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861. (1824) Ébauches d’une poétique dramatique « Observations générales, sur, l’art dramatique. » pp. 39-63

Voltaire y a rarement manqué. […] Nos grands maîtres n’y manquent jamais. […] Il veut encore qu’en composant on imite les gestes et l’action de ceux qu’on fait parler ; car, de deux hommes qui seront d’un égal génie, celui qui se mettra dans la passion sera toujours plus persuasif : et une preuve de cela, c’est que celui qui est véritablement agité, agite de même ceux qui l’écoutent ; celui qui est en colère, ne manque jamais d’exciter les mêmes mouvements dans le cœur des spectateurs.

862. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Du Rameau » pp. 288-298

La scène entière est ordonnée d’enthousiasme ; tout y est bien d’action et de position, rien n’y manque que l’intelligence et le pinceau de Rubens, la magie de l’art, la distinction des plans, de la profondeur. […] ô mon ami, la belle occasion que cet artiste a manquée, de montrer l’extravagante barbarie de la question ! […] Le saint a la tête relevée sur son chevet, et les mains jointes sur sa poitrine ; cette tête est de toute beauté, le saint bien senti dans son lit, et les couvertures annoncent parfaitement le nu. à cette composition si vraie dans toutes ses parties il n’a manqué, pour être la plus belle qu’il y eût au sallon, que d’être peinte ; car elle ne l’est pas.

863. (1860) Ceci n’est pas un livre « Une croisade universitaire » pp. 107-146

mon Dieu, si ce monsieur a manqué de respect aux palmes vertes, tancez-le comme il le mérite, ce sera bien fait ; et je serai le premier à rire des bons coups de batte que vous lui appliquerez sur les épaules. […] Cette audace me vaudra la qualification de Jeune-France, et vous ne manquerez pas de dire que je suis sorti hier soir de la première représentation d’Hernani. […] Duchesne écrivit un jour qu’Henry d’Audigier avait manqué ses classes à l’École normale, et que, vu sa faiblesse notoire, il se faisait confectionner ses versions latines et ses discours français par toi ou ton copin Sarcey.

864. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « M. de Sénancour — Oberman, édition nouvelle, 1833 »

Élève de Jean-Jacques pour l’impulsion première et le style, comme madame de Staël et M. de Chateaubriand, mais, comme eux, élève original et transformé, quoique demeuré plus fidèle, l’auteur des Rêveries, alors qu’il composait Oberman, ignorait que des collatéraux si brillants, et si marqués par la gloire, lui fussent déjà suscités ; il n’avait lu ni l’Influence des Passions sur le Bonheur, ni René ; il suivait sa ligne intérieure ; il s’absorbait dans ses pensées d’amertume, de désappointement aride, de destinée manquée et brisée, de petitesse et de stupeur en présence de la nature infinie.  […] (Depuis l’espèce de résurrection que nous avons tentée d’Oberman, les admirateurs n’ont pas manqué à ce morne et triste génie ; il faut mettre en tête George Sand, qui a honoré la troisième édition d’une préface.

865. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Relation inédite de la dernière maladie de Louis XV. »

Ses troupes feront mieux leur devoir, et les généraux n’oseront pas manquer si ouvertement au leur… » On touche là les ficelles de la campagne tant célébrée de 1744. […] C’est dans cette conviction qu’en livrant ces pages au public, nous sommes assuré de ne manquer en rien ni à la mémoire ni à la pensée de celui qui les a écrites.

866. (1874) Premiers lundis. Tome I « M. A. Thiers : Histoire de la Révolution française — II. La Convention après le 1er prairal. — Le commencement du Directoire. »

L’Ouest ne manquait pas de partisans braves et fidèles, de chefs intelligents et intrépides : on les mit en avant à la légère, on les leurra de vaines promesses. […] Thiers, un prince sorti de ces retraites pour remonter sur le trône de ses pères n’eût pas été moins glorieux que Gustave Wasa sorti des mines de la Dalécarlie. » Tout manqua donc, grâce à tant de fautes, grâce surtout au génie guerrier et pacificateur de Hoche.

867. (1874) Premiers lundis. Tome II « Loève-Veimars. Le Népenthès, contes, nouvelles et critiques »

Quant à Racine, j’eusse à peine remarqué peut-être ce qu’il y a d’insuffisant et d’un peu maigre, même d’un peu aigre, dans la part qui lui est faite, attribuant ce défaut au manque d’espace ce jour-là, et comptant sur une prochaine revanche, si, dans un dernier feuilleton, non encore recueilli, je n’avais lu sur le pauvre auteur de Phèdre l’accusation grave d’être, j’ose au plus le répéter, … d’être un intrigant, et d’avoir cabalé à la cour et chez les grands seigneurs favoris contre Pradon, tandis que Pradon cabalait à l’hôtel de Nevers et au théâtre contre Racine lui-même. […] Mais cette dernière erreur, si erreur il y a, ne me paraît pas comparable en témérité et en déviation à l’idée de faire de Racine un Molière ou un Aristophane manqué.

868. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre XI. Trois bons médanistes : Henry Céard, Joris-Karl Huysmans, Lucien Descaves » pp. 145-156

C’est un intéressant métier qu’on peut élever à l’art, et Huysmans n’y a pas manqué. […] Rien qu’il envie ne manque à sa gloire ; car la renommée lui serait insupportable.

869. (1920) La mêlée symboliste. I. 1870-1890 « Les poètes maudits » pp. 101-114

Il est incontestable que l’Image a plus d’activité poétique que l’Idée, mais elle manque de sanction. […] Mais comment nos critiques à tant la ligne pourraient-ils suivre cet exemple, eux, qui manquent de goût pour discerner le beau et qui adorent la réclame au point de s’intéresser plutôt aux œuvres bruyantes qu’aux œuvres vraiment belles ?

870. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XV » pp. 175-187

Il lui manquait d’être roi de fait ; il le fut. […] Enfin, on citait comme locution précieuse, cette modeste phrase : Je sais bien ce que je veux dire, mais le mot me manque.

871. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Corneille, et le cardinal de Richelieu. » pp. 237-252

C’est qu’il sçavoit bien que la plus grande partie de l’académie étoit gagnée par le cardinal, & que la décision que porteroit cette compagnie naissante, formée sous ses auspices, ne pouvoit manquer d’être favorable à son protecteur. […] Les académiciens manquèrent cependant quelquefois de jugement.

872. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome II « Querelles générales, ou querelles sur de grands sujets. — Première Partie. Des Langues Françoise et Latine. — L’orthographe, et la prononciation. » pp. 110-124

Quelque sentiment qu’on embrasse pour ou contre, on ne manquera jamais de partisans & de raisons Le moyen de sçavoir à quoi s’en tenir c’est d’aller à la source, de consulter les gens de cour, & les gens de lettres. En général, il nous manque un bon traité de prosodie, c’est à l’académie Françoise à nous en donner un aussitôt qu’elle aura terminé son grand dictionnaire.

873. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Madame Therbouche » pp. 250-254

Ce n’est pas le talent qui lui a manqué, pour faire la sensation la plus forte dans ce pays-ci, elle en avait de reste, c’est la jeunesse, c’est la beauté, c’est la modestie, c’est la coquetterie ; il fallait s’extasier sur le mérite de nos grands artistes, prendre de leurs leçons, avoir des tétons et des fesses, et les leur abandonner. […] Je ne dis pas qu’on en eût mieux fait d’admettre ce tableau, et que le comité n’eût pas manqué de respect au public et outragé les bonnes mœurs.

874. (1905) Les ennemis de l’art d’écrire. Réponse aux objections de MM. F. Brunetière, Emile Faguet, Adolphe Brisson, Rémy de Gourmont, Ernest Charles, G. Lanson, G. Pélissier, Octave Uzanne, Léon Blum, A. Mazel, C. Vergniol, etc… « II »

Rien n’est admirable comme l’intrépide conviction de ce manque éternel de conviction. […] Ces athées placent leur foi dans leur manque de principes ; ils ne sont jamais sûrs des autres, mais ils sont toujours sûrs d’eux-mêmes.

875. (1905) Les ennemis de l’art d’écrire. Réponse aux objections de MM. F. Brunetière, Emile Faguet, Adolphe Brisson, Rémy de Gourmont, Ernest Charles, G. Lanson, G. Pélissier, Octave Uzanne, Léon Blum, A. Mazel, C. Vergniol, etc… « XIV »

Saint-Simon n’en a point et Molière en manque. — Employer des métaphores qui se suivent ? […] Sans doute, avec Chateaubriand, qui les nomme les écueils de notre langue, avec Flaubert qui les poursuit sans relâche, nous blâmons l’abus des qui et des que, le manque d’harmonie et bien d’autres choses ; mais M. 

876. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « Notre critique et la leur »

ce n’est pas la fonction qui manque au titulaire ; c’est plus souvent ce titulaire qui manque à la fonction.

877. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Tourgueneff »

Il y a plus : quand il écrit pour son propre compte, c’est un esprit froid, dont le style est pâle et manque de relief. […] Quand un livre n’est qu’impressions et détails, quelques hachures inspirées, quelques morsures d’une plume métallique qui sait enlever un profil d’horizon ou un profil de visage, quand il manque, enfin, comme celui-ci, de plan, d’ordonnance et d’architecture, l’analyse devient impossible.

878. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Dante »

J’augure très bien de ce jeune homme, et voici pourquoi : il se soucie plus de bien penser que de bien écrire, de montrer du bon sens que du style, ce qui est déjà très peu jeune homme, et malgré son inexpérience et sa méprise de respects pour des gens qu’il apprendra promptement à juger et qu’il saluera moins bas plus tard, il ne manque vis-à-vis de son sujet ni de hardiesse ni d’indépendance. […] Bien des choses lui manquent, nous le savons et il le sait aussi, mais il y a peut-être un critique futur dans cet enfant qui n’a pas craint de regarder le Dante au front, de voir la ride sous le laurier, l’infirmité humaine sous le rayon, et qui n’a pas eu peur de chercher la tache dans une telle splendeur de lumière.

879. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « V. Saint-René Taillandier »

Il n’y a que les perles qui manquent ici. […] C’est comme cette liberté religieuse qui manque à la France !

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