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780. (1769) Les deux âges du goût et du génie français sous Louis XIV et sous Louis XV pp. -532

On figurait les objets pour en exprimer l’idée avant que l’écriture alphabétique fût en usage. […] De mérope éperdue exprimez les allarmes. […] C’est ainsi qu’Alaric exprime sa flamme à la Reine Amalasonte. […] & que son amour est bien exprimé ! […] Il exprime avec agrément les détails les plus épineux.

781. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « La princesse Mathilde » pp. 389-400

La physionomie entière exprime noblesse, dignité, et, dès qu’elle s’anime, la grâce unie à la force, la joie qui naît d’une nature saine, la franchise et la bonté, parfois aussi le feu et l’ardeur. […] L’empereur Nicolas y répondit par une lettre qui touche de trop près à l’histoire pour que nous n’usions pas de la permission qui nous est donnée de la produire ici : Je vous remercie bien sincèrement, ma chère nièce, des nobles sentiments que m’exprime votre lettre.

782. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Histoire de la littérature française, par M. D. Nisard. Tome iv. » pp. 207-218

Les Grecs avaient un précepte dont je ne puis donner ici que le sens, à défaut des mots mêmes qui, par leur jeu et leur cliquetis de son38, y ajoutaient de l’agrément : ce précepte et ce conseil, c’était d’exprimer autant que possible les choses neuves simplement, et au contraire les choses communes avec nouveauté (inaudita simpliciter, proprie communia dicere). […] Goethe l’a vu et l’a exprimé avec sa supériorité de critique et de naturaliste : « Lorsqu’une famille s’est fait remarquer, dit-il, durant quelques générations par des mérites et des succès divers, elle finit souvent par produire dans le nombre de ses rejetons un individu qui réunit les défauts et les qualités de tous ses ancêtres, en sorte qu’il représente à lui seul sa famille entière.

783. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Chateaubriand, jugé par un ami intime en 1803 » pp. 2-15

Je n’ai pas assez comparé les deux pays pour être juge ; mais ici le monde catholico-légitimiste qui avait pourtant connu Chateaubriand aussi bien que moi, et qui, dans le particulier, ne s’exprimait pas autrement sur son compte, parut se scandaliser et s’insurgea sur toute la ligne. […] J’étais bien sûr d’être d’accord sur les points principaux avec ces hommes d’autrefois, dont j’avais recueilli si souvent les paroles, quand ils s’exprimaient dans la familiarité sur cette nature singulière de génie qui, même après toutes les explications, était restée pour eux une sorte de problème.

784. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « JULES LEFÈVRE. Confidences, poésies, 1833. » pp. 249-261

Avant d’arriver, en effet, à l’expression directe du sentiment qui l’émeut, le poëte érudit fait volontiers le grand tour ; il se souvient de tout ce qu’il a lu en diverses langues de plus ou moins analogue à ce qu’il sent ; il traverse laborieusement cette infinité de réminiscences ; il y réfracte mainte et mainte fois sa pensée primitive, et elle ne nous parvient, quand il l’exprime, que déjà détournée de sa route et dépouillée de son rayon. […] Il avait fait ce vers, traduit, je crois, de l’anglais, et qui exprimait bien sa propre nature : La rose a des poisons qu’on finit par trouver !

785. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « VICTORIN FABRE (Œuvres publiées par M. J. Sabbatier. Tome Ier, 1845. » pp. 154-168

Sabbatier ne craint pas de s’exprimer : « Quant à l’ouvrage de M. de Barante, des considérations particulières avaient bien pu lui faire accorder une mention, mais ne pouvaient donner à personne l’idée de le mettre en parallèle avec un écrit de Victorin Fabre !  […] Auger et de Feletz, aient essayé, à certain jour, d’effleurer de leur plume un écrivain qui ne leur paraissait ni aussi neuf ni aussi pur qu’à d’autres ; le biographe en prend occasion de s’exprimer sur le compte de ces deux critiques, l’un strictement judicieux et l’autre agréable, d’une façon qui ne se ressent en rien assurément du goût ni de l’aménité littéraire.

786. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre XV. De l’imagination des Anglais dans leurs poésies et leurs romans » pp. 307-323

Leur supériorité consiste dans le talent d’exprimer vivement ce qu’ils voient et ce qu’ils éprouvent ; ils ont l’art d’unir intimement les réflexions philosophiques, aux sensations produites par les beautés de la campagne. […] Ils exagèrent les images, ils subtilisent les idées, ils épuisent tout ce qu’ils expriment, et le goût ne les avertit pas de s’arrêter.

787. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Deuxième partie. Invention — Chapitre II. Définition. — Énumération. — Description »

Et pourtant, par un jeu mécanique de la mémoire, ces mêmes esprits pensent avec des mots abstraits, généraux, collectifs : les ayant pensés et exprimés, ils semblent avoir épuisé du coup leur puissance d’invention, et ne peuvent passer outre. […] « Supposez-vous, leur disait-on, dans une pareille situation, et vous n’aurez pas de peine à exprimer ce que le malheureux éprouve. » Le malheur, c’est que ni vous ni moi, nous ne pouvons-nous supposer vraiment, et du fond du cœur, sérieusement, dans une pareille situation : nous ne nous y voyons pas, et, dans la froide et tout intellectuelle hypothèse que nous faisons, nous n’apercevons qu’une chose : nous aurions peur, grand’peur.

788. (1895) Histoire de la littérature française « Avant-propos »

La littérature se réduit à une sèche collection de faits et de formules, propres à dégoûter les jeunes esprits des œuvres qu’elles expriment.   […] Presque toutes les améliorations de cette édition venaient d’eux, et je leur en exprimais ici toute ma reconnaissance.

789. (1895) Histoire de la littérature française « Troisième partie. Le seizième siècle — Livre I. Renaissance et Réforme avant 1535 — Chapitre I. Vue générale du seizième siècle »

Il nous fallait l’idée de l’art, idée à laquelle peut-être le fond de notre tempérament national est assez réfractaire, qu’en cinq siècles de fécondité littéraire il n’avait pas acquise, que peut-être il ne pouvait absolument pas s’adapter dans toute sa pureté, et qu’il lui fallut toutefois saisir le plus possible pour s’exprimer par elle dans une grande littérature. […] Hommes, œuvres, genres, tout ce qui était pratique ou actuel, tout ce qui servait ou exprimait les intérêts ou les passions de circonstance, prit le dessus.

790. (1886) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Deuxième série « Armand Silvestre »

Armand Silvestre avait ces visions, est-ce qu’il n’était pas, spontanément ou par artifice, dans un état d’esprit aussi approchant que possible de celui des anciens hommes quand, essayant d’exprimer dans leur langue incomplète les phénomènes de la nature, ils créaient sans effort des mythes immortels ? […] Enfin, il se plaît souvent à exprimer des choses banales ou grossières sous une forme ultra-lyrique ou à mêler le style du « Parnasse » à celui des estaminets, et de là des contrastes d’un effet sûr.

791. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre V. Le théâtre des Gelosi (suite) » pp. 81-102

Oratio se plaint de sa mauvaise fortune et maudit la présence de ces comédiens dont vient tout le mal ; il s’exprime surtout en termes injurieux à l’égard de Vittoria qui lui a joué ce méchant tour. […] Pedrolino persuade à Pantalon que la comédienne est amoureuse de lui ; Pantalon, flatté, exprime l’intention de lui faire un présent.

792. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome II « Querelles générales, ou querelles sur de grands sujets. — Troisième Partie. De la Poësie. — La déclamation. » pp. 421-441

Comment les exprimer par des signes, représenter tous les changemens rapides des passions, observer toutes les proportions harmoniques ? […] Il dit qu’il a consulté là-dessus des musiciens, & qu’ils l’ont tous assuré qu’il étoit très-facile d’en exprimer les inflexions avec les notes actuelles de la musique ; qu’il suffiroit de leur donner la moitié de la valeur qu’elles ont dans le chant, & de faire la même réduction à l’égard des mesures.

793. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Troisième partie. Beaux-arts et littérature. — Livre second. Philosophie. — Chapitre premier. Astronomie et Mathématiques. »

La manière dont il s’énonce est remarquable : Itaque per hanc epistolam hoc ago ut ostendam tibi non minorem esse dubitandi causam in scriptis mathematicorum, quàm in scriptis physicorum, ethicorum 151, etc. « Je te ferai voir dans ce traité qu’il n’y a pas moins de sujets de doute en mathématiques qu’en physique, en morale, etc. » Bacon s’est exprimé d’une manière encore plus forte contre les sciences, même en paraissant en prendre la défense. […] Nous ne citerons pas Rousseau, dont l’autorité pourrait être suspecte ici ; mais Descartes, par exemple, s’est exprimé d’une manière bien étrange sur la science qui a fait une partie de sa gloire.

794. (1772) Bibliothèque d’un homme de goût, ou Avis sur le choix des meilleurs livres écrits en notre langue sur tous les genres de sciences et de littérature. Tome II « Bibliotheque d’un homme de goût — Chapitre VIII. Des romans. » pp. 244-264

Ses réfléxions exprimées avec noblesse, sont rarement amenées par le sujet ; elles paroissent quelquefois d’autant plus déplacées que l’auteur les fait à la suite de quelque intrigue, qui a non-seulement attendri, mais amolli les lecteurs. Les mœurs du monde lui étoient moins connues que les passions du cœur humain ; & il réussit aussi mal à plaisanter ou à peindre des choses ridicules, qu’il excelle à exprimer le sentiment.

795. (1818) Essai sur les institutions sociales « Addition au chapitre X de l’Essai sur les Institutions sociales » pp. 364-381

Il me paraît évident que la révélation et l’infini sont deux mots différents pour exprimer une même chose : religieusement et historiquement, c’est la révélation ; philosophiquement et idéalement, c’est l’infini. […] Avant la création de ces mots, ou pendant les différentes époques successives du perfectionnement de la parole, on pense souvent avec des images ; un grand nombre de perceptions de rapports a lieu, et ces perceptions sont des idées, des pensées réelles, qui demeurent indépendantes de la parole, faute de mots pour les rendre concrètes, les fixer, les exprimer.

796. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre XXI. Mme André Léo »

Mme André Léo, probablement née avec cet instinct religieux qui fait tendre en haut la créature humaine, y tend encore, dans les idées qu’elle vient d’exprimer ; mais tendance vaine ! […] Ce sont là des façons de s’exprimer qui sentent la caque de ce hareng, et ce sont ces charmants langages qui empêcheront, malgré la purulence démocratique universelle, les romans de Mme André Léo de s’asseoir dans l’opinion et dans le succès.

797. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Nicolas Gogol »

Nicolas Gogol25 I En voyant ce titre singulier et piquant sur la couverture de ces deux volumes : Les Âmes mortes, les braves gens naïfs qui se prennent au titre des livres, et qui ne sont pas, d’ailleurs, très au courant de la littérature de Russie, ne se douteront guères, à distance, de ce qu’exprime un titre pareil. […] Cette faculté d’imitation, si facile qu’elle en paraît instantanée comme l’éclair, les Russes ont trouvé un mot pour l’exprimer sans faire saigner cette veine si pleine, toujours gonflée sur la joue rougissante, de l’amour-propre national.

798. (1909) Les œuvres et les hommes. Philosophes et écrivains religieux et politiques. XXV « Edgar Quinet »

Mais sans rhythme et sans rime, comme la voilà, que vaut-elle, en n’exprimant que ce qu’elle exprime, c’est-à-dire rien ?… III Car elle n’exprime rien et rien partout !

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