Ainsi, selon lui, le soleil de ses lettres de feu blasonne les coteaux ; la lune, glissant à travers le feuillage, d’une dentelle errante estampe les gazons ; ainsi, démontrant à Maria les richesses du ciel, il parle de ces tableaux qui, dans les nuages, Changent à chaque instant leur magique hypallage. […] Ausone a dit ingénieusement à propos de la métamorphose de Daphné : Laurea debetur Phœbo, si virgo negatur ; ce qui revient à dire (avec Waller, je crois) que le poëte à la fin se console toujours, pourvu que l’amante rebelle se change pour lui en laurier. […] Jules Lefèvre est mort le 13 décembre 1857 : il avait, dans les dernières années, changé son nom en celui de Lefèvre-Deumier ; Mme Deumier, sa tante, l’ayant fait héritier d’une grande fortune, il ajouta ce nom au sien par reconnaissance, ce qui acheva de dérouter la notoriété qui était déjà en retard avec lui. […] Les années changèrent totalement cette disposition.
“Sire, lui dit Arlequin, il faut avoir un peu de patience, les garçons changent de conduite en avançant en âge. […] La scène change et représente une rue. […] Don Juan, furieux, redouble ses menaces, et veut changer d’habit avec Arlequin pour plus de sûreté. […] « Le décor change ; ils aperçoivent le tombeau du commandeur, superbe mausolée.
C’est que l’ancien clerc de Saint-Sulpice n’avait point changé d’âme : il était devenu clerc de la science, voilà tout. […] Il n’avait pas à changer de ton, puisque sa vie, à le bien prendre, n’avait pas changé d’objet. «….
À savoir écrit d’avance le texte entier du drame, à savoir qu’aucun effort n’y peut rien changer, à savoir qu’ils ne sont rien de plus que des acteurs, les hommesse désintéresseraient de leur jeu, de leurs paroles et de leurs mimiques ; ils ressembleraient à ces cabotins, qui récitent pour la salle des tirades pathétiques, tandis qu’ils murmurent quelque gaudriole à l’oreille de l’actrice qui leur donne la réplique. […] À savoir qu’ils ne peuvent rien changer à la forme de leur volonté, aux modes de leur activité, à la fatalité de leurs passions, non plus qu’aux circonstances avec lesquelles leur personne doit en venir aux prises, la plupart des hommes seraient atteints de désespoir ou frappés de torpeur. Au contraire, une confiance joyeuse, une ardeur singulière et un intérêt puissant les stimulent à se persuader qu’à tout moment ils sont maîtres de changer leur destinée en modifiant souverainement la forme de leur âme, en modifiant aussi en quelque mesure la forme du monde.
Toujours en action, toujours en repos, vous soutenez, vous remplissez, vous conservez l’univers ; vous aimez sans passion, vous êtes jaloux sans trouble ; vous changez vos opérations et jamais vos desseins… Mais que vous dis-je ici, ô mon Dieu ! […] « Nous mourons et nous changeons à toute heure, écrit-il à un de ses amis, et cependant nous vivons comme si nous étions immortels. […] C’est du prêtre de Carthage que Bossuet a emprunté ce passage si terrible et si admiré : « Notre chair change bientôt de nature, notre corps prend un autre nom ; même celui de cadavre, dit Tertullien, parce qu’il nous montre encore quelque forme humaine, ne lui demeure pas longtemps ; il devient un je ne sais quoi qui n’a plus de nom dans aucune langue 187 : tant il est vrai que tout meurt en lui, jusqu’à ces termes funèbres par lesquels on exprime ses malheureux restes !
Rien, à mon jugement, ne pourrait remplacer les parties du cours de La Harpe, où ce critique parle de ce qu’il sait, et ne fait point de théories à l’usage de ses préventions ou pour donner le change sur les défauts de ses œuvres originales. […] Et quelle histoire réussirait à rendre moins précieuses les leçons d’un professeur illustre, écrivain du goût le plus délicat et de la raison la plus ornée, qui a élevé la critique littéraire au rang de l’histoire, et qui, à l’exemple des antiques orateurs retravaillant leurs harangues pour l’épreuve de la lecture, a changé de brillantes improvisations en écrits durables ?
Il est hébergé à bon hôtel, et il n’en voudrait pas changer s’il avait à manger seulement. […] Quand tout changeait autour d’elle et que la littérature à la mode se surchargeait de vaines recherches d’école, l’Armorique un peu arriérée et cantonnée restait fidèle à la vieille forme poétique comme aux vieilles mœurs ; elle restait surtout fidèle à ce courage qui est toujours prêt en France à renaître et à sortir quelque part de terre, quand les grands raisonneurs disent qu’il a disparu. […] Il revient donc vers son monde, et leur annonce que Bombourg voudrait changer le jour et qu’on s’en retournât sans frapper de grands coups ; il leur en demande leur avis. L’un d’eux, Charuel, change de couleur à cette idée, et déclare honni celui qui ne maintiendra pas la cause du duc légitime (Charles de Blois)e, et qui s’en ira sans donner de coups d’épée. — « Cette chose m’agrée, dit Beaumanoir ; allons à la bataille, ainsi qu’elle est jurée. » Il revient à Bombourg, qui lui représente encore que c’est folie à lui d’exposer ainsi à la mort la fleur de la duché ; car, une fois morts, on ne trouvera jamais à les remplacer. — « Gardez-vous de croire, répond Beaumanoir, que j’aie amené ici toute la chevalerie de Bretagne, car ni Laval, ni Rochefort, ni Rohan et bien d’autres n’y sont ; mais il est bien vrai que j’ai avec moi une part de cette chevalerie et la fleur des écuyers… » Bombourg reprend la bravade et l’invective. […] Son originalité (nous ne l’avons jamais mieux compris) est toute dans la manière et non dans la matière. — Mais n’admirez-vous pas comme les horizons littéraires s’étendent, comme les points de vue changent et se déplacent ?
C’est lui qui fait ici de la psychologie appliquée : avec le cynisme d’un esprit lucide et sachant qu’il est autre, il se pare, aux yeux de la dupe qu’il a choisie, de qualités générales dont la représentation existe par avance, sous forme de notion, dans tous les esprits : générosité, vertu, bonté piété, religion et il compte, pour établir sur celle-ci son empire, que, prenant le change, elle l’identifiera avec ces concepts que son attitude évoque. […] Peut-être faut-il penser que les fausses vocations, où il prend le change sur lui-même, sont un dérivatif et qu’appliquant son énergie à des tâches moins dispendieuses, elles procurent à celle-ci une détente favorable. La part d’inconscience qui entre dans l’exercice de son activité la plus haute explique d’autre part comment l’homme de génie risque de prendre le change sur son destin. […] Il faut qu’il se reflète dans sa propre conscience autre qu’il n’est, revêtu d’apparences où il prenne le change sur sa propre personne. […] Cette pauvreté des moyens de suggestion auxquels le snobisme a recours méritait qu’on la signalât, parce qu’elle implique l’étonnante sensibilité de cette faculté de prendre le change en quoi consiste le Bovarysme.
Il y a plus : le langage change, non seulement selon les conditions, mais selon les caractères, ou plutôt le langage change selon les conditions et le style change selon les caractères. […] Mais le maître en ce genre, maître incomparable, du moins à considérer tous les auteurs français, et pour les autres je sens mon incompétence, c’est Molière, qui trace un caractère par le style même du personnage dès les premières répliques qu’il prononce, qui met des nuances de style sensibles entre des personnages à peu près semblables, et par exemple entre Philaminte, Armande et Bélise, peut-être et je le crois, entre Mademoiselle Cathos et Mademoiselle Madelon ; qui indique par des styles différents les différents âges, même, d’un même personnage ; car on sait parfaitement que Don Juan n’a pas le même âge au cinquième acte qu’au premier, malgré l’apparente observation de la règle des vingt-quatre heures, et qu’il change de caractère du commencement à la fin de la pièce ; or, observez le style, et vous verrez que de ces différences dans le caractère et de ces différences d’âge, le style même vous avertit. […] De même Elmire, qui a un style si court, si direct et si franc dans la scène trois du troisième acte, parce qu’elle n’est nullement une coquette, quoi que d’aucuns en aient cru, change de style, non seulement en ce sens qu’elle parle un tout autre langage, comme le lui fait remarquer Tartuffe (« Madame, vous parliez tantôt d’un autre style ») ; mais aussi dans le sens grammatical du mot, quand elle a pris un caractère d’emprunt ; et le style alambiqué, torturé de la coquette, ou bien plutôt de la femme qui ne l’est point et qui s’efforce péniblement de l’être, lui vient aux lèvres et marque tout justement ce changement momentané de caractère et avertirait et mettrait en défiance le convoiteux, s’il n’était étourdi par sa convoitise.
L’auteur ressemble à un homme qui voudrait calculer avec des chiffres dont il ignorerait ou changerait la valeur. […] Il change dans la première phrase le sens naturel du mot conscience. […] Cousin change les termes de Kant. […] Il ne sait pas bien non plus ce qu’est cette abstraction personnifiée, douée d’yeux, changée en témoin, et nommée la conscience. […] Il est surtout orateur : le danger est grand pour la philosophie qu’il changera en dissertations oratoires, toutes les fois qu’il n’y introduira pas des idées vagues, des raisonnements douteux, des mots équivoques, et des erreurs.
Je suis sûr que lorsque le temps aura éteint l’éclat un peu dur et cru des couleurs fraîches, ceux qui pensent que Chardin faisait encore mieux autrefois changeront d’avis. […] Je n’ignore pas que les modèles de Chardin, les natures inanimées qu’il imite ne changent ni de place, ni de couleur, ni de formes ; et qu’à perfection égale, un portrait de La Tour a plus de mérite qu’un morceau de genre de Chardin.
I Existence de la volonté au point de vue psychologique Si on entend par volonté une faculté spéciale qui interviendrait au milieu des faits internes, comme un deus ex machina, pour en changer soudain la direction, l’intensité, la durée, etc., alors on a raison de rejeter cette faculté, qu’il est impossible et de constater et de comprendre. […] Je me sens non seulement à l’état de changé, mais encore en train d’être changé (passivité) et de changer quelque chose dans le temps (activité) et simultanément dans l’espace (activité motrice). Ceux qui nient cet aspect intérieur s’en tiennent au point de vue statique : ils considèrent des états de conscience tout donnés et achevés ; ils négligent le point de vue dynamique des idées-forces, c’est-à-dire les états de conscience en train de se produire et de changer. […] Cette admission et ce rejet n’est plus simplement plaisir ou peine, mais une tendance à maintenir le plaisir et à changer la peine en plaisir : c’est l’appétition.
Et sans doute la quantité par soi n’est pas efficiente : la structure d’un tout ne serait nullement modifiée par l’accroissement du nombre de ses éléments si cet accroissement même ne devait rien changer à leurs rapports. […] À côté du gouverneur qui vient rendre ses comptes à l’empereur, des ambassades qui lui apportent des réclamations, des troupes qu’il fait changer de garnison, des vétérans qui gagnent la colonie qu’il leur a assignée, commerçants, rhéteurs, médecins se croisent sur les larges chaussées en ligne droite, avec les étudiants, les pèlerins, les touristes. […] Et c’était Thiers qui se trompait en déclarant que deux morceaux de fer mis à côté l’un de l’autre ne changeraient pas grand-chose au monde. Ils sont capables d’y changer beaucoup, puisqu’ils changent les habitudes d’esprit des hommes. […] L’habitude, que seule notre civilisation nous permet, de vivre au milieu d’un nombre considérable d’individus qui changent, et défilent en quelque sorte devant nous pour se substituer les uns aux autres dans les mêmes places, n’est sans doute pas étrangère à l’assouplissement de nos conceptions juridiques : elle nous prépare à reconnaître des droits au premier « passant » venu, c’est-à-dire à tous les êtres, quels qu’ils soient, qui sont hommes.
Lorsqu’il revint en 1822, le monde littéraire avait changé de face ; en philosophie, en critique, en poésie, tout s’essayait au renouvellement. […] Victorin Fabre se donna le change à lui-même, et il interrompit bientôt ses leçons en se disant et en disant à ceux qui lui en parlaient qu’il s’était aperçu du danger que pouvaient avoir, dans l’état des circonstances politiques, certaines doctrines incomplétement expliquées et légèrement comprises. […] Comme, en 1815, après les Cent-Jours, quelques électeurs de l’Ardèche avaient eu l’idée de porter à la députation Victorin Fabre, Auguste s’est échappé à dire, dans une notice biographique écrite après la mort de son frère, que cette nomination, si elle avait eu lieu, aurait pu changer le cours des choses et arrêter sur leur penchant les destinées de la patrie.
