Dépendant également de la Raison et de l’imagination, l’Histoire tombe alternativement sous la seule et absolue domination de l’une ou de l’autre, tantôt fiction, tantôt théorie, souvent toutes les deux. » Nous en demandons bien pardon à Macaulay, mais si la difficulté de la composition historique ne venait que de l’accord qu’il faut savoir établir entre l’imagination et la Raison, elle ne serait que celle de tous les genres de composition littéraire, qui n’existent pas plus que l’Histoire sans la fusion harmonieuse de ces deux grandes facultés.
Mais c’est la seule poésie qu’il ait, rien n’étant plus dénué que cette histoire d’imagination, de coloris et de pittoresque. […] Prescott a dans l’esprit une fermeté qui lui permet de rester calme dans un sujet déconcertant pour les esprits faibles et les imaginations sensibles, et qui leur campe des convulsions.
ils sont presque tous géomètres, parce que la géométrie est suprêmement la science de l’imagination, et, de l’aveu de M. […] Avec leurs tourbillons, leur vide et leur plein, leur dynamique, leurs harmonies préétablies, leurs idéalismes impossibles, ce sont de grands poëtes, mais abstraits, — des faiseurs, comme dit le mot poëte, des créateurs de puissantes ou d’impuissantes chimères, car l’homme n’invente réellement que sur le terrain de l’imagination : mais Dieu lui donne et il reçoit seulement sur celui de la vérité.
Il a le regain d’imagination, qui fut suffisant pour produire cette ineffable plaisanterie du druidisme, guy d’un ridicule fabuleux, que la Critique doit couper, avec une serpette d’or, sur les chênes de son histoire. […] Le relief lui manque, et jamais chez lui l’imagination ne nous venge par un écart, plus ou moins burlesque, des longs développements, très consciencieusement ennuyeux.
Ils réalisèrent dans leur imagination l’hérédité, hereditas, comme souveraine des héritages, et ils la placèrent tout entière dans chacun des effets dont ils se composaient ; ainsi quand ils présentaient aux juges une motte de terre dans l’acte de la revendication, ils disaient hunc fundum, etc. […] Elle introduisait une foule de déguisements, de voiles qui ne couvraient rien, jura imaginaria ; de droits traduits en fable par l’imagination.
Cependant la variété excessive de ce pot-pourri, les décors, les machines, le grotesque même de l’imagination dans les scènes du capitan Matamore, firent le succès de la pièce ; si bien qu’elle se maintint au théâtre pendant trente ans ! […] Puis, l’imagination populaire, amoureuse de la force et du succès, transforma peu à peu le personnage, et s’en fit une idole, parée et embellie de toutes les vertus. […] Doudan, une sorte de Henri Heine français par l’imagination et la fantaisie mêlées à la plus fine critique, écrit à M. […] Dorante est un esprit fantaisiste, une imagination gaie, qui se plaît à la fiction et ment pour le plaisir, au risque de se créer des embarras. […] Voilà l’agrément de cette comédie : il réside principalement dans l’imagination des détails, et parfois dans la poésie du style ; il est dans l’esprit brillant, la verve élégante, le bien dire, la grâce, le tour.
Toutes ses grâces, toutes ses vertus, toutes ses perfections y sont détaillées et célébrées par une imagination jamais à court, avec une merveilleuse abondance et une infinie variété.
Vernet Nous avons eu une foule de Marines de Vernet ; les unes locales, les autres idéales ; et dans toutes, c’est la même imagination, le même feu, la même sagesse, le même coloris, les mêmes détails, la même variété.
Son imagination, il est vrai, n’étoit pas toujours réprimée par le jugement, & ses Sermons ne sont pas irréprochables du côté de l’affectation & de la singularité : malgré cela, on a su en extraire un grand nombre de pensées dont on a formé un Recueil, que les Orateurs Chrétiens peuvent lire avec fruit.
Il y regne autant d’imagination que de variété.
Sa Médecine de l’Esprit fait honneur à son imagination, à ses lumieres, & à son zele pour l’humanité.
Ces Pieces, dont la lecture est très-amusante, décelent de la facilité dans le style, le talent du dialogue, une imagination féconde pour intriguer & varier les sujets, & sur-tout une ame aussi honnête que zélée pour corriger les vices & les ridicules.
Venevault Apothéose du prince de Condé . sujet immense, digne de l’imagination grande et féconde et de la hardiesse de Rubens, et sujet fait en miniature par Venevault.
Vos portraits du comte de Maistre sont des portraits d’imagination ; le mien est un portrait d’après nature. […] Ô pauvre imagination humaine ! […] Il fatiguait la cour et les ministres des secousses de son imagination. […] Le roi, évidemment importuné lui-même des imaginations trop grandioses du comte de Maistre, le nomma son ministre plénipotentiaire à Pétersbourg. […] Quoi qu’il en soit, le comte de Maistre inventa dans sa féconde imagination, une belle nuit, un plan de restauration, ici ou là, de la cour de Sardaigne.
