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771. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Étude sur la vie et les écrits de l’abbé de Saint-Pierre, par M. Édouard Goumy. L’abbé de Saint-Pierre, sa vie et ses œuvres, par M. de Molinari. — II » pp. 261-274

On ne cesse d’opposer à toute réforme de l’orthographe le vers d’Horace sur l’usage, maître absolu et seul régulateur légitime du langage : « Quem penes arbitrium est… » Cela est vrai des mots mêmes qui sont mis en circulation plus que de la manière de les écrire. […] Il n’a cessé de broder là-dessus de petits sermons de morale théophilanthropique.

772. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Appendice. »

C’était une personne des plus distinguées et des plus rares de l’ancienne société, et qui n’avait cessé de rester en relation et en communication d’esprit avec la société nouvelle. […] Croyez-bien, — ou plutôt laissez-moi être persuadé que vous le saviez déjà, — que votre pensée n’a cessé un moment de m’être présente pendant que je m’occupais de l’illustre ami que nous avons tous perdu.

773. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Lettres de Rancé abbé et réformateur de la Trappe recueillies et publiées par M. Gonod, bibliothécaire de la ville de Clermont-Ferrand. »

La république des lettres ne s’étend point dans des lieux où elle sait qu’elle n’a que des ennemis, occupés sans cesse à désapprendre ou à oublier ce que la curiosité leur avoit fait rechercher, pour renfermer toute leur application et leur étude dans le seul livre de Jésus-Christ. » Chaque fois que l’incorrigible Nicaise recommence, Rancé réitère cette profession d’oubli : « Tous les livres dont vous me parlez ne viennent point jusqu’à nous, parce qu’on les regarde comme perdus et comme jetés dans un puits d’où il ne doit rien revenir. » Le bon abbé Nicaise ne se décourage point pourtant ; à défaut des ouvrages d’autrui, il enverra les siens propres, et il espère apprendre du moins ce qu’on en pense. […] Ce dernier caractère se retrouve partout dans la correspondance de Rancé ; même lorsqu’il prend la plume, je l’ai dit, il va sans cesse au but, il coupe court aux phrases.

774. (1861) La Fontaine et ses fables « Première partie — Chapitre I. L’esprit gaulois »

6 Et d’un bout à l’autre cette longue épopée est pareille ; la raillerie n’y cesse point et ne cesse point d’être agréable.

775. (1895) Histoire de la littérature française « Troisième partie. Le seizième siècle — Livre IV. Guerres civiles conflits d’idées et de passions (1562-1594) — Chapitre I. Les mémoires »

Cependant deux choses tendent à ramener les ouvrages de science et d’érudition dans notre domaine : la langue française, quand on l’emploie, toute concrète encore et chargée de réalité, et dont les mots apportent, au milieu des abstractions techniques, les formes, les couleurs et comme le parfum des choses sensibles ; ensuite, le tempérament individuel, mal plié encore à la méthode scientifique, et qui jette sans cesse à la traverse des opérations de la pure intelligence l’agitation de ses émotions et les accidents de sa fortune. […] Un certain goût, une certaine humeur, enfin une nature d’homme apparaît sans cesse, qui court à son plaisir, suit une curiosité personnelle dans la prise de telle matière, dans ce libre vagabondage à travers tout l’inexploré des sciences historiques et philologiques.

776. (1890) L’avenir de la science « Préface »

Si des critiques soutiennent un jour que la Revue des Deux Mondes et Le journal des Débats me gâtèrent en m’apprenant à écrire, c’est-à-dire à me borner, à émousser sans cesse ma pensée, à surveiller mes défauts, ils aimeront peut-être ces pages, pour lesquelles on ne réclame qu’un mérite, celui de montrer, dans son naturel, atteint d’une forte encéphalite, un jeune homme vivant uniquement dans sa tête et croyant frénétiquement à la vérité. […] La culture intensive, augmentant sans cesse le capital des connaissances de l’esprit humain, n’est pas la même chose que la culture extensive, répandant de plus en plus ces connaissances, pour le bien des innombrables individus humains qui existent.

777. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Cours de littérature dramatique, par M. Saint-Marc Girardin. (2 vol.) Essais de littérature et de morale, par le même. (2 vol.) » pp. 7-19

Je ne sais si cela a cessé d’être vrai aujourd’hui qu’on se flatte d’avoir aboli les distinctions de naissance, il me semble que les fils de personnages considérables, que les noms historiques, ne laissent pas d’avoir encore au moins dix ans d’avance sur les autres au début de la carrière. […] Il n’a cessé de lui redire sur tous les tons, sur le ton de la raillerie, comme aussi sur celui de l’affection : Ne vous croyez pas supérieur aux autres ; acceptez la vie commune ; ne faites pas fi de la petite morale, elle est la seule bonne.

778. (1913) Le bovarysme « Quatrième partie : Le Réel — IV »

Il semble tout d’abord, pour le moi humain, comme pour l’Etre universel que cette utilité s’exprime dans la joie de connaître : tous les efforts de l’homme, pour augmenter la somme de ses sensations heureuses au détriment de ses déplaisirs, se heurtent, ainsi qu’on l’a montré, à cette faculté de mécontentement qui transforme l’assouvissement de ses convoitises en une sensation d’ennui ou en un malaise nouveau : à cette fin, que les individus semblent poursuivre et qu’ils ne réalisent jamais un surcroît de bien-être, il semblerait donc qu’il convienne do substituer cette autre qui se montre sans cesse et par chaque effort accomplie, l’embellissement et l’enrichissement du spectacle phénoménal offert à l’esprit. […] L’utilité qui les a formées les laisse sans force dès qu’elle cesse de les vivifier.

779. (1912) L’art de lire « Chapitre II. Les livres d’idées »

Il faut donc, à mesure qu’il se complète et qu’il s’éclaire, tenir compte sans cesse, pour comprendre ce qu’on en lit aujourd’hui, de ce qu’on en a lu hier, et pour mieux comprendre ce qu’on en a lu hier, de ce qu’on en lit aujourd’hui. […] Lire un philosophe, c’est le comparer sans cesse à lui-même ; c’est voir ce qui en lui est sentiment, idée sentimentale, idée résultant d’un mélange de sentiment et d’idées, idée idéologique enfin, c’est-à-dire résultant d’une lente accumulation, dans l’esprit du penseur, d’idées pures ou presque pures.

780. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « M. Gaston Boissier » pp. 33-50

Boissier essaie de noyer la surnaturalité du Christianisme, qui est, en somme, sa vérité, puisque sans sa surnaturalité, le Christianisme cesserait d’être. […] Les femmes, qui expriment mieux que les hommes l’imagination religieuse d’une race, les femmes, « très pieuses à leurs dieux » dans cette époque de dévotion universelle, allaient à Isis et à Cybèle sans cesser d’aller à Junon et à Diane, comme, plus tard, elles devaient aller à Jésus… Seulement, il ne faut pas oublier de marquer ce que l’auteur de La Religion romaine oublie : c’est qu’une fois à Jésus, elles ne revenaient pas à Junon et à Diane, et que Junon et Diane ne leur avaient jamais fait faire ce que le Christianisme, qu’on veut diminuer en l’expliquant, leur fit faire, en raison de deux choses que ne connaissaient pas ces misérables religions anciennes : l’absolu de son dogme et le péremptoire de sa loi.

781. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « Le père Augustin Theiner »

Organisés contre la révolte du protestantisme par un de ces grands hommes qui avait la sainteté du génie et le génie de la sainteté, ils étaient et n’avaient cessé d’être les défenseurs les plus intrépides du Saint-Siège, et, s’ils n’avaient pas été humbles, s’ils n’avaient rien su de la stupidité ou de l’ingratitude humaine, ces soldats de l’Église auraient pu croire en partager l’éternité. Leurs missions par tout l’univers, leurs conquêtes, leurs miracles, leur enseignement, leurs travaux de savants et d’apôtres, et, on peut le dire de cet ordre si profondément unitaire et qui donna au monde un modèle de gouvernement que l’ancienne Rome n’avait pas égalé, leur génie collectif, retrempé sans cesse aux sources de l’obéissance, auraient dû les préserver, à ce qu’il semblait, des coups d’un pouvoir qu’ils n’avaient jamais pensé qu’à défendre.

