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53. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre premier. De la louange et de l’amour de la gloire. »

de la nature même de l’homme. […] D’ailleurs, en voyant les hommes de si près, on met moins de prix à leur opinion. […] Nous nous récrions contre Athènes qui proscrivait ses grands hommes. […] Là Socrate est vengé, Galilée est absous, Bacon reste un grand homme. […] En parcourant la classe des hommes loués, il est difficile de ne pas s’indigner souvent.

54. (1866) Cours familier de littérature. XXI « CXXIIe entretien. L’Imitation de Jésus-Christ » pp. 97-176

Tel livre, tel homme. […] Il écrivait pour l’homme et non pour une exception de l’homme. […] dit l’homme. […] Il faut vous revêtir de l’homme nouveau et devenir un autre homme. […] Cet homme était Gerson, qui fit faire un pas à ses frères, et qui, en disant à l’homme : « Tu n’es qu’un homme », lui fit accomplir l’évolution morale qui en fait presque un Dieu !

55. (1796) De l’influence des passions sur le bonheur des individus et des nations « Section première. Des passions. — Chapitre VIII. Du crime. »

Deux liens retiennent les hommes sous l’empire de la moralité, l’opinion publique et l’estime d’eux-mêmes. […] Quand une fois les hommes sont arrivés à cet horrible période, il faut les rejeter hors des nations, car ils ne peuvent que les déchirer. L’ordre social, qui placerait un tel criminel sur le trône du monde, ne l’apaiserait pas envers les hommes ses esclaves ; rien de restreint dans des bornes fixes, fut-ce le plus haut point de prospérité, ne peut convenir à ces êtres furieux, qui détestent les hommes comme des témoins de leur vie. […] Les hommes sont là pour craindre, s’ils ne sont pas là pour aimer ; la terreur qu’on inspire, flatte et rassure, isole et enivre, et avilissant les victimes, semble absoudre leur tyran. […] Mais de ce que les criminels ne se tuent presque jamais, on ne doit point en conclure, qu’ils sont moins malheureux que les hommes qui se résolvent au suicide.

56. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — Y. — article » pp. 529-575

La raison de l’homme le plus sage, n’est-elle pas continuellement exposée à s’égarer ? […] Est-ce donc pour douter, que l’Homme a reçu des lumieres ? […] Si cette Foi étoit de l’invention de l’Homme, l’Homme n’auroit-il pas gardé pour lui-même un hommage qu’il est obligé de faire remonter jusqu’au Dieu dont il est la créature ? […] Est-ce parmi ces Hommes licencieux, qui n’écoutent que leurs goûts, leurs caprices, leurs passions, leurs penchans, & qui taxent d’imbécillité les Hommes qui leur sacrifient les leurs ? […] En un mot, elle oblige l'Homme à se regarder comme ennemi de lui-même, au moment qu'il se montre le plus l'ami des autres Hommes, si ses motifs ne sont pas aussi nobles que ses actions.

57. (1864) William Shakespeare « Conclusion — Livre III. L’histoire réelle — Chacun remis à sa place »

Ce genre de grands hommes est soluble au progrès. […] Caligula est bien plus un fait qu’un homme. […] C’est une variété du malhonnête homme. […] L’homme expiré, l’époque est close. […] L’effigie historique, ce ne sera plus l’homme roi, ce sera l’homme peuple.