Mézerai, Saint-Réal, Vertot, sont des hommes habiles, à qui n’ont manqué ni le savoir, ni une certaine imagination, ni l’intelligence des conditions de l’histoire, ni le talent d’écrire ; ils ont fait des livres à recommencer et sont partis avant l’heure. […] Voltaire a l’imagination, non celle qui met la fable à la place de l’histoire, mais celle qui se rend les faits et les lieux présents. […] Pour en connaître le prix, on n’a qu’à lire les historiens chez qui domine l’autre sorte d’imagination, ou ceux qui n’ont ni l’une ni l’autre ; les uns qui grossissent tout, les autres qui ne voient rien. […] Elles rasent les contours de ces futurs continents que son imagination s’est représentés émergeant un jour du fond des abîmes, pour, remplacer les continents actuels, nivelés peu à peu et rendus à la mer par l’effet des eaux du ciel. […] Il en a pourtant, et du meilleur, pour ceux du moins qui le sentent dans le ton, l’accent, l’excellence de l’œuvre, et qui ne mettent pas au-dessous de l’imagination le sentiment, don plus rare encore, quoique de moindre prix dans l’estime du commun des hommes.
Ce qu’il avait surtout, et bien mieux que l’étude première et la discipline, c’était la source, le jet, l’esprit vif, ouvert, primesautier et perfectible, un tour particulier d’imagination, et c’est ce qui lui assure son originalité à côté des plus grands princes et capitaines qui ont bien parlé ou bien écrit. […] Le grand Frédéric, lui, était un roi essentiellement écrivain ; et quand il écrivait en prose, sauf les germanismes inévitables, c’était un écrivain ferme, sensé, vraiment philosophe, plein de résultats justes et de vues d’expérience, et doué aussi par endroits d’une imagination assez haute et assez frappante. […] Jung a très bien saisi ce caractère du talent de Henri IV, si l’on peut ainsi parler, et ce mélange de saillie spirituelle, d’imagination rapide et de cœur. « Pour moi, écrit Henri à la reine Élisabeth (15 novembre 1597), je ne me lasserai jamais de combattre pour une si juste cause qu’est la nôtre ; je suis né et élevé dedans les travaux et périls de la guerre : là aussi se cueille la gloire, vraie pâture de toute âme vraiment royale, comme la rose dedans les épines.
En nous la dénonçant dès l’enfance dans ses goûts raffinés et coquets de petite fille, de pensionnaire, en nous la montrant rêveuse et sensible d’imagination à l’excès, il la raille impitoyablement ; et l’avouerai-je ? […] En soi : — elle a un défaut grave, elle n’a pas beaucoup de cœur ; l’imagination de bonne heure a tout pris et absorbé. […] Les adieux contraints, les chagrins étouffés, les nuances inégales de ce qui leur fait l’effet tout bas d’être un désespoir, le regret qui s’augmente chez elle par le souvenir et qui s’exalte après coup à l’aide de l’imagination, ce sont là des analyses parfaitement suivies et nettement creusées.
Et comme il faut qu’il y ait toujours quelque chose d’individuel dans ce qui paraît le plus indépendant, elle ajoutait : “Le retour de l’Empereur est prodigieux et surpasse toute imagination ; je vous recommande mon fils.” » Je ne laisse cette mesquine et malicieuse insinuation de la fin que pour montrer que le souvenir est précis, et qu’une lettre d’elle aura été vue, en effet, par le duc de Rovigo. […] La plus grave des objections est le mot ici qui semble supposer quelqu’un de présent en France : Mme de Staël n’y était que par ses amis, et elle s’y sera transportée d’imagination en écrivant. […] N’ayez donc pas tant peur, Messieurs les doctrinaires, qu’elle ait été patriote une fois comme le peuple : savez-vous bien qu’elle avait plus d’imagination que vous, je n’ose dire de cœur, et qu’elle n’était des vôtres qu’à demi ?
Voilà ce qui, avec une admirable force de logique, une grande chaleur d’imagination et une pratique continuelle et courageuse de liberté que s’arrogeait l’écrivain à titre de prêtre, voilà ce qui, pour toute mémoire qui n’est pas oblitérée, marque le rôle de M. de La Mennais jusqu’en juillet 1830. […] à la fougue d’une imagination qui outrait tout… » Mais au pis, et malgré l’inconséquence reprochable, et malgré le danger de la pente rapide, ce rôle d’un Arnauld, d’un Savonarole, offrait encore de grandes parties continues et en harmonie avec cette nature invincible de prêtre : il y avait la foi. […] Au reste, ces pages de M. de La Mennais sont merveilleuses de jeunesse d’imagination, de transparence de couleur et, par moments, de philosophique tristesse : « D’Antibes à Gênes, la route côtoie presque toujours la mer, au sein de laquelle ses bords charmants découpent leurs formes sinueuses et variées, comme nos vies d’un instant dessinent leurs fragiles contours dans la durée immense, éternelle. » Et plus loin, en Toscane, il nous montre çà et là, « à demi caché sous des ronces et des herbes sèches, le squelette de quelque village, semblable à un mort que ses compagnons, dans leur fuite, n’auraient pu achever d’ensevelir. » Mais à peine avons-nous le pied dans les États romains, quelques prisonniers conduits par les sbires du pape, comme il dit, font contraste avec cette simplicité naïve de foi que l’auteur s’attribue encore par oubli, ou qui du moins ne devait pas tarder à s’évanouir.