Ma pitié a changé d’objet, et mes espérances ont changé de lieu. […] » Les pressentiments se justifièrent trop vite, et quelques mois à peine écoulés, cette joie mélangée de crainte était changée en un deuil amer, inconsolable (12 février 1853)94. […] Comme à l’ordinaire, je cache tout, ne pouvant obéir qu’à mon instinct d’aimer. — Si j’étais libre de suivre celui de mère, je changerais tout le régime adopté, et dès longtemps, je crois, j’aurais rétabli l’harmonie dans ce corps chéri, qui semble se dissoudre d’une maigreur désespérante, d’une faim étrange et jamais contentée, malgré quatre repas abondants et un bon sommeil souvent. […] Mais ce parti lui-même est entouré de bien des difficultés ; c’est un déchirement, et je suis inerte de douleur. » « (5 décembre 1853)… J’ai tant de raisons de savoir que le malheur d’argent surtout change beaucoup les affections et n’est justifié devant personne ! […] Elle changea quatorze fois de logement en vingt ans.
Puisque le point de repère par rapport auquel on peut juger de l’état de santé ou de maladie varie avec les espèces, il peut varier aussi pour une seule et même espèce, si celle-ci vient à changer. […] Après avoir établi par l’observation que le fait est général, il remontera aux conditions qui ont déterminé cette généralité dans le passé et cherchera ensuite si ces conditions sont encore données dans le présent ou si, au contraire, elles ont changé. […] Elle change de forme, les actes qui sont ainsi qualifiés ne sont pas partout les mêmes ; mais, partout et toujours, il y a eu des hommes qui se conduisaient de manière à attirer sur eux la répression pénale. […] Or, à supposer que cette condition put être effectivement réalisée, le crime ne disparaîtrait pas pour cela, il changerait seulement de forme ; car la cause même qui tarirait ainsi les sources de la criminalité en ouvrirait immédiatement de nouvelles. […] Il ne s’agit plus de poursuivre désespérément une fin qui fuit à mesure qu’on avance, mais de travailler avec une régulière persévérance à maintenir l’état normal, à le rétablir s’il est troublé, à en retrouver les conditions si elles viennent à changer.
Mais tous les compagnons d’Ulysse, qui, vous le savez, ne sont pas autre chose que des imbéciles, ont été transformés en animaux, ce qui ne les change pas beaucoup. […] Tu me rendras peut-être encor simple soldat : Je ne veux point changer d’état. » Ulysse espère réussir mieux avec un animal moins fier et qui n’est pas le roi des animaux. […] Je vis libre, content, sans nul soin qui me presse ; Et te dis tout net et tout plat : Je ne veux point changer d’état. » Ulysse va trouver alors un loup. […] Tout bien considéré, je te soutiens en somme Que scélérat pour scélérat, Il vaut mieux être un loup qu’un homme ; Je ne veux point changer d’état. […] Le retour sur ses pas, les malices, les tours, Et le change, et cent stratagèmes…, etc.
Le vertige de ces temps ne me gagna pas, leur fantasmagorie ne m’éblouit point, l’orageuse et brillante fée ne put me changer comme elle en a changé tant d’autres ; elle fit en vain passer devant mes yeux son iris aux cent couleurs… D'autres voyaient tout cela comme costumes et blasons, drapeaux, armes curieuses, coffres, armoires, faïences, que sais-je ?
Le caractere de la nation est-il changé ? […] Un Théatre changé par leur baguette en maison bourgeoise, des hommes en robe de chambre, des femmes en déshabillé, des laquais en papillotes, un petit attirail domestique proprement étalé, des phrases entrecoupées, des exclamations perpétuelles, des sentimens emmiélés, des sentences Platoniques, des caracteres Paladins, de la prose léthargique, des Spectateurs benins.
Un Orateur, par exemple, aura dit qu'un Ministre plénipotentiaire doit avoir ces trois qualités, la probité, la capacité, & le courage ; pour déguiser cette division, le plagiaire n'aura qu'à changer d'abord l'ordre de ces trois mots, & dire : le courage, la capacité, la probité ; mais comme ce déguisement ne suffiroit pas, il doit changer aussi les expressions, & mettre la fermeté au lieu du courage, la vertu au lieu de la probité, & à la capacité substituer la science ; enfin, pour cacher encore mieux son vol, il faudra qu'il dise que l'Ambassadeur doit être ferme, vertueux, & habile.
II Le ton change dans les fables, et le vers aussi. […] Encore faut-il qu’elle ne persévère point d’un bout à l’autre dans le même style, mais qu’elle change, qu’elle ondule, par toutes sortes de tours sinueux, de la joie à la tristesse, du sérieux à la plaisanterie. […] Nous n’avons plus le mot, mais nous avons encore la chose : « Ne pas sourire respectueusement au seul nom de M. le préfet, disait Beyle, passe aux yeux des paysans de la Franche-Comté pour une imprudence signalée, et l’imprudence dans le pauvre est promptement punie par le manque de pain. » L’état des choses n’a guère changé, et les maximes qui en naissent n’ont pas changé davantage.
voiez, dit l’auteur de la pluralité des mondes, combien la face de la nature est changée d’ici à la Chine… etc. . […] Quoique l’Allemagne soit aujourd’hui dans un état bien different de celui où elle étoit quand Tacite la décrivit, quoiqu’elle soit remplie de villes, au lieu qu’il n’y avoit que des villages dans l’ancienne Germanie, quoique les marais et la plûpart des forêts de la Germanie aïent été changez en prairies et en terres labourables, enfin quoique la maniere de vivre et de s’habiller des germains, soient differentes par cette raison en bien des choses de la maniere de vivre et de s’habiller des allemands, on reconnoît néanmoins le génie et le caractere d’esprit des anciens germains dans les allemands d’aujourd’hui. […] Aussi le changement de moeurs, d’inclination et d’esprit inévitable à ceux qui changent de patrie, a-t-il été plus subit et plus sensible dans les nouvelles colonies que dans les anciennes. […] Les chevaux changent même de naturel en changeant d’air et de nourriture.
Cette approbation s’étoit déja changée en admiration dès le temps de Quintilien, qui écrivoit environ quatre-vingt-dix ans après Virgile. […] Ainsi les hommes ne changeront point d’opinion sur ce point-là, que les ressorts de la machine humaine ne soient changez. […] Ces hommes répondront aux critiques sans entrer en discussion de leurs remarques, qu’ils reconnoissent déja des fautes dans les poemes qu’ils admirent, et qu’ils ne changeront pas de sentiment, parce qu’ils y verront quelques fautes de plus.
Tout change. […] Socrate a changé ce précepte, et a dit : faisons du bien à nos amis, et ne faisons point de mal à nos ennemis. Il rapporte l’exemple de tous les grands hommes qui ont pardonné, ou à des assassins, ou à des ingrats. » Il vante ce pouvoir magique qu’ont les princes, de changer les âmes par leurs bienfaits. […] La persécution cessa ; et cet empereur assassin, ce barbare incendiaire, ce chrétien persécuteur d’autres chrétiens, publia un édit, par lequel il défendait qu’on employât désormais ni autorité, ni menaces pour faire changer personne de religion.
Mais les tours changeront peu, parce que les tours expriment ce qu’il y a de plus original dans cet esprit, et de moins sujet au changement. […] Un événement singulier les fit changer de dessein, et les conduisit à Constantinople. […] Changez l’orthographe c’est une vérité de tous les temps exprimée dans un langage définitif. […] A la foi qui entraînait les seigneurs en Orient, se mêlait un vague espoir de changer l’écu de chevalier contre les armes impériales. […] A-t-il changé des victoires en défaites ?
Quand on a lu un Discours de Bourdaloue, & qu’on va les entendre ensuite, il semble que l’éloquence de la Chaire ait changé d’objet. […] Est-ce en s’accommodant au ton du monde & de la société, qui n’est que l’image des travers qui nous déshonorent, qu’on pourra frapper les esprits & changer les cœurs corrompus ?
Par là encore, nous définissons sa mobilité, qui n’est que le pouvoir de changer de lieu. […] Ils changent, c’est-à-dire que, dans le groupe de possibilités permanentes qui les constitue, telle possibilité périt ; en d’autres termes encore, parmi les sensations possibles qui désignaient un corps, telle sensation cesse d’être possible. […] La scène change, lorsque nous essayons de démêler, dans cette multitude énorme de propriétés, les propriétés fondamentales. […] Transportée par notre main, elle change de place à nos yeux, comme notre main elle-même. […] Poussée par un autre corps, elle change de place, comme fait notre main en pareille circonstance.
. — Changer les choses sans changer les hommes. — Pas de concessions, des convictions., etc. […] Et par exemple, pour ne prendre qu’un trait du caractère national, nous sommes un peuple qui se plaît ou s’est beaucoup plu à la guerre, qui aime le clairon et le pompon ; cela diminue sans doute, mais peut-on agir et raisonner absolument comme si cela n’était plus, comme si cette forme de notre imagination et tout notre tempérament étaient changés subitement, du soir au matin, comme si le tempérament et les intérêts des nations rivales ou jalouses avaient changé aussi ? […] Un mot heureux a souvent suffi pour arrêter un armée qui fuyait, changer la défaite en victoire et sauver un empire… « Il y a des mots souverains : tel mot fut plus puissant que tel monarque, plus formidable qu’une armée.
Sa pensée va plus loin, mais il ne s’y livre point avec trop de promptitude, il ne s’y obstine pas : il sait que rien n’est sûr, qu’indépendamment de la rareté de ces débris qui peuvent sembler les témoins d’un des états du monde disparus, sa pensée à lui-même est un instrument bien imparfait, qu’il lui suffirait d’un sens de plus ou de moins, ou du moindre degré changé dans la perspicacité de l’un des cinq sens, pour que tout lui parût sous un jour tout autre. […] Quelques-uns sont une exception heureuse ; on les distingue, on les compte, la plupart, ni bons ni mauvais, à la merci des impressions, ont un premier mouvement naturel ; mais le temps, les années, les circonstances et les intérêts qui changent et s’éloignent, les changent aussi. […] Je n’ai pas fini : tout homme, par cela même qu’il vit, a une secrète horreur de l’anéantissement total ; on se donne le change comme on peut ; on veut au moins lutter contre l’oubli, laisser un souvenir, un nom. […] Aussi le répéterai-je encore, il vit pour le mieux en dehors des liens, exempt et affranchi de ce qu’entraînent à leur suite les relations de famille, les devoirs de société, les convenances publiques et oratoires : dès qu’on entre dans cet ordre mixte, le point de vue change ; il y a lieu de payer tribut, plus ou moins, au décorum de l’humanité, à ses désirs, à ses préjugés et à ses conventions honorables, aux bienfaits immédiats et à l’utilité pratique qui en découlent.
On conçoit du moins ce retour comme possible, et l’on admet que, dans ces conditions, rien ne serait changé à l’état primitif du système tout entier ni de ses parties élémentaires. […] Il faut remarquer, comme nous le disions plus haut, que le moi grossit, s’enrichit et change, à mesure qu’il passe par les deux états contraires ; sinon, comment se déciderait-il jamais ? […] Il ordonne au temps d’aller dix fois, cent fois, mille fois plus vite, et il en a le droit, puisqu’il ne change ainsi que la nature des intervalles conscients et que ces intervalles, par hypothèse, n’entrent pas dans les calculs. […] Or, si l’on veut bien remarquer que ce fluide est d’une parfaite homogénéité, qu’il n’existe entre ses parties ni un intervalle vide qui les sépare ni une différence quelconque qui permette de les distinguer, on verra que tout mouvement s’accomplissant au sein de ce fluide équivaut en fait à l’immobilité absolue, puisque avant, pendant et après le mouvement rien ne change, rien n’est changé dans l’ensemble. […] Que sous l’influence des mêmes conditions extérieures je ne me conduise point aujourd’hui comme je me conduisais hier, cela n’a rien d’étonnant, parce que je change, parce que je dure.
D’un jour à l’autre on avait changé de climat et de lumière, on avait changé d’Olympe : c’était une révélation.
Il a pris pour sujet d’un de ses tableaux Mercure amoureux qui change en pierre Aglaure qui l’éloignait de sa saur Hersé. […] Pour l’Aglaure ; c’est en charbon de terre que Mercure la change ; je m’en rapporte à M. de Jussieu.
Homere auroit donc été blâmé s’il eut changé certains caracteres, où s’il avoit alteré certains évenemens connus, et sur tout s’il avoit obmis dans les dénombremens de ses armées, ceux qui véritablement y parurent. […] A-t-il pû changer à son plaisir les évenemens des combats et des sieges ? […] Homere, par cet endroit-là même qui l’a fait blâmer ici, plairoit encore à plusieurs peuples de l’Asie et de l’Afrique, qui n’ont point changé la maniere ancienne de gouverner leurs chevaux, non plus que beaucoup d’autres usages.
Mais quand l’homme change sans cesso, Nu passé pourquoi rien changer ?
