Son livre est rempli d’images indécentes ; ses expressions sont basses, ordurières. […] Le livre de l’abbé Boileau n’a pas le mérite du stile ; il est mal écrit, &, par-là, moins dangereux que celui de Chorier, qui n’a que trop réuni, aux idées les plus libres, l’élégance & la finesse de l’expression.
Broute sa bienfaitrice… Est une expression hardie, mais amenée si naturellement, qu’on ne songe point à cette hardiesse. […] La Fontaine se sert exprès de ces expressions qui appartiennent à l’art de raisonner, que l’homme dit être son seul partage, et que Descartes refuse aux animaux.
Ces expressions : Non vultus, non color unus, peignent excellemment le trouble de la prophétesse. […] Tous deux polissent leurs ouvrages avec le même soin, tous deux sont pleins de goût, tous deux hardis, et pourtant naturels dans l’expression, tous deux sublimes dans la peinture de l’amour ; et, comme s’ils s’étaient suivis pas à pas, Racine fait entendre dans Esther je ne sais quelle suave mélodie, dont Virgile a pareillement rempli sa seconde églogue, mais toutefois avec la différence qui se trouve entre la voix de la jeune fille et celle de l’adolescent, entre les soupirs de l’innocence et ceux d’une passion criminelle.
On l’a vu par les corrections que nous avons publiées, il superposait ses verbes, il écrivait trois mots pour un, il essayait les épithètes, il modifiait à chaque instant ses idées et ses expressions. […] Sinon il faudra dire que les styles de Rousseau, Labruyère (sic), Montesquieu, Flaubert et tant d’autres, qui sentent la rhétorique et le travail, ne sont pas de l’art ; et il n’y aurait de vrais artistes que ceux qui n’ont pas médité leurs phrases, qui n’ont pas cherché leurs épithètes, qui n’ont pas combiné leurs mots, qui n’ont pas travaillé leurs expressions.
Ce n’est rien de beau que l’humanité réduite à sa plus simple expression ! […] Il a, suivant l’heureuse expression de M. […] Dans quelle mesure une littérature est-elle l’expression d’une société ? […] Mais la clarté absolue et la propriété de l’expression. […] Les bonheurs d’expression sont fréquents sous la plume de M.
Il n’y a pas de plus grand nom dans l’histoire de la littérature française ; il n’y a pas, pour me servir d’une expression familière à Bossuet, d’esprit dont la cime soit plus haute. […] Si son sujet l’amène à méditer sur le néant des choses humaines, sur la mort, sur les révolutions des empires, sur la force de l’Eglise écrasant les hérésies, les images, les expressions fortes abondent sous sa plume. […] Bossuet y trouvait plus en relief les deux genres de beautés où il excelle lui-même : la vérité des peintures et la hardiesse de l’expression qui est le privilège de la langue poétique. […] » Et ailleurs : « Ce sont des expressions, et non des pratiques. » A-t-il d’ailleurs méconnu ou trop peu estimé les délicatesses de la piété des contemplatifs ? […] Leur gloire est de rendre immortelles par l’expression les vérités fondamentales qui servent comme d’assises à toutes les sociétés, quel qu’en doive être le couronnement.
La foule s’était composé un lord Byron factice, d’après quelques excentricités de sa jeunesse, d’après quelques audaces de pensée et d’expression, mais surtout par son obstination à identifier le poète avec les personnages imaginaires de ses poèmes, types qui ne ressemblaient en rien au Byron que j’ai connu. […] Mais c’était surtout dans la bouche et dans le menton que résidait sa plus grande beauté, ainsi que la plus puissante expression de sa belle physionomie. […] Encore aujourd’hui, si je viens à penser à l’expression qu’un grand peintre devrait donner au génie, cette tête sublime reparaît tout à coup devant moi. » Et dans une autre occasion : « J’eus un instant d’enthousiasme. […] Il portait à la tribune le style lapidaire, et moi la première expression que le cœur ému prêtait à mes lèvres. […] Depuis, il a laissé les vers ; il a donné à la prose des inflexions, des contours, des inattendus d’expression, des finesses et des souplesses qui rendent son style semblable à des chuchotements inarticulés entre des êtres dont la seule langue serait le tact.
Le progrès qu’on avait cru faire, avec Taine et sur ses traces, « en soudant, — selon son expression, — les sciences morales aux sciences naturelles », n’a pas été du tout un progrès, mais au contraire un recul. […] Et toutes ces clameurs, et tous ces hurlements ne sont qu’une forme, ou une expression plus démocratique, de ce que Bossuet a si bien appelé « la haine des hommes contre la vérité ». […] S’il y a des « notions du merveilleux », — je veux dire si cette expression signifie quelque chose, — ce sont peut-être les « spirites » qui dirigent leur vie d’après elles, mais le « spiritisme » et le « spiritualisme » font deux. […] C’est ici la seule expression que je consente à modifier, comme étant trop absolue dans sa brièveté. […] L’absolue nécessité des lois de la nature n’est après tout qu’un postulat dont nous avons besoin pour asseoir le fondement de la science, et rien ne prouve que ce postulat soit autre chose que l’expression d’une loi toute relative de notre intelligence.
