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816. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME DE CHARRIÈRE » pp. 411-457

On a parlé de nouvelles, et on a raconté, entre autres, le mariage d’une jeune personne du pays de Vaud, qui épouse un homme riche et très-maussade, tandis qu’elle est passionnément aimée d’un étranger sans fortune, mais plein de mérite et d’esprit. […] c’est du moins une obligation éternelle que vous m’aurez imposée ; et vous ne pourrez jamais repousser ma reconnaissance, mon respect, mes services, mon dévouement. — Je ne les repousserai pas, m’a-t-elle dit avec des accents enchanteurs ; mais c’est bien plus que je ne mérite. […] Mais n’oubliez pas, pour vous la figurer aussi jolie qu’elle l’est, une certaine transparence dans le teint ; je ne sais quoi de satiné, de brillant, que lui donne souvent une légère transpiration ; c’est le contraire du mat, du terne ; c’est le satiné de la fleur rouge des pois odoriférants. » On commence de tous côtés à faire la cour à Cécile ; elle n’a qu’à choisir entre les amants : un cousin ministre, un Bernois de mérite… ; mais, décidément, le préféré de la jeune fille est un petit milord en passage, qui lui fait la cour assez tendrement, mais ne se déclare pas. […] Cécile ne se fait pas illusion ; elle voit bien qu’elle ne remplit pas, comme elle le mérite, ce cœur du petit Lord trop léger ; deux larmes brillent dans ses yeux en le confessant, et pourtant elle garde sa préférence ! […] Déjà cette conversation me fait quelque bien ; mais j’étais au désespoir quand je vous voyais tout occupée de vous et d’un certain mérite que vous voulez avoir, et avec lequel vous laisseriez tranquillement souffrir tout le monde… » Ainsi encore, quand Émilie, sur l’aveu de Mme de Vaucourt que ses biens avaient été mal acquis, cherche à lui donner des scrupules, celle-ci, après une justification de son motif, ajoute en souriant : « Cependant, permettez-moi de vous dire que l’on pourrait vous chicaner à votre tour sur bien des choses que vous trouvez toutes simples, et cela parce qu’elles vous conviennent et que vos principes s’y sont pliés peu à peu. — Que voulez-vous dire ?

817. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « Granier de Cassagnac » pp. 277-345

Nous ne pensons pas que son Histoire du Directoire égale en mérites son Histoire des causes de la Révolution française, mais il fallait le talent de l’une pour écrire l’autre, dans son infériorité belle encore. […] Selon nous, le mérite de ce premier volume est particulièrement dans le détail poignant des maux de la patrie, dont pas un seul n’est oublié. […] Voilà, sans compter beaucoup d’autres, sur lesquels nous allons revenir, le premier et le principal mérite du livre de Granier de Cassagnac : c’est le livre d’un homme qui n’a rien pressenti, mais qui a tout compris, et qui, naturellement, par le fait de ses facultés éminemment politiques, s’est trouvé immédiatement, par la raison, par l’observation sur le vif, par les conclusions arrêtées, de niveau avec l’histoire des temps présents. […] Cette qualité inconnue aux anciens, qui composaient grandement l’histoire, mais qui n’y jetaient pas la vie dans les proportions où la pensée moderne a le besoin de l’y verser, est le mérite le plus en saillie du talent très riche et très complexe de Cassagnac. […] XIII Quel que soit le livre… Mais le livre a de hauts mérites.

818. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Shakespeare »

Le chemin qu’il a fait mérite d’être apprécié dans les difficultés qu’il a surmontées, et ces difficultés né sont peut-être pas, quand on y réfléchit, là où l’imagination a coutume de les chercher. […] À côté d’Hamlet, de Richard III, d’Othello, de Macbeth, traduits en ces six volumes, auxquels l’imagination et la curiosité vont d’abord et qui sont le plus beau bleu du ciel de Shakespeare, il s’y trouve des pièces de théâtre moins radieuses, qui suffiraient cependant à la gloire d’un homme qui ne serait pas Shakespeare, et avec les difficultés desquelles François Hugo s’est noblement colleté… Le mérite du traducteur, qui est un mérite volontaire, continu, modeste, courageux, une vertu encore plus qu’un talent, a été le sien, et pourquoi ne pas le dire ? un mérite qu’on n’attendait pas de celui qui, dix ans auparavant, écrivait l’Événement. […] Je ne dis point en termes formels : la traduction intégrale de Shakespeare entreprise par François Hugo est-elle, absolument parlant, le chef-d’œuvre que mérite Shakespeare et que l’on désirerait qu’elle fût ? […] C’est la comédie encore plus que la tragédie qui fait le mérite sans pareil du poète anglais dans son drame de Roméo et Juliette.

819. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Discours sur le système et la vie de Vico » pp. -

Le dernier titre mérite une explication : les philosophes ne tirèrent point leurs systèmes d’Homère, quoiqu’ils cherchassent à les autoriser de ses fables ; mais ils y trouvèrent réellement une occasion de recherches, et une facilité de plus pour exposer et populariser leurs doctrines. […] La justice de ce dernier âge considère le mérite des faits et des personnes ; une justice aveugle serait faussement impartiale ; son égalité apparente serait en effet inégalité. […] À l’avènement de la maison de Bourbon, sa condition sembla s’améliorer, il fut nommé historiographe du roi, et obtint que son fils, Gennaro Vico, dont on connaissait le mérite et la probité, lui succédât comme professeur ; mais ces faveurs venaient bien tard. […] On commençait dès lors à connaître son mérite, et les théatins cherchaient à le faire entrer dans leur ordre ; comme il n’était point gentilhomme, ils offraient de lui obtenir une dispense du pape. […] Vie pure et tranquille, plaisirs honnêtes et modérés, gloire et trésors acquis par le mérite, paix céleste de l’âme, (et ce qui est plus poignant à mon cœur) amour dont l’amour est le prix, douce réciprocité d’une foi sincère !

820. (1841) Matinées littéraires pp. 3-32

La critique, telle que nous la comprenons, est fille du bon sens et du bon goût ; elle s’attache à reconnaître, à découvrir le mérite réel des écrivains, et tout en cherchant à nous garantir d’une vénération aveugle et irréfléchie, elle se complaît à éveiller en nous le sentiment du beau, en nous faisant partager son enthousiasme pour ce qui lui paraît digne d’admiration. […] L’une reconnaît plus vite la réalité du mérite dans un ouvrage, l’autre en découvre plus aisément la fausseté. […] Assurément, le talent de bien parler mérite d’être placé au-dessus du talent de bien lire ; et cependant il semble que le nombre des bons lecteurs soit plus restreint encore que celui des bons orateurs. […] Il s’installe au fauteuil en empereur Auguste : Il s’arme d’un lorgnon qu’à son œil il ajuste : Il prend un air tragique, et quand il a trois fois Éloquemment toussé pour éclaircir sa voix, Il laisse à son rival, certain de son mérite, L’honneur de commencer pour l’écraser ensuite.

821. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre II — Chapitre quatrième »

Il n’y fait allusion qu’en un seul endroit, dans un dizain où il se prononce pour la doctrine orthodoxe du mérite des œuvres : La foi sans œuvre est morte et endormie. […] Le mérite en est si grand qu’il ne saurait être diminué par les erreurs que Du Bellay mêle à ces vues et notamment par le conseil d’imiter les modernes. […] « L’illustre Ronsard, dit Pasquier dans ses Recherches, a porté la poésie française à sa perfection, ou jamais elle n’y parviendra. » Montaigne d’un sens si juste, ne le trouve guère éloigné de la perfection ancienne, « aux parties en quoy il excelle87. » Exemple éclatant de l’illusion où sont toujours les contemporains, fût-ce des esprits excellents sur le mérite d’un auteur. […] Nouvelle preuve que, dans l’impuissance où nous sommes d’échapper à l’illusion sur les choses et les hommes de notre temps, les envieux en savent plus sur le mérite réel des auteurs contemporains que leurs admirateurs les plus sincères.

