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400. (1883) Souvenirs d’enfance et de jeunesse « Chapitre IV. Le Séminaire d’Issy (1881) »

Par des congrégations d’un type nouveau, distinct des anciennes règles monacales et imité en quelques points des jésuites, ils créent le séminaire, c’est-à-dire la pépinière soigneusement murée où se forment les jeunes clercs. […] Émery, d’ailleurs, se garda de lui en suggérer l’idée, Il n’avait pas conservé un bon souvenir de l’ancien système ; il préférait beaucoup garder ses jeunes clercs sous sa main. […] Cependant, comme à Saint-Sulpice rien ne change, les anciennes dénominations restèrent. […] Les anciens qui avaient fait leurs études à la Sorbonne avant la Révolution tenaient hautement pour les quatre propositions de 1682. […] Sa famille appartenait à cette partie de l’ancienne bourgeoisie qui, sans être affiliée aux jansénistes, partageait l’attachement extrême de ces derniers pour la religion.

401. (1888) Revue wagnérienne. Tome III « III »

Pour nous en tenir aux pays de langue française, disons que la première représentation à Bruxelles est ancienne déjà. […] Celle-là remonte, pour sa part, aux plus anciens âges de l’humanité, toutes les civilisations eurent des poètes qui parlèrent de la question interdite, de ce doute qui tue le bonheur avec la foi. […] Nous conseillons à nos lecteurs d’observer, à l’Opéra, les mouvements de bras d’un chanteur quelconque : ils s’apercevront combien cette coutume qui est transmise dans l’enseignement du Conservatoire par les anciens acteurs aux nouveaux23, est contraire à toute vérité et à tout naturel. […] de drames lyriques, dont les sujets sont empruntés, comme on sait, aux anciennes légendes germaniques et scandinaves. […] Voir aussi les anciens poèmes Elias ou Le Chevalier au Cygne, etc..

402. (1856) La critique et les critiques en France au XIXe siècle pp. 1-54

Elle adorait trop les anciens pour oser les juger, dédaignait trop les modernes pour en faire une sérieuse étude. […] La grande querelle des anciens et des modernes lui donna le signal. […] Sans découvrir d’œuvres nouvelles, on découvrit l’esprit des anciennes œuvres. […] Elle ne compose pas d’œuvres nouvelles ; elle conserve vivants et rajeunit les anciens chefs-d’œuvre. […] L’art des anciens fut lyrique et épique ; l’art moderne sera dramatique.

403. (1765) Essais sur la peinture pour faire suite au salon de 1765 « Ce que tout le monde sait sur l’expression, et quelque chose que tout le monde ne sait pas » pp. 39-53

