Que presque tous les philosophes de l’école expérimentale se soient rencontrés dans la théorie qui explique tout le mécanisme de l’esprit humain par l’association, il n’y a rien à cela que de naturel. […] S’agit-il d’expliquer telle conception dite rationnelle, comme l’idée de l’infini dans le temps ou dans l’espace ? […] S’agit-il enfin d’expliquer le jeu de l’activité volontaire ? […] Que certaines affections résultent de l’association habituelle de tels phénomènes sensitifs ; qu’on puisse expliquer tels mouvements d’amour ou de haine, de sympathie ou d’antipathie par des sensations répétées de plaisir ou de peine, sans recourir à un principe spécial de la nature humaine : cela n’est guère douteux. […] La sensation s’explique elle-même par une affection innée, par un instinct de nature.
Nous devons donc partir d’une notion quelconque de la divinité dont les hommes ne puissent être privés, quelque sauvages, quelque farouches qu’ils soient ; et voici comment nous expliquons cette connaissance : l’homme déchu, n’espérant aucun secours de la nature, appelle de ses désirs quelque chose de surnaturel qui puisse le sauver ; or cette chose surnaturelle n’est autre que Dieu. […] Alors s’expliquera la manière particulière dont les choses sont nées, autrement dit, leur nature (axiome 14) ; or l’explication de la nature des choses est le propre de la science. […] Nous montrons dans les fables l’histoire civile des premiers peuples, lesquels se trouvent avoir été partout naturellement poètes. 2º Même accord avec les locutions héroïques, qui s’expliqueront dans toute la vérité du sens, dans toute la propriété de l’expression ; 3º et avec les étymologies des langues indigènes, qui nous donnent l’histoire des choses exprimées par les mots, en examinant d’abord leur sens propre et originaire, et en suivant le progrès naturel du sens figuré, conformément à l’ordre des idées dans lequel se développe l’histoire des langues (axiomes 64, 65). 4º Nous trouvons encore expliqué par le même système le vocabulaire mental des choses relatives à la société 40, qui, prises dans leur substance, ont été perçues d’une manière uniforme par le sens de toutes les nations, et qui dans leurs modifications diverses, ont été diversement exprimées par les langues. 5º Nous séparons le vrai du faux en tout ce que nous ont conservé les traditions vulgaires pendant une longue suite de siècles. Ces traditions ayant été suivies si longtemps, et par des peuples entiers, doivent avoir eu un motif commun de vérité (axiome 16). 6º Les grands débris qui nous restent de l’antiquité, jusqu’ici inutiles à la science, parce qu’ils étaient négligés, mutilés, dispersés, reprennent leur éclat, leur place et leur ordre naturels. 7º Enfin tous les faits que nous raconte l’histoire certaine viennent se rattacher à ces antiquités expliquées par nous, comme à leurs causes naturelles. — Ces preuves philologiques nous font voir dans la réalité les choses que nous avons aperçues dans la méditation du monde idéal.
L’extension discontinue et brisée de certaines espèces peut souvent s’expliquer par leur extinction dans les régions intermédiaires. […] Beaucoup d’autres faits encore, à ce qu’il me semble, s’expliquent par cette théorie. […] Les mêmes principes nous expliquent comment il se fait que les affinités mutuelles des espèces et des genres de chaque classe soient si complexes et si tortueuses. […] Je ne puis croire qu’une fausse théorie puisse expliquer, comme le fait la loi de sélection naturelle, les diverses grandes séries de faits dont j’ai parlé. […] Qui expliquera quelle est l’essence de l’attraction ou de la pesanteur ?
En un mot, la parole est nécessaire à l’homme pour penser, et alors l’homme n’a pu inventer la parole ; car on ne peut supposer un temps où il ait été sans pensée, et on ne peut expliquer comment il aurait pu créer la parole, sans laquelle il ne pouvait penser ; ou la parole n’est pas nécessaire à l’homme pour penser, et alors il a pu graduellement inventer la parole. […] On me pardonnera de prendre ainsi mes précautions d’avance, puisque c’est pour m’accommoder aux opinions nouvelles, et les expliquer : cela, au reste, n’augmente ni ne diminue en rien le crédit de ces opinions ; c’est une méthode pour mes lecteurs aussi bien que pour moi. […] J’écarte pour le moment, comme on voit, l’examen de l’action continue de la Providence sur les sociétés humaines, parce qu’on l’écarte assez généralement dans la discussion actuelle : au reste, aucune des deux classes ne la nie ; seulement chacune l’explique à sa manière. […] Mais, avant de terminer ce chapitre, il faut que j’explique deux choses ; car, dans une telle matière, il est très difficile d’être clair d’après un simple énoncé, surtout lorsqu’on a peu l’habitude de ces sortes de discussions. […] Enfin il en est qui, sentant un obstacle invincible à comprendre les idées nouvelles, mais sentant aussi que ces idées doivent être fondées en raison, veulent s’expliquer ce qui leur est si profondément antipathique.
