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445. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre VI. De la littérature latine sous le règne d’Auguste » pp. 164-175

Il existe des histoires appelées avec raison histoires philosophiques ; il en existe d’autres dont le mérite consiste dans la vérité des tableaux, la chaleur des récits et la beauté du langage ; c’est dans ce dernier genre que les historiens grecs et latins se sont illustrés. […] Les anciens, qui se complaisaient dans l’admiration, qui ne cherchaient point à diminuer l’odieux du vice, ni le mérite de la vertu, avaient une qualité presque aussi nécessaire à l’intérêt de la vérité qu’à celui de la fiction ; ils étaient fidèles à l’enthousiasme comme au mépris, et souvent même les caractères étaient plus soutenus dans leurs tableaux historiques que dans leurs ouvrages d’imagination.

446. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre premier. Vue générale des épopées chrétiennes. — Chapitre III. Paradis perdu. »

Aussi Milton appelle-t-il la femme, fair defect of nature, « beau défaut de la nature. » La manière dont le poète anglais a conduit la chute de nos premiers pères mérite d’être examinée. […] Milton a surtout le mérite de l’expression.

447. (1772) Bibliothèque d’un homme de goût, ou Avis sur le choix des meilleurs livres écrits en notre langue sur tous les genres de sciences et de littérature. Tome II « Bibliotheque d’un homme de goût — Chapitre VII. Des ouvrages périodiques. » pp. 229-243

Castillon : deux auteurs qui savent rendre justice au mérite, & qui écrivent avec soin & avec goût. […] Il est entre les mains d’une société de gens de lettres de beaucoup de mérite, à la tête desquels est M.

448. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « L’insurrection normande en 1793 »

La Révolution ne le mérite pas. […] Pendant tout le temps que dura la Révolution, toutes les villes, Lyon excepté, qui eut du moins le mérite de l’horreur (et nous ne parlons pas de la Vendée, cette guerre de géants, comme disait l’Empereur), toutes les villes se conduisirent à peu près de la même manière.

449. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre II. Des éloges religieux, ou des hymnes. »

Les hymnes qu’Horace fit pour les jeux séculaires de Rome, ont le mérite de la délicatesse et du goût ; mais combien elles sont au-dessous du sujet ! […] Notre seul mérite aujourd’hui est d’avoir mis quelque pureté de style dans un genre d’ouvrage le plus susceptible de beautés fortes, et qui semblerait devoir être grand et sublime, comme le tableau de la nature.

450. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XIV. Panégyrique de Trajan, par Pline le jeune. »

Pour bien juger de son mérite ou de ses défauts, il faudrait le lire soi-même. […] Il serait à souhaiter qu’on ne fût pas en droit de faire à Pline une partie de ces reproches ; peut-être en mérite-t-il à d’autres égards.

451. (1886) Le naturalisme

Il est cependant juste de reconnaître que, s’il y avait un grand mérite, en 1883, à leur faire passer les Pyrénées, ce mérite était double, s’il appartenait à une femme. […] Qui ne l’a appelée bien des fois en se faisant violence et qui, s’il mérite le nom d’homme, ne l’a vue obéir à l’appel ? […] La génération présente le dédaigne avec excès en oubliant ses mérites d’artiste. […] On a prononcé des jugements fort différents sur le mérite de ces deux livres. […] » La cause pour laquelle le livre ne plut pas mérite qu’on la raconte.

452. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Notes et pensées » pp. 441-535

Cela vous perpétue plus encore que le mérite intrinsèque de votre œuvre. […] Flourens dit en causant : « Moi, monsieur, je suis toujours sincère. » — Les mérites du savant et ses travaux subsistent : je laisse entrevoir l’homme tel qu’il m’est apparu. […] La difficulté fait le mérite. […] Je ne m’étais jamais figuré Génin, homme d’esprit et de mérite d’ailleurs, comme un écrivain attique. […] Ce ne fut pas plus long que cela. — Notez qu’ayant affaire à tout homme de mérite et qui se serait présenté autrement, K…, après l’observation faite, aurait tâché de le contenter.

453. (1805) Mélanges littéraires [posth.]