Qu’y va-t-il faire pour changer ce terrain plat et vulgaire en un beau jardin ? […] De la même façon qu’il a composé des caractères ; le domaine seul est différent, l’art et ses lois n’ont pas changé. […] Ainsi, la poésie, qui suit les démarches de l’âme, doit se composer de petits mouvements et à chaque instant changer d’allure. […] En Chinon, il change sa coignée d’argent en beaux testons et autre monnaie blanche ; sa coignée d’or en beaux saluts, beaux moutons à grande laine, belles riddes, beaux royaux, beaux écus au soleil. […] Voyons seulement comment il a transformé Pilpay son modèle, et fait un poëme d’une simple matière, ce qu’il a dû changer pour accommoder le récit à la morale, combien de fois il a fallu créer de toutes pièces des caractères.
L’Aminta est à la Jérusalem délivrée ce que les Églogues de Virgile sont à l’Énéide : une diversion légère et gracieuse d’un poète souverain, qui change d’instrument sans changer de souffle, qui dépose un moment la trompette épique pour le chalumeau des bergers. […] Du jour où Alphonse soupçonna cette défection de son poète favori, la conduite de ce prince envers le Tasse changea ; la défiance et la froideur succédèrent à la familiarité. […] L’amitié même se changea en trahison et en piège contre lui. […] Ce ne fut que plus tard que la sollicitude changea de caractère, et qu’une aigreur cruelle parut succéder dans ce prince à la pitié. […] Le Tasse, soit qu’il craignît d’être reconnu par des émissaires du duc de Ferrare lancés à sa poursuite, soit plutôt que, par suite de sa maladie mentale, il voulût éprouver sa sœur elle-même avant de se découvrir à elle, changea ses habits de gentilhomme, usés et déchirés par la longue route, contre les habits d’un berger des Abruzzes.
Ici l’ambitieux usurpateur du trône change tout à coup de rôle, d’esprit, de langage, par une de ces révolutions d’esprit qui déconcertent souvent l’histoire. […] Le matin, ses troupes attaquent, malgré lui, le sénateur Sabinus, chef du parti de Vespasien, barricadé dans le Capitole ; le Capitole est incendié avec les statues des dieux et des héros, changées par les combattants en armes défensives ou agressives. […] L’aspect tout à coup change autour d’elle ; sa solitude, troublée par des tumultes soudains, semblait lui annoncer les derniers malheurs ; enfin, sa dernière esclave s’enfuyant : — Et toi aussi, tu m’abandonnes ? […] Voyez la première nuit du coupable après le crime, sa terreur de la lumière qui va renaître, son horreur pour les lieux, scène de son forfait, pour cette physionomie de la terre et de la mer qui ne change pas comme le visage des hommes, et qui le force à se sauver à Naples. […] — Les Camille Desmoulins sont de tous les temps ; ils allument le bûcher, et ils sont consumés par la flamme quand le vent change.
Il ne devient tel que quand il y a quelque obstacle qui tend à le détruire, c’est-à-dire à nous détruire nous-mêmes et à changer le plaisir en douleur. […] La volonté continue du bien-être, reliant les séries d’effets, les change en séries de moyens, leur prête ainsi une continuité interne, une unité de but, une unité de conscience. […] L’insecte la choisit donc et la porte là où sont ces œufs que, pendant la période secondaire, il voyait se changer en larves à nourrir. […] Les autres l’expliquent par un pouvoir spécial différent de l’intelligence et des appétitions, différent même du caractère, capable, en un mot, de changer la direction finale qui résulterait naturellement des trois facteurs suivants : caractère, état et direction des inclinations, état et direction de l’intelligence. […] Chacun des poids que nous ajoutons ne modifie en rien les autres et n’en change point la qualité : c’est simplement une quantité de plus à introduire dans le total.
En voici tout d’abord une raison : c’est que la langue, qui n’a pas beaucoup changé depuis que le xviie siècle s’est flatté de la fixer, a pourtant changé un peu : en sorte que, quand nous lisons Boileau, ou Racine, ou Corneille, leurs expressions ne suscitent plus en nous tout à fait les mêmes représentations qui surgissaient dans l’esprit des contemporains, et la traduction mentale que nous en faisons en courant, n’est qu’une suite d’à peu près, d’inexactitudes et de faux sens. […] Une description burlesque, une tragédie galante, cela plaît comme une forme d’habit se porte, pendant six mois ou pendant dix ans, tant que la mode y est : la mode change, et tragédies et descriptions s’en vont où sont les paniers et les vertugadins. […] Ce n’est pas seulement l’homme juge des œuvres, qui ne change pas : c’est la nature, aussi matière des œuvres. […] La nature, disais-je, ne change pas : mais assurément quelque chose change dans la nature, et ce n’est pas à cela que l’imitation des anciens se rapporte.
D’abord, ils s’ennuieront de la scolastique ; la scolastique jetée de côté, on changera la forme des idées, et puis on reconnaîtra l’impossibilité de l’explication orthodoxe de la Bible, etc. […] Je changeai de ton, quand il me proposa de la faire avec M. de Ravignan. […] Il faut, autant que possible, se maintenir dans une position où l’on soit prêt à virer de bord, alors que change le vent de la croyance. Et combien de fois doit-il changer dans la vie ? […] Or, on n’est pas sûr de ne pas changer de croyance à l’avenir, quelque certitude qu’on ait du présent et du passé.
Avec les vingt-quatre milliards anglais dépensés en coups de canon, on eût changé la face de la terre, ébauché partout la civilisation, et supprimé dans le monde entier l’ignorance et la misère. […] Paul de Russie émet cet axiome : « Il n’y a d’homme puissant que celui à qui l’empereur « parle, et sa puissance dure autant que la parole qu’il entend. » Philippe V, d’Espagne, si férocement calme aux auto-da-fé, s’épouvante à l’idée de changer de chemise, et reste six mois au lit sans se laver et sans se couper les ongles, de peur d’être empoisonné par les ciseaux, ou par l’eau de la cuvette, ou par sa chemise, ou par ses souliers. […] IV Il est temps que cela change. […] Je le répète, il est temps que cela change. […] Changer le passé, cela est étrange ; c’est ce que l’histoire va faire.
Puis, à supposer que cet entourage « dure », rien ne prouve rigoureusement que nous retrouvions la même durée quand nous changeons d’entourage : des durées différentes, je veux dire diversement rythmées, pourraient coexister. […] Au regard de la science il n’y aurait rien de changé. […] La rapidité de déroulement de ce Temps extérieur et mathématique pourrait devenir infinie, tous les états passés, présents et à venir de l’univers pourraient se trouver donnés d’un seul coup, à la place du déroulement il pourrait n’y avoir que du déroulé : le mouvement représentatif du Temps serait devenu une ligne ; à chacune des divisions de cette ligne correspondrait la même partie de l’univers déroulé qui y correspondait tout à l’heure dans l’univers se déroulant ; rien ne serait changé aux yeux de la science. […] S’il n’en a aucune, se réduisant à un point qui change indéfiniment de qualité, on peut supposer que la rapidité de succession des qualités devienne infinie et que ces points de qualité soient donnés tout d’un coup, pourvu qu’à ce monde sans dimension on apporte une ligne où les points se juxtaposent. […] Mais il en est d’autres auxquels la théorie défend, en quelque sorte, d’être perçus ou de devenir perceptibles : s’ils le devenaient, ils changeraient de grandeur, — de telle sorte que la mesure, exacte si elle porte sur ce qu’on n’aperçoit pas, serait fausse aussitôt qu’on apercevrait.
il ne faut pas, celui-là, qu’il sorte de ton école, mon cher Sénèque, mais bien de l’école de Celui qui seul peut enseigner excellemment et changer les âmes de ses disciples, et les former selon qu’il le veut. […] O Lucilius, mon vertueux ami, pénétrez-vous de cette maxime, et vous rougirez de la légèreté des hommes qui changent tous les jours la base de leur vie, et qui, prêts à la quitter, ébauchent encore des projets. […] — Ô grand philosophe (s’écrie à son tour Casaubon), je suis bien de ton avis, et je te prendrai plutôt pour conseil que ces miens amis, gens d’ailleurs de vertu et de prudence, qui m’engagent à changer de genre de vie et à embrasser si tard la profession d’enseigner le droit. […] Et c’est ainsi que comme un fleuve qu’on saigne tant qu’on peut à droite et à gauche, jusqu’à ce qu’à la fin on parvienne à lui faire changer de cours, le pauvre Casaubon, qui, de loin, nous apparaît comme la personnification de l’étude heureuse de l’Antiquité dans une époque faite exprès pour lui et toute favorable, suivait péniblement sa voie à travers les obstacles et luttait pour maintenir sa vocation. […] et je suis persuadé que ce qu’elle a approuvé, ce qu’elle a réglé et consenti, et qui n’est point d’ailleurs en contradiction avec ton Écriture, ne peut être rejeté ou changé indifféremment ; mais je suis, d’autre part, effrayé de cette tyrannie ouverte et tout à fait antichrétienne de l’évêque de Rome.
Il n’en souffrit pas moins cruellement de l’affront qui lui était fait ; et alors, non pas, comme on l’a cru, par hypocrisie et pour complaire au roi, mais par un réveil naturel des sentiments religieux de sa première éducation, il songea à Dieu dans sa disgrâce, et il essaya s’il ne pourrait pas guérir son cœur en le tournant vers ce qui ne change point. […] D’Antin, tout plat courtisan qu’il est, a donc une idée morale supérieure ; et, puisque j’en suis ici, non pas à le réhabiliter, mais à le montrer au vrai et sans que nous en puissions tirer orgueil, qu’on sache bien que la forme du courtisan n’a fait que changer ; elle a changé comme la forme même du souverain. […] J’ai vu tous ces événements comme dans un tableau : j’ai ressenti les mouvements de la nature, j’ai pleuré mon fils amèrement, j’ai regretté très sincèrement Mme la Dauphine ; les malheurs à venir de ma patrie m’ont touché ; j’ai été attendri de l’horreur d’un spectacle comparable à rien : voilà tout ; je n’ai rien changé à ma conduite. […] Un abbé de Rancé s’était dit autrefois ces mêmes choses, et du jour où il se les était dites sérieusement, tout pour lui avait changé.
Il ne suffit pas d’ajouter à l’estimation l’inconscience pour la changer en une conscience de plaisir ou de douleur. […] « Que mon ami A ou que mon ami B meure, cela peut changer le degré, mais non la nature de ma douleur. » Selon nous, il y a sous tous les plaisirs, même les plus différents, une sorte de plaisir fondamental et vital qui est le plaisir même de vivre, conséquemment d’agir, de sentir et d’avoir conscience ; mais, de ce qu’il y a ainsi un élément commun qui nous permet de comparer les divers plaisirs en les rapportant tous au plaisir radical de l’action, il n’en résulte nullement qu’il n’existe aucune différence de qualité entre les différents plaisirs comme plaisirs. […] Qu’on m’arrache une dent, ou que mon ami meure, « cela peut changer le degré, mais non la nature de ma douleur ». […] Par exemple, une sensation produite par une couleur peut, à un certain moment, être agréable ; puis, sans changer de nature, mais en se prolongeant, elle peut devenir indifférente ou même désagréable. […] Il y a un côté vrai dans la théorie pessimiste : c’est que la peine a, en général, une plus grande force que le plaisir pour mouvoir l’activité, pour lui faire changer de direction au lieu de la laisser à l’état rectiligne, pour lui donner même une direction déterminée au lieu de la laisser à l’état flottant.
En outre, « les objets avaient perdu leur aspect naturel ; tout ce qu’il voyait avait changé de manière d’être ». — « L’étrangeté de ce que je voyais, dit-il, était celle que je me croyais transporté sur une autre planète. » — « Il était constamment étonné, il lui semblait qu’il se trouvait en ce monde pour la première fois. […] Je me souviens parfaitement d’avoir dit à un ami que les objets me paraissaient changés d’aspect ; il y avait aussi de l’hyperesthésie de la vue, et je portais depuis quelque temps des lunettes légèrement colorées… Le 25 novembre, aussitôt après avoir eu la sensation de cette bouffée chaude, je fus pris de bourdonnements d’oreille, et j’eus de l’obnubilation intellectuelle. […] Sur ce point, presque tous emploient le même langage : « Je me sentais si complètement changé, qu’il me semblait être devenu un autre134 ; cette pensée s’imposait constamment à moi sans que cependant j’aie oublié une seule fois qu’elle était illusoire. » — « Quelquefois il me semble n’être pas moi-même, ou bien je me crois plongée dans un rêve continuel. » — « Il m’a littéralement semblé que je n’étais plus moi-même. » — « Je doutais de ma propre existence, et même par instants je cessais d’y croire. » — « Souvent il me semble que je ne suis pas de ce monde ; ma voix me paraît étrangère, et, quand je vois mes camarades d’hôpital, je me dis à moi-même : “Ce sont les figures d’un rêve.” » — Il semble au malade « qu’il est un automate » ; « il sent qu’il est en dehors de lui-même ». — Il ne « se reconnaît plus ; il lui semble qu’il est devenu une autre personne ».
