; elle n’a pas pour but premier de faire voir le tableau à ceux qui ne l’ont pas vu, ou de le rappeler aux autres : elle va bien plus avant, elle explique le milieu où chaque maître a vécu, les influences qui l’ont formé, la qualité de son œil, l’idéal poursuivi, le procédé, le métier dont chacun a usé. […] Aujourd’hui, le monde plus large ouvert des esprits cultivés le sent et vous remercie.

604. (1860) Cours familier de littérature. IX « LIe entretien. Les salons littéraires. Souvenirs de madame Récamier. — Correspondance de Chateaubriand (3e partie) » pp. 161-240

Décidément je ne puis supporter la vie du monde ; c’est auprès de vous seule que je retrouverai tout ce qui me manque ici. […] Ma retraite des affaires pour toujours est devenue dans ma tête une idée fixe ; je la porte dans le monde et à la promenade. […] La France, bien conduite, peut sauver le monde, un jour, par ses armes et par ses lois : tout cela n’est plus de moi. […] « Mon vieil ami, je vous envie ; vous pouvez très bien vous passer de ce monde, dont je ne sais que faire. […] Je mets à vos pieds la plus belle aurore du monde, qui éclaire le papier sur lequel je vous écris.

605. (1857) Cours familier de littérature. IV « XXe entretien. Dante. Deuxième partie » pp. 81-160

Il n’y a là d’autre fait que le songe d’un homme éveillé, qui est enlevé au monde réel par sa vision et qui se transporte imaginairement dans les mondes surnaturels : voyage à travers l’infini. […] dont la renommée dure encore dans ce bas monde et durera autant que ce monde lui-même ; « “L’ami de mon cœur, et non de ma fortune, est là sur la plage déserte, tellement embarrassé de trouver sa voie que l’effroi lui fait rebrousser son chemin ! […] Dante ne pouvait manquer de retrouver dans l’autre monde ceux dont la triste aventure l’avait si fortement ému dans celui-ci. […] quand tu seras remonté dans le monde des vivants et reposé de ton long voyage », lui dit-elle, « souviens-toi de moi, qui suis la Pia. […] C’est de cela que le cochon de saint Antoine s’engraisse, et bien d’autres qui sont pires que des porcs, payant le monde en fausse monnaie ! 

606. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « XVIII. J.-M. Audin. Œuvres complètes : Vies de Luther, de Calvin, de Léon X, d’Henri VIII, etc. » pp. 369-425

Il l’emportait sur la montagne et le tentait en lui déroulant le triple monde de la passion, de la réalité et des chimères. […] Homme du monde par les extériorités de sa vie, Audin semble être resté prêtre par le centre, par l’esprit et par le savoir. […] C’était la même série d’études, mais c’était un autre homme à mettre debout, un autre monde à lever de la tombe, une autre erreur à démontrer. […] Le monde moderne est surtout sorti de Calvin, ce fils de scribe qui n’avait rien de prêtre ; il en est sorti plus que de Luther, qui a du moine encore, même après son apostasie. […] Un jour cependant, le malheur, pour parler comme le monde, passa dans cette vie inénarrable.

607. (1896) Les Jeunes, études et portraits

lui crie la morale du monde. […] C’est la « tragédie » dans le monde. […] Mais il a l’horreur du monde. […] On annonce sa découverte au monde. […] Et sans doute entré le monde invisible et notre monde il y a d’intimes concordances.

608. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Entretiens de Gœthe et d’Eckermann (suite) »

Après son premier jet poétique et sa première moisson si riche, si puissante et comme indomptable, il s’apaisa, parut avoir tout donné, et se mit à étudier le monde en savant. […] Gœthe n’était pas un physicien, un géomètre ; mais il était un naturaliste, il avait à un haut degré le génie de l’histoire naturelle, le sens et le tact du monde organique, et, de ce côté, en se confiant en sa force, il ne se trompait pas. […] Soyons juste : l’ambition était par trop grande à lui de prétendre régner aussi dans les sciences ; cette monarchie universelle n’est donnée à personne, même dans le monde des esprits. […] Je devais, après mon Gœtz et mon Werther, vérifier le mot d’un sage : « Lorsqu’on a fait quelque chose qui plaît au monde, le monde sait, s’arranger de manière à ce qu’on ne recommence pas. » En d’autres heures pourtant et dans l’habitude de la vie, il appréciait mieux son rare bonheur : ce bonheur avait été de venir à temps, en tête d’une grande époque qui naissait et qu’il avait en partie dirigée et conduite : « Je suis bien content, disait-il gaiement un jour qu’il venait de lire de jolis vers d’un tout jeune poëte, de n’avoir pas aujourd’hui dix-huit ans. […] Mais, dans l’état actuel, il faut qu’il se maintienne toujours dans un certain milieu ; il faut qu’il pense que ses œuvres iront dans les mains d’un monde mêlé, et il est par là obligé de prendre garde que sa trop grande franchise ne soit un scandale pour la majorité des esprits honnêtes.

609. (1892) Boileau « Chapitre VII. L’influence de Boileau » pp. 182-206

Mais il est vrai que ces œuvres lui sont un peu supérieures, et ce que nous y voyons aujourd’hui de défectueux et de mort, fut nécessaire alors pour établir la communication entre elles et le public : c’est par ces formes passagères et fragiles que le monde abordait, par exemple, Bajazet, ou Phèdre, et s’élevait de là aux essentielles et solides beautés du poème. […] Lié avec Mme de Scudéry, tenant par sa jeunesse au monde précieux, Bussy se trouve sur la fin de ses jours tout proche de Perrault et de Fontenelle, trop grand seigneur et trop bon esprit pour s’embrigader dans un parti littéraire, mais insensiblement et naturellement porté de ce côté par la pente de son esprit. […] Cette société reçut l’Art poétique comme le code officiel et pour ainsi dire le livre sacré du bon goût : et ce préjugé une fois reçu se tourna en lourde tyrannie, parce que dans le monde il est de mauvais ton de ne pas penser comme tout le monde. […] Le monde interprète les règles selon l’esprit mondain : il y voit des « convenances » dont il n’y a pas à demander la raison, et qui sont souveraines parce qu’elles sont. Le monde fait ce qui se fait : voilà la loi du monde, et voilà pourquoi il faut faire une tragédie comme il est établi qu’on fait les tragédies.

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