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2227. (1782) Essai sur les règnes de Claude et de Néron et sur la vie et les écrits de Sénèque pour servir d’introduction à la lecture de ce philosophe (1778-1782) « Essai, sur les règnes, de Claude et de Néron. Livre premier. » pp. 15-203

Un homme instruit et véridique racontait qu’un pieux fondateur d’ordre, un saint personnage que l’Église a canonisé, consulté par son frère, homme d’épée, sur la conduite qu’il avait à tenir avec un ennemi violent qui l’avait gravement insulté, ne lui dit point : « Tu ne tueras pas ; si l’on t’a frappé sur une joue, tends l’autre » ; mais qu’il se mit à genoux, et que, levant les mains au ciel, il adressa cette prière à Dieu : « Dieu miséricordieux, je te rends grâce de m’avoir conduit dans cet asile où je n’ai point d’injure à craindre ni à venger ; sans cela, l’insolent qui m’aurait outragé serait déjà mort. » Lecteur, je vous entends, vous condamnez le moine à prendre l’habit du militaire, et le militaire à prendre l’habit du moine ; mais blâmez-vous celui-ci ? […] Nous louerons son repentir, mais sa faute n’en sera que plus évidente, et n’en déposera qu’avec plus de force contre le caractère moral du libelliste… Si l’on eût imprimé dans les papiers publics : Jean-Jacques, en mourant, a reconnu l’injustice cruelle qu’il avait commise envers un ami qui lui écrivait : « Et vous croyez en Dieu, et vous porterez ce crime à son tribunal ! […] La réponse est facile : c’est qu’il s’était fait anti-philosophe ; c’est qu’entre ses fanatiques, ceux qui traîneraient au bûcher l’indiscret qui aurait proféré la moitié de ses blasphèmes, haïssent plus leurs ennemis qu’ils n’aiment leur Dieu ; c’est qu’entre ses fanatiques, ceux qui n’accordent aux opinions religieuses ni grande certitude, ni grande importance, haïssent encore moins les prêtres que les philosophes ; c’est que nombre de vieilles dévotes ont été, comme de raison, de l’avis de leurs directeurs ; c’est que nombre de jeunes femmes ont été séduites par la chaleur de ses peintures voluptueuses ; c’est qu’entre les gens du monde la plupart ont oublié son traité de l’Inégalité des conditions, ou le lui ont pardonné en faveur de son aversion pour des moralistes sévères qu’ils redoutent, pour d’insolents et tristes penseurs qui osent préférer les talents et la vertu à l’opulence et aux dignités ; c’est qu’entre les hommes de lettres, quelques-uns par esprit de religion politique, d’autres par adulation, ont dû faire cause commune avec des protecteurs puissants dont ils attendent des grâces, et que ceux à qui le caractère et la morale pratique de Jean-Jacques étaient le mieux connus, n’en prisaient pas moins son talent, et se confondaient avec ses admirateurs. […] Dieu me garde d’avoir à mes côtés d’aussi dangereux interprètes de nos sentiments secrets !

2228. (1890) Dramaturges et romanciers

J’ai dix-huit mois de moins que vous… Jour de Dieu, Ernest ! […] monsieur, Dieu n’a pas béni notre sagesse », dit la vieille marquise, lorsque George s’éloigne en laissant Mme de Palme frappée à mort, et ce mot résume heureusement la moralité de l’histoire. […] Les manies poétiques de la jeune fille, son amitié pour le fou Feray dont elle assouplit l’humeur sauvage, les tourments de sa jeune raison qui prend tout au sérieux, le culte qu’elle adresse à Dieu sur un autel bâti de ses mains en pleine nature, son déguisement en magicienne et sa rencontre avec Raoul auprès de la fontaine, autant d’incidents ingénieusement inventés, combinés et juxtaposés. […] L’amour représente l’artiste et non pas l’art ; il n’est qu’un intermédiaire ; Dieu est donc le but véritable et légitime de l’art. […] Quelle adresse dans la progression des exigences de l’abbé pour feindre de se faire arracher un consentement qu’il grille d’accorder, quel art subtil de mettre le désintéressement au service de la cupidité, quel talent de négociation pour faire hausser le prix de la bicoque paternelle que le comte veut acquérir, quel tact dans ces manœuvres pour se ménager les faveurs de la fortune sans quitter un instant le service de Dieu !

2229. (1883) Le roman naturaliste

mais vraiment, ce pauvre Ponsard, dont ils se moquent tant, — et que Dieu me préserve, au surplus, de vouloir défendre contre eux !