Il y en a peu en Angleterre ; la principale et celle qui mérite le plus d’attention, est celle que nous connaissons sous le nom de Société royale, et on peut y joindre la Société d’Édimbourg. […] La matière dont je vais parler intéresse le gouvernement et la religion, et mérite bien qu’on en parle avec liberté sans que cela puisse offenser personne : après cette précaution j’entre en matière. […] Mais il s’en faut bien que celle des collèges mérite ce nom : elle ouvre pour l’ordinaire par un compendium, qui est, si on peut parler ainsi, le rendez-vous d’une infinité de questions inutiles sur l’existence de la philosophie, sur la philosophie d’Adam, etc. […] Ils se trompent, s’ils s’imaginent en cela avoir le mérite de la difficulté vaincue : il est plus difficile d’écrire et de parler bien sa langue, que de parler et d’écrire une langue morte ; la preuve en est frappante. […] Cette question mérite d’être approfondie.

454. (1870) Portraits contemporains. Tome IV (4e éd.) « M. THIERS. » pp. 62-124

Un autre point qui ne mérite pas moins de l’être, c’est cette prédilection déclarée pour l’action, qui se retrouvera dans toutes les circonstances de la vie et dans toute l’habitude de la pensée chez M. […] Vous avez raison ; mais moi, je n’attache pas l’orgueil au sang comme vous y attachez le mérite : je l’impute aux situations. […] Tous les partis ont leurs bons et leurs méchants, et ne diffèrent que par le but ; mais vous conviendrez qu’entre un Bailly mourant la tête et le cœur pleins de vérité, et un d’Éprémesnil mourant plein d’entêtement, quoique le sacrifice soit le même, le mérite ne l’est pas. […] Thiers n’avait pas visitée encore, les considérations générales sur le goût, sur la critique des arts et sur les divers mérites propres à ceux du dessin, restent des pages très-agréables et très-justes, des gages d’un instinct très-sûr et d’une inclination naturellement éclairée. […] Son morceau sur Law, mis en tête d’une certaine Encyclopédie progressive qui n’alla pas plus loin (1826), mérite d’être tout particulièrement remarqué, et il fut très-lu au moment de la publication.

455. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « M. DE LA ROCHEFOUCAULD » pp. 288-321

Sa vie et son portrait ne sauraient être ici brusqués en passant : elle mérite une place à part et elle l’aura. […] Ses belles qualités étoient moins brillantes, dit-il, à cause d’une tache qui ne s’est jamais vue en une princesse de ce mérite, qui est que, bien loin de donner la loi à ceux qui avoient une particulière adoration pour elle, elle se transformoit si fort dans leurs sentiments qu’elle ne reconnoissoit plus les siens propres. » En tout temps, que ce fût M. de La Rochefoucauld, ou M. de Nemours, ou à Port-Royal M. […] C’était un mérite que personne n’avait eu avant lui, en Europe, depuis la renaissance des lettres. » Trois cent seize pensées formant cent cinquante pages eurent ce résultat glorieux. […] Je vous assure aussi que je vous serai plus obligée, si vous en usez comme d’une chose qui seroit à vous, en le corrigeant ou en le jetant au feu, que si vous lui faisiez un honneur qu’il ne mérite pas. […] Un peu de sottise avec beaucoup de mérite ne nuit pas : cela fait levain.

456. (1902) Les œuvres et les hommes. Le roman contemporain. XVIII « Gustave Flaubert »

… Je sais bien que les Réalistes, dont Flaubert est la main droite, disent que le grand mérite de Flaubert est de faire vulgaire, puisque la vulgarité existe. […] Parmi ceux-ci, qui sont une inondation, Gustave Flaubert a des admirateurs passionnés et presque des fanatiques, qui lui ont fait une gloire aussi disproportionnée avec son talent que le mérite de ses œuvres avec l’effort de travail qu’elles lui ont coûté. […] Encore un mérite de Flaubert. […] comme force morale de haine et de mépris contre le bourgeois, il y a peut-être là un mérite pour Flaubert l’implacable, mais le mérite intellectuel d’un livre n’y est pas.

457. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Roederer. — II. (Suite.) » pp. 346-370

Un article très piquant sur les travers et les ridicules des jeunes incroyables (11 juillet 1795), est peut-être, ou mérite certainement d’être de lui. […] Mme de Staël que quelque trait de plume avait blessée, s’en plaignait à lui en femme, avec bonne grâce, et lui disait un de ces mots qui n’accusent d’ailleurs autre chose en Roederer que l’indépendance d’un esprit critique et judicieux : « Je ne suis pas le premier des êtres qui vous ont aimé qui se soient plaints de l’impossibilité de fixer dans votre cœur un jugement durable. » C’est qu’en effet ce qui mérite le nom de jugement durable ne se fixe point dans le cœur, mais dans l’esprit, et encore, pour peu qu’on cherche le vrai, la balance y recommence toujours. […] — Il n’est pas un homme de quelque mérite qui ne préférât, près de Bonaparte, l’emploi qui occupe sous ses yeux à la grandeur qui en éloigne, et qui, pour prix d’un long et pénible travail, ne se sentît mieux récompensé par un travail nouveau que par le plus honorable loisir.  […] Lebrun est un homme du premier mérite, Cretet est un homme de troisième ligne. » (Suit un long interrogatoire très précis sur Lebrun ; ce qu’il était, quelles places il a occupées avant la Révolution ; quel rôle depuis ; ce qu’il a fait comme homme de lettres ; sa réputation.

458. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Appendice. Discours sur les prix de vertu »

C’était le temps, il est vrai, où la philanthropie dans toute sa confiance et son ingénuité se donnait carrière, où le sentiment exalté d’humanité qu’aucun échec n’avait encore averti se passait toutes ses espérances et tous ses rêves, où des zélés en venaient jusqu’à proposer de créer des espions du mérite et de la vertu pour dénoncer les beaux génies inconnus et modestes, pour découvrir les belles actions cachées, avec la même vigilance et la même adresse qu’on met à découvrir les mauvaises. […] Et c’est l’auteur de l’Histoire de la Grande Armée, c’est un brave et éloquent guerrier dont la jeunesse s’est prodiguée sur les champs de bataille, c’est lui-même qui, depuis vingt ans et plus, a donné ainsi ses soins scrupuleux, minutieux, à compulser, à peser les actions d’humbles filles, de pauvres domestiques, à tâcher que rien d’essentiel n’échappe, que chaque mérite atteigne juste à son degré de rémunération. […] Scheffer étonné appela dans son atelier l'enfant qui marquait ces heureuses dispositions, lui dit de revenir tous les jours et en fit un peintre de mérite, qui tient aussi de la bonté de sa mère. […] Or, il importe, quand une richesse est créée dans la société, qu’elle n’aille pas au hasard, qu’elle reste et revienne à qui il appartient ; qu’elle soit possédée par celui qui le mérite le mieux : il importe d’en régler la distribution.

459. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Nouvelle correspondance inédite de M. de Tocqueville »

Il le mérite de tout point. […] J’ai fait autrefois quelques réserves à son sujet, lorsqu’il m’a semblé qu’on voulait le porter un peu trop haut ; j’en ferai peut-être encore quelques-unes ; mais ce sera le plus souvent en me servant de ses paroles mêmes et toujours en rendant hommage à son mérite, à son caractère et à ses vertus. […] Scherer, dans un article où il a parfaitement apprécié Tocqueville pour ses mérites, a conclu en disant : « La postérité lui érigera un buste au pied de la statue de Montesquieu. » Mais ici on est loin de Montesquieu, dont les plus grands chagrins, on le sait, ne résistèrent jamais à une heure d’étude et de lecture. […] —  Michel Lévy. toujours en rendant hommage à son mérite, à son caractère et à ses vertus.

460. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Nouvelle correspondance inédite de M. de Tocqueville (suite et fin.) »

Mais en y réfléchissant, il me vient de grandes hésitations à traiter le sujet de cette manière : ainsi envisagé, l’ouvrage serait une entreprise de très-longue haleine ; de plus, le mérite principal de l’historien est de savoir bien faire le tissu des faits, et j’ignore si cet art est à ma portée : ce à quoi j’ai le mieux réussi jusqu’à présent, c’est à juger les faits plutôt qu’à les raconter ; et, dans une histoire proprement dite, cette faculté que je me connais n’aurait à s’exercer que de loin en loin et d’une façon secondaire, à moins de sortir du genre et d’alourdir le récit. […] On pourra trouver que, plus indulgent en apparence pour beaucoup d’autres écrivains d’un mérite moindre, j’ai bien tenu ici à marquer mes réserves, quand il s’agissait d’apprécier un esprit d’un ordre aussi élevé. […] En somme, la presque totalité de ces lettres sont étrangères à la poliùque, et la plupart sont, si je ne me trompe, extrêmement remarquables, abstraction faite même des idées et à ne considérer que leur mérite littéraire. […] Si vous ne critiquez que ce qui mérite de l’être, pourrai-je me plaindre de ce que vous ne loueriez pas toujours et pas assez tout ce qui, dans Tocqueville, me paraît digne de louange ?