822. (1904) Prostitués. Études critiques sur les gens de lettres d’aujourd’hui « Chapitre IX. Le trottoir du Boul’ Mich’ »

Leur plume généreuse accorde du talent à tous les imbéciles, un peu plus de talent tout de même aux gens de mérite. […] il n’a même pas les médiocres mérites qu’elle est capable de supporter. […] Un poète vint, qui avait toutes les qualités de Racan à un degré supérieur et qui y joignait quelques mérites nouveaux ; qui aimait d’une sincérité première et spontanée, et qui, d’un accent plus pénétré, chantait comme les plus précieux des biens, ce qui n’était pour Racan que des consolations. […] C’est, intéressante peut-être par le sujet traité et par l’abondance de la documentation, une thèse avec tous les mérites lourds et ennuyeux du genre.

823. (1917) Les diverses familles spirituelles de la France « Chapitre vii »

Ils ont reçu la France, leur trésor familial, et veulent laisser une France plus belle et une famille plus riche en mérites. […] Si les paroles de la troisième Béatitude s’appliquent aux nations comme aux individus, elle mérite d’avoir un bel avenir.‌ […] J’ai, je crois, plus profité des circonstances que de mon mérite. […] Nul de ces jeunes morts qui ne mérite son portrait, une étude, son reliquaire.

824. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — L — Lemoyne, André (1822-1907) »

André Lemoyne mérite une mention spéciale parmi les fins ouvriers du style.

825. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — F. — article » pp. 337-339

Ces deux Ouvrages, sans avoir le mérite de l’élégance dont ils peuvent se passer, ont celui de l’intérêt, de la clarté, de la simplicité, de la facilité, & de l’onction, qui vaut bien la sécheresse, l’obscurité, l’enflure, l’entortillage & la morgue des Productions philosophiques.

826. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — G — article » pp. 430-432

M. l’Abbé de Gourcy a publié depuis un Essai sur le bonheur, qui mérite d’être lu par les personnes qui désirent de tirer le plus grand parti possible des avantages & des inconvéniens attachés à la vie de ce bas monde.

827. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — S. — article » pp. 188-189

On sent que l’Auteur sait penser & faire penser, mérite aussi rare qu’utile ; qu’il a du goût & de la raison, de l’imagination, & de la sensibilité.

828. (1913) Essai sur la littérature merveilleuse des noirs ; suivi de Contes indigènes de l’Ouest-Africain français « Contes — XIV. Le procès funèbre de la bouche »

dit-il, elle s’attribuait des mérites qu’elle n’avait nullement !

829. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Nouvelles lettres de Madame, mère du Régent, traduites par M. G. Brunet. — I. » pp. 41-61

La jeune fille fut confiée à un certain moment aux soins de sa tante Sophie, l’électrice de Hanovre, personne de mérite, pour laquelle elle conserva toujours les sentiments et la reconnaissance d’une fille tendre. […] Il y avait alors dans le royaume un roi digne de l’être, avec toutes les qualités qu’on sait, au milieu des défauts que chacun concourait à favoriser et à recouvrir ; un roi homme de mérite, « toujours maître et toujours roi, mais plus honnête homme encore et plus chrétien qu’il n’était maître et roi : C’est ce mérite qui la toucha, dit très bien le père Cathalan.

830. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « M. de Stendhal. Ses Œuvres complètes. — I. » pp. 301-321

C’est du critique seul que je m’occuperai aujourd’hui, et il le mérite bien par le caractère singulier, neuf, piquant, paradoxal, bien souvent sensé, qu’il nous offre encore, et qui frappa si vivement non pas le public, mais les gens du métier et les esprits attentifs de son temps. […] Cela dit, il faut, pour être juste, reconnaître que le théâtre moderne, pris dans son ensemble, n’a pas été sans mérite et sans valeur littéraire ; les théories ont failli ; un génie dramatique seul, qui eût bien usé de toutes ses forces, aurait pu leur donner raison, tout en s’en passant. […] L’objection subsiste, et, sous une forme plus générale, il mérite qu’on la maintienne contre lui.

831. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « L’abbé de Marolles ou le curieux — II » pp. 126-147

Voltaire, dans sa liste des écrivains français du siècle de Louis XIV, lui accorde du moins ce genre de mérite : « Michel, abbé de Villeloin, composa soixante-neuf ouvrages, dont plusieurs étaient des traductions très utiles dans leur temps. » Un écrivain de ce temps-là même, Sorel, dans sa Bibliothèque française, semble mettre ce fait d’utilité hors de doute, lorsque dans une page laudative, et que Marolles n’eût pas écrite autrement si on la lui eût demandée, il disait : Entre tous les auteurs qui se sont occupés à traduire dans ce siècle-ci, on n’en saurait nommer un qui ait travaillé à plus d’ouvrages et avec une assiduité plus grande qu’a fait M. de Marolles, abbé de Villeloin. […] C’est son refrain perpétuel dans ses préfaces qui, à mesure qu’il avance en âge, ne sont plus qu’une longue lamentation : « Il ne suffit pas toujours, disait-il, de faire un bel ouvrage pour en acquérir de la réputation à son auteur, il lui faut encore des amis affectionnés et puissants en crédit pour l’établir dans l’opinion du monde : le peuple n’est pas capable de lui-même d’en connaître le mérite. » Marolles s’estime ainsi victime du mauvais vouloir ou de l’indifférence, à son égard, des principaux oracles de l’opinion ; il croit volontiers à la conspiration du silence. […] À côté d’une faculté qui dévie et qui divague, il peut, dans le même homme, s’en rencontrer une autre où il excelle et où il mérite d’être considéré ; et tel qui le raille aisément pour des défauts qui sautent aux yeux, aurait tout profit d’aller à son école pour la qualité qu’il a.

832. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Journal et mémoires du marquis d’Argenson, publiés d’après les manuscrits de la Bibliothèque du Louvre pour la Société de l’histoire de France, par M. Rathery » pp. 238-259

De son côté, M le ministre d’État52, en donnant et en maintenant l’autorisation nécessaire pour la publication d’un manuscrit appartenant à l’une des bibliothèques particulières de l’empereur, mérite aussi, et plus que personne, les remerciements des amis des études historiques. […] Parlant d’un intendant de mérite, mais dur et violent, qui était devenu inapplicable, il le juge, en faisant quelque retour sur lui-même : L’intendant d’Aube vient d’être révoqué, ou plutôt s’est fait révoquer lui-même, et exprès. […] D’Argenson a écrit quelque part, dans cette supposition favorite de son futur ministère : « Si j’étais premier ministre et le maître, certainement j’établirais une académie politique dans le goût de celle de M. de Torcy. » Et voilà à quoi, certainement, il était le plus propre : établir une Académie des sciences morales et politiques, faire une société de l’Entresol en grand et au premier étage, y lire, en compagnie de gens de savoir et de mérite, des mémoires nourris, instructifs, à vues nombreuses et touffues, à projets drus et vifs, et dans lesquels d’autres que lui verraient ensuite ce qui est à prendre ou à laisser, ce qui est pratique ou ce qui ne l’est pas.

833. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Marie-Antoinette »

Un des mérites de M. le comte d’Hunolstein sera, indépendamment de ce qu’il nous donne, d’avoir piqué d’honneur M.  […] je les mérite par le respect profond et l’amour sans bornes que je vous porte. […] « Alors on m’a présenté ma maison française, et j’ai quitté mon île pour entrer dans Strasbourg : — du canon, des cloches, plus de bruit que n’en mérite votre petite sœur !

834. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Marie-Thérèse et Marie-Antoinette. Leur correspondance publiée par. M. le Chevalier Alfred d’Arneth »

Marie-Antoinette est la première à le sentir : « Il est bien vrai que les éloges et l’admiration pour le roi ont retenti partout ; il le mérite bien par la droiture de son âme et l’envie qu’il a de bien faire ; mais je suis inquiète de cet enthousiasme français pour la suite. […] La comtesse d’Artois a un grand avantage, celui d’avoir des enfants ; mais c’est peut-être la seule chose qui fasse penser à elle, et ce n’est pas ma faute si je n’ai pas ce mérite. […] Disons aussi que la modestie, — trop de modestie, — a pu faire craindre à M. d’Arneth de se hasarder dans une langue étrangère. — Pour que le lecteur français n’ignore rien des titres et des mérites du savant éditeur qui va acquérir une très-grande autorité dans le débat si vivement engagé sur l’authenticité des premières lettres de Marie-Antoinette, il est bon de savoir que M. 

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