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698. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome II « Querelles générales, ou querelles sur de grands sujets. — Première Partie. Des Langues Françoise et Latine. — De la langue Françoise. » pp. 159-174

Je n’ai garde cependant de préconiser le Latin, au point de croire ridiculement qu’il faille donner à cette langue les plus belles années de sa vie, y être consommé pour se mettre en état d’écrire en François. […] Celles que M. l’évêque du Puy, écrivain qui, à l’exemple de Bossuet & de Fénélon, joint à l’amour des sciences le goût de la littérature, donne dans son Essai critique sur l’état présent de la république des lettres, méritent de l’attention.

699. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome II « Querelles générales, ou querelles sur de grands sujets. — Seconde Partie. De l’Éloquence. — Éloquence en général. » pp. 177-192

Ils avoient passé toute leur vie dans l’étude des auteurs Grecs & Latins, dans ce talent si rare d’instruire la jeunesse, dans la composition de plusieurs ouvrages analogues à leur état. […] Un orateur, ajoute-t-il, qui aura étudié les passions en physicien, sera plus en état d’appliquer les préceptes de rhétorique que celui qui n’aura pas les mêmes connoissances.

700. (1799) Jugements sur Rousseau [posth.]

Il n’y a pas grand mal à cela ; mais où j’en trouve davantage, c’est que tant d’esprit, de lumières, de vie et de chaleur, soit dépensé presque en pure perte, pour considérer l’homme dans des états d’abstraction, dans des états métaphysiques où il ne fut et ne sera jamais, et non l’homme tel qu’il est dans la société.

701. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « Le Christianisme en Chine, en Tartarie et au Thibet »

Dans tout état de cause et de littérature, les voyages préparent merveilleusement à l’histoire, mais dans l’état actuel de nos connaissances, ils sont presque de nécessité. […] Réduit à son état atomique dans la personne de ses derniers prêtres à la Chine, le Christianisme n’en paraîtra que plus auguste, et sur les lèvres de ces derniers prêtres l’éclair de la puissance de Dieu brillera mieux !

702. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « Léopold Ranke » pp. 1-14

Mais il paraît que le bœuf aussi a la même horreur pour ce qui brille… Aux yeux de ces sortes d’esprits, Léopold Ranke, passant de l’état d’historien qui sent, se passionne et peint sa pensée, à l’état d’historien systématique et décoloré, est un grand esprit qui s’élève ; et si, à cette suppression de sentiment ou de mouvement, à cette recherche amoureuse sans amour de l’expression abstraite, à cette généralisation vague quand elle n’est pas fausse et fausse dès qu’elle s’avise de préciser, on ajoute la gravité, ce masque des têtes vides qui cache si bien, dans tant de livres contemporains, la platitude de la niaiserie sous l’imposance du sérieux, vous avez un de ces historiens composés de qualités négatives tels que les rationalistes philosophiques et littéraires conçoivent leur historien — leur caput mortuum — et l’ont souvent réalisé.

703. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « Μ. Eugène Hatin » pp. 1-14

Il n’y a pas de « torpeur » présentement pour le journalisme, ce qui serait un état maladif et une réaction, comme dit médicalement Μ.  […] Il y a liberté, mais liberté réglementée, ce qui est, au contraire, pour le journalisme, la santé et l’état normal !

704. (1909) Les œuvres et les hommes. Philosophes et écrivains religieux et politiques. XXV « Vte Maurice De Bonald »

Quoi qu’il y écrive vers la fin le mot de conclusion, il n’y en a pas pourtant de rigoureusement affirmée par ce royaliste contre la royauté qu’il aime encore malgré ses fautes, et ce sont les événements seuls qu’il laisse conclure… Il est évident cependant que l’état général des rois en proie à l’entrainement révolutionnaire a pu être d’un exemple contagieux pour celui qui devra s’appeler Henri V, et c’est par les expériences et les aveux de la papauté elle-même que Bonald constate cet état lamentable.

705. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre quatrième. Du cours que suit l’histoire des nations — Chapitre V. Autres preuves tirées des caractères propres aux aristocraties héroïques. — Garde des limites, des ordres politiques, des lois » pp. 321-333

Cet état dura un siècle encore après la loi des douze tables, au rapport du jurisconsulte Pomponius. […] La multitude des lois est, comme le remarquent les politiques, la route la plus prompte qui conduise les états à la monarchie ; aussi Auguste pour l’établir en fit un grand nombre ; et les princes qui suivirent, employèrent surtout le sénat à faire des sénatus-consultes d’intérêt privé.

706. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre quatrième. Du cours que suit l’histoire des nations — Chapitre VII. Dernières preuves à l’appui de nos principes sur la marche des sociétés » pp. 342-354

Dans l’état de famille les peines furent atroces. […] Dans les guerres barbares des temps héroïques, les cités vaincues étaient ruinées, et leurs habitants, réduits à un état de servage, étaient dispersés par troupeaux dans les campagnes pour les cultiver au profit du peuple vainqueur.

707. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « [Note de l’éditeur] »

C’est un brouillon, écrit ou dicté à la hâte, et qui est resté à l’état de premier jet.

708. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — N. — article »

Cinq ou six prix de Poésies remportés dans plusieurs Académies, & deux Discours, l’un sur le Goût, l’autre sur la Frivolité, prouvent qu’il est en état d’écrire également bien en Vers & en Prose.

709. (1763) Salon de 1763 « Peintures — M. Favray, Chevalier de Malte et Académicien » p. 248

Favray pour sa copie de Saint-Jean de Malte ; mais reçu, il eût fallu l’en exclure pour sa Famille maltaise, pour ses Femmes maltaises de différents états, et qui se font visite.

710. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — B — article » p. 349

Après avoir professé la Religion Protestante, il l’abjura à l’âge de 25 ans, entra aussi-tôt dans l’état ecclésiastique, & s’appliqua à des Ouvrages d’Astronomie.

711. (1875) Premiers lundis. Tome III « Du point de départ et des origines de la langue et de la littérature française »

— Il est donc indispensable que j’établisse devant vous quelques faits généraux antérieurs, que j’expose l’état des choses, et comment le français d’alors était né, — un français intermédiaire et qui n’est pas encore tout à fait le nôtre, mais qui y mène par une route et une pente désormais ininterrompues. […] Or, maintenant, que peut-on conjecturer de l’état de la langue ou des langues parlées en Gaule à cette époque, et de ce qui dut résulter de la ruine de la prédominance romaine ? […] C’était, comme nous le reconnaîtrons plus expressément par la suite (disait Fauriel), ce même idiome que j’ai distingué plus haut par la dénomination de latin rustique, et qui fut un peu plus tard nommé langue romane, ou roman ; il se divisait en nombreux dialectes, dont les deux plus tranchés, aux deux extrémités du pays, formèrent, l’un le français, ou roman du Nord ; l’autre, le provençal, ou roman du Midi20. » Tel est l’état général des choses au moment où notre étude proprement dite commence. […] « Gustave Fallot, dit ce savant grammairien (et je citerai le passage tout entier, comme exposant bien l’état actuel et dernier de la question), Gustave Fallot fut le premier qui essaya de débrouiller le chaos des formes dialectales de la langue des trouvères ; par malheur pour la science, la mort vint le surprendre au milieu de ses travaux, et son ouvrage resta imparfait. […] Ces fruits de la littérature dumoyen âge, nous y atteindrons le plus tôt possible ; après avoir passé par les rudiments indispensables et nous être rendu compte, seulement pour la bien comprendre, de la question primordiale et de formation, nous arriverons après deux ou trois journées, nous nous arrêterons devant les premiers monuments, et de ceux-ci nous passerons à d’autres, et ainsi de suite sans plus cesser, en quête par-dessus tout de l’excellent : car, encore une fois, nous sommes ici pour professer la langue, la littérature cultivée, perfectionnée, celle qui ne reste pas à l’état acéphalique, anarchique, mais qui a une tête, qui, maîtresse d’elle-même, se gouverne, réagit en tous sens et s’impose, qui enfin, comme la race et comme l’esprit français qu’elle représente, a et gardera longtemps, nous l’espérons, son unité, sa grandeur et son empire.

712. (1890) L’avenir de la science « XV » pp. 296-320

Il y a un extrême danger à donner une valeur historique et chronologique aux évolutions que l’on conçoit comme ayant dû être successives, à supposer, par exemple, que l’homme débute par l’anthropophagie, parce que cet état est conçu comme le plus grossier. […] Les noms généraux par lesquels on désigne les phases diverses de l’esprit ne s’appliquent jamais d’une manière parfaitement univoque, comme disait l’école, à deux états divers. « La ligne de l’humanité, dit Herder, n’est ni droite, ni uniforme ; elle s’égare dans toutes les directions, présente toute les courbures et tous les angles. […] Le Moyen Âge ressemble par certains côtés aux temps homériques, et qui voudrait pourtant appliquer à des états si divers la même dénomination ? […] L’Orient a toujours vécu dans cet état psychologique où naissent les mythes. […] Auguste Comte, par exemple, prétend avoir trouvé la loi définitive de l’esprit humain dans la succession des trois états théologique, métaphysique, scientifique.