58. (1796) De l’influence des passions sur le bonheur des individus et des nations « Section première. Des passions. — Chapitre III. De la vanité. »

L’amour de la gloire se fonde sur ce qu’il y a de plus élevé dans la nature de l’homme ; l’ambition tient à ce qu’il y a de plus positif dans les relations des hommes entre eux ; la vanité s’attache à ce qui n’a de valeur réelle, ni dans soi, ni dans les autres, à des avantages apparents, à des effets passagers, elle vit du rebut des deux autres passions ; quelquefois cependant elle se réunit à leur empire ; l’homme atteint aux extrêmes par sa force et sa faiblesse, mais plus habituellement la vanité l’emporte surtout dans les caractères qui l’éprouvent. […] Un homme d’un esprit infini disait, en parlant de ce qu’on pouvait appeler précisément un homme orgueilleux et vain, en le voyant j’éprouve un peu du plaisir que cause le spectacle d’un bon ménage, son amour-propre et lui vivent si bien ensemble. […] L’homme se complaît dans la supériorité de sa nature, et, comme Pigmalion, il ne se prosterne que devant son ouvrage. […] On approche d’une femme distinguée comme d’un homme en place ; la langue dont on se sert n’est pas semblable, mais le motif est pareil. […] Comme elle fait haïr l’ascendant d’un homme, elle soutient les lois constitutionnelles, qui, au bout d’un temps très court, ramènent les hommes les plus puissants dans une condition privée ; elle appuie en général ce que veulent les lois, parce que c’est une autorité abstraite, dont tout le monde a sa part, et dont personne ne peut tirer de gloire.

59. (1766) Le bonheur des gens de lettres : discours [graphies originales] « Le Bonheur des gens de lettres. — Seconde partie. » pp. 35-56

Est-ce à toi d’attendre ton destin des hommes ? […] Aimerois-tu mieux grossir la classe des hommes vils & lâches dont la fureur triomphe ? […] Sa Société est la Société des grands hommes de tous les tems. […] Le tems écoulé & perdu pour l’homme de Lettres a passé dans la solitude. Le tems écoulé & perdu pour l’homme vulgaire existe encore pour lui.

60. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre premier. Des principes — Chapitre IV. De la méthode » pp. 81-92

Voilà la lumière que Dieu a répandue sur tous les hommes. […] De cette idée dut naître le noble effort propre à la volonté de l’homme, de tenir en bride les mouvements imprimés à l’âme par le corps, de manière à les étouffer, comme il convient à l’homme sage, ou à les tourner à un meilleur usage, comme il convient à l’homme social, au membre de la société37. […] Dans toutes ces circonstances, l’homme est principalement attaché à son intérêt particulier. […] Ainsi conduit par elle, l’homme incapable d’atteindre toute l’utilité qu’il désire, obtient ce qu’il en doit prétendre, et c’est ce qu’on appelle le juste. La dispensatrice du juste parmi les hommes, c’est la justice divine, qui, appliquée aux affaires du monde par la Providence, conserve la société humaine.

61. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Seconde partie. De l’état actuel des lumières en France, et de leurs progrès futurs — Chapitre IV. Des femmes qui cultivent les lettres » pp. 463-479

L’esprit de chevalerie qui subsistait encore s’opposait, sous quelques rapports, à ce que les hommes même cultivassent trop assidûment les lettres. […] Un homme supérieur déjà les effarouche ; mais une femme supérieure, s’éloignant encore plus du chemin frayé, doit étonner, et par conséquent importuner davantage. […] L’homme de génie peut devenir un homme puissant, et sous ce rapport, les envieux et les sots le ménagent ; mais une femme spirituelle n’est appelée à leur offrir que ce qui les intéresse le moins, des idées nouvelles ou des sentiments élevés : sa célébrité n’est qu’un bruit fatigant pour eux. […] Si l’esprit vain de tel homme excite la dérision, si le caractère vil de tel autre le fait succomber sous le poids du mépris, si l’homme médiocre est repoussé, tous aiment mieux s’en prendre à cette puissance inconnue qu’on appelle une femme. […] N’excitent-elles pas en secret la malveillance des hommes ?

62. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre troisième. L’esprit et la doctrine. — Chapitre III. Combinaison des deux éléments. »

Pour des millions d’hommes, pour des centaines de générations, il n’y avait accès que par leur voie aux choses divines. […] C’est pourquoi il demeurait respecté, mais isolé, et sa célébrité n’était point une influence  La raison classique refusait393 d’aller si loin pour étudier si péniblement l’homme ancien et l’homme actuel. […] Rousseau et les spiritualistes. — Bonté originelle de l’homme. — Erreur de la civilisation. — Injustice de la propriété et de la société. […] Qu’un homme de considération vole ses créanciers ou fasse d’autres friponneries, n’est-il pas sûr de l’impunité ? […] Car il n’y a de droit que par consentement, et il n’y a ni consentement ni droit d’esclave à maître. « Soit d’un homme à un homme, soit d’un homme à un peuple, ce discours sera toujours également insensé : Je fais avec toi une convention toute à ta charge et toute à mon profit, que j’observerai tant qu’il me plaira et que tu observeras tant qu’il me plaira.

63. (1861) Cours familier de littérature. XII « LXXIIe entretien. Critique de l’Histoire des Girondins (3e partie) » pp. 369-430

Celui de l’homme d’État commence. […] ” Cet homme, c’était Robespierre. […] Il y avait des sages comme Bailly et Mounier, des penseurs comme Sieyès, des factieux comme Barnave, des hommes d’État comme Talleyrand, des hommes époques comme Mirabeau, des hommes principes comme Robespierre. […] Les hommes de cette Assemblée n’étaient pas des Français, c’étaient des hommes universels. […] La déclaration des droits de l’homme le prouve.

64. (1864) William Shakespeare « Première partie — Livre V. Les âmes »

Mais l’homme plus qu’homme, d’où vient-il ? […] Quel lien entre ce temple et cet homme ? […] L’homme qui ne médite pas vit dans l’aveuglement, l’homme qui médite vit dans l’obscurité. […] La persistance du moi est la soif de l’homme. […] Non, quel que soit cet homme, tu es Dieu.

65. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre second. De la sagesse poétique — Chapitre II. De la métaphysique poétique » pp. 108-124

Ce monde social étant indubitablement l’ouvrage des hommes, on pouvait en lire les principes dans les modifications de l’esprit humain. […] Ainsi ces premiers hommes, qui nous représentent l’enfance du genre humain, créaient eux-mêmes les choses d’après leurs idées. […] Ainsi Jupiter acquit ce regnum fulminis, par lequel il est le roi des hommes et des dieux. […] — Quant à Pufendorf, il commence son système par jeter l’homme dans le monde, sans soin ni secours de Dieu. […] Cependant sans religion les hommes ne seraient pas réunis en nations… Point de physique sans mathématique ; point de morale ni de politique sans métaphysique, c’est-à-dire sans démonstration de Dieu. — Il suppose le premier homme bon, parce qu’il n’était pas mauvais.

66. (1905) Pour qu’on lise Platon pp. 1-398

Il est des hommes qui estiment que le but de l’homme est de savoir et que le bonheur de l’homme est dans le savoir. […] L’homme de bien est l’homme qui ne fait que ce qu’il veut et qui ne veut que le raisonnable. […] L’homme rêve d’éternité comme homme, comme artiste, comme guerrier, comme homme d’État, comme citoyen et comme amoureux. […] L’homme juste est l’homme qui fait régner la justice, c’est-à-dire un juste équilibre en lui-même. […] L’homme juste est un homme équilibré, la cité ordonnée est une cité organisée par un homme juste.