Quelques-uns ont cru devoir changer l’ancienne, par la même raison qu’on a réformé nos vieilles modes. […] Un cas, disent-ils, où il seroit ridicule de changer la manière usitée d’écrire, c’est lorsque des mots, ayant un même son, ont pourtant une signification opposée, comme poids, poix & pois, ville, & vile, qui sont toutes choses différentes. […] « L’ancienne nous échappe tous les jours ; &, comme il ne faut point se presser de la rejetter, on ne doit pas non plus faire de grands efforts pour la retenir. » Le changement dans toute matière a des attraits : de même qu’on a changé en grande partie l’orthographe, on a aussi essayé de substituer aux notes ordinaires de la musique d’autres signes ; inventions dont les auteurs n’ont pas été bien reçus du public, & qui les en ont même fait mépriser dès qu’elles ont paru.
Les volontés humaines changent ; mais qu’est-ce qui ne change pas ici-bas ?
Que le Christianisme a changé les rapports des passions en changeant les bases du vice et de la vertu. […] Les bases de la morale ont changé parmi les hommes, du moins parmi les hommes chrétiens, depuis la prédication de l’Évangile.
Deux relais, et les routes de la campagne se changent presque en une rue continue. […] Nous sommes bien changés depuis le seizième siècle, et nous condamnons aujourd’hui ce que nous approuvions autrefois. […] Vous ne pouvez que changer les circonstances où il se trouve ; vous ne le changez pas lui-même ; il reste immobile, et, à tous les chocs qui le frappent, il rend le même son. […] Les vices changent à chaque siècle en même temps que les vertus. […] Sa mère se remarie, et tout change.
XII Chaque jour je change ; les années se succèdent, mes goûts de l’autre saison ne sont déjà plus ceux de la saison d’aujourd’hui ; mes amitiés elles-mêmes se dessèchent et se renouvellent. […] sur tous les points on est à l’œuvre ; en physique, en chimie, en zoologie, en botanique, dans toutes les branches de l’histoire naturelle, en critique historique, philosophique, en études orientales, en archéologie, tout insensiblement change de face ; et le jour où le siècle prendra la peine de tirer ses conclusions, on verra qu’il est à cent lieues, à mille lieues de son point de départ. […] La Nécessité, cette grande muse, m’a forcé brusquement d’en changer : cette Nécessité qui, dans les grands moments, fait que le muet parle et que le bègue articule, m’a forcé, en un instant, d’en venir à une expression nette, claire, rapide, de parler à tout le monde et la langue de tout le monde : je l’en remercie.
… Telle est la question que nous ne craignons pas de poser devant sa jeune gloire… Comme les diverses manifestations de l’esprit n’en changent jamais la nature, la place d’Augier dans la poésie lyrique et élégiaque nous semble devoir être identiquement la même que dans la poésie dramatique, — moins les retentissements d’un succès, toujours plus sonores à la scène qu’ailleurs ! […] Si, au lieu d’être un enfant du xixe siècle, Émile Augier eût appartenu à une autre époque, il eût fait, sans y rien changer, tout ce qu’il a fait dans la sienne. […] Mais il ne changera pas de nature, et cette nature, comme l’intérêt que le poème inspire, est radicalement inférieure.
. — En quoi le goût a changé depuis un siècle. […] Le goût s’est transformé depuis un siècle ; c’est que l’esprit humain a fait volte-face ; avec le point de vue la perspective a changé ; il faut tenir compte de ce déplacement. […] Ils tenaient à ce style comme à leur habit ; c’était affaire de convenance ou de cérémonie ; il y avait un patron accepté, immuable ; on ne pouvait le changer sans indécence ou ridicule ; écrire en dehors de la règle, surtout en vers, avec effusion et naturel, c’eût été se présenter dans un salon en pantoufles et en robe de chambre. […] En vain le fond est changé, la forme subsiste. […] En effet, tout était changé.
Montesquieu est un esprit actif qui a toujours étudié, qui, par suite, s’est élargi, enrichi, mais aussi modifié, qui a découvert des points de vue nouveaux, changé son orientation : sa vie intellectuelle comprend plusieurs périodes distinctes. […] Par la raison que leurs crimes, leurs injustices, le mal qu’ils justifient par l’utilité et le bien public, que tout cela ne sert à rien : leurs agitations sont vaines et ne changeront rien à l’action toute-puissante de causes éternelles. […] C’est alors sans doute que son point de vue change. […] Il y a sophisme aussi à dire qu’une loi, un acte humain aurait nécessairement, dans des circonstances données, changé le cours des choses. […] Et notre réalisme ne peut s’empêcher d’en vouloir à Montesquieu d’avoir créé l’illusion de tous ces faiseurs de constitutions, qui croient changer le monde par des articles de loi.
Fiévée croit qu’il aurait fait surtout des romans, et qu’il aurait eu assez d’imagination pour cela, mais que la Révolution, en y substituant en lui les passions de l’esprit et le goût des réflexions qu’elles font naître, changea par là même sa destination. […] Le jour me surprit, et je n’avais encore rien résolu… On devine que cette femme riche, chez qui va se présenter Mme de Senneterre, n’est autre que Suzette, qui a changé de nom. […] On disait autrefois qu’en France personne ne résistait au ridicule ; cela a bien changé depuis : « Est-ce qu’il y a du ridicule, en effet, quand il n’y a plus de mœurs fixées ? […] Il se souvint de ce mot profond du cardinal de Retz, « qu’il faut souvent changer d’opinion pour rester toujours de son parti ». Lui, au contraire, il changea de parti, apparemment pour rester fidèle au gros de ses opinions.
« La face du monde change si promptement ! […] Il n’en était pas de même autrefois, mais les goûts changent et le cœur se déprend chaque jour de quelque chose. […] Ce voyage m’amuse peu ; je n’aime pas à m’en aller, à changer de lieu, ni de ciel, ni de vie, et tout cela change en voyage. […] C’est possible qu’il soit le même ; lui me trouvera bien changée depuis dix ans. […] « Demain, je change et vais à Cahuzac pour des réparations à la maison qui me tiendront quelques jours.
Il n’en est pas de même du mauvais, né d’une autre sorte de raison que Fénelon appelle « bornée et subalterne. » Le propre de celui-là est tout à la fois de haïr ce qu’il veut changer, et de ne savoir changer qu’en renversant. […] Des maximes générales sur la folie des conquêtes, et des exhortations à la paix et à la bienfaisance, ne changent pas le cœur des princes. […] Si Lesage avait eu le dessein de peindre son temps, l’original aurait trop souvent changé d’attitude. […] Ses vices ne prennent pas racine en lui, et ses mœurs se corrompent sans que sa nature change. […] On ne changera rien utilement au plan d’études de Rollin ; ou si l’on y change, ce doit être avec la réserve qu’il met lui-même à proposer les réformes.
Mais qu’il y ait un mouvement réel, personne ne peut le contester sérieusement : sinon, rien ne changerait dans l’univers, et surtout on ne voit pas ce que signifierait la conscience que nous avons de nos propres mouvements. […] Sans doute cette continuité change d’aspect, d’un moment à l’autre : mais pourquoi ne constatons-nous pas purement et simplement que l’ensemble a changé, Comme si l’on avait tourné un kaléidoscope ? […] D’où vient alors l’irrésistible tendance à constituer un univers matériel discontinu, avec des corps aux arêtes bien découpées, qui changent de place,) c’est-à-dire de rapport entre eux ? […] Tant qu’il s’agit d’espace, on peut pousser la division aussi loin qu’on veut ; on ne change rien ainsi à la nature de ce qu’on divise. […] Voici des objets qui changent de forme et qui se meuvent.
Napoléon ici hésita, eut des égards pour l’Europe, pour l’empereur Alexandre, alors son ami et son allié intime, celui qui, en 1808, disait au roi de Saxe à Erfurt « qu’il se sentait meilleur après chaque conversation avec l’Empereur Napoléon, et qu’une heure d’entretien avec ce grand homme l’enrichissait plus que dix années d’expérience. » Mais, depuis cette époque, les dispositions de la Russie et de son souverain avaient bien changé ; les exigences de Napoléon au sujet du blocus continental, l’intérêt qu’avait Saint-Pétersbourg à ne pas s’y prêter, les griefs et les passions de sa Cour et de son peuple, avaient influé sur l’esprit mobile d’Alexandre et l’avaient désenchanté peu à peu et finalement aliéné de son grand ami. […] Fidèle et circonspect, par devoir comme par nécessité, il réprimera son penchant et le tiendra secret jusqu’à ce qu’il croie le moment venu pour la Saxe de suivre une autre ligne et de repasser dans un autre camp : il aura l’air alors de changer de drapeau quoiqu’il n’ait réellement pas changé de sentiments ni de manière de voir. […] Lui-même, avec les années, il avait changé, et devenu depuis 1815 diplomate au service de l’Autriche, conservateur du vieil ordre européen, il voyait les choses d’un tout autre point de vue que dans sa jeunesse. — Les détails, d’ailleurs, qu’il nous donne sur la réception de la députation polonaise par l’Empereur le 24 janvier 1808, sont piquants et d’une familiarité d’expression à laquelle je renvoie.
Ce qui hier encore s’appelait défaut dans un auteur, change aussitôt de nom et devient, une fois le type admis, un simple trait de signalement et de caractère. […] Notre âme s’étend sur ce qu’elle voit ; elle change comme les horizons, elle en prend la forme… » C’est joli et gracieux sans doute, remarque le critique anglais ; mais quelle différence avec le pinceau de Maurice peignant la nature en traits profonds, trouvés et neufs, disant au retour d’une course où il a vu les rives de la Loire, Chambord, Blois, Amboise, Chenonceaux, les villes des deux bords, Orléans, Tours, Saumur, Nantes et l’Océan grondant au bout : « De là je suis rentré dans l’intérieur des terres jusqu’à Bourges et Nevers, pays des grands bois, où les bruits d’une vaste étendue et continus abondent aussi. » Et ailleurs il parle de ce beau torrent de rumeurs que roule la cime agitée des forêts. […] La scène a changé ; les plaines et les lacs resplendissent. […] Que vous fussiez une sainte. » Elle choisit toujours de préférence pour confidente de ses chastes et ardents désirs cette Louise de Bayne qu’a aimée son frère, qui n’a plus seize ans, qui en a vingt déjà et plus, mais qui n’a pas changé et dont elle nous trace ce ravissant portrait en deux lignes : « C’est même air de jeunesse, même gaieté, même œil de feu.
Rien ne change, même quand tout paraît le plus changé. […] Ce n’est pas lui qui a changé, mais le terrain où il lui était permis d’être tout lui-même. […] Puis il songe que, si dans un ou plusieurs siècles, la forme actuelle de la société se trouve radicalement changée, à cette distance tous les révoltés d’aujourd’hui, pêle-mêle, passeront pour des précurseurs et sembleront avoir travaillé pour l’avènement de la justice… Décidément le rôle de révolutionnaire artiste comporte des plaisirs si distingués qu’on est presque excusable d’y sacrifier un peu de sa conscience.
Il n’y a point de règle pour mesurer ou limiter les emprunts qu’une science peut faire à une autre : cela dépend du tact et du génie des écrivains ; mais il est facile de comprendre qu’un certain excès changerait le caractère d’une science. […] Non-seulement la géologie, mais la zoologie et la botanique entrèrent dans cette voie ; il fut établi que les habitants de la terre, comme la terre elle-même, avaient changé. […] Mais s’il a fallu beaucoup de temps et une attention très-particulière pour s’apercevoir que la nature a changé, il est au contraire une classe d’êtres où le changement est si visible et où le passé joue un rôle si considérable, que l’on a dû être de très-bonne heure frappé d’un fait si éclatant. […] Combien tout est changé aujourd’hui !
Alors une révolution se réduit à changer les individus. […] Cette dernière leçon n’était-elle point due à ceux qui croient que l’on peut changer de dynastie avec la même facilité que l’on ferait un nouveau bail ? […] Ceux-là changent la royauté en un simple mandat. […] La Charte et les éléments de notre système social actuel n’ont point changé.
— La prétention affichée et proclamée par la Presse de devenir le premier journal politique et littéraire est un coup direct porté aux Débats, et un coup dont ce dernier journal aura quelque peine à se relever, s’il ne change d’allure. […] De loin, à nous humbles esprits, il nous semble que, malgré tout, la partie n’est point perdue pour la cause des Lettres honnêtes et sévères, et que ce drapeau si bruyamment déployé par des spéculateurs intrépides peut au contraire servir de signal à tous les esprits modérés et sains, à tous les talents restés sérieux et dignes, pour s’unir, se serrer en groupe, et pour résister à un coup de main qui tend à changer ainsi de fond en comble le régime et les conditions vraies de la littérature.