Je ne dois pas dissimuler surtout qu’au point où nous sommes arrivés de la discussion, ce qui me reste à expliquer, afin d’achever la tâche que je me suis imposée, est trop conjectural pour ne pas m’inspirer une réserve extrême. […] Nous n’avons point à expliquer ici les bienfaits de la première émancipation ; nous n’avons à nous occuper que de la seconde émancipation, pour laquelle l’esprit humain est encore dans le travail douloureux de la crise. […] J’aurais pu citer ailleurs ce passage, mais j’ai dû le réserver pour cette partie de la discussion, parce qu’il explique parfaitement ma pensée sur les fonctions que les langues ont à remplir. […] Ceci expliquerait assez bien, au reste, comment plusieurs philosophes ont été portés à attribuer l’invention du langage à l’homme. […] C’est ainsi qu’on a été graduellement amené à penser que tout était d’invention humaine ; c’est ainsi que, ne pouvant expliquer les prodiges de l’harmonie ancienne, on a trouvé plus simple de les nier, ou de les attribuer à des causes indépendantes de l’essence même de la musique primitive ; c’est ainsi qu’on a imaginé d’établir en théorie que l’homme avait pu fonder la société et parvenir à instituer le langage, sans savoir toutefois ce qu’il faisait.
— nous voulons, du moins, parler de son succès, s’il en a un, comme dit la musette, et l’expliquer par Voltaire lui-même, qui suffit tout seul pour l’expliquer. […] Voltaire étant donné, avec tout ce qu’il est et tout ce que nous sommes, Voltaire, résumant à lui seul tant de choses vivantes qu’il a créées, que nous n’avons pas eu la force d’arracher de nous et de faire mourir, explique profondément les admirations qu’il excite, — ou plutôt il ne les explique pas.
Spencer a essayé, en étendant et compliquant son explication, d’expliquer en partie la formation de l’œil rudimentaire chez les animaux inférieurs, de l’œil plus complexe chez les animaux supérieurs. […] C’est cette spécification que nous ne pouvons pas expliquer ; mais, qu’elle soit simple pour être inexpliquée, c’est ce qu’on ne peut admettre. […] Par cela même, nous nous séparons à la fois et des spiritualistes qui veulent tout expliquer (ou plutôt ne rien expliquer) par des états simples de la conscience, et des matérialistes qui veulent tout expliquer par des éléments simples de quantité, ou par une qualité prétendue simple indéfiniment ajoutée à elle-même, comme serait la résistance, ou enfin par un phénomène prétendu simple, comme le choc. […] Cette loi, selon nous, explique le malentendu entre les relativistes et les non-relativistes. […] Une pareille explication, qui vient se confondre avec celle de Hartmann, n’est-elle pas encore plus inintelligible que le fait même à expliquer ?
De plus, dans l’hypothèse de la table rase, comment expliquer le phénomène d’idiotie ? […] Comment expliquer un cas comme celui de Laura Bridgmann, qui, née aveugle et sourde-muette, manifeste une activité intellectuelle très variée. […] Mais comment alors expliquer la continuité de la conscience, puisque entre deux états il y a nécessairement un intervalle ? […] Il explique les sensations par des mouvements vibratoires : hypothèse qui n’ajoute rien à notre connaissance des processus psychiques. […] On expliquait ces faits en les attribuant à l’imagination, bien ; mais par quelles conditions matérielles l’imagination a-t-elle pu agir sur les viscères ou sur la dent ?