Il est de toute évidence que l’auteur de Germinal et de la Terre, à force de chercher des effets dans l’expression et l’image de l’ordure, a fini par s’y familiariser et y prendre goût. […] Il ne redoute pas, de même que Voltaire, Rousseau, la sincérité d’une verte expression, réminiscence de cette vieille langue française, de laquelle il avait été bercé, mais il se garde de persister sur ce ton. […] Les exhalaisons fades, nauséabondes, fétides même, il les traduit par les expressions les plus susceptibles d’amener l’illusion olfactive : les conditions ambiantes n’étant pas indifférentes à la détermination des actes. […] Chez Rabelais, tout jaillit de la verve et de l’entrain le terme cynique n’est que l’expression de la gaieté et de la gausserie gauloise. […] C’est ainsi que nous retrouvons à chaque page des lueurs molles, des clartés molles, des expressions molles, des physionomies molles, des douceurs molles, etc., etc.
M. de Régnier surtout se tient à l’écart des nouvelles recherches sur l’expression sonore de la pensée poétique ; M. […] Mais cet ensemble d’harmonies n’est au point de vue purement musical que la contraction des divers groupes transcrits ci-après sous leur plus simple expression : On le remarquera, chacun d’eux est ici complet avec sa conclusion logique. […] L’enjambement, autrefois constamment nécessaire, est devenu un moyen d’expression nullement distinct des autres et ne sera plus employé que dans un but prévu, et par exception : l’analyse logique peut dorénavant coïncider avec le vers sans amener l’uniformité, car elle s’unit au rythme désinvolte et primesautier, et chaque ligne nouvelle (ou presque !) […] Car l’artiste ne doit mépriser aucun des moyens d’expression usités jusqu’à lui ; il faut au contraire qu’il puisse les faire servir tous au glorieux mystère de la Beauté. […] Il ne pouvait tolérer longtemps une forme littéraire restrictive de l’action et du fol instinct, et qui, en régularisant avec rigueur l’expression de l’idée, arrête l’élan du cœur pour le discipliner à de traditionnels mouvements.
Franchement, quelques strophes de Malherbe, très belles de formes et d’expressions, quelques odes aussi harmonieuses, mais moins poétiques de J. […] Il n’est plus douteux d’ailleurs que les Romantiques (pour nous servir encore de cette expression déjà surannée) n’aient en ce moment l’avantage du talent comme celui de la position. — « Mais, nous dit-on, n’y a-t-il point parmi les rangs des Romantiques des gens à idées extravagantes, à imagination déréglée, dont les compositions ne ressemblent à rien et dont le style est alternativement barbare et ridicule ? […] C’est l’ordre des idées, la grâce ou la sublimité des expressions, l’originalité des tours, le mouvement et la couleur, l’individualité du langage, qui composant le style ; c’est après une peinture éloquente de toutes ces qualités, que Buffon a dit : le style est l’homme même. […] Comme si on pouvait séparer l’idée de l’expression dans un écrivain ; comme si la manière de concevoir n’était pas étroitement unie à la manière de rendre ; comme si le langage enfin n’était qu’une traduction de la pensée, faite à froid et après coup ! […] Il a reproduit avec génie la manière franche, l’expression mâle du grand poète Régnier ; et remontant aux premiers âges de notre poésie, il a rendu à nos vers l’indépendance de la césure et de l’enjambement, et ces formes elliptiques, et cette allure jeune et vive, dont ils n’avaient presque plus de traces.
Mais si la distinction et l’esprit de choix lui font faute habituellement, il a au plus haut degré la véracité, la bonhomie pleine de sens, le cœur dans les choses essentielles, la naïveté dans les moindres ; cela lui donne quelquefois l’expression. Je n’oserais assurer qu’il ait trouvé cette expression et qu’elle lui soit venue aussi vive, aussi légèrement tendre qu’elle aurait pu l’être, le jour où, à peine âgé de vingt ans, il fit un matin à je ne sais quelle dame la déclaration suivante, qu’il a pris soin de nous conserver mot pour mot : Déclaration d’amour prononcée à une toilette le 25 juin 1714 : « Jusques à quand, madame (il débute tout comme Cicéron dans sa fameuse harangue : Jusques à quand, Catilina…), — jusques à quand, madame, prendra-t-on des marques d’amour pour des marques de mépris ? […] Il n’a pas d’élévation, au moins continue ; il se passe à tout moment des trivialités d’expression qui font de son langage l’opposé du langage noble et digne ; il était certes, à cet égard, très peu propre, on l’a dit, à être un ministre des Affaires étrangères et à représenter dans la forme sans déroger. […] [NdA] Je lis dans une de ses Remarques : Pourquoi avoir banni du beau langage une expression populaire une jeunesse, pour parler d’une jeune fille ou de plusieurs jeunes gens ensemble ?