2230. (1896) Journal des Goncourt. Tome IX (1892-1895 et index général) « Année 1894 » pp. 185-293

Là-dessus, le voilà qui me lit dans un cahier manuscrit, son livre tout plein de Dieu, dans lequel il est devenu un métaphysicien, disant des choses plus élevées, que dans ses autres livres, et où il cite cette originale phrase de l’Allemand Bohme : « La matière est comme le portrait d’une personne absente. » Vendredi 8 juillet Seconde pose pour un médaillon, qu’exécute d’après moi, Alexandre Charpentier. […] Alors — c’est bien de ce temps catholico-romantique — pour remercier Dieu de l’article, Adolphe Dumas faisait communier, en sa compagnie, et celle de deux autres littérateurs, Mistral à Notre-Dame, après qu’on s’était confessé au Père Félix : communion suivie d’un gueuleton, où l’on se grisait fortement.

2231. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME GUIZOT (NEE PAULINE DE MEULAN) » pp. 214-248

Après avoir cité ce mot d’un ancien, que toute pensée qui ne peut supporter l’épreuve de la plaisanterie est au moins suspecte, après avoir rappelé Pascal sur la Grâce, Boileau sur l’Amour de Dieu, et M. de La Harpe lui-même plaisantant les Théophilanthropes, Mlle de Meulan renvoie à ses adversaires le reproche du danger qu’ils croyaient voir pour les idées religieuses en ces prises à partie trop vives : « Vous traitez dans les journaux ce que vous ne voulez pas qu’on traite à la manière des journaux !

2232. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre VII. La littérature et les conditions économiques » pp. 157-190

Il a écrit62 : « Ô peuples des siècles futurs, lorsque par une chaude journée d’été, vous serez courbés sur vos charrues dans les vertes campagnes de la patrie ; lorsque vous verrez, sous un soleil pur et sans tache, la terre, votre mère féconde, sourire dans sa robe matinale au travailleur, son enfant bien-aimé ; lorsque, essuyant sur vos fronts tranquilles le saint baptême de la sueur, vous promènerez vos regards sur votre horizon immense, où il n’y aura pas un épi plus haut que l’autre dans la moisson humaine, mais seulement des bleuets et des marguerites au milieu des blés jaunissants ; ô hommes libres, quand alors vous remercierez Dieu d’être nés pour cette récolte, pensez à nous qui n’y serons plus ; dites-vous que nous avons acheté bien cher le repos dont vous jouirez ; plaignez-nous plus que tous vos pères ; car nous avons beaucoup des maux qui les rendaient dignes de plainte, et nous avons perdu ce qui les consolait. » Mais celui qui sentait si bien que la terre doit compenser la banqueroute du ciel, celui qui comprenait que les misérables, privés, comme a dit plus tard Jaurès, de la vieille chanson qui berçait la misère humaine, doivent nécessairement réclamer leur part immédiate de soleil et de joies, ce même Musset parlait bientôt d’un autre ton.

2233. (1888) Revue wagnérienne. Tome III « III »

Bourgeois sait apporter une agréable variété dans sa manière de succomber sous la lance du Dieu.

2234. (1888) Petit glossaire pour servir à l’intelligence des auteurs décadents et symbolistes « Petit glossaire »

— Puissance créatrice inférieure à Dieu.

2235. (1817) Cours analytique de littérature générale. Tome II pp. 5-461

« Envisage non loin ces zélés Papimânes, « Qui sur l’amour sacré sont plus forts que des ânes, « Et qui, béats fervents, engraissés de tous biens, « Rôtissent mainte andouille et maints luthériens. » Il signale ici les inquisiteurs qui faisaient dévotement tenailler et brûler leurs ennemis comme ennemis de Dieu. […] Les Nuées parurent comme emblèmes personnifiés de la vanité des esprits-forts qui, s’enfonçant dans les ténèbres des systèmes vagues, ne savent affermir leurs principes sur rien, et divinisent la nature, qui n’est qu’un ouvrage, à la place de Dieu, qui en est l’ouvrier.

2236. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Notes et pensées » pp. 441-535

Pendant un temps, c’était pour Latouche qu’il raffolait ; il lui accordait le génie, tous les talents. « C’est fort heureux, disait sa fille (la spirituelle Mme Ménessier), que Dieu ait fait le monde, car autrement ce serait M. de Latouche qui l’aurait fait. » CXXXVIII Lamartine, chaque matin, soit qu’il écrive ou soit qu’il pérore, improvise, et cette improvisation ne lui coûte aucun effort ; au contraire, elle lui fait plaisir, et lui donne le sentiment de son talent, de sa verve. […] Il soutient que Jésus-Christ n’est point Dieu.