461. (1868) Cours familier de littérature. XXV « CXLIXe entretien. De la monarchie littéraire & artistique ou les Médicis (suite) »

Les Médicis les protégèrent, l’un le mérite, l’autre la popularité. […] Aussi ne trouve-t-on pas dans l’histoire une famille de simples citoyens offrant l’hérédité du mérite, du travail et des vertus continues, et rassemblés avec des qualités présentes diverses, tels que Côme Ier, Laurent, Julien et Côme II, chacun ajoutant un échelon de plus à la grandeur des autres. […] Les Médicis fondèrent un nom immortel et presque un empire ; ils étaient, par le hasard de leur opulence et par le hasard de leur mérite, ceux de tous les citoyens du moment qui pouvaient le mieux se consacrer à l’idée en vogue : le rajeunissement de l’esprit humain. […] Par cet amour qui vous fait embrasser tout le genre humain, qui vous a fait descendre du ciel et revêtir notre humanité nue, qui vous a fait souffrir la faim, la soif, le froid, la chaleur, le labeur, les moqueries, le mépris, les coups, la flagellation, la mort enfin sur une croix ; par cet excès d’amour, ô mon Sauveur Jésus, je vous supplie et vous conjure de détourner vos regards, votre face de mes péchés, afin que cité à comparaître devant votre tribunal, ce que je sens devoir être très-prochain, je ne sois pas puni pour mes fraudes, mes péchés, mais pardonné par les mérites de votre croix : qu’il plaide, qu’il plaide en ma faveur, ce sang, le plus précieux de tous, que vous avez répandu sur ce sublime autel de notre rédemption, et pour rendre l’homme libre, donner à l’homme la liberté. » Après ces paroles et d’autres encore, devant tous les assistants en pleurs, le prêtre ordonna qu’on le relevât et qu’on le mît dans son lit pour qu’on lui administrât plus facilement le sacrement : il s’y opposa d’abord ; mais, de crainte de manquer d’obéissance au vieillard, il se laissa fléchir, et répétant avec fermeté les paroles sacramentales, déjà sanctifié et vénérable par une sorte de majesté divine, il reçut le corps et le sang du Seigneur.

462. (1868) Alexandre Pouchkine pp. 1-34

Sa sobriété, son tact à choisir les grands traits de tous les sujets qu’il traite, à sacrifier les détails inutiles, serait un mérite considérable en tout pays, et ce mérite est surtout à louer chez un Russe. […] Il ne nous montre ses géants qu’habillés en Croquemitaine, et dès qu’ils ne font plus peur, ils ont perdu presque tout leur mérite. […] Je crois qu’il ne serait pas impossible de lui ravir la gloire de l’invention, et de remonter à l’antiquité pour découvrir des modèles, si, dans une œuvre de ce genre, le mérite de l’exécution n’était pas le plus important, disons mieux, le seul à considérer.

463. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre huitième »

L’Esprit des lois n’a tout son prix que lu à sa date et dans son ordre, après les grands prédécesseurs de Montesquieu, en le comparant avec eux, non pour donner des rangs, mais pour distinguer les mérites. […] Aucun livre n’a plus gardé le mérite de l’à-propos. […] Il y a peut-être plus de mérite à défendre l’esprit de conservation ; car le présent paraissant plus fort que l’avenir, on risque, en prenant sa défense, de passer pour être du parti du plus fort, et l’appui même qu’on reçoit des choses établies compromet le défenseur plus qu’il ne le recommande. […] Une morale, c’est plus que le goût de tout ce qui est moral, plus que l’amour du droit, plus que la justice et la bienfaisance ; c’est la certitude que toutes ces choses ne sont pas de purs mérites de la volonté, mais des lois divines obéies, et qu’en les pratiquant d’un cœur sincère, on reste infiniment au-dessous de ce qu’elles prescrivent.

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