Nous nous servions habituellement, pour ce jeu, des longs cheveux fins, jeunes, blonds et soyeux, coupés aux tresses pendantes de mes sœurs ; mais un jour, nous voulûmes éprouver si les anges joueraient les mêmes mélodies sur des cordes d’un autre âge, empruntées à un autre front. […] Elle se prêta à notre enfantillage, et coupa avec les ciseaux une longue mèche de ses cheveux, qu’elle nous livra. […] Mais si, après les sueurs, les labours, les agitations et les lassitudes de la journée humaine, la volonté de Dieu me destinait un long soir d’inaction, de repos, de sérénité avant la nuit, je sens que je redeviendrais volontiers à la fin de mes jours ce que je fus au commencement : un poëte, un adorateur, un chantre de la création. […] Je vois déjà le schisme qui tombe, l’Orient et l’Occident qui se réunissent, et l’Asie qui voit renaître le jour, après une si longue nuit !
Les seuls ouvrages utiles à la science sont ceux auxquels on peut accorder une entière confiance, et dont les auteurs ont acquis, par une longue habitude, sinon le privilège de l’infaillibilité, du moins cette étendue de connaissances qui fait l’assurance de l’écrivain et la sécurité du lecteur. […] Pourquoi faire de longs volumes, parmi lesquels un seul peut-être aura une valeur réelle ? […] Tel philologue a consacré de longues dissertations à discuter le sens des particules de la langue grecque ; tel érudit de la Renaissance écrit un ouvrage sur la conjonction quanquam ; tel grammairien d’Alexandrie a fait un livre sur la différence de [en grec] et [en grec]. […] Les travaux approuvés par l’autorité compétente y sont faits une fois pour toutes et adoptés de confiance, sans que l’on s’impose de revenir, si ce n’est rarement et à de longs intervalles, sur les recherches des premiers expérimentateurs.
Ainsi va la Fortune à la guerre comme dans la politique, comme partout en ce monde agité, théâtre changeant, où le bonheur et le malheur s’enchaînent, se succèdent, s’effacent, ne laissant, après une longue suite de sensations contraires, que néant et misère ! […] Pendant les longues entrevues des deux empereurs, la foule des rois, des souverains de second ordre, des princes et des ambassadeurs, servira de comparses sur l’avant-scène ; les parties de chasse et les fêtes couvriront le sérieux du jeu. […] Esprit clair, vigoureux et net, par sa longue pratique positive il n’a fait que se fortifier dans son premier instinct et y ajouter l’arrêt de l’expérience. […] Quant à Joseph, il ne renoncerait pas si aisément à son métier de roi, et il n’est nullement d’humeur à aller planter ses choux ; il se croit très propre à régner, mais il le voudrait faire à son aise, sur un trône à lui, comme un bon roi Louis XII sous le dais, comme s’il était l’héritier d’une longue race.
Cet arrangement de vie commune se fit en 1754, et dura jusqu’en 1764 : dix ans de ménage et de concorde, c’était bien long, plus long qu’on n’aurait pu l’espérer entre deux esprits aussi égaux en qualité et associés à des éléments aussi impétueux. […] M. de Guibert allait partir et faire un long voyage en Allemagne, en Prusse, peut-être en Russie. […] Cette longue agonie eut son terme.
Elle ne se marque guère qu’en un point : c’est un tuteur fictif, le tuteur de Mme d’Épinay, qui est censé raconter l’histoire de sa pupille, mais qui ne fait le plus souvent que lui céder la parole à elle-même, ainsi qu’aux autres personnages, dont il cite et insère au long les lettres, journaux ou conversations. […] Diderot est plus juste, et il nous peint à ravir Mme d’Épinay à cet âge de la seconde jeunesse, un jour qu’il était à La Chevrette, pendant qu’elle et lui faisaient faire leur portrait : On peint Mme d’Épinay en regard avec moi, écrit Diderot à Mlle Volland ; elle est appuyée sur une table, les bras croisés mollement l’un sur l’autre, la tête un peu tournée, comme si elle regardait de côté ; ses longs cheveux noirs relevés d’un ruban qui lui ceint le front. […] Après le dîner, je me suis mise sur ma chaise longue. […] Parison s’en est acquitté avec tant de bonheur, que, tout en conservant, sans les altérer, les récits de l’auteur, il a su extraire de l’« ébauche d’un long roman » (c’est ainsi que l’a qualifié Grimm dans sa Correspondance) des Mémoires fort curieux que tout le monde a lus avec le plus grand plaisir.
