Ce n’étoit pas répondre à ce reproche ; aussi le jugement & la justesse d’esprit n’étoient pas le partage du Critique.
Ses Réflexions sur la Peinture, ses Observations sur le Poëme de l’Art de peindre, ses Lettres critiques sur Cénie, sur l’Histoire du Parlement d’Angleterre, & sur quelques autres Ouvrages, n’ont eu qu’un succès momentané.
Gaillard est chargé de la partie Littéraire du Journal des Savans ; ce qui est certain, c’est que, depuis quelques années, depuis sur-tout que la Philosophie cherche à s’emparer des Tribunaux littéraires, ce Journal est devenu, comme la plupart des autres, un dépôt d’encens pour les Philosophes du jour, ou de critiques injustes à l’égard de ceux qui ne le sont pas.
L’intérêt & l’utilité y fixent tour-à-tour l’esprit du Lecteur, que l’Historien fait captiver par un mélange de méthode, de clarté, de critique, d’élégance.
De tout ce qu’il a publié, le Tableau de l’Histoire moderne, & la petite Histoire d’Euphranor, sont ce qui offre le moins à la critique.
Un peu plus de noblesse & moins de prolixité dans le langage, rendroient ce Roman irréprochable aux yeux de la critique, comme il l’est aux yeux des mœurs & de la raison.
Quelques Critiques se sont plaint de ne pas trouver, dans son style, cette politesse & ces graces, but actuel des efforts de tous nos Ecrivains ; mais quand il ne seroit pas injuste de lui reprocher d'avoir manqué de ces qualités, qui n'etoient encore qu'en germe, nous doutons qu'elles soient préférables à cette noblesse simple & naturelle, à cette aisance moëlleuse & toujours soutenue, qui regnent dans sa Traduction & dans tous les Ecrits qui ont paru quelque temps après lui.
S’il est vrai qu’il n’existe point d’écrivain plus ancien qu’Homère, comme Josèphe le soutient contre Apion le grammairien, si les écrivains que nous pourrions consulter ne sont venus que longtemps après lui, il faut bien que nous employions notre critique métaphysique à trouver dans Homère lui-même et son siècle et sa patrie, en le considérant moins comme auteur de livre, que comme auteur ou fondateur de nation ; et en effet, il a été considéré comme le fondateur de la civilisation grecque.
Note J’ai peu à ajouter à ces articles au point de vue littéraire, et toute la gamme des sentiments du critique, depuis l’enthousiasme premier jusqu’au temps d’arrêt et à la résistance finale, vient d’être, ce me semble, parcourue et comme épuisée. […] « Lamartine a bien mérité de la patrie à un moment décisif, et la critique littéraire ou celle du moraliste n’a plus guère rien à faire avec lui : l’acclamation publique la ferait taire.
A travers toutes les oppositions et tous les quolibets, en dépit de Mlle de Gournay et de Scipion Dupleix, défenseurs du vieux langage, en dépit de Saint-Evremond et de Ménage, critiques d’humeur plutôt que de conviction, l’Académie poursuivit son Dictionnaire. […] Sorel ; Balzac, Socrate chrétien, X ; Dissert. critiques, VI ; Bouhours, Entretiens d’Ariste et d’Eugène (Entr. sur la langue française) ; Pellisson et d’Olivet, Hist. de l’Acad.
Catulle Mendès, morceaux certes d’élévation, nourris de souvenirs amusants et à qui ne manquent point les hauts points de vue, ont beau n’être que les coupures de ses livres de critique et d’histoire musicale, quand il les lit lui-même on l’acclame ; mais tout seul, auprès de son feu, on ne songerait pas à les lire, parce qu’on ne lit pas, parce qu’on est trop paresseux. […] Ferdinand Brunetière lui-même, le plus loyal certes des critiques, interroge profondément sa conscience ; il confessera, étonné peut-être tout le premier, qu’il parle beaucoup moins pour nous faire pénétrer sa théorie évolutionniste que pour s’assurer qu’il est un orateur à la grâce de qui rien ne saurait résister, il confessera qu’il disserte comme d’autres flirtent. — À un examen attentif, ce pourrait bien être celui de tous les causeurs à la mode qui passe pour le plus dilettante, qu’on constaterait le plus sincère et le plus sérieux.