782. (1904) Les œuvres et les hommes. Romanciers d’hier et d’avant-hier. XIX « Marie Desylles » pp. 323-339

Alors, encore, ce qui était facile à la Critique quand il s’agissait des combinaisons d’un roman, devient extrêmement difficile lorsqu’il faut rendre compte de cette adorable chose qu’on appelle des lettres d’amour, pour en faire apprécier intégralement la délicate et opulente beauté… Il n’y a plus là, en effet, ni plan qu’on puisse saisir, ni mise en œuvre, ni drame, ni visée d’art quelconque, mais seulement les tendresses et les transports d’une âme exceptionnelle, dépaysée par sa supériorité dans un temps de civilisation excessive, où l’amour, tel qu’il est dans ces lettres, a presque cessé d’exister. […] Ce ne fut plus que l’intimité, — l’intimité plus forte que tout encore, l’intimité fatale, déchirée, déchirante, dont on ne peut plus se passer quand on a goûté à son philtre… Les lettres de Réa, de brûlantes, deviennent touchantes, tristement amères, courageusement maternelles, et le recueil finit avant que la généreuse créature blessée ait cessé d’admirer l’homme qui ne la méritait pas, et jusqu’à la fin elle s’obstine à la fidélité de l’enthousiasme dans l’amour !

783. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « M. Gustave Flaubert » pp. 61-75

Flaubert, qui doit être, sauf erreur, un incrédule, nous montre à travers un curé ridicule et stupide, rencontre au spectacle, où son mari la mène pour la distraire, ce jeune homme aimé et désiré autrefois ; et alors tous deux, ayant cessé d’être novices, se reprennent tout à coup l’un à l’autre avec la fureur du regret de ne s’être pas saisis plus tôt ! […] Le grand mérite de ce roman est dans la figure principale, qui est toute la pensée du livre et qui, quoique commune, cesse de l’être par la profondeur avec laquelle elle est entendue et traitée.

784. (1908) Les œuvres et les hommes XXIV. Voyageurs et romanciers « Le Comte de Gobineau »

Après un si terrible passage : Il faisait des passages, Moins content qu’aucun des sept sages, vous ne pouvez plus douter, j’imagine, qu’il y ait un misanthrope, et le plus corsé, et le plus bronzé et le plus carabiné des misanthropes, dans l’auteur singulier de ces singulières Pléiades, dans le berger de ces Pléiades qui a cessé d’être tendre, dans le stoïque de ces Pléiades qui a cessé d’être impassible, et un misanthrope par-dessus et par-dessous toutes les autres choses qu’il est dans son livre, ce kaléidoscospe qui tourne tout seul !

785. (1906) L’anticléricalisme pp. 2-381

Elle consiste à mesurer les forces de son esprit et à chercher où est le point (qui n’est pas le même pour tous les hommes) où précisément l’évidence cesse ; et où est le point (qui n’est pas le même non plus pour tous les hommes) où la probabilité cesse aussi et où l’hypothèse commence à être, non plus rationnelle, mais tout imaginative. […] Sous l’empire de l’un et de l’autre, le Français a cessé d’être vain pour devenir orgueilleux. […] Louis XIV n’a jamais cessé d’être devant ses yeux et dans son esprit comme modèle et comme idéal. […] Il doit, non seulement ne plus enseigner, mais cesser d’être. […] On peut donc croire qu’elle ne cessera de suivre cette tactique qu’à la dernière extrémité.

786. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « V » pp. 19-21

Lamartine y était et ne cessait d’admirer : malgré sa banalité, ce qu’il disait (j’étais près de lui) avait de la valeur.

787. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — C — article » pp. 69-73

Ils nous livrent sans cesse à des soins criminels ; Par eux, plus d’un remords nous afflige & nous ronge ; Nous voulons les garder & les rendre éternels, Sans penser qu’eux & nous passeront comme un songe.

788. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — M. — article » pp. 368-371

Nous renvoyons les Lecteurs de bonne foi à l’Ouvrage même : ils verront combien l’Auteur est éloigné de favoriser l’autorité arbitraire & le gouvernement despotique ; ils verront avec quelle force il défend les droits des Sujets, avec quel noble courage il présente au Prince, non seulement le tableau des devoirs de la Royauté, mais une infinité de principes & de vérités propres à écarter du cœur des Souverains, l’orgueil qui cherche sans cesse à les séduire & à leur faire oublier qu’ils ne sont sur le Trône, que pour rendre leurs Peuples heureux.

789. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — P. — article » pp. 555-559

L’ame veut être remuée, & non pas déchirée ; on cesse de plaindre, lorsque l’attendrissement fatigue, ce qui arrive souvent dans les Romans de M. l’Abbé Prévôt.

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