Mais cet homme habile, en voulant se tourner du côté du soleil levant, ne sut pas s’orienter avec une parfaite justesse : il avait fait de longue main sa cour à la maîtresse du prince, la croyant destinée à l’influence, et il avait négligé la femme légitime, la future reine, qui pourtant eut seule le crédit réel. […] Il écrivait à ce fils en toute sincérité : « Du premier jour de votre vie, l’objet le plus cher de la mienne a été de vous rendre aussi parfait que la faiblesse de la nature humaine le comporte. » C’est vers l’éducation de ce fils que s’étaient tournés tous ses vœux, toutes ses prédilections affectueuses et mondaines, et, vice-roi d’Irlande ou secrétaire d’État à Londres, il trouvait le temps de lui écrire de longues lettres détaillées pour le diriger dans les moindres démarches, pour le perfectionner dans le sérieux et dans le poli. […] Il n’avait pas été long à sentir ce qui manquait à cet enfant qu’il voulait former, et dont il avait fait l’occupation et le but de sa vie : En scrutant à fond votre personne, lui disait-il, je n’ai, Dieu merci, découvert jusqu’ici aucun vice du cœur ni aucune faiblesse de la tête ; mais j’ai découvert de la paresse, de l’inattention et de l’indifférence, défauts qui ne sont pardonnables que dans les personnes âgées, qui, sur le déclin de leur vie, quand la santé et la vivacité tombent, ont une espèce de droit à cette sorte de tranquillité. […] Il n’entreprit point de longs ouvrages, pour lesquels il se sentait trop fatigué, mais il envoyait quelquefois d’agréables essais à une publication périodique, Le Monde.
Retz appartient à cette grande et forte génération d’avant Louis XIV, dont étaient plus ou moins, à quelques années près, La Rochefoucauld, Molière, Pascal lui-même, génération que le régime de Richelieu avait trouvée trop jeune pour la réduire, qui se releva ou se leva le lendemain de la mort du ministre, et se signala dans la pensée et dans le langage (quand l’action lui fit défaut) par un jet libre et hardi, dont se déshabituèrent trop les hommes distingués sortis du long régime de Louis XIV. […] Il décrit en observateur doué d’une exquise sensibilité de tact leur période d’invasion, si brusque parfois, si imprévue, et de longue main pourtant si préparée. […] Le cardinal de Retz, on le voit, en savait aussi long sur la force du tiers état que l’abbé Sieyès. […] D’autres fois il étend agréablement ses images ; ainsi, opposant son crédit bien enraciné à la faveur d’un jour du duc d’Elbeuf : « Le crédit parmi les peuples, cultivé et nourri de longue main, dit-il, ne manque jamais à étouffer, pour peu qu’il ait de temps pour germer, ces fleurs minces et naissantes de la bienveillance publique, que le pur hasard fait quelquefois pousser. » Indiquant les moyens qu’il avait de bonne heure employés pour fonder ce crédit, il parle de ses grandes aumônes, et des libéralités « très souvent sourdes, dont l’écho n’en était quelquefois que plus résonnant ».
Long, maigre, décharné même, il a le front sévère et beau, l’arc et la voûte du sourcil faits pour être le siège d’une pensée, le nez long, fin et mince, la lèvre mince également, et qui semble n’attendre que l’instant de décocher le trait cruel. […] Amants des roses passagères, Ils ont les grâces mensongères Et le sort des rapides fleurs : Leur plus long règne est d’une aurore ; Mais le Temps rajeunit encore L’antique laurier des neuf sœurs. […] Un second coup d’un autre genre qu’il éprouva et qui acheva de rompre ses projets de poèmes et de longs travaux, fut la banqueroute du prince de Guémené, chez qui il avait placé sa modique fortune (1783).
Tous les anciens amis de la reine sont revenus après une disgrâce plus ou moins longue : chacun d’eux compte sur la même faveur qu’autrefois, et ils ne s’aperçoivent pas d’abord que cette reine, qu’ils avaient laissée opprimée par Richelieu, sans enfants et encore Espagnole de cœur, est devenue mère, toute aux intérêts du jeune roi, et une reine toute française. […] Elle avait les plus beaux cheveux du monde : ils étaient fort longs et en grande quantité, qui se sont conservés longtemps sans que les années aient eu le pouvoir de détruire leur beauté. […] On a trouvé ces réflexions trop multipliées et trop longues, ce qui peut être vrai pour la dernière partie des Mémoires ; mais elle sait d’ordinaire les entremêler aux circonstances mêmes qui les lui inspirent. […] Les longues conversations particulières qu’elle avait eues avec la reine d’Angleterre, l’avaient éclairée sur la portée de ces périls qui souvent ne semblent au début qu’une ébullition folle et un sujet à risée.