Lisez, par exemple, cette peinture du pécheur mourant : « Enfin, au milieu de ses tristes efforts, ses yeux se fixent, ses traits changent, son visage se défigure, sa bouche livide s’entrouvre d’elle-même, tout son esprit frémit ; et, par ce dernier effort, son âme s’arrache avec regret de ce corps de boue, et se trouve seule au pied du tribunal redoutable193. » À ce tableau de l’homme impie dans la mort, joignez celui des choses du monde dans le néant. […] Rien ne demeure, tout change, tout s’use, tout s’éteint : Dieu seul demeure toujours le même.
Changez-moi cet Ulysse ; c’est un Ulysse d’osier. […] Laissez votre Andromaque prosternée comme elle l’est, car elle est très bien ; qu’elle saisisse seulement d’une main son fils ou le soldat, comme il vous plaira ; que son autre bras, sa tête, son corps, ses regards, son mouvement, toute son action soient portés vers Ulysse, comme il arrivera, sans y rien changer, lorsque vous aurez écarté ce soldat.
Les personnes qui en avoient jugé autrement que les gens de l’art, et en s’en rapportant au sentiment, s’entrecommuniquent leurs avis, et l’uniformité de leur opinion change en persuasion l’opinion de chaque particulier. […] Mais, comme je l’ai déja dit, la chose n’arrive point, et je ne pense pas qu’on puisse me citer une seule piece françoise rejettée par le public lorsqu’il la vit dans sa nouveauté, laquelle le public ait trouvée bonne dans la suite, et quand les conjonctures qui l’auroient fait tomber auroient été changées.
Il y a même des cas où soit une pratique, soit une institution sociale changent de fonctions sans, pour cela, changer de nature. […] Les dogmes religieux du christianisme n’ont pas changé depuis des siècles ; mais le rôle qu’ils jouent dans nos sociétés modernes n’est plus le même qu’au moyen âge. C’est ainsi encore que les mots servent à exprimer des idées nouvelles sans que leur contexture change. […] Il a été ainsi nécessité à changer de direction. […] L’un cherchera à le changer pour le mettre en harmonie avec ses besoins ; l’autre aimera mieux se changer soi-même et modérer ses désirs, et, pour arriver à un même but, que de voies différentes peuvent être et sont effectivement suivies !
Le monde se changera de lui-même dès qu’on lui aura fait subir tous les changements dont il a besoin pour se changer. […] Changer la nature humaine, ce n’est pas une chimère. […] Mais parce que Quinet, le généralisateur, est toujours le même, quoique ayant changé de voie, et que, s’il a changé de voie, il n’a changé ni d’objet ni de méthode. […] Or, ce qui rend cette synthèse incommode, l’homme change et l’animal ne change pas. […] Il croit changer.
Chacun de ces corps change, en réalité, à tout moment. […] Mais, en réalité, le corps change de forme à tout instant. […] On pouvait atténuer cette conclusion sans changer les prémisses, dire que la réalité change, mais qu’elle ne devrait pas changer. […] Au regard de la science il n’y aura rien de changé. […] C’est le progrès d’une pensée qui change au fur et à mesure qu’elle prend corps.
Mais je ne changerais peut-être pas mon sort pour le vôtre. » Goût de la solitude avec le goût de l’indépendance. […] La Fontaine a un fond qui ne change point, comme nous tous certainement, et ce fond c’est son bon caractère, c’est l’impossibilité où il est de s’irriter, ou de s’irriter longtemps (car je sais bien qu’il s’est irrité à un certain moment contre Lulli, d’une façon féroce ; mais enfin ce n’est qu’un tout petit épisode de sa vie). […] Tu changes tous les jours de manière et de style ; Tu cours en un moment de Térence à Virgile : Aussi rien de parfait n’est sorti de tes mains. […] Un jour il écrivit, Dieu merci, car le renseignement est admirable pour nous, il écrivit ceci à Mme Herwart, touchant La Fontaine : Je voudrais bien le voir aussi Dans ces charmants détours que votre parc enserre, Parler de paix, parler de guerre, Parler de vers, de vin et d’amoureux soucis, Former de vingt projets le plan imaginaire, Changer à sa façon l’ordre de l’univers, Sans douter, proposer mille doutes divers ; Puis tout seul s’écarter, comme il fait d’ordinaire, Non pour rêver à vous qui rêvez tant à lui, Non pour rêver à quelque affaire, Mais pour varier son ennui. […] Je n’aurais pas alors Contre le Louvre et ses trésors, Contre le firmament et sa voûte céleste Changé les bois, changé les lieux Honorés par les pas, éclairés par les yeux De l’aimable et jeune bergère Pour qui, sous le fils de Cythère, Je servais engagé par mes premiers serments.
Elle exprime sereinement, impartialement, le monde et la vie, dans leur commune réalité, sans aspirer à en changer les conditions actuelles. […] La société est faite : ils ne prétendent rien y changer ; mais l’individu, qui vivra dans cette société, est toujours à faire : c’est cet individu à qui tous nos écrivains veulent imposer une forme. […] On copie donc les chefs-d’œuvre du xviie siècle ; on en imite les procédés, on en suit les règles servilement, par préjugé ; le monde, qui a adopté cette littérature faite pour lui, ne permet pas qu’on change rien aux formes qu’elle présente.
Quelquefois, cela s’était vu, on avait employé pour atteindre ce but des moyens contraires, mais le but même n’avait pas changé. […] Mettez par la pensée Louis XIV à la place de Henri IV, et Henri IV à la place de Louis XIV, et vous n’aurez rien changé peut-être à la politique de leur époque, tant il est des logiques de situation qui viennent modifier ces grandes individualités politiques qui sont moins des hommes que des systèmes ! […] Mais, malgré cette justice, malgré le bon goût d’un ouvrage qui n’a pas une déclamation, Weiss n’en travaille pas moins à faire prendre le change sur Louis XIV, quand il accepte si vite comme une faute absolue, comme une faute complète, la révocation de l’Édit de Nantes.
Son talent ne sert plus qu’à édifier ceux qui ont sa foi, mais si la Grâce surnaturelle ne s’en mêle pas, il ne change ou ne modifie ni les convictions opposées à la sienne, ni les scepticismes, ni les incrédulités. […] M. de L’Épinois aurait pu se permettre cette immense peinture et ne pas changer une seule syllabe à son titre ; car le gouvernement des Papes et le gouvernement de l’Église intégrale, c’est tout un. […] Elle s’établissait parce que tout tombait… Les évêques, hommes d’avenir dans un présent qui périssait, acceptèrent la charge des corps comme des âmes… » L’axe du monde était changé.
Changer les figures de côté, mettre à gauche ce qui était à droite, à droite ce qui était à gauche, intervertir l’ordre des groupes, distraire un personnage de la scène ou du milieu dans lequel il était placé pour le placer dans une autre scène et quelquefois sous un autre costume, toutes ces choses, et bien d’autres que j’omets, se font et se sont faites, et la Gloire elle-même y a été prise… La Gloire un peu trop vite venue, fille du sentiment exalté d’une époque, a transformé parfois en grand peintre tel grand archéologue, qui avait assez d’exécution et de rétorsion dans la main pour cacher aux ignorants ses… butins, et c’est le critique d’art qui doit réviser ces méprises de la Gloire. […] Son Nouveau Testament, où ce qu’il y a de plus beau a été inspiré par l’Apocalypse : la Vision de saint Jean, qui rappelle ce qu’il y a de plus grandiose, de plus pathétique et de plus fulgurant dans l’Ancien, son Nouveau Testament n’a guères de touchant que Jésus guérissant les malades, et encore la tête, l’incompréhensible tête de Notre-Seigneur Jésus-Christ pour tous les artistes, et sur laquelle les plus grands n’ont eu que des lueurs, Doré, qui la change chaque fois qu’il la recommence, la manque toujours. […] Toutes ces illustrations, qui serviraient à la renommée de Gustave Doré si cette renommée n’était déjà faite, nous continuent le Doré que nous connaissons, mais ne nous le changent pas, ne nous le transfigurent point, et, puisque nous parlons de la Bible, qu’on nous permette cette image biblique : c’était ici une transfiguration qu’il fallait.
Le fer sous les deux formes, éternelles et sublimes, qui ne changeront jamais, malgré tous les progrès et toutes les civilisations, comme ils disent ! […] Il a sa manière qui ne changera pas. […] II Si cela était possible, du reste, si cette manière qui est le visage de notre pensée et qui nous a été donnée comme notre autre visage pouvait être changée au gré du poète et du penseur, M.
On reconnaît le théoricien qui, pour faire instituer le divorce, n’avait recours qu’à l’Écriture et prétendait changer la constitution civile d’un peuple, en changeant le sens accepté d’un verset. […] La race des vivants a changé. […] En même temps que le style, les sujets se trouvaient changés ; il resserrait et ennoblissait le domaine comme le langage du poëte, et consacrait ses pensées comme ses paroles. […] Changez de style, ou plutôt, si vous le pouvez, changez d’émotion. […] une âme — qui ne sera changée ni par le lieu, ni par le temps !
Le public pensant et l’esprit humain changent, et sous ces deux chocs une littérature nouvelle jaillit. […] En même temps que l’état de la société humaine, la forme de l’esprit humain a changé. […] Tout d’un coup une secousse violente avait changé cet instinct en passion et cette opinion en fanatisme. […] Ils peignent avec un détail infini les costumes et les lieux sans y rien changer. […] Sous leurs efforts multipliés et par leur concert involontaire, l’idée du beau change, et par contagion les autres idées vont changer.
Si nos oreilles avoient été faites comme celles de certains animaux, il auroit fallu réformer bien de nos instrumens de Musique : je sais bien que les rapports que les choses ont entre elles auroient subsiste ; mais le rapport qu’elles ont avec nous ayant changé, les choses qui dans l’état présent font un certain effet sur nous, ne le feroient plus ; & comme la perfection des Arts est de nous présenter les choses telles qu’elles nous fassent le plus de plaisir qu’il est possible, il faudroit qu’il y eût du changement dans les Arts, puisqu’il y en auroit dans la maniere la plus propre à nous donner du plaisir. […] Ainsi ce que nous pourrions dire ici, & tous les préceptes que nous pourrions donner pour former le goût, ne peuvent regarder que le goût acquis, c’est-à-dire ne peuvent regarder directement que ce goût acquis, quoiqu’il regarde encore indirectement le goût naturel : car le goût acquis affecte, change, augmente & diminue le goût naturel, comme le goût naturel affecte, change, augmente & diminue le goût acquis. […] Suétone nous décrit les crimes de Néron avec un sang froid qui nous surprend, en nous faisant presque croire qu’il ne sent point l’horreur de ce qu’il décrit ; il change de ton tout-à-coup & dit : l’univers ayant souffert ce monstre pendant quatorze ans, enfin il l’abandonna : tale monstrum per quatuordecim annos perpessus terrarum orbis tandem destituit. […] L’antithèse d’expression n’est pas cachée, celle d’idées l’est : l’une a toûjours le même habit, l’autre en change comme on veut : l’une est variée, l’autre non.
Y a-t-il quelque chose à changer à tout cela quand nous passons aux échelons suivants ? […] Ce jour-là, il faudrait changer le langage scientifique pour en faire disparaître une grave ambiguïté. […] Là encore nous n’avons rien à changer à nos conclusions. […] Il est vrai qu’au dernier échelon les choses changent. […] S’il m’a donné seulement cette indication brute, ou s’il a fait des corrections contraires aux règles habituelles, il a changé sans me prévenir le langage convenu.
Stéphane Mallarmé a mis en tête de sa traduction des poèmes d’Edgar Poe8 ce sonnet préliminaire : LE TOMBEAU D’EDGAR POE Tel qu’en Lui-même enfin l’éternité le change Le Poète suscite avec un glaive nu Son siècle épouvanté de n’avoir pas connu Que la Mort triomphait dans cette voix étrange Eux comme un vil sursaut d’hydre oyant jadis l’ange Donner un sens plus pur aux mots de la tribu Proclamèrent très haut le sortilège bu Dans le flot sans honneur de quelque noir mélange Du sol et de la nue hostiles ô grief Si notre idée avec ne sculpte un bas-relief Dont la tombe de Poe éblouissante s’orne Calme bloc ici-bas chu d’un désastre obscur Que ce granit du moins montre à jamais sa borne Aux noirs vols du Blasphème épars dans le futur Qu’est-ce que cela veut dire ? […] Il faut, je pense, une virgule après change, un point après étrange, une virgule après eux, une après tribu, un point après mélange, un point d’exclamation après grief, une virgule après s’orne, une après obscur et, j’imagine, un point final.
Cette découverte fit changer de face à la création : par sa partie intellectuelle, c’est-à-dire par cette pensée de Dieu que la nature montre de toutes parts, l’âme reçut abondance de nourriture ; et par la partie matérielle du monde, le corps s’aperçut que tout avait été formé pour lui. […] Quand l’esprit humain fait un pas, il faut que tout marche avec lui ; tout change avec ses clartés ou ses ombres : ainsi il nous fait peine à présent d’admettre de petites divinités, là où nous ne voyons plus que de grands espaces.