Mais il n’a point l’idée… Or, quand l’idée manque, l’idée autour de laquelle on centralise les faits et par laquelle on les explique, peu importe alors que les histoires ramassées à toutes places dans les annales des États, et qu’on enfile les unes au bout des autres, s’appellent les Reines de la main gauche, sujet galant, ou les Couronnes sanglantes, sujet sinistre. […] C’est là ce qui explique tout dans la vie de cet incroyable roi, que Catherine, en belle mauvaise humeur, comparait spirituellement à « un comédien en voyage », et justement c’est ce qui explique ses ribambelles de voyages qui n’étaient que de la coquetterie étouffant dans cette toute petite Suède, et qui voulait déborder sur le monde et y régner sur tous les cœurs ! C’est ce qui explique sa fureur de fêtes et de costumes et cette jeunesse dorée qu’il entretenait autour de lui et pour le luxe de laquelle il saigna à blanc son malheureux royaume, finissant par de la fausse monnaie, mascarade d’écus, — moins joyeuse que les autres, celle-là ! C’est ce qui explique enfin sa politique, qui entassait le mensonge et les tentatives de séduction personnelle, jusqu’à l’heure où une inconséquence de femme crevait tout à coup les mensonges de femme et emportait le brillant et faible réseau !
N’essayons pas d’expliquer cette uniformité du droit naturel en supposant qu’un peuple l’a communiqué à tous les autres. […] Ne pouvant expliquer les origines de la société, et ne se résignant point à les ignorer, on s’est représenté la barbarie antique d’après la civilisation moderne. […] Mais comment expliquer ce premier pas de l’esprit humain, ce passage critiqué de la brutalité à l’humanité ? […] Il aimait aussi à observer le soin avec lequel les jurisconsultes pèsent les termes des lois qu’ils expliquent. […] Dans cette lettre curieuse, Vico explique le peu de succès de La Science nouvelle.
La conscience et les opérations intellectuelles, abstraction, généralisation, induction, déduction, association des idées et imagination, sont suffisantes pour expliquer l’origine de l’idée du parfait. […] Ils ont raison de dire, en d’autres termes, que la pensée ne saurait se ramener entièrement aux choses qu’elle pense ni s’expliquer entièrement par elles. […] Il ne faut donc pas prétendre expliquer la conscience même, le sentiment et la pensée, par les seules relations des choses extérieures et par les mouvements de la matière. […] Une fois admis que la conscience ne s’explique pas par le dehors, il en résulte que ce qui est vraiment constitutif du fait même de conscience ne s’explique pas davantage par le dehors ; c’est là ce qu’on peut retenir du kantisme. […] L’hypothèse philosophique qui explique le plus simplement cet accord de la pensée et de ses objets est la doctrine d’unité radicale qu’on nomme le monisme.
Comme elle n’a plus recours à une opposition entre l’agréable et le bien moral, une seule et même inclination suffit à expliquer tous les actes. […] Elle n’est toutefois qu’une conséquence elle-même d’une autre illusion plus profonde et qui l’explique en partie : l’illusion de la personnalité, la croyance à l’unité du moi. […] Il suffit, pour expliquer comment se forme l’illusion d’un moi unique, de montrer le jeu de ces instincts divers dans la conscience. […] Elle explique le sérieux avec lequel les amants s’appliquent à satisfaire leur désir, elle justifie leur mépris de tous les autres intérêts et le sacrifiée qu’ils en font. […] Le même état de sensibilité qui explique les premières hypothèses où le désir se satisfait dans la foi, sans regarder à l’invraisemblance de ses inventions, le même état de sensibilité explique encore ces échafaudages plus complexes au moyen desquels l’esprit s’ingénie à construire, à côté du monde visible, ces apparences logiques dont l’harmonie dissimule la fragilité et qui composent les métaphysiques.
A l’aide de ce nouveau point de vue, toutes les contradictions apparentes que nous avons signalées dans nos premiers chapitres peuvent s’expliquer facilement. […] Voici comment s’explique M. […] Les phrénologues expliquent ces faits en disant que lorsque la blessure ou le mal se produit par derrière, les parties antérieures sont sympathiquement malades ; mais on pourrait faire le raisonnement inverse avec la même autorité, et par là toutes les indications de l’anatomie pathologique sont entachées d’incertitude et d’obscurité46. […] Broussais explique ce singulier fait par la docilité du mouton à se soumettre au chien ; mais il se trouve que le même organe se rencontre chez le loup, le tigre et le lion. […] Même chez l’homme, certains talents très circonscrits et très déterminés pourraient encore s’expliquer dans cette hypothèse, et l’on reviendrait ainsi par un chemin détourné à une doctrine qui ne serait pas très éloignée de celle de Gall.
Tout s’explique Dans le palais du Bosphore. — La chambre du grand conseil […] Laissez-moi vous expliquer ; c’est bien simple… […] Je demande à m’expliquer, voilà tout.