On a bientôt dit, avec l’abbé de Choisy : Esprit audacieux, insatiable de crédit ; — ou avec Duclos : Puissant génie, âme féroce : « C’était sans doute, ajoutait ce dernier, un ministre supérieur pour conduire une guerre ; mais, si on le considère comme citoyen, c’était un monstre. » Cette expression de monstre d’égoïsme , appliquée à Louvois, a fait fortune et a trouvé des échos. […] Flousset aurait beaucoup le talent d’écrire et de peindre, d’être éloquent, comme on dit, dans le cas où il marcherait tout seul et où il aurait à composer, pour son compte, quelque morceau de sa propre étoffe ; mais aujourd’hui il ne nous donne pas le temps d’y songer : dans ce long travail d’analyse, d’extrait, de résumé et d’assemblage, il a fait preuve partout d’un excellent jugement, d’un goût sobre, d’un choix sévère, d’une fermeté de pensée et d’expression qui inspire toute confiance. […] Ici nous sommes au centre même du mouvement intérieur, et, selon l’expression ingénieuse du meilleur des juges46, nous sommes comme au dedans d’une montre dont nous voyons s’engrener et marcher les rouages. […] qui oserait soutenir que d’avoir donné à la France une suite de frontières où Douai, Lille, Cambrai, Valenciennes, Saint-Omer, n’étaient plus à l’ennemi, où Besançon et la Franche-Comté nous étaient acquis, où Strasbourg nous couvrait vers le Rhin, où la Lorraine dans un avenir prochain nous était assurée, qui oserait dire que d’avoir obtenu ce résultat, d’avoir extirpé du sein du royaume toutes ces enclaves étrangères, ces bras de polypes qui essayaient en vingt endroits d’y pénétrer, d’avoir fait, selon l’expression de Vauban, son pré carré , et d’avoir pu désormais tenir son quartier de terre des deux mains, ce ne soit pas avoir compris les conditions essentielles du salut et de l’intégrité de la noble patrie française ?
Il ne manquerait cependant à l’oisiveté du sage qu’un meilleur nom, et que méditer, parler, lire et être tranquille, s’appelât travailler. » Il se flatte aujourd’hui d’avoir à peu près réalisé ce plan qu’il s’était proposé, d’avoir vécu en sage et en philosophe, étranger à ce qu’on appelle succès, indifférent à ce qu’on appelle gloire, et de s’être uniquement « attaché, en cultivant les lettres, à mettre en jeu les ressources de son intelligence, dans l’espoir de prendre une idée de l’ensemble des choses de ce monde où il ne fera que passer, et de purifier, autant qu’il est possible, son esprit et son âme par la méditation et l’étude. » Ce sont ses propres termes, et je n’ai pas voulu affaiblir l’expression de cette satisfaction élevée ; mais il est résulté de cette conscience habituelle de sa propre sagesse et de cette confiance tranquille en soi, qu’il a été enclin à voir les autres plus fous ou plus sots qu’ils n’étaient peut-être ; il se disait, en les écoutant, en les voyant animés de passions diverses : « Est-il possible que tous ces gens-là ne soient point raisonnables et sages comme moi-même ? […] Casimir Delavigne devient faible du moment où il veut intercaler dans ses phrases pures et élégantes les idées gigantesques nées en Allemagne ou en Angleterre ; tandis que Mme Tastu, modeste et discrète comme la langue dont elle fait usage, en n’effarouchant pas le lecteur par la singularité des expressions, protège beaucoup mieux l’élan qu’elle fait prendre à l’imagination de celui, qui lit ; enfin M. […] » Je ne suivrai pas Étienne dans l’idée qu’il veut nous donner de divers autres salons, « tels qu’ils étaient tenus, dit-il, en 1826 » il a de ces expressions singulières et naturellement inélégantes. […] Des deux côtés du visage de Ballanche, l’un était difforme et concassé, selon l’expression de M.
Était-ce donc la peine de tant aller chez Mme de Sablé pour prendre tout à coup, et sans même s’en apercevoir, une expression à la bohème ? […] Évidemment, Monsieur, vous ne vous rendez pas bien compte de la valeur des expressions. […] Cousin daignait un jour revenir sur un premier entraînement et enthousiasme, je ne doute pas qu’il n’apportât à la seconde expression de son jugement des réserves qui le rendraient pleinement acceptable. […] Dans la vie ordinaire, son commerce est honnête, sa conversation juste et polie : tout ce qu’il dit est bien pensé ; et dans ce qu’il écrit, la facilité de l’expression égale la netteté de la pensée. » Voilà un La Rochefoucauld avant la lettre et jugé par un de ses pairs.