67. (1874) Premiers lundis. Tome II « Jouffroy. Cours de philosophie moderne — II »

Jouffroy, l’humanité est composée d’individus ; la destinée de l’humanité ne saurait être autre que la destinée des hommes qui la composent. […] La vie de l’homme en effet lui afflue de tous côtés par les relations qu’il soutient avec les autres hommes et avec la nature ; cette vie qu’il reçoit de l’univers, il la rend, il la rayonne à son tour en vertu d’une force propre et d’un foyer intérieur. […] Il est l’homme unique, l’homme nécessaire, l’organe et l’oracle de l’humanité, celui qu’elle enfante et celui qui la régénère ; il est inspiré. […] Une religion n’est donc pas un simple système de visionnaire sur l’avenir ou le passé métaphysique de l’homme, sur son avenir ou son passé dans une autre vie ; le fait essentiel de toute religion est de produire un nouveau rapport plus parfait entre l’homme et ce qui l’entoure, entre l’homme et Dieu. […] La conception du révélateur est alors soumise par les disciples qui la recueillent, à un travail d’élaboration et de réalisation plus éclairé que dans les temps passés où l’instrument divin se sentait confirment sans se comprendre ; mais dans aucun cas une religion ne se fait toute seule ; un homme la conçoit et la produit ; la conception primitive ainsi produite se crée d’autres hommes qui la transforment encore et la réalisent ; les religions font les hommes et les hommes les font.

68. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 1, du génie en general » pp. 1-13

Un homme qui invente mal, qui produit sans jugement, ne mérite pas le nom d’inventeur. […] Mais les hommes n’ont pas le même empire sur leur imagination que sur leurs jambes. […] La nature a voulu répartir ses talens entre les hommes, afin de les rendre nécessaires les uns aux autres, parce que les besoins des hommes sont le premier lien de la societé. […] Des hommes sans aucun esprit, sont aussi rares que les monstres, dit celui de tous les hommes qui s’est fait la plus grande réputation dans la profession d’instruire les enfans. […] Les inclinations des hommes ne sont si differentes que parce qu’ils suivent tous le même mobile, je veux dire l’impulsion de leur génie.

69. (1898) Politiques et moralistes du dix-neuvième siècle. Troisième série

Hommes en place, hommes en crédit, hommes célèbres, hommes à la mode, hommes honorés, hommes approuvés, lui ont toujours semblé autant de pères, à lui désignés par le consentement universel pour être respectés de lui, et qu’à ce titre il abhorrait, et dont, à ce titre, il se faisait une loi de prendre en tout le contrepied et de réaliser la contre-partie. […] La démocratie est donc favorable à la douceur de l’homme envers l’homme. […] Il était homme d’intérieur et de silence. […] Où est le droit qu’un homme a d’être l’égal d’un autre homme ? […] Du désir qu’a l’homme faible que tous les hommes soient aussi faibles que lui.

70. (1818) Essai sur les institutions sociales « Chapitre II. Marche progressive de l’esprit humain » pp. 41-66

Enfin l’esprit humain a, ainsi que l’homme, ses âges et ses temps critiques. […] On n’a cru jamais qu’on ne dût étudier l’homme que dans le vieillard. […] Ainsi les traditions de la déchéance de l’homme circulaient dans le monde ; et celles d’un Réparateur de la nature humaine, d’un Médiateur entre Dieu et l’homme, circulaient en même temps. […] Il est certain que s’il eût été un homme marqué pour sauver, au lieu d’être un homme marqué pour détruire, il eût été le législateur actuel de l’esprit humain. […] Ce grand luxe de la création, cet appareil de corps célestes semés dans d’espace comme une éclatante poussière, tout cela n’est pas trop pour l’homme, parce que l’homme est un être libre et intelligent, parce que l’homme est un être immortel.

71. (1911) La morale de l’ironie « Chapitre premier. La contradiction de l’homme » pp. 1-27

C’est l’opposition que crée visiblement en chacun de nous la dualité de l’homme, animal social, et de l’homme, individu égoïste. […] Les ancêtres de l’homme n’ont pas pu ne pas la présenter. […] Il se pourrait que l’homme fût altruiste ? […] L’homme s’y est peut-être pris trop tard pour devenir un être social. […] Sans que l’homme en eût conscience, et parfois même tandis que l’homme croyait agir sans elle ou contre elle, elle l’a influencé pourtant, elle l’a dirigé et conduit.

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