Lyell, lorsqu’il a expliqué pour la première fois les transformations géologiques de la croûte terrestre par l’action des causes actuelles. […] Cette loi naturelle peut nous aider à comprendre certaines grandes séries de faits que nulle autre ne suffit à expliquer. […] En partant de ce principe, peut-être pourrions-nous expliquer quelques faits au sujet desquels nous reviendrons du reste dans notre chapitre sur la distribution géographique. […] — La loi que j’ai désignée par le terme de divergence des caractères est de la plus haute valeur, en ce qu’elle explique, je crois, plusieurs faits de grande importance. […] Comment explique-t-elle encore qu’une plante ait des feuilles pointues, et l’espèce voisine, des feuilles obtuses ?
C’est de la plaisanterie, en effet, que ressortent tous ces systèmes de philosophie, qui veulent expliquer ce monde de mystère et en supprimer le crépuscule… C’est de la plaisanterie ! […] Cet esprit puissant, mais dans un vide immense, s’est trompé de la plus petite erreur et de la plus commune sur le compte de la destinée humaine que Schelling, — un philosophe comme lui pourtant, — ne pouvait expliquer sans la Chute. […] Cet homme fameux, mais mal expliqué dans l’arcane de son texte, dont jusqu’ici on ne nous a donné que des déchirures, ce Vieux de la Montagne philosophique, compromis par les Cousins et les Proudhons et toute sa bande d’assassins littéraires ou politiques, M. […] Les Mandarins seuls de la Philosophie se sont risqués et continueront de se risquer dans la logique d’Hegel, mais ils ont rapporté déjà et continueront de rapporter de leur accointance avec les œuvres du professeur de Berlin une méthode historique et des vues sur l’histoire qui pourraient très bien bouleverser le monde, sous prétexte de l’expliquer. […] Dans son Introduction, trop courte, et dans ses belles notes, dont il a presque doublé les beaux volumes de la Logique, il rapporte tout, explique tout et consent tout, avec une docilité et une fidélité égales.
N’y a-t-il point quelque inclination fondamentale qui en soit la source et les explique ? […] Spinoza, on le sait, expliquait toutes nos passions par le désir, la joie et la peine, qu’il ramenait à l’inclination fondamentale de tout être : « être et persévérer dans son être. » Jouffroy arrivait à la même conclusion sous une autre forme et d’une autre manière. […] Ces deux lois expliquent les émotions contagieuses, la propagation du bâillement ou du rire. […] Le sublime est un sentiment qui s’explique par la sympathie. […] Tout ceci nous explique la question du rire.
Si l’on ne s’explique plus devant des Claude Monet ou des Renoir les rafales de rire des anciennes expositions d’impressionnistes, encore moins peut-on s’imaginer comment en 1875 des personnes amoureuses de musique se dirigeaient vers le Châtelet avec des sifflets quand on y devait donner la Danse macabre, comment Carmen échoua, comment jadis des hommes d’intelligence pratique réelle eurent horreur d’Hernani, comment Baudelaire scandalisa, comment Flaubert froissa ; et je ne cite que des nouveautés où l’élément d’art était le seul en question, admettant que le naturalisme fut d’abord discuté simplement au nom de la morale, et que le patriotisme seul amena les Parisiens à manifester contre Lohengrin… En tout cas, le jour de Tannhauser ils n’avaient encore d’autres raisons que l’horreur du nouveau. […] L’historien a du mal à s’expliquer pourquoi les novateurs n’allèrent pas plus loin, et surtout il s’explique difficilement l’acharnement de la résistance contre une nouveauté qui de loin apparaît comme l’aboutissement logique d’anciennes nouveautés, déjà devenues de la tradition. […] Quoique résolu à vous en expliquer l’esthétique, je pense que seuls les poèmes ont qualité pour y bien réussir. […] Ce n’est point que je ne saisisse l’intérêt et le mérite des efforts tentés pour expliquer scientifiquement le vers libre. […] On peut déduire la métaphore, la détailler, l’expliquer tout entière, ou la faire apparaître sous des aspects divers, sur des plans variés.
L’homme qui prétend tout expliquer par un seul mot n’est pas digne d’en comprendre deux. […] Sans le mystère, je vous défie d’expliquer un atome. […] La matière n’explique rien. […] Est-ce qu’une énigme explique un monde ? […] Ce mystère explique tout !