Thiers, Stendhal, — Jal, expression de l’opinion moyenne, — avaient pu se rencontrer souvent et causer avec des artistes, mais ils ne l’étaient pas eux-mêmes. […] Là où d’autres seraient rudes et blessants d’expression, même sans le vouloir, il a des délicatesses qui tiennent à une qualité morale ; il a des égards de confrère. […] Avec des antipathies profondes de genres, il a toujours adouci l’expression de son peu de goût à l’égard des œuvres et des personnes. […] Il aurait pu le critiquer, il ne le fait pas ; mais, en décrivant comme amoureusement ses tableaux, il énerve à dessein son expression, il la subtilise et l’effrange pour ainsi dire, il la rend plus diaphane ou plus miroitante que de raison ; il donne à son propre style quelques-uns de ces agréables défauts du peintre, s’inquiétant peu, pourvu qu’il les exprime, qu’on l’accuse ensuite de les partager : « M.
Toutes les âmes jeunes, vives, nationales, naturellement françaises, y trouvèrent l’expression éloquente et harmonieuse de leurs douleurs, de leurs regrets, de leurs vœux ; tout y est honnête, avouable, et respire la fleur des bons sentiments : Casimir Delavigne s’y montra tout d’abord l’organe de ces opinions mixtes, sensées, aisément communicables, et si bien baptisées par un grand écrivain, le mieux fait pour les comprendre et les décorer, par M. de Chateaubriand, de ce nom de libérales qui leur est resté. On n’en trouverait aucun représentant plus irrépréhensible et plus pur, en ces jeunes années d’essai, que Casimir Delavigne : en sincérité, en éclat, en expression loyale et populaire, il rappelle un autre cher souvenir, un autre nom sans reproche aussi, et qu’il a chanté : Casimir Delavigne et le général Foy ! […] Que du milieu de la moisson si riche de ses premiers triomphes, de cette ferveur généreuse des Vêpres Siciliennes, de cette exquise versification des Comédiens, il me soit permis de choisir, et d’exprimer ma prédilection toute particulière pour des portions du Paria : le jeune auteur y trouvait dans l’expression de l’amour des accents passionnés et vrais ; dans ses chœurs, surtout quand il exhale les tristesses et les langueurs de sa Néala, il arrivait au charme et nous rendait mieux qu’un écho de la mélodie d’Esther. […] Le monde, qui eût été empressé de l’attirer, ne le tentait pas : on peut dire de lui, selon une expression heureuse, que le monde ne l’a pas vu et ne l’a pas connu, il ne l’a qu’entendu.
Les détails du départ, le premier trot de la Grise, la mère de celle-ci, la Vieille Grise, qui, paissant près de là, reconnaît sa fille au passage, et qui essaie de galoper sur la marge du pré pour la suivre, tout est peint au naturel, avec une observation parfaite et une expression vivante. […] Quand l’expression manque, le petit Pierre arrive, et il est l’expression vivante. […] On y rencontre des scènes dignes, pour la finesse et la gaieté d’expression, du joli roman de Daphnis et Chloé.
D’Aguesseau était encore de cette race d’hommes qui ne pouvaient avoir une pensée sans en demander la permission et l’expression à quelque ancien. […] C’est dans les pages mêmes du fils qu’il faut apprendre à aimer l’expression modérée, continue et pleine, de cette belle vie antique de M. d’Aguesseau le père ; c’est là qu’il faut voir briller, sous des cheveux de plus en plus blancs, la vertu toujours égale du vieillard dans toute la fleur de sa première innocence. […] De la modération, du ménagement en toutes choses, une intelligence vaste et tempérée, un sincère et ingénu désir de conciliation, une mémoire prodigieuse, immense, une expression pure, élégante et soignée, cette politesse affectueuse qui naît d’un fonds d’honnêteté et de candeur, c’est ce que témoignent tous ses écrits, et ce qu’on lirait aussi, jusqu’à un certain point, dans les traits de son noble et beau visage, dans ce sourire discret, dans cet œil fin, bienveillant et doux, et jusque dans ces contours si ronds et sensiblement amollis, où rien n’accuse la vigueur. […] Puisqu’il faut de loin des auréoles aux hommes, il est bon, il est louable qu’elles entourent quelquefois ces figures pacifiques où l’âme respire plus que le génie, et où le ton excellent de l’ensemble n’est que l’expression des mœurs elles-mêmes.