Il en résulte un ensemble fidèle, quelque chose de ressemblant même à travers les couleurs flatteuses.
On n’obtient rien des poètes que par l’extrême louange : Homère, le plus grand de tous, le savait bien, lui qui, au livre VIII de l’Odyssée, fait dire par Ulysse au chantre Démodocus, pour lui demander un chant : « Démodocus, je te mets sans contredit au-dessus de tous les mortels ensemble, car c’est la Muse elle-même qui t’a enseigné, la Muse, fille de Jupiter, ou plutôt Apollon… » Ce compliment de début est de rigueur auprès des poètes, depuis Homère et Démodocus jusqu’à… jusqu’à tous ceux de nos jours.
Depuis lui, Helvétius, Volney, Cabanis, l’ont abordée, sinon expressément, du moins en diverses parties de leurs ouvrages : en de telles mains, la question s’est éclaircie ; réduite à ses véritables formes, elle a été résolue du moins dans son ensemble, et de nos jours on est d’accord sur le mode d’influence générale des climats.
La bouche voluptueuse, songeuse, empourprée de sang, la barbe douce et enfantine, l’abondante chevelure brune, l’oreille petite et délicate, concourent à un ensemble fièrement viril, malgré la grâce féminine.
Cela est tout ensemble vu, imaginé, exprimé.
Voulant éloigner madame de La Vallière qui s’était refusée à solliciter des faveurs pour eux, ils composèrent ensemble une lettre en espagnol, par laquelle le roi d’Espagne était supposé instruire la reine de France de l’infidélité du roi.
Naguère, obligée à des abréviations par la longueur hostile de certains vocables, la chimie a dû adopter, pour signifier tout un ensemble de combinaisons complexes, tel suffixe assez heureux.
Quand le chœur ne faisait que parler, un seul parlait pour toute la troupe ; mais quand il chantait, on entendait chanter ensemble tous ceux qui composaient le chœur.
Il réfléchit peu sur l’ensemble des objets ; mais il observe curieusement les détails, et son coup d’œil est prompt, sûr et délié : il faut toujours qu’il soit en scène, et il ne peut consentir, même comme historien, à disparaître tout à fait.
… Dans l’esprit humain et dans l’Histoire, qui est la glace de l’esprit humain, mais une glace où les traits restent au lieu de passer, rien n’est isolé, tout se tient, tout s’enchaîne, et le devoir de l’historien est de montrer ces enchaînements, ces jointures, ces articulations, qui constituent l’ensemble de l’Histoire et de son unité.
Triste vie et précaire, comme devant une bête de proie ; les Frisons, dans leurs lois antiques, parlent déjà de la ligue qu’ils ont fait ensemble contre « le féroce Océan. » Même pendant le calme, cette mer reste inclémente. « Devant les yeux s’étale le grand désert des eaux ; au-dessus voguent les nuées, ces grises et informes filles de l’air, qui de la mer avec leurs seaux de brouillards, puisent l’eau, la traînent à grand’peine, et la laissent retomber dans la mer, besogne triste, inutile et fastidieuse10. » « À plat ventre étendu, l’informe vent du nord, comme un vieillard grognon, babille d’une voix gémissante et mystérieuse, et raconte de folles histoires. » Pluie, vent et houle, il n’y a de place ici que pour les pensées sinistres ou mélancoliques. […] Les nobles se crurent insultés, et sur-le-champ l’abbé Dunstan s’en fut lui-même chercher le jeune homme. « Il trouva la femme adultère, dit le moine Osbern, sa mère et le roi ensemble sur le lit de débauche. […] « Alors elle rit, Brynhild, — la fille de Budli, — cette fois-là seulement, — de tout son cœur, — lorsque du lit, — on put entendre — le cri éclatant de la veuve. » Elle-même, revêtant sa cuirasse, se perça de son glaive, et, pour dernière demande, se fit étendre sur un grand bûcher avec Sigurd, l’épée entre eux, comme au jour où ils avaient dormi ensemble, avec des boucliers, avec des esclaves ornés d’or, avec deux faucons, avec cinq femmes, avec huit serviteurs, avec son père nourricier et sa nourrice, et tous brûlèrent ensemble. […] Je pense à mourir au côté de mon seigneur, près de cet homme que j’ai tant aimé… Il tint sa parole, la parole qu’il avait donnée à son chef, au distributeur des trésors, lui promettant qu’ils reviendraient ensemble à la ville, sains et saufs dans leurs maisons, ou que tous les deux ils tomberaient dans l’armée, à l’endroit du carnage, expirant de leurs blessures. […] Les deux poésies religieuses, la chrétienne et la païenne, sont si voisines, qu’elles peuvent fondre ensemble leurs disparates, leurs images et leurs légendes.