713. (1888) Journal des Goncourt. Tome III (1866-1870) « Année 1868 » pp. 185-249

Ce bruit nous met dans un état nerveux abominable. […] Il me dit que c’est la plus étonnante créature du monde, un cerveau merveilleux, mais un cerveau qui serait, selon son expression, dans une assiette, n’ayant aucune corrélation avec sa personne, sa conduite, son état et son esprit dans la vie, la laissant « enfantine et dinde au possible ». […] Il avait pris pour thèse que, chez tout le monde, sans exception, tous les sentiments et toutes les impressions dépendent du bon et du mauvais état de l’estomac, et il racontait, à l’appui, l’histoire d’un mari de ses amis qu’il avait emmené dîner chez lui, le soir de la mort de sa femme, une femme qu’il adorait. — Il lui avait servi un morceau de bœuf, lorsque le mari tendit son assiette et avec une douce imploration de la voix, lui demanda : « Un peu de gras ! […] * * * — Ce qui sauve les souverains de devenir fous par la multiplicité des affaires et la contention des préoccupations, c’est que, par une grâce d’état, ils vivent dans une espèce de rêve de tout ce qu’ils font. […] * * * — L’homme ne possède vraiment que dans l’état sauvage.

714. (1888) Journal des Goncourt. Tome III (1866-1870) « Année 1869 » pp. 253-317

Pas de distraction pour nous enlever à notre état malingre, au tourment de notre santé, comme ces hautes élévations de la science, ces hypothèses médicales, ces rêves dans l’inconnu de la vie, et qui nous apportent les oublis et les étourdissements que donnent aux autres les enivrements d’une fête du monde, d’un bal, d’un spectacle. […] Nous le trouvons triste de son état, triste de la politique, triste de l’état de la littérature. […] Au sortir du déjeuner, comme je lui faisais mes excuses, en lui témoignant la profonde affection que j’avais pour elle, et que, malgré moi, en le bête d’état nerveux où je suis, des larmes tombaient de mes yeux sur ses mains que je baisais, mon émotion la gagnant, elle me prit dans ses bras, et m’embrassant sur les deux joues me dit : « Mais comment donc ! […] … Moi aussi, depuis quelque temps, avec les choses qui se passent en politique, je me sens dans un état nerveux… » Et la scène finit dans la douceur d’un silence ému, où se retrempe et se resserre l’amitié. […] * * * — Inquiète, malgré deux dépêches reçues hier, et voulant se rendre compte par elle-même de l’état de santé de l’Empereur, la princesse va le voir aujourd’hui à Saint-Cloud.

715. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Froissart. — I. » pp. 80-97

Enfant, il aimait donc toutes sortes de déduits et d’ébats, et il s’attachait par instinct aux gens riches, à ceux qui tenaient grand état de chasse, faucons et meutes, ce qui lui semblait le signe d’une noble inclination. […] Cette fois messire Jean Froissart se met en route en plus respectable état que jamais, et il n’a pas moins de quatre lévriers en laisse qu’il va offrir au comte Gaston, grand amateur de chasse comme on sait. […] Et puis, il faut se bien rendre compte de l’état de la chevalerie d’alors, de laquelle Froissart est proprement l’historien sans acception de cause et de nation.

716. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Fénelon. Sa correspondance spirituelle et politique. — II. (Fin.) » pp. 36-54

Cet apaisement, cette simplification et ces temps de repos qu’il lui prêche, cet état de tranquillité et de quiétude morale auquel il le voudrait insensiblement amener, — ne pas toujours voir Dieu à travers la grille d’un raisonnement étroit et serré, — c’est de la part de Fénelon un conseil du bon sens le plus clairvoyant, le plus net, et qui dans le cas présent, autant que nous en pouvons juger, allait le mieux à son adresse ; c’est encore du bon quiétisme. […] Dans son exil, et malgré ses restes de relations confidentielles à la Cour, il n’était plus bien informé du fond ; il dit à tout moment qu’il est mal instruit de l’état général des affaires, et il a raison ; il n’en juge que comme le public et, selon qu’il le dit, par les morceaux du gouvernement qu’il entrevoit sur sa frontière. […] Je trouve dans une lettre de lui à Mme de Montberon, alors qu’il approchait de la cinquantaine (1700), une peinture bien fine et bien circonstanciée de cet état insipide, aride, désabusé, où il se trouve : « Pour moi, je suis dans une paix sèche, obscure et languissante, sans ennui, sans plaisir, sans pensée d’en avoir jamais aucun ; sans aucune vue d’avenir en ce monde ; avec un présent insipide et souvent épineux… » Ces instants d’aridité et de dégoût, chez Fénelon, se peignent avec des traits qui font encore que son ennui ne ressemble pas à un ennui vulgaire.

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