2237. (1889) Histoire de la littérature française. Tome II (16e éd.) « Chapitre sixième »

Même après le Lutrin, dont le libraire Barbin disait à l’auteur : « Monsieur, votre Lutrin s’enlève ; s’il plaît à Dieu, nous en vendrons cinq cents exemplaires », il paraissait une septième édition des œuvres de Voiture. […] Les grandes vérités de l’art, dont la principale, Rien n’est beau que le vrai, fait le sujet de l’épître à Seignelay140; l’utilité qu’on doit tirer des critiques injustes, pour s’exciter à n’en pas mériter de justes141; l’amour de la campagne, pour s’y étudier soi-même commodément, et en devenir meilleur142; le noble témoignage qu’il se rend à lui-même des motifs qui ont conduit sa plume et dirigé sa vie143 ; l’éloge du travail et la critique de l’oisiveté144; l’amour de Dieu, selon la doctrine catholique, c’est-à-dire avec l’espoir des récompenses éternelles145 ; des remercîments délicats à Louis XIV pour les bienfaits qu’il en a reçus146 : tels sont les sujets de ces épîtres, où s’épanche une humeur pacifique et indulgente.

2238. (1907) L’évolution créatrice « Chapitre III. De la signification de la vie. L’ordre de la nature et la forme de l’intelligence. »

Il pourra hypostasier l’unité de la nature ou, ce qui revient au même, l’unité de la science, dans un être qui ne sera rien puisqu’il ne fera rien, dans un Dieu inefficace qui résumera simplement en lui tout le donné, ou dans une Matière éternelle, du sein de laquelle se déverseraient les propriétés des choses et les lois de la nature, ou encore dans une Forme pure qui chercherait à saisir une multiplicité insaisissable et qui sera, comme on voudra, forme de la nature ou forme de la pensée. […] Dieu, ainsi défini, n’a rien de tout fait ; il est vie incessante, action, liberté.

2239. (1716) Réflexions sur la critique pp. 1-296

Joseph, l’historien des juifs, a recüeilli bien des absurditez d’Homere, et il félicite Platon de l’avoir banni de sa république ; en vain diroit-on que Joseph étoit juif, et que les idées qu’il avoit de Dieu augmentoient à ses yeux l’extravagance des fables d’Homere. […] Nous ne devons le sacrifice de nôtre jugement qu’à l’autorité divine ; et c’est une espece d’idolatrie, que d’accorder à des décisions humaines ce sacrifice que Dieu s’est reservé pour lui seul. […] Nous pouvons bien peindre les véritables miracles que Dieu a opérez ; mais il ne nous est jamais permis de lui en supposer, sous prétexte du vrai-semblable ; et c’est offenser la sagesse divine que de penser seulement qu’elle auroit dû faire, ce qu’elle n’a pas fait.

2240. (1932) Les idées politiques de la France

des vers de Lamartine pourrait se ramener à un truisme, celui-ci : Dieu, en formant l’humanité de générations qui se renouvellent, et où le fil de l’expérience est constamment rompu, en y éteignant, chaque soir de vie, des yeux dans des tombes, pour en ranimer d’autres au matin triomphant qui suit, lui défend de vivre d’une idée, l’oblige à renouveler ses pensées, avec ses êtres, avec ses peuples, avec ses empires. […] Mais en ce qui concerne le second, la question du libéralisme est posée au minimum, puisque le libéralisme envers les personnes ne représente qu’une forme pâle, une ombre timide de la charité chrétienne, et que, le corps de la charité paraissant à la lumière de Dieu, l’ombre ne peut que suivre le corps. […] En politique, il n’y a jamais de solution de continuité entre les idées et les intérêts, et les idées consistent à systématiser les intérêts, à les placer dans un ordre général humain, et même, si l’on veut, à les voir en Dieu.

2241. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Les Mémoires de Saint-Simon » pp. 423-461

Il ne fut point ministre parce qu’il ne le voulut pas ; il aurait pu l’être à un instant ou à un autre, mais il se pliait peu aux combinaisons diverses et n’en augurait rien de bon ; il ne trouvait point dans le duc d’Orléans l’homme qu’il aurait voulu et qu’il avait tant espéré et regretté dans le duc de Bourgogne ; il lui reprochait précisément d’être l’homme des transactions et des moyens termes, et le prince à son tour, disait, de son ardent et peu commode ami « qu’il était immuable comme Dieu et d’une suite enragée », c’est-à-dire, tout d’une pièce.

2242. (1886) Revue wagnérienne. Tome I « Paris, 8 novembre 1885. »

Dieu garde que jamais pareille idée ne te vienne ! 

2243. (1888) Préfaces et manifestes littéraires « Théâtre » pp. 83-168

Enfin, Dieu merci, nous ne fûmes pas joués, et nous dûmes peut-être à ce bienheureux refus de ne pas devenir des vaudevillistes à tout jamais.

2244. (1856) Cours familier de littérature. I « Ve entretien. [Le poème et drame de Sacountala] » pp. 321-398

« Dieu veuille, ajoute le naïf et laborieux traducteur, que je ne me sois pas bercé d’une vaine espérance ; et puisse l’estime de quelques amis sincères et passionnés des lettres me compenser ma peine !

2245. (1914) Boulevard et coulisses

Mais Dieu me garde de partager ces sentiments !

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