Il fallait quatorze siècles pour que le génie latin, après avoir changé de lieu, de religion et de langue, se retrouvât à Rome, à Florence et à Ferrare, sous les Médicis, dans le Dante, dans Pétrarque, dans le Tasse, dans l’Arioste, ces quatre grands ressusciteurs de l’Italie. […] Il y occupait même un emploi officiel et lucratif, équivalant à la fois à celui de percepteur des contributions, d’agent de change et de banquier, trois charges qui alors comme de nos jours donnent l’opulence. […] Caton était le chef de cette école à Rome ; les ennemis et les assassins de César n’étaient que des philosophes qui avaient changé le livre contre le poignard ; Horace brûlait alors de républicanisme par amour pour l’idéal antique des honnêtes gens. […] Le temps ne change pas autant les choses sur la terre qu’on le croit ; il ne change guère que les noms ; deux mille ans, c’est un battement d’ailes dans son vol ; si Horace renaissait, il connaîtrait tout, excepté sa langue et ses dieux. […] Louis XIV élevait quelquefois Racine, Molière et Boileau à sa présence, mais jamais à sa familiarité ; il avait la grandeur d’Auguste, il n’avait pas son esprit ; il laissait toujours la majesté du trône entre le génie et lui ; il semblait craindre que, s’il descendait de sa hauteur, on s’aperçût que le niveau était changé entre ces grands hommes et lui.
C’est donc une affaire finie, le monde est changé ; mais qu’y gagnera-t-il ? […] Il sent bien tout le premier, et il se le dit assez souvent, que les temps sont changés ; il s’avertit de ne pas faire le prophète, de se contenter de dire : Nous verrons : « Depuis vingt ans, je vois les empires tomber les uns sur les autres sans se douter seulement de ce qu’il faudrait faire pour se sauver. […] ) — Sur l’esprit européen, si entreprenant, par contraste avec l’esprit asiatique : L’homme européen ; le fils de Japhet (audax Iapeti genus) veut changer, même sans profit. […] Au lieu de l’enfant miraculeux, on aura l’éternel vieillard, l’antique monde patriarcal soudainement réintégré ; il y compte ; c’est là le coin mystique : « Il viendra un moment, dont la date seule est douteuse, qui changera tout en un instant. » Après tout, il n’y a pas trop d’hommes qui soient tout d’une pièce, surtout en ces époques de révolutions qui brisent souvent les meilleurs en plusieurs morceaux.
Mais ces formules, développées et complétées par d’abondantes dissertations, sont exactes : du moins elles doivent l’être, car je ne vois pas que nos écrivains y aient beaucoup changé depuis quatre-vingts ans. […] Ses amis lui insinuent leurs convictions : elle en change, quand ils se renouvellent. […] Toute son âme s’intéresse dans sa croyance, et la crise d’où elle soit « convertie » l’achève plutôt qu’elle ne la change. […] D’autres affirment que les règles dramatiques ont été définitivement arrêtées dans telle année, et que le génie qui voudrait maintenant y changer quelque chose a tort de n’être pas né avant cette année sans appel, où l’on a terminé toutes les discussions littéraires passées, présentes et futures.
Dans ce moment, même, qu’ils daignent, je les en prie, ne pas prendre ou donner le change sur ma pensée : je ne viens pas ici conseiller d’épouser le pouvoir, mais simplement de ne pas le nier avec obstination, de ne pas bouder la société qui l’a ratifié, le fond et le vrai de la société de notre temps. […] Mais plutôt mettez votre honneur et votre supériorité à n’avoir ni dépit ni colère, à garder de vos idées ce que vous en croyez juste et durable, sauf à les confronter perpétuellement avec l’état de la société, à les corriger sans cesse par l’observation de ce monde qui marche et qui change, et qui de nos jours tourne si vite à l’indifférence du passé. […] Combien il est changé ! […] Il y a des années que je ne suis guère accoutumé à le flatter ; pourtant, depuis qu’il a perdu le pouvoir sans en avoir fait l’usage qu’il pouvait, et bien qu’il en gémisse tout bas peut-être, il n’en laisse rien percer dans ses écrits ; il produit avec l’abondance qu’on sait, mais sans amertume, sans y mêler de ressentiment personnel, et sans s’écrier à toute heure que les temps sont changés, que le monde va de mal en pis.
Il aimait les grands seigneurs, il aimait les rois ; il voulait éclairer la société plutôt que la changer. […] L’écrivain qui ne cherche que dans l’immuable nature de l’homme, dans la pensée et le sentiment, ce qui doit éclairer les esprits de tous les siècles, est indépendant des événements ; ils ne changeront jamais rien à l’ordre des vérités que cet écrivain développe. […] Dans les pays où le talent peut changer le sort des empires, le talent s’accroît par l’objet qu’il se propose : un si noble but inspire des écrits éloquents par le même mouvement qui rend susceptible d’actions courageuses.
J’ai donc changé plusieurs noms propres. […] Je n’ai rien changé cependant à ma rédaction première, pensant qu’il valait mieux laisser à M. […] Mais le vrai a une grande force, quand il est libre ; le vrai dure ; le faux change sans cesse et tombe.
III Et d’ailleurs, dans le livre de Fournier, j’ai cherché vainement les scandales non prouvés, les crimes sans authenticité dont il se vante, c’est-à-dire, en définitive, les grandes choses qui changent l’aspect des annales du monde et importent à la morale des nations parce que ces mensonges-là sont des oppressions et des injustices, et à cela près de deux ou trois faits remis sur la pierre du lavoir et sous le battoir, comme, par exemple, l’arquebusade de Charles IX, par cette fenêtre équivoque, le jour de la Saint-Barthélemy, — ce qui ne blanchit pas beaucoup, du reste, la mémoire tachée de sang de cet insensé du fait de sa mère, — je ne vois guères que des faits de très peu d’importance et je comprends mieux le sous-titre de ce livre de l’Esprit dans l’histoire : L’Esprit dans l’histoire, ou recherches et curiosités sur les mots historiques. […] Prenez, par exemple, la lettre d’Henri IV à Crillon, la lettre qui dit : « Pends-toi, brave Crillon, nous avons combattu à Arques, etc. » ; et lisez « Pendez-vous, brave Crillon, de n’avoir pas été ici près de moi, lundi dernier, à la plus belle occasion qui se soit jamais vue, etc. » ; puis un délayage de six lignes qui ne change rien au fond des choses, mais qui emporte cette adorable forme du laconisme et du tutoiement ! […] la critique ordinaire de Fournier, qui ne change qu’un grain de sable, — un infiniment petit, — une date obscure, — l’obole d’un détail, — dans une vie éclatante ou dans une immense destinée, et qui souffle et halète de ce prodigieux changement introduit par lui dans l’histoire, comme un Hercule éreinté !
Alfred, en Angleterre, vers la fin du neuvième siècle, fut lui-même grammairien, un peu philosophe, dit-on, historien et géomètre ; c’était beaucoup pour un roi, et surtout dans ce temps ; mais il étonna son pays, et ne le changea pas. […] Rome, l’empire, tout avait été bouleversé ; tout avait changé ou péri : mais il restait encore une telle idée de la grandeur romaine, qu’on ne s’occupa, chez tous les peuples, qu’à faire revivre les lois, les arts, les monuments et la langue du peuple-roi qui n’était plus. […] On sait que de son vivant même elle trouva des censeurs ; les femmes, en France, lui reprochèrent de n’avoir point les manières et les agréments de son sexe ; les protestants, d’avoir changé de religion ; les politiques, d’avoir quitté un trône ; tous ceux qui avaient quelque humanité, d’avoir pu croire que sa qualité de reine pût autoriser un assassinat : mais elle fut l’objet éternel des hommages des savants et des gens de lettres.
À part les révolutions de palais qui interrompaient le cours régulier de cet ordre de choses et en changeaient les principaux personnages, en dehors de ces accidents naturels et de ces sinistres compensations du pouvoir absolu, il y avait, durant toute cette époque dont votre théorie préconise la salutaire immobilité, il y avait alors sans cesse la plus active rébellion du sentiment moral, le plus ardent foyer pour les intelligences et les cœurs. […] Non : les mœurs changent, les formes politiques s’altèrent, les langues se détruisent, et la transplantation des races peut accroître et hâter toutes ces mutations inévitables ; mais l’âme humaine, avec ses points divers et ses touches sonores de sensibilité, de jugement et d’imagination, ne change pas, ne dégénère pas, ne perd aucune des conditions de sa puissance.
On cessera de louer en lui ce titre de novateur qui a fait sa première gloire, et on regrettera même de l’avoir vu appliquer les efforts de sa muse à changer les détails d’une langue poétique fixée par l’autorité d’un grand siècle. […] L’approche de la mort, qui attendait le poète à la porte de sa prison sur l’échafaud, avait changé le diapason de ce jeune Grec en diapason moderne.
Quand les corps deviennent plus foibles et plus sensibles aux injures de l’air, il s’ensuit qu’un peuple doive changer quelque chose dans ses moeurs et dans ses coutumes, ainsi qu’il le feroit si le climat étoit changé.
Cependant, comme à Saint-Sulpice rien ne change, les anciennes dénominations restèrent. […] Vers 1840, tout cela changea. […] Rien ne fut changé au petit pavillon de la reine ; on y ajouta de longues ailes et on retoucha légèrement les peintures. […] J’allai à Saint-Sulpice, j’appris l’allemand et l’hébreu ; cela changea tout. […] Je pense que, depuis, rien n’a changé.
Et, d’un autre côté, que les Grecs eussent à jamais été asservis par leurs vainqueurs, comme on le supposait généralement en Europe avant 1821, qu’il n’eût plus existé en Turquie que des Turcs, rien, depuis le commencement du siècle, n’aurait changé dans les affaires du continent ni surtout dans les destinées de Bonaparte. […] Mais déjà il en avait changé ; l’Égypte paraissait à son ambition une plus belle arène.
Lorsque le systême de l’Europe vient à changer, on fait un nouveau livre, et on substituë la puissance qui est devenuë redoutable à l’état à la place de celle qu’il a cessé de craindre. […] L’amour de soi-même qui se change presque toujours en amour propre immoderé à mesure que les hommes avancent en âge, les rend trop attachez à leurs interêts presens et à venir, et trop durs envers les autres, lorsqu’ils prennent leur resolution de sens rassis.
Un malentendu, un oubli, une mauvaise humeur peut changer ses sentiments à notre égard ; et combien sur un pareil sujet les moindres reproches qu’on se fait à soi-même ne doivent-ils pas être douloureux ! […] Il me semble que je suis changée, que le monde est changé, que j’ai d’autres espérances et d’autres craintes, qui, excepté toi et mon père, me rendent indifférente sur tout ce qui m’a intéressée jusqu’ici, et qui, en revanche, m’ont rendu intéressantes des choses que je ne regardais point ou que je faisais machinalement. […] Mais il me semble que ce doit être en bien, quand j’aurais moi-même changé en mal. […] Qu’on le veuille ou non, on change, on s’instruit, on devient responsable de ses actions. […] Mlle de La Prise, depuis ce moment, a quelque chose de changé dans ses manières ; toujours aussi naturelle, mais moins gaie, et, aux yeux de Meyer, plus imposante.
Le temps change bien des choses. […] « Notre Cayla est bien changé et change tous les jours. […] Cela se fait souvent. » XVI La saison change. […] Aujourd’hui j’en ferais comme elle, je ne trouve pas cette prière si étrange : tant le cœur change l’esprit ! […] Je pense que mes nuits et mes jours seront changés, et je n’y puis penser sans peine.
Moi, le triste instinct m’y ramène : Rien n’a changé là que le temps ; Des lieux où notre œil se promène, Rien n’a fui que les habitants. […] Du foyer proscrit volontaire, Qu’il cherche en vain sur cette terre Un père au visage attendri ; Que tout foyer lui soit de glace, Et qu’il change à jamais de place Sans qu’aucun lieu lui jette un cri ! […] Les arbres et les murs, oui ; cela ne change pas de place ; mais les hommes, non : cela va, cela vient, aujourd’hui ici, demain là ; cela court comme de l’eau, cela change comme le vent ; à moins de les voir, on ne sait pas à qui l’on parle, et je ne les vois plus. […] père Dutemps », lui dis-je, « cela prouve que ma voix a bien changé, comme mon visage ; car vous l’avez entendue bien souvent sous le vieux sorbier de votre cour, quand nous ramassions au pied de l’arbre les sorbes que la Madeleine votre femme faisait mûrir sur la paille, ou quand je rappelais les chiens courants de mon père au bord du grand bois, au-dessus de votre champ de blé noir. » Il renversa sa tête en arrière, ôta son bonnet, d’où roulèrent sur ses joues des écheveaux de cheveux blancs et fins comme une toison, et il recula machinalement en arrière, à deux pas. […] Dieu est Dieu ; les prés, les terres et les maisons sont à lui, et il les change de maître quand il veut !