Son long règne, en effet, commençait fort à lasser les peuples, et l’on aspirait de toutes parts au relâchement. […] Saint-Simon nous a raconté très au long deux ou trois audiences qu’il obtint de lui, et nous a rendu au vif l’impression de respect, de soumission et de joie reconnaissante qu’il en avait rapportée. […] Il voudrait que son fils, au lieu de s’arrêter en chemin, et de regarder autour de lui et au-dessous de lui, ceux qui valent moins, reportât ses regards plus haut : Pensez plutôt à ceux qu’on a le plus sujet d’estimer et d’admirer dans les siècles passés, qui d’une fortune particulière ou d’une puissance très médiocre, par la seule force de leur mérite, sont venus à fonder de grands empires, ont passé comme des éclairs d’une partie du monde à l’autre, charmé toute la terre par leurs grandes qualités, et laissé depuis tant de siècles une longue et éternelle mémoire d’eux-mêmes, qui semble, au lieu de se détruire, s’augmenter et se fortifier tous les jours par le temps. […] Quand ce monarque s’oublie et se néglige, il a la phrase longue, de ces phrases qui ont été depuis, l’apanage de la branche cadette et dont on ne voit pas la fin : c’est là où Louis XIV en vient quand il sommeille.
Il n’y a point de circonstances où les hommes soient plus exposés à faire le sophisme, post hoc, … etc. que celles où les longues calamités et l’inutilité des secours humains les contraignent de recourir au ciel. […] Il est tout nu, ses deux longs bras livides, sa tête et sa chevelure pendent vers le pied du massif. […] C’est encore une belle idée, bien poétique, que cet homme dont la tête, les longs bras nus et la chevelure pendent le long du massif. […] Si au contraire elle ne serpente pas assez, si elle parcourt un long espace sans trouver aucun objet qui la rompe, la composition sera rare et décousue.
C’est un de ces regards, imprégnés d’exquise malfaisance que voilaient, à cette heure crépusculaire qui suit le five o’clock tea, les longs cils ah ! si longs de la comtesse Alice de Courtisols qui, blottie sur un pouf, à l’abri d’un parait vent anglais, etc… » M.
C’est Marguerite Moréno qui s’avance, souple, onduleuse dans un long fourreau de laine noire. […] Il y a souffert et me conte son long martyre.
Je ne suis pas un homme de lettres ; je suis un homme du peuple ; je suis l’aboutissant de longues files obscures de paysans et de marins. […] D’où viendrait le génie, qui est presque toujours le résultat d’un long sommeil antérieur ?
Année 1851 2 Décembre 1851 Au jour du jugement dernier, quand les âmes seront amenées à la barre par de grands anges, qui, pendant les longs débats, dormiront, à l’instar des gendarmes, le menton sur leurs deux gants d’ordonnance, et quand Dieu le Père, en son auguste barbe blanche, ainsi que les membres de l’Institut le peignent dans les coupoles des églises, quand Dieu m’interrogera sur mes pensées, sur mes actes, sur les choses auxquelles j’ai prêté la complicité de mes yeux, ce jour-là : « Hélas ! […] Et nous voici, rue Mogador, au cinquième, dans l’appartement de l’actrice qui a rapporté Musset de Russie, et où une vierge byzantine, au nimbe de cuivre doré, rappelle le long séjour de la femme là-bas.
Ils vouloient qu’on laissât le Latin dans sa longue possession de transmettre à la postérité les actions des héros, & qu’on célébrât Louis XIV dans une langue qui avoit immortalisé César, Auguste, Tite & Trajan. […] Ses syllabes longues & brèves, l’enchantement de sa prosodie font qu’elle a toute l’expression de la musique.
Lépicié veut placer ces trois tableaux en enseigne à sa porte, je lui garantis la pratique de tous ces gens qui chantent dans les rues, montés sur des escabeaux, la baguette à la main, à côté d’une longue pancarte attachée à un grand bâton, et montrant comment le diable lui apparut pendant la nuit, comment il se leva et s’en alla dans la chambre de sa femme qui dormait. […] Je serais long, si je voulais ; mais rassurez-vous, je serai court.
Depuis la perte de notre ami commun, mon âme a beau s’agiter, elle reste enveloppée de ténèbres, au milieu desquelles une longue suite de scènes douloureuses se renouvellent. […] Les uns font leurs figures longues et sveltes ; d’autres les font courtes et lourdes ; ou les parties sont trop ressenties, ou elles ne le sont point du tout.
Or il faut être né avec du génie pour inventer, et l’on ne parvient même qu’à l’aide d’une longue étude à bien inventer. […] Mon sujet ne veut pas que je parle plus au long de la difference qui se rencontre entre le génie des hommes, et même entre le génie des siecles et des nations.