Les Euménides des Anciens sont belles, et n’en sont que plus effrayantes. […] Je rajeunis de deux mille ans, pour vous exposer comment dans les temps anciens ces artistes influaient réciproquement les uns sur les autres, comment ils influaient sur la nature même, et lui donnaient une empreinte divine. […] Si notre religion n’était pas une triste et plate métaphysique ; si nos peintres et nos statuaires étaient des hommes à comparer aux peintres et aux statuaires anciens : j’entends les bons, car vraisemblablement ils en ont eu de mauvais et plus que nous, comme l’Italie est le lieu où l’on fait le plus de bonne et de mauvaise musique ; si nos prêtres n’étaient pas de stupides bigots ; si cet abominable christianisme ne s’était pas établi par le meurtre et par le sang ; si les joies de notre paradis ne se réduisaient pas à une impertinente vision béatifique de je ne sais quoi qu’on ne comprend ni n’entend ; si notre enfer offrait autre chose que des gouffres de feux, des démons hideux et gothiques, des hurlements et des grincements de dents ; si nos tableaux pouvaient être autre chose que des scènes d’atrocités, un écorché, un pendu, un rôti, un grillé, une dégoûtante boucherie ; si tous nos saints et nos saintes n’étaient pas voilés jusqu’au bout du nez ; si nos idées de pudeur et de modestie n’avaient proscrit la vue des bras, des cuisses, des tétons, des épaules, toute nudité ; si l’esprit de mortification n’avait flétri ces tétons, amolli ces cuisses, décharné ces bras, déchiré ces épaules ; si nos artistes n’étaient pas enchaînés et nos poètes contenus par les mots effrayants de sacrilège et de profanation ; si la Vierge Marie avait été la mère du plaisir ; ou bien, mère de Dieu, si c’eût été ses beaux yeux, ses beaux tétons, ses belles fesses qui eussent attiré l’Esprit Saint sur elle, et que cela fût écrit dans le livre de son histoire ; si l’ange Gabriel y était vanté par ses belles épaules ; si la Magdelaine avait eu quelque aventure galante avec le Christ ; si aux noces de Cana le Christ entre deux vins, un peu non-conformiste, eût parcouru la gorge d’une des filles de noces et les fesses de saint Jean, incertain s’il resterait fidèle ou non à l’apôtre au menton ombragé d’un duvet léger : vous verriez ce qu’il en serait de nos peintres, de nos poètes et de nos statuaires ; de quel ton nous parlerions de ces charmes qui joueraient un si grand et si merveilleux rôle dans l’histoire de notre religion et de notre Dieu, et de quel œil nous regarderions la beauté à laquelle nous devrions la naissance, l’incarnation du Sauveur, et la grâce de notre rédemption. Nous nous servons cependant encore des expressions de charmes divins, de beauté divine ; mais sans quelque reste de paganisme que l’habitude avec les anciens poètes entretient dans nos cerveaux poétiques, cela serait froid et vide de sens. […] Je me suis quelquefois demandé pourquoi les temples ouverts et isolés des Anciens sont si beaux et font un si grand effet.

404. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XX. De Libanius, et de tous les autres orateurs qui ont fait l’éloge de Julien. Jugement sur ce prince. »

Presque à chaque page on rencontre des traits de la mythologie ancienne, et souvent son style même tient plus du coloris du poète que de l’orateur. […] Ainsi, multipliant leur fortune par la misère des autres, ils étendaient leur insatiable avidité aux bornes de la terre, demandant, au nom et sous l’autorité du prince, tout ce qui flattait leurs désirs, sans qu’il fût jamais permis de refuser ; les villes les plus anciennes étaient dépouillées ; des monuments qui avaient échappé au ravage des siècles, étaient conduits à travers les mers pour embellir les palais destinés à des fils d’artisans, et leur faire des habitations plus belles que celles des rois : ces oppresseurs en avaient d’autres sous eux qui les imitaient ; l’esclave avait son ambition comme le maître ; à son exemple, il outrageait, tourmentait, dépouillait, chargeait de fers, et pour s’enrichir, reversait sur d’autres le despotisme que son maître exerçait sur lui. […] Cependant l’ancienne langue des Césars, quoiqu’altérée, se conservait toujours, et ces empereurs daces, pannoniens et barbares, qui, du fond de la Thrace et des bords de la mer Noire, commandaient au monde, étaient loués quelquefois dans la langue des Scipions. […] Marc-Aurèle agissait et pensait d’après lui ; Julien, d’après les anciens philosophes ; il imitait. […] Le paganisme, trop faible, avait appelé la philosophie à son secours ; et la philosophie, sentant qu’il fallait réparer l’édifice pour le conserver, des débris de l’ancien système religieux, en avait presque formé un nouveau.

405. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XXXVII. Des éloges en Italie, en Espagne, en Angleterre, en Allemagne, en Russie. »