Car la formule est fixe depuis une vingtaine de siècles, mais tous les siècles le sentiment change ; saint Bernard dogmatisait à peu près comme Bossuet ; mais les bourgeois du moyen âge, qui se battaient pour avoir un bras de saint Martin, n’avaient pas la même piété que les « honnêtes gens » de Versailles. Au fond, tel monde, telle idée de Dieu ; de sorte que l’idée de Dieu change avec les changements du monde. […] Ajoutez que les habits et les physionomies humaines ont changé depuis Homère, tandis que les bêtes sont les mêmes.
Bourdaloue fait ici des merveilles ; la duchesse et moi nous le voyons tous les jours. » Cette lettre est un exemple de ces entretiens où madame de Maintenon, sans malice, et peut-être en prenant le change sur elle-même, mue par un double instinct d’amour et d’honnêteté, se joue de l’esprit grossier de son directeur, lui présente comme des griefs contre la cour, l’intérêt qui l’y attache, et comme dépit contre le roi, l’amour qu’il ressent et celui qu’il inspire, et se fait ordonner comme un sacrifice méritoire, de rester à sa cour. […] « Je ne sais si vous êtes content de cet établissement » (de cette dot pour mon établissement) ; « pour moi je le suis, et je changerai bien de sentiment si jamais je leur demande un sou. […] Je ne change point sur l’envie de me retirer.
Mais Chamfort ne prenait pas le change sur la nature de cet empressement. […] Étonné de vivre et résolu de mourir, il saisit un rasoir, essaie de se couper la gorge, y revient à plusieurs reprises, et se met les chairs en lambeaux ; l’impuissance de sa main ne change rien aux résolutions de son âme ; il se porte plusieurs coups vers le cœur, et commençant à défaillir, il tâche par un dernier effort de se couper les deux jarrets, et de s’ouvrir les veines. […] La vivacité de son esprit, le sel de ses réparties, une certaine causticité naturelle, qui fait trop souvent suspecter la bonté du caractère, une invincible aversion pour la sottise confiante, et l’impossibilité absolue de déguiser ce sentiment, inspirèrent à beaucoup de gens une sorte de crainte qu’il prenait trop peu de soin de dissiper, et qui, pour l’ordinaire, se change facilement en haine.
C’était nouveau, c’était original, c’était intéressant, c’était vrai, et si réussi qu’en rééditant ce livre pas un mot n’y a été changé. […] L’Empire avait des raisons d’être intimes et profondes… Il était le développement définitif, et auquel la République avait travaillé, d’une loi plus haute que les ambitions et plus impérieuse que les volontés humaines, à savoir : que toute victoire pour Rome s’était changée en nécessité de gouverner les peuples conquis, et que cette nécessité de gouverner le monde méditerranéen avait fini, en grandissant les vices de l’élection, par la rendre complètement impossible. — Le travail de Champagny nous semblait digne de cette imposante conclusion. […] Sans doute, en nous décrivant la famille romaine que le Christianisme sanctifia, mais ne changea pas, il nous a montré le lien qui existe entre nous et Rome, le rapport qui n’existe pas entre nous et la Grèce ; mais il l’aurait marqué davantage s’il avait vu que la famille romaine, analogue à la famille moderne, devait nécessairement et inévitablement aboutir à l’institution impériale.
Il changea les conditions du roman comme Napoléon avait changé les conditions de la guerre, et, chose saisissante d’analogie ! […] Or, quand on est un de ces génies assez puissants pour changer une poétique qui régnait jusque-là, que ce soit celle du roman ou de la guerre, il se passe des générations d’hommes qui appliquent cette poétique nouvelle et en vivent, spirituellement, jusqu’au jour clairsemé, et qui se fait longtemps attendre, où arrive encore un homme de génie, avec une autre poétique, qui bouleverse tout et renouvelle tout à son tour.
Soit pitié, soit amitié, on m’a promis de ne me pas fuir et de ne rien changer à notre façon de vivre. […] Sa sensibilité aussi s’est usée à attendre, à souffrir ; le pli est pris : pourquoi changer ? […] Il renvoyait une lettre de change, mais sans trop de colère. […] N’étant pas, quant à présent, dans ce cas, je vous envoie ci-jointe la lettre de change, en attendant le moment de m’en prévaloir. […] Il n’est que de vivre et de durer un peu longtemps pour que toutes les variétés et les oppositions se produisent dans ce grand drame historique bigarré qui change sans cesse et qui lui-même se reflète en mille faces dans l’existence d’un chacun.
Si ce point prenait conscience de lui-même, il se sentirait changer, puisqu’il se meut : il apercevrait une succession ; mais cette succession revêtirait-elle pour lui la forme d’une ligne ? […] Pourtant je donne encore le même nom à la sensation éprouvée, et je parle comme si, le parfum et la saveur étant demeurés identiques, mes goûts seuls avaient changé. […] Ce qu’il faut dire, c’est que toute sensation se modifie en se répétant, et que si elle ne me paraît pas changer du jour au lendemain, c’est parce que je l’aperçois maintenant à travers l’objet qui en est cause, à travers le mot qui la traduit. […] Le sentiment lui-même est un être qui vit, qui se développe, qui change par conséquent sans cesse ; sinon, on ne comprendrait pas qu’il nous acheminât peu à peu à une résolution : notre résolution serait immédiatement prise. […] Toutefois, nous n’avons rien trouvé à changer aux pages qu’on va lire, parce que M.
Un siècle après Massillon, les choses avaient bien changé : ce n’était plus la seule corruption des mœurs que l’orateur chrétien avait en face de lui comme ennemi principal, c’était l’incrédulité raisonnée, établie, et qui avait fait son chemin, même parmi les honnêtes gens. […] « Et que nous importe de vous plaire, si nous ne vous changeons pas ? […] » Acceptant hardiment l’éloge et en tirant sujet de s’humilier : Dieu, dit-il, ne retire plus ses prophètes du milieu des villes, mais il leur ôte, si j’ose parler ainsi, la force et la vertu de leur ministère ; il frappe ces nuées saintes d’aridité et de sécheresse : il vous en suscite qui vous rendent la vérité belle, mais qui ne vous la rendent pas aimable ; qui vous plaisent, mais qui ne vous convertissent pas : il laisse affaiblir dans nos bouches les saintes terreurs de sa doctrine ; il ne tire plus des trésors de sa miséricorde de ces hommes extraordinaires suscités autrefois dans les siècles de nos pères, qui renouvelaient les villes et les royaumes, qui entraînaient les grands et le peuple, qui changeaient les palais des rois en des maisons de pénitence… Et faisant allusion à d’humbles missionnaires qui, durant ce même temps, produisaient plus de fruit dans les campagnes : « Nous discourons, disait-il, et ils convertissent. » J’ai cité, d’après la tradition, quelques-unes des conversions soudaines opérées par l’éloquence de Massillon : pourtant, sans nier les deux ou trois cas que l’on cite, je vois que Massillon croyait peu à ces sortes de conversions par coup de tonnerre, « à ces miracles soudains qui, dans un clin d’œil, changent la face des choses, qui plantent, qui arrachent, qui détruisent, qui édifient du premier coup… Abus, mon cher Auditeur, disait-il ; la conversion est d’ordinaire un miracle lent, tardif, le fruit des soins, des troubles, des frayeurs et des inquiétudes amères ».
Vous avez souvent des conversations avec un homme qui est au fait, quoiqu’il soit éloigné du cabinet, et que les idées de ce cabinet puissent changer d’un jour à l’autre. […] Je ne précipiterai rien, mais aussi me sera-t-il impossible de changer de sentiments… Je suis très résolu de lutter encore contre l’infortune ; mais en même temps suis-je aussi résolu de ne pas signer ma honte et l’opprobre de ma maison… Quant à vous, mon incomparable sœur, je n’ai pas le cœur de vous détourner de vos résolutions. […] Dans cette extrémité, tandis que Frédéric raisonnait de sa situation en homme qui avait lu et médité le chapitre XIIe De la grandeur et de la décadence des Romains, et qu’il prétendait usurper le droit le plus ambitieux pour un mortel, celui de finir la pièce où il était acteur en ce monde à l’endroit où il le voulait, les choses subitement changèrent, et un souffle léger de la fortune vint rendre vaines ces altières réminiscences de Caton. […] On me porte depuis huit jours sur une chaise et sur un char roulant, pour me faire un peu changer d’attitude.
Napoléon revenu de l’île d’Elbe inaugure ce nouvel empire si rapide et si court qui peut s’intituler l’Empire constitutionnel : il change de système, il modifie profondément sa manière de gouverner, il introduit dans les Constitutions de l’Empire ce fameux Acte additionnel dont Benjamin Constant est le principal rédacteur, reconnaissable à la parfaite clarté et à l’élégance ; dont Sismondi, alors à Paris, se fait l’avocat et le défenseur officieux dans le Moniteur, et qui est destiné à donner satisfaction au parti libéral, à tous les patriotes ralliés. […] Oui, mais la position des puissances et la nôtre sont bien changées. […] Qu’y a-t-il de changé ? […] Il désire, il veut la Paix de Paris ; quoiqu’il ne l’eût jamais signée, il n’y changera pas une virgule, afin qu’elle soit toujours la paix des Bourbons.
Tout le monde alors dans les finances faisait des affaires ; le tort de Fouquet fut d’en faire plus qu’un autre, avec profusion, avec scandale, et de ne pas s’apercevoir que le moment était venu où il fallait changer de méthode et compter avec le maître. […] Ici la scène change. […] Que serait-ce si elle voyait encore cet infortuné même, à peine connaissable, mais moins changé et moins abattu de la longueur de sa maladie et de la dureté de sa prison que du regret d’avoir pu déplaire à Votre Majesté, et qu’il lui dît : « Sire, j’ai failli, si Votre Majesté le veut ; je mérite toute sorte de supplices ; je ne me plains point de la colère de Votre Majesté : souffrez seulement que je me plaigne de ses bontés. […] Louis XIV, par une suite de rigueurs qui doivent enfin paraître excessives, jugea à propos de commuer plus sévèrement la peine, et de changer le bannissement en une prison perpétuelle.
Dans ce statu quo de l’Ancien Régime, Portalis va jusqu’à penser qu’une législation uniforme, qui peut convenir à une cité et à un gouvernement de peu d’étendue, ne saurait s’appliquer dans la pratique à un grand État, composé de peuples divers, ayant des besoins et des caractères différents, des lois fondamentales antérieures, des capitulations et des traités « que les souverains sont dans l’heureuse impuissance de changer ». […] Tant il est vrai qu’à chacun appartient sa tâche et son rôle ; celui de Portalis était de ne point innover en détruisant : « Le mal de détruire, disait-il, est infiniment plus grand que celui de souffrir. » — « Il est plus dangereux de changer, disait-il encore, qu’il n’est incommode de souffrir. » Mais la destruction faite, et quand la violence aveugle ne régnait plus, il arrivait, il se levait avec calme, il trouvait des paroles de douceur, d’équité, de renaissance et presque de convalescence sociale, et il excellait à infuser quelque chose de la moralité ancienne dans le fait nouveau. […] Portalis faisait de cette affreuse époque de la veille un tableau vrai, avec des traits tirés de Tacite ; il ajoutait avec une observation fine qui n’était qu’à lui : On poursuivait les talents, on redoutait la science, on bannissait les arts ; la fortune, l’éducation, les qualités aimables, les manières douces, un tour heureux de physionomie, les grâces du corps, la culture de l’esprit, tous les dons de la nature, étaient autant de causes infaillibles de proscription… Par un genre d’hypocrisie inconnu jusqu’à nos jours, des hommes qui n’étaient pas vicieux se croyaient obligés de le paraître… On craignait même d’être soi ; on changeait de nom ; on se déguisait sous des costumes grossiers et dégoûtants ; chacun redoutait de se ressembler à lui-même. […] Après avoir traité la question dans sa généralité, il arrivait au fond même, et il ne craignait pas de dire le secret des cœurs : « Les prêtres non assermentés sont, dit-on, violemment soupçonnés de n’avoir jamais aimé la Révolution. » Et en ne les justifiant qu’autant qu’il le fallait pour rester dans le vrai, il maintenait que le cours des pensées est libre et doit être ménagé tant qu’il ne se traduit point en actes coupables : « Quand il s’opère une grande révolution dans un État, il n’est pas possible que tous les membres de cet État changent d’habitudes, de mœurs et de manières dans un instant.
Si la discussion était interrompue par l’arrivée d’un message du Conseil des Cinq-Cents ou du Directoire, il suffisait que je lui en fisse tout bas la lecture une seule fois pour qu’il répétât tout haut, en s’adressant à l’Assemblée, la résolution tout entière, quelque nombreux qu’en fussent les articles, sans en déranger la série, sans changer aucune expression. […] Il a dans la mémoire quantité de maximes, de définitions, des parties tout écrites de science et de morale sociale, des paragraphes entiers qu’il reprend et qu’il replace à l’occasion sans presque y rien changer. […] Pendant qu’on changeait de chevaux à Osnabrück, un voyageur qui venait de France, et qui se trouvait par hasard au même relais, se présenta à eux, et, dès qu’il l’aperçut, se jeta dans les bras de Portalis. […] Toute superstition, toute routine a disparu : « Il faut changer, dit Portalis, quand la plus funeste de toutes les innovations serait de ne point innover. » Mais en même temps quel souci du passé et du présent !
Ce goût pour l’abstraction a persuadé à M. de Biran de transformer en substances les forces, simples qualités ou rapports abstraits, de considérer la volonté comme l’âme, de changer l’étendue en une apparence, et de ressusciter les monades de Leibnitz. […] Personne ne se scandalisa en voyant M. de Chateaubriand recommander le christianisme à titre d’agréable, changer Dieu en tapissier décorateur, et répondre à la géologie nouvelle que le monde fut créé vieux. […] Ailleurs il déduisait de ses théories morales le gouvernement constitutionnel et la charte : tactique excellente, qui faisait du système un parti, reportait sur lui la faveur et l’intérêt mérités par les opinions libérales, et devait au jour du triomphe le changer en philosophie de l’État. […] L’analyse systématique et universelle, inconnue à Voltaire, a changé la foule éparse des événements en un corps de lois fixes, et M.
Pour les en tirer, on essaierait vainement de changer l’ordre des choses. […] Ainsi il n’a rien changé dans le fond des choses, il n’a élevé qu’une querelle de mots. […] Il lui semble courageux de ne point changer de pensée, malgré tout ce fracas imaginaire des événements. […] En effet, cet esprit public tendait de plus en plus au changement, sans trop savoir ce qui devait être changé. […] Le parlement d’Angleterre désespère de voir la nation heureuse sous la domination des Stuarts, il change la dynastie.
Moréas, ayant changé de manière, répudie ces primitives œuvres, je n’insisterai pas. […] Mais un si funeste hasard ne change rien à des sentiments que je nourris depuis plusieurs années : aujourd’hui comme hier, M.
Il a changé ces vers en ceux-ci : Heureux si ses discours craints du chaste lecteur Ne se sentaient des lieux que fréquentait l’auteur. Dans Le Malade imaginaire, de Molière, le malade disait à un apothicaire : « Allez, monsieur, on voit bien que vous avez coutume de ne parler qu’à des culs. » À la représentation suivante, il changea ainsi ce passage : « On voit bien que vous n’avez pas coutume de parler à des visages. » P.
C’est que la graisse et les boyaux se changeaient tous les matins en deux jeunes filles qui lui faisaient son ménage. […] Quand ils furent au bord du fleuve, le roi se changea en hippopotame et plongea à la recherche de Takisé.
Il vaut encore mieux cependant que ce qui l’entoure. » Il a conscience dès lors de son incompatibilité, s’il fonde quelque chose, et du rôle qu’il doit tenir et qui ne peut être celui d’auxiliaire et de second : « Si nous faisons un ouvrage périodique, je suis convaincu qu’il faut que nous en soyons absolument les maîtres, et par conséquent les seuls rédacteurs. » On voit donc qu’avec des idées toutes contraires il a déjà le même caractère qu’il conservera jusqu’à la fin : c’est qu’on peut changer ses opinions et les retourner du tout au tout, on ne change pas son caractère. […] Il faisait oratoirement comme on fait en mathématiques : la formule restant la même, il avait simplement renversé le signe ; il n’y avait de changé que la direction. […] Écoutez-moi, je ne le perdrai pas de vue un instant, et nos respectables dames auront soin de sa délicate santé. » Mais le ton change : la teinte va se rembrunir. […] J’aime mieux M. de Bonald, chêne vigoureux qui va chercher sa sève à travers les rocs primitifs, jusque dans les entrailles de la terre. » Il changea probablement d’avis sur M. de Bonald avec les années 124 ; mais peu importe, l’image reste belle.
Ce n’est que le 13 août, à l’annonce des promotions pour le 15, et en se voyant exclu, qu’il prit le parti suprême, le parti désespéré de changer d’aigles et de passer son Rubicon. […] La scène a changé. […] Le jour même de la bataille, sans avoir autorité pour rien, mais sur la simple vue des choses et après une reconnaissance qu’il avait faite de son côté comme Moreau du sien, Jomini ouvrit un seul avis, qui était de prendre toutes les masses accumulées au centre, de leur faire changer de front pour les faire tomber de concert avec la droite sur la gauche de Napoléon, qui s’aventurait vers Grima et Reick entre l’Elbe et une masse de forces supérieures. […] Cependant il avait rédigé une notice à l’adresse de l’empereur Alexandre pour démontrer l’urgence de faire changer de rôle à l’armée de Silésie commandée par Blucher, qu’il aurait voulu voir rappeler vers Dresde. […] Après ces journées de Leipsick, lui, l’homme de l’art, il pouvait bien se répéter au sens militaire le mot célèbre que le chancelier Oxenstiern avait dit autrefois au sens politique : « Avec combien peu d’habileté et de sagesse sont donc conduites ces grandes armées qui demeurent pourtant victorieuses et qui changent la face du monde !
Il est triste, quand on s’endort dans une bergerie, de trouver à son réveil les moutons changés en loups ; et cependant, en cas de révolution, on peut s’y attendre. […] Le peuple est souverain, et le gouvernement n’est que son commis, moins que son commis, son domestique. — Entre eux « point de contrat » indéfini ou au moins durable, « et qui ne puisse être annulé que par un consentement mutuel ou par l’infidélité d’une des deux parties ». — « Il est contre la nature du corps politique que le souverain s’impose une loi qu’il ne puisse jamais enfreindre. » — Point de charte consacrée et inviolable « qui enchaîne un peuple aux formes de constitution une fois établies ». — « Le droit de les changer est la première garantie de tous les autres. » — « Il n’y a pas, il ne peut y avoir aucune loi fondamentale obligatoire pour le corps du peuple, pas même le contrat social. » — C’est par usurpation et mensonge qu’un prince, une assemblée, des magistrats se disent les représentants du peuple. « La souveraineté ne peut être représentée, par la même raison qu’elle ne peut être aliénée… À l’instant qu’un peuple se donne des représentants, il n’est plus libre, il n’est plus… Le peuple anglais pense être libre, il se trompe fort ; il ne l’est que durant l’élection des membres du Parlement ; sitôt qu’ils sont élus, il est esclave, il n’est rien… Les députés du peuple ne sont donc ni ne peuvent être ses représentants ; ils ne sont que ses commissaires, ils ne peuvent rien conclure définitivement. […] Cela posé, suivons les conséquences. — En premier lieu, je ne suis propriétaire de mon bien que par tolérance et de seconde main ; car, par le contrat social, je l’ai aliéné442, « il fait maintenant partie du bien public » ; si en ce moment j’en conserve l’usage, c’est par une concession de l’État qui m’en fait le « dépositaire ». — Et ne dites pas que cette grâce soit une restitution. « Loin qu’en acceptant les biens des particuliers, la société les en dépouille, elle ne fait que changer l’usurpation en véritable droit, la jouissance en propriété. » Avant le contrat social, j’étais possesseur, non de droit, mais de fait, et même injustement si ma part était large ; car « tout homme a naturellement droit à tout ce qui lui est nécessaire » ; et je volais les autres hommes de tout ce que je possédais au-delà de ma subsistance. […] Je n’ai pas le droit d’élever mes enfants chez moi et de la façon qui me semble bonne. « Comme on ne laisse pas la raison445 de chaque homme unique arbitre de ses devoirs, on doit d’autant moins abandonner aux lumières et aux préjugés des pères l’éducation des enfants, qu’elle importe à l’État encore plus qu’aux pères. » — « Si l’autorité publique, en prenant la place des pères et en se chargeant de cette importante fonction, acquiert leurs droits en remplissant leurs devoirs, ils ont d’autant moins de sujet de s’en plaindre qu’à cet égard ils ne font proprement que changer de nom et qu’ils auront en commun, sous le nom de citoyens, la même autorité sur leurs enfants qu’ils exerçaient séparément sous le nom de pères. […] Dès la première année, Grégoire dira à la tribune de l’Assemblée constituante : « Nous pourrions, si nous le voulions, changer la religion, mais nous ne le voulons pas. » Un peu plus tard, on le voudra, on le fera, on établira celle d’Holbach, puis celle de Rousseau, et l’on osera bien davantage.
Alors nous allons changer de place. — Venez ici, messieurs. […] Il aime sa tristesse, et ne voudrait pas la changer contre la joie. […] Un sylphe touche de la racine magique les yeux du jeune homme, et change son cœur. […] La fleur magique le change à son tour : c’est maintenant Héléna qu’il aime. […] She must change for youth.
………………………………………………… Comment en un plomb vil l’or pur s’est-il changé ? […] Qui changera mes yeux en deux sources de larmes, Pour pleurer ton malheur ?
Mais, dites-vous, ce labeur d’épithètes, cet effort d’originalité, de couleur, d’images, de diction, d’antithèse, altèrent votre pensée, changent ce que vous vouliez dire ? […] Je change mes idées ?
Observons d’ailleurs à quel point la technique des images a changé depuis le romantisme et le Parnasse. […] Hercule changé en hirondelle, ce mythe existe-t-il ? […] Je suis l’être qui change. […] Car l’être pris en soi serait, comme pour l’Eleate, ce qui ne change pas, ou ce qui ne change plus. Et cet être immuable je l’élimine, je le déclasse par ma seule présence, puisque je suis ce qui change, puisque, quand je ne changerai plus, quand je serai rendu à l’A = A de l’identité, rentré dans le jeu de ces tombes et de cette mer, je ne serai plus.
L’instant d’après, elle s’en échappe à plat ventre, — à quatre pattes, c’est le mot — abattue et vautrée à terre par l’effroi, comme une vieille brebis fuyant du bercail changé en antre pendant son absence. — « Je me traîne sur les mains, n’ayant plus de jambes. […] Quelque chose de sa sublimité et de sa vertu entre dans la Sophia byzantine, et lorsque la Panagie lui succède dans son temple changé en église, Pallas Parthénos semble, avec elle, y régner encore. […] Le caractère des Euménides n’est pas moins changé que leur forme. […] La conversion des Érynnies, changées en Euménides, figure, dans un symbole saisissant, le progrès des religions amendées par l’homme. […] Ne veux-je pas plutôt qu’il change de voie et qu’il vive ?
Et Balzac le sait si bien que, dans son livre, il évoque l’image de Brummell, et met sous l’autorité de son nom bien des aperçus et bien des axiomes, — ce qui, pour le dire en passant, change l’erreur en contradiction. […] Et je dis actuel, parce que cet esprit exubérant changera plus d’une fois sa voie avant de découvrir celle dans laquelle il devra rester. […] Lévy n’ont fait précéder d’aucun avant-propos qui justifie la conception quelconque, s’il y en a une, et il doit y en avoir une, d’après laquelle ils se sont permis de changer l’ordre de La Comédie humaine de l’édition de Furne. Ces volumes, typographiquement assez bien exécutés, autant du moins que le permet l’abaissement général et honteux de la confection matérielle du livre moderne, ont, en effet, dans la distribution qu’ils ont changée des romans composant l’Œuvre de Balzac, renversé l’ordre établi par lui-même, c’est-à-dire toute son architecture ; car c’était un architecte que Balzac dans sa Comédie humaine ! […] L’homme, le cerveau de l’homme, les développements successifs de ce cerveau, intéressent peut-être encore plus les lecteurs que ses ouvrages, et c’est pourquoi il n’est jamais permis de rien changer à l’ordre chronologique des œuvres d’un homme ; car le temps est l’accoucheur de la pensée !
M. de Luynes, l’honnête homme circonspect, en recherche les raisons un peu mollement : « Dans le commencement que la reine est arrivée ici, dit-il, il y avait assez lieu d’espérer que l’indifférence du roi trop connue pour elle pourrait peut-être changer. […] Depuis le séjour de Metz, les choses paraissent bien changées, et le froid est aussi grand que jamais ; soit que les conversations trop vives et trop fréquentes de la reine avec M. le Dauphin en sa présence lui aient déplu ; soit que ce soit l’effet des sentiments qu’il avait pour elle depuis longtemps et que l’on avait cherché à entretenir et à augmenter ; soit enfin que la mauvaise humeur du roi en soit la seule cause : peut-être toutes ces raisons ensemble y contribuent-elles. » M. de Luynes ne soupçonne pas ou fait semblant d’oublier la vraie raison. […] La dame d’honneur en était si dévotement persuadée qu’un jour, trouvant le roi en état de donner à la reine des marques certaines