Dans les Harmonies, le souffle grandit, le vers est d’une trempe meilleure, mieux construit, plus sonore, moins sacrifié à l’ensemble de la strophe, la pensée s’élève et s’accentue. […] Tel qu’il nous apparaît, tel que nous l’admirons dans l’ensemble de ses poèmes, des Orientales à la Légende des Siècles, Victor Hugo s’impose à toute intelligence compréhensive comme une force vivante, à la fois volontaire et fatale. […] Le regard qu’il jette sur la nature est large et profond ; son œil saisit le détail infini et l’ensemble des formes, des couleurs, des jeux d’ombre et de lumière. […] Il semble que tout a été pensé et dit, et qu’il ne reste aux poètes futurs qu’à répéter incessamment le même ensemble d’idées et de sentiments dans une langue de plus en plus affaiblie, banale et décolorée. […] Aussi, le grand Poète saisit-il d’un œil infaillible le détail infini et l’ensemble des formes, des jeux d’ombre et de lumière.
Si elles s’accordaient ensemble, nous saurions que l’absurdité nous est épargnée ; et ce serait, pour nous, un repos. […] Chaque vers constitue un ensemble, pour le sens et pour l’harmonie, et, avec les autres, compose l’unité de la strophe. […] Les circonstances de temps et de lieu organisent l’ensemble des nécessités auxquelles les politiques auront à faire face. […] L’ensemble est d’une sereine mélancolie, d’une grâce parée et d’une douceur délicate. […] L’ensemble, même coordonné, de ces sciences particulières ne sera qu’une collection : ce n’est pas une synthèse.
Est-ce contre le système de l’univers qu’il se révolte, ou contre la part qu’il a dans un ensemble soumis à d’invariables lois ? […] Nous descendîmes ensemble et il me laissa jouir pendant quelque temps de cette nature dont j’étais privée depuis plusieurs mois ; c’était un de ces jours de la fin de l’hiver qui annoncent le printemps, je ne sais si la belle saison elle-même aurait autant frappé mon imagination que ce pressentiment de son retour ; les arbres tournaient leurs branches encore dépouillées vers le soleil ; le gazon était déjà vert, quelques fleurs prématurées semblaient préluder par leurs parfums à la mélodie de la nature quand elle reparaît dans toute sa magnificence ! […] Je me rappelai combien de fois nous avions admiré ensemble de certaines morts volontaires parmi les anciens, et je tombai dans des réflexions profondes comme si les lumières du Christianisme s’étaient tout à coup éteintes en moi, et que je fusse livrée à cette indécision, dont l’homme même dans les plus simples occurrences a tant de peine à se tirer. […] Asham revint le lendemain et nous allâmes encore une fois sur les bords de cette Tamise, l’orgueil de notre belle contrée ; j’essayai de reprendre mes sujets habituels d’entretien, je récitai quelques passages des beaux chants de l’Iliade et de Virgile, que nous avions étudiés ensemble, mais la poésie sert surtout à se pénétrer d’un noble enthousiasme pour l’existence, le mélange séducteur des pensées et des images, de la nature et de l’âme, de l’harmonie du langage et des émotions qu’il retrace, nous enivre de la puissance de sentir et d’admirer ; et ce n’était plus pour moi que ces plaisirs étaient faits ! […] Mr. de K… et Me. de V…, deux personnes dont le caractère était très estimé, sont partis de Berlin, lieu de leur demeure, vers la fin de l’année 1811, pour se rendre dans une auberge de Potsdam où ils ont passé quelques heures à prendre de la nourriture et à chanter ensemble les Cantiques de la Sainte Cène.
Le mâle se mit à chanter et fit entendre six sons ; la femelle, lui répondant, en articula six autres, et il se trouva que les douze sons réunis ensemble formaient les douze degrés de l’échelle chromatique. […] L’enfant de quatre ans, sa petite pochette sous le bras, descendait quelquefois dans la boutique d’un serrurier voisin qui jouait lui-même du violon ; l’artisan et l’enfant s’amusaient à exécuter ensemble des duos inhabiles dont l’enfant inventait les motifs. […] — Ces deux instruments, répondit l’enfant, ne pourraient pas s’accorder ensemble ; le violon du serrurier est juste d’un demi-ton plus bas que le tien. » Le père, étonné du discernement exquis de l’oreille d’un enfant, voulut s’assurer si la différence d’un demi-ton entre son violon et celui du serrurier était réelle ; il descendit, l’archet à la main, chez son voisin, et, s’étant assuré par lui-même que la dissonance était précisément du demi-ton perçu par son fils, il embrassa l’enfant les larmes aux yeux, appela sa femme et sa fille, et bénit Dieu en famille en s’extasiant sur l’organisation précoce et miraculeuse du grand homme futur dont la Providence avait doté leur humble foyer. […] Or vous saurez que le roi ne mange pas en public ; seulement tous les dimanches soir la famille royale soupe ensemble ; on ne laisse pas entrer tout le monde. […] « Ma chère maman, dit-il, je ne peux pas écrire tant les doigts me font mal à force d’écrire des récitatifs ; je te prie, chère mère, de prier pour moi que mon opéra réussisse, et qu’après cela nous nous trouvions tous réunis heureusement ensemble. » Le jour terrible de la représentation de son premier opéra à Milan approche.