J’ai tâché de faire connaître la plupart de ceux qui, dans les langues anciennes ou dans la nôtre, ont écrit dans le genre de l’éloge. […] Les Italiens modernes, quoiqu’ils descendent presque tous de Gaulois, d’Africains, de Germains, de Goths, de Lombards, d’Allemands et de Français, bien plus que des anciens Romains, aiment toujours la langue qu’on parlait autrefois au Capitole : elle leur rappelle qu’ils ont été les maîtres du monde. […] Poètes, peintres, sculpteurs, philosophes, savants dans les langues anciennes, historiens, politiques, tout a été célébré, tout a eu sa portion d’immortalité dans quelques lignes écrites au bas de leurs noms. […] Lorsque, il y a cent ans, la Russie était à peine connue, que les descendants des anciens Scythes étaient encore à demi sauvages, et que le lieu où est aujourd’hui située leur capitale, n’était qu’un désert, on ne s’attendait pas alors qu’avant la fin du siècle, l’éloquence dût y être cultivée, et qu’un Scythe, au fond du golfe de Finlande, et à quinze degrés au-delà du Pont-Euxin, prononcerait un tel panégyrique dans une académie de Pétersbourg. […] Cette idée digne des anciens Grecs, qui croyaient que le génie des grands hommes veillait toujours au milieu d’eux, et que leur âme était présente parmi leurs concitoyens pour animer et soutenir leurs travaux, est peut-être le plus bel hommage qui ait été rendu au législateur de la Russie.

406. (1894) Études littéraires : seizième siècle

D’abord ils n’ont qu’affaibli l’ancien ; ensuite ils n’en ont pas fondé un nouveau qui soit très fort. […] Calvin prétendait rompre la tradition prochaine, mais se rattacher très fermement à l’ancienne. […] Il faut expliquer pourquoi les anciens Pères de l’Église ont penché presque tous pour le libre arbitre. […] Enfin Pétrarque est, presqu’à l’égal des anciens, un des maîtres de Ronsard. […] Il faut tout imiter des anciens, fond et forme.

407. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — B — article » p. 347

Celle du Président est d’un homme nourri de la lecture des Anciens, & plus engraissé de leur substance (si on peut se servir de ce terme) que paré des graces qui leur sont si naturelles. […] M. le Président Bouhier pensoit très-sagement qu’on ne devoit traduire qu’en vers les anciens Poëtes ; mais il auroit dû en laisser à d’autres l’exécution.

408. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — T. — article » p. 352

Les plaisanteries de l'Auteur sur les divers états de la vie, sont, à la vérité, aussi anciennes que ces états mêmes, mais elles sont renouvelées d'une maniere très-piquante & très-philosophique. […] En lisant le premier chapitre, qui sert d'introduction, on croit entendre Pline l'ancien.

409. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — S. — article » p. 206

Ce Poëte s'étoit formé le goût d'après l'étude des Anciens ; avec moins de génie que Marot, son esprit étoit plus orné. […] Les Italiens le confondoient, comme les Anciens, avec l'Epigramme ; Saint-Gelais l'a réduit au sentiment, & à la finesse de la galanterie, qui paroissoient beaucoup mieux lui convenir.

410. (1875) Premiers lundis. Tome III « De la loi sur la presse »

Le règlement du Sénat, qui diffère en cela des usages de l’ancienne Chambre des pairs, n’admet point ce genre d’inscription sur la loi ; il serait peut-être bon de l’y introduire. […] Un honorable amiral, notamment, a obtenu dans cette Assemblée un succès tel, je le crois, qu’il n’y en a jamais eu de semblable dans une haute Assemblée, siégeant au Luxembourg, depuis l’ancienne Chambre des pairs. […] Messieurs, toutes les fois que cette question revient, ma pensée est assaillie d’un souvenir ; ce souvenir est bien ancien et n’a rien qui puisse passionner les esprits. […] Vous inscrivez cela dans la loi : c’était la loi aussi sous l’ancien régime ; mais alors, comme sous l’ancien régime aussi, gare les nouvelles à la main, gare les pasquinades comme à Rome ! […] Vacherot, ancien directeur des études à l’École normale, métaphysicien distingué, et qui n’est pas du tout un matérialiste, comme l’a prétendu M. 