Ce fut Chapelain qui attira sur Racine les premiers bienfaits de Louis XIV, rédigea la critique du Cid, conçut le plan du Dictionnaire de l’Académie. […] Voltaire aussi le déclare mauvais poète, mais homme fort savant, et, ce qui est étonnant, bon critique.
Dumas et sans ce qu’il ajoute à cette déclaration, le livre en question n’aurait pas le pouvoir d’arrêter cinq minutes la Critique. La Critique n’aurait rien à dire de ce livre inconséquent, inconsistant, emphatique, production turbulente d’un esprit perturbé, et le laisserait périr dans l’oubli.
Édité une fois par un très savant homme, Monmerqué, jugé par la critique avec la bienveillance enfantine que nous avons pour tout ce qui nous amuse dans ce joyeux pays de France, le livre de Tallemant avait obtenu plus qu’il ne méritait de la Fortune littéraire. […] Un tel jugement, empreint de l’idolâtrie du commentateur, un tel jugement inexplicable, venant de Paulin Paris qui est fait pour mieux que pour lécher des manuscrits et soigner la toilette de l’enfant des autres, une critique grave et consciencieuse n’y saurait condescendre, et elle croit devoir le relever.
Voilà toute la critique que nous nous permettrons. […] Et lui, Renée, lui qui a le goût et le sens, ces deux grands avertissements critiques, ces deux consciences de ce qui fait la force et la beauté littéraires, a-t-il donc pu oublier que, pour écrire l’histoire de Grégoire VII, presque autant que pour la penser, il faut avoir en soi cet absolu que Grégoire avait dans le génie, dans le caractère, dans la foi, et que ceux qui ne l’ont pas dans la pensée ne peuvent s’empêcher d’admirer ?
Et, cela étant reconnu et irréfragablement certain, la Critique n’a point ici à s’occuper du génie de Balzac, incontestable comme la lumière, ni de ses Œuvres, pour lesquelles, s’il était nécessaire de les analyser et de les juger, il faudrait l’étendue d’un Cours de littérature, mais elle va s’occuper de son âme, de sa personne morale, à Balzac, aperçue, soupçonnée à travers son génie, mais vue — et pour la première fois — dans le plein jour d’une Correspondance qui montre la plus magnifique nature dans sa complète réalité ! […] La ressemblance dans le sentiment et dans la position saute aux yeux… Balzac, cet inventeur, qui inventa à propos de tout et qui eut même le défaut sublime de trop d’invention, car il inventa jusque dans la Critique et dans l’Histoire, — et il les faussa, quelquefois, toutes les deux, mais comme il n’y avait que lui qui pût les fausser !
Mais, le fond orthodoxe du livre mis de côté, il reste aux yeux de la Critique littéraire… tout le livre, et le livre ne satisfait ni le critique ni même le chrétien, qui sait ce que peut être la prédication d’un livre bien fait.
Ici le naturaliste, le physiologiste devient presque un critique comme l’un de nous. […] C’est même, dirons-nous, — et c’est la seule critique que nous oserons contre ces livres amusants, comme s’ils n’étaient pas savants, et savants comme s’ils n’étaient pas amusants, — c’est même l’habitude du professorat qui donne à ces livres la tache de ces répétitions de faits ou d’idées, qu’on prendrait pour des négligences et qui sont plutôt des scrupules de clarté.
Tout cela est si gros de visée, et dans le détail, comme on le verra, si blessant pour les idées acquises, si révoltant au premier abord, pour les éducations et les impressions contemporaines, que la Critique, fût-elle persuadée que la vérité est ici du côté de l’audace, doit, dans l’intérêt même du livre, s’interdire d’abord tout ce qui en dépasserait l’analyse complète et fidèle. […] L’auteur y examine d’abord l’influence des lieux fatidiques ou du domaine privilégié des esprits, les hauts lieux, les lieux déserts, certaines sources, les béthyles ou les pierres mystérieuses élevées en commémoration des faits merveilleux, les animaux subissant, dans certains lieux fatidiques, la même influence que ceux qui les guident ; et sur toutes ces questions, prises à revers des solutions de la science moderne, le terrible savant ne cesse de marcher au flambeau allumé de la critique historique.