« Tel est le cas du minéralogiste qui, pour reconnaître si une masse de matière peut être appropriée à un certain usage, en examine le mode de cristallisation, la couleur, la texture, la dureté, le clivage, la fracture, le degré de transparence, l’éclat, le poids spécifique, le goût, l’odeur, la fusibilité, les propriétés électriques et magnétiques, et dirige sa conduite d’après toutes ces choses prises ensemble. » La correspondance entre l’être et son milieu s’est donc constituée pleinement par des conquêtes successives ; il ne reste plus qu’à coordonner ces divers éléments. […] Tandis que les phénomènes qui sont l’objet de la physiologie, se produisent sous la forme d’un nombre immense de séries différentes liées ensemble, les phénomènes qui sont l’objet de la psychologie, au contraire, ne se produisent que sous la forme d’une simple série. […] Mais dans la jeunesse et l’âge mûr, « les petits groupes d’états qui aux premiers jours de la vie furent produits par les arbres, les champs, les rivières, les cascades, les rocs, les précipices, les montagnes, les nuages, s’éveillent ensemble devant un grand paysage. » En même temps naissent partiellement des myriades de sensations, causées, dans les temps passés, par des objets semblables à ceux qu’on a sous les yeux. […] Il signifie l’acte de grouper ensemble les rapports semblables et l’acte de séparer les semblables des dissemblables. […] Chaque fois qu’une intelligence développée découvre quelque distinction entre des objets, des phénomènes ou des lois qui étaient précédemment confondus ensemble comme étant de la même espèce, cela implique une différenciation d’états de conscience.
Il lui faut donc tout ensemble s’occuper de définir sa pensée à ses propres yeux, et de la rendre claire aux yeux de ceux qui suivent sa leçon. […] … La mère et la fille se sont écriées ensemble : — Oh ! […] Le sujet était immense tout ensemble, et très bien circonscrit. […] J’en aime la poésie tout ensemble intime et solennelle. […] Enfin, ici, c’est l’homme qui nous intéresse autant et plus que ce qu’il dit, c’est le reflet, sur les pages, de son âme travaillée, amoureuse tout ensemble de complications et d’ingénuité.
Jusqu’à lui on ne se doutait pas de tout ce que pouvaient fournir d’intérêt, de vie, de drame mouvant et sans cesse renouvelé, les événements, les scènes de la Cour, les mariages, les morts, les revirements soudains ou même le train habituel de chaque jour, les déceptions ou les espérances se reflétant sur des physionomies innombrables dont pas une ne se ressemble, les flux et reflux d’ambitions contraires animant plus ou moins visiblement tous ces personnages, et les groupes ou pelotons qu’ils formaient entre eux dans la grande galerie de Versailles, pêle-mêle apparent, mais qui désormais, grâce à lui, n’est plus confus, et qui nous livre ses combinaisons et ses contrastes ; jusqu’à Saint-Simon on n’avait que des aperçus et des esquisses légères de tout cela ; le premier il a donné, avec l’infinité des détails, une impression vaste des ensembles. […] Au défaut de bonnes fortunes dont son âge et sa figure l’excluoient, il y suppléoit par de l’argent, et l’intimité de son fils et de lui, de M. le prince de Conti et d’Albergotti, portoit presque toute sur des mœurs communes et des parties secrètes qu’ils faisoient ensemble avec des filles. […] Tout cela ensemble forme un air modeste· et de grandeur qui imprime du respect : elle a d’ailleurs toute la beauté d’âme qu’une personne de qualité doit avoir, et elle ira de pair en mérite avec M. le duc de Saint-Simon son époux, l’un des plus sages et des plus accomplis seigneurs de la Cour. […] Cette grandeur qui, nonobstant tout accroc de détail, allait à revêtir d’une imposante majesté l’époque entière de Louis XIV, et qui était la première vérité du tableau, ne pouvait se dévoiler que par la considération des ensembles et dans la suite même de ce corps incomparable d’annales.
Rien ne s’y détache de l’ensemble en saillie indépendante ; la sculpture, comprimée et rigide, n’est là que l’accessoire, parfois colossal, de l’architecture. « Cependant cet ensemble n’est pas un tout harmonique. […] Ce monument, tel qu’il était avec l’ensemble de sa situation, de son piédestal naturel, de ses gradins décorés de statues sans rivales, de ses formes grandioses, de son exécution achevée dans tous ses détails, de sa matière, de sa couleur, lumière pétrifiée ; ce monument écrase, depuis des siècles, l’admiration sans l’assouvir. […] Les pas s’impriment dans une poussière de marbre ; on finit par la regarder avec indifférence, et l’on reste insensible et muet, abîmé dans la contemplation de l’ensemble, et dans les mille pensées qui sortent de chacun de ces débris.