411. (1870) De l’intelligence. Première partie : Les éléments de la connaissance « Livre deuxième. Les images — Chapitre II. Lois de la renaissance et de l’effacement des images » pp. 129-161

Pour les autres, l’aptitude est trop faible ; lorsque reparaît un lambeau d’expérience lointaine auquel jadis elles étaient liées, elles ne reparaissent pas avec lui ; la tendance qui jadis les évoquait est vaincue par d’autres tendances constituées dans l’intervalle ; et le passé récent barre la voie au passé ancien. […] Parfois tel ruisseau, plus gonflé et tombant de plus haut, réchauffe jusque dans les bas-fonds d’anciennes couches inertes ; elles remontent alors à la lumière ; le hasard de l’afflux et les lois de l’équilibre ont échauffé telle couche pour la mettre au-dessus des autres. […] Par exemple, dans l’ancien état, elle possède toutes ses connaissances primitives. […] Dans l’ancien état, elle a une belle écriture ; dans le nouveau, elle n’a qu’une pauvre écriture maladroite, ayant eu trop peu de temps pour s’exercer. […] À présent, la dame et sa famille sont capables de conduire l’affaire sans trop d’embarras ; ils savent seulement qu’elle est dans l’ancien ou dans le nouvel état, et se gouvernent en conséquence. » — Cette double vie se rencontre souvent chez les somnambules64.

412. (1891) Journal des Goncourt. Tome V (1872-1877) « Année 1877 » pp. 308-348

Et le sergent de ville de lui apprendre, que mon voisin est un ancien saltimbanque d’origine irlandaise, auquel un oncle a laissé quelque chose comme un héritage de cent mille livres de rente, qu’il est en train de manger… et qu’il a fait revenir son ancienne voiture de saltimbanque pour y remonter, quand il sera arrivé à son dernier billet de mille. […] Un ancien ambassadeur vient me voir, et laisse tomber de ses lèvres : « Un titre bien grave !  […] Il a des favoris blancs où reste un peu du roux de leur ancienne couleur. […] Le voisin de Delacroix, un ancien marchand de vin, avait un mur qui gênait la vue du peintre. […] Et j’entends parler de traiter la droite, comme un ancien gouverneur du Tonkin, qui est là, a traité les Annamites.

413. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Deuxième partie. — Chapitre XXI. »

Pie V en avait remis le commandement à un Colonna, de cette ancienne famille romaine longtemps suspecte à la papauté. […] Ce fut le dimanche, 7 octobre 1571, dans cet ancien golfe de Corinthe qui se prolonge entre la côte de l’Albanie et la presqu’île de Morée, près du détroit où s’était livrée la bataille d’Actium, que le génie romain gagnait, au profit d’un maître, contre l’amas confus et les pavillons barbares de l’Orient. […] Il écrivit avec éloquence des Méditations pieuses ; et ses poésies, imitées des anciens ou originales, furent admirées, sans être aussi populaires que les vieilles romances du pays et les chants irréguliers du théâtre. […] à ce grand nom prononcé, les nobles ombres de cette grande ruine renouvellent leurs gémissements, et le peuple aussi les partage. » Ce chant si poétique était composé pour la fête d’un ancien évêque, réputé jadis martyr dans Italica. […] À lui, on peut le dire, appartient le premier modèle de perfection du style français, le plus ancien mélange de force élégante et d’irréprochable pureté, de naturel et d’éclat.

414. (1814) Cours de littérature dramatique. Tome I

C’était l’usage des anciens chevaliers d’envoyer ainsi aux pieds de leur maîtresse l’ennemi qu’ils avaient terrassé. […] Cependant il y avait à Rome d’anciens monuments qui attestaient la réalité de cet événement mémorable. […] Il semble que Voltaire ne puisse jamais louer les modernes qu’aux dépens des anciens. […] Ainsi l’incomparable comédie de Lopez n’avait que peu de rivales à qui elle pût être comparée, et la supériorité que lui attribue Corneille sur les comédies anciennes et modernes n’est pas un avantage aussi extraordinaire qu’on pourrait le croire d’abord, attendu qu’il n’y avait encore rien chez les modernes, et chez les anciens fort peu de chose. […] Voltaire, qui aime à citer de grands noms, fait retentir celui de don Gregorio Mayans y Siscar, ancien bibliothécaire du roi d’Espagne.

415. (1900) La culture des idées

Paru en des temps plus anciens, ce manuel eût certainement fait partie de la bibliothèque de M.  […] L’ancien élément qualificatif fut aussitôt remplacé par un élément à peine nouveau, moins logique que l’ancien et encore moins nécessaire. […] C’est très ancien. […] Presque tous ses poèmes et sa gloire, datent de l’ancien régime. […] Le plus ancien poème de la langue française est une complainte, et précisément inspirée par un des poèmes de Prudence.

416. (1809) Tableau de la littérature française au dix-huitième siècle

De leurs recherches, résulta une théorie du langage, claire et méthodique, qui remplaça bientôt les anciennes nomenclatures. […] Tel est à peu près l’esprit des anciens gouvernements européens, qui s’est conservé en Angleterre. […] Aussi apprécia-t-il d’une manière très superficielle toute la littérature ancienne et étrangère. […] Le caractère des savants qui se livraient à ces études conservait quelque chose de l’ancien esprit des littérateurs. […] Comme les orateurs anciens, c’est aussi sa vraie pensée, celle du fond de son cœur, qu’il veut persuader aux hommes.

417. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre VII » pp. 56-69

Tyron avait fait un recueil des bons mots de Cicéron ; et un ancien grammairien parle de deux livres de Tacite, qui avaient pour titre Les Facéties. » Le troisième discours de Balzac à la marquise de Rambouillet est intitulé de la Gloire. […] L’auteur y oppose l’amour de la gloire qui, chez les peuples anciens, à Rome surtout, payait les plus grands services ; il s’exalte de nouveau et avec une éloquente chaleur au souvenir de ces grands hommes de la république romaine, dont il sent si bien la dignité. […] « Vous avez dans l’âme, madame, tous les principes de la haute et ancienne générosité. […] Mais dans une monarchie ancienne dont rien ne menaçait l’existence, où les affaires publiques étaient gouvernées par un pouvoir héréditaire, où une grande fortune donnait de longs loisirs, où des études suivies étaient le plus sûr moyen d’éviter les ennuis du désœuvrement, où la culture de l’esprit pouvait seule assurer des jouissances à l’âge mûr et à la vieillesse, les études de la marquise de Rambouillet étaient éminemment raisonnables.

418. (1909) Les œuvres et les hommes. Philosophes et écrivains religieux et politiques. XXV « La Bible Illustrée. Par Gustave Doré »

Et ceci devient évident quand Doré arrive au Nouveau Testament, bien moins varié que l’Ancien au point de vue dramatique, bien moins fécond en effets extérieurs. […] Dans l’Ancien Testament, au contraire, il y a, pour l’invention du dessinateur, beaucoup plus de ressources. […] Son Nouveau Testament, où ce qu’il y a de plus beau a été inspiré par l’Apocalypse : la Vision de saint Jean, qui rappelle ce qu’il y a de plus grandiose, de plus pathétique et de plus fulgurant dans l’Ancien, son Nouveau Testament n’a guères de touchant que Jésus guérissant les malades, et encore la tête, l’incompréhensible tête de Notre-Seigneur Jésus-Christ pour tous les artistes, et sur laquelle les plus grands n’ont eu que des lueurs, Doré, qui la change chaque fois qu’il la recommence, la manque toujours. […] Je ne sais rien des croyances de Gustave Doré ni des conseils qu’il peut recevoir ou demander, mais je ne crois pas que le génie, sans une foi complète, puisse se tirer de l’interprétation de l’Évangile, tandis que pour l’Ancien Testament il ne s’agit pas d’être Juif pour en comprendre, au moins, la beauté tonitruante et l’effroyable sublime : il ne s’agit que d’avoir l’électrique organisation de l’artiste, et cette colonne vertébrale le long de laquelle court le frisson de l’imagination épouvantée, qui met debout tout ce que nous avons de génie et nous cabre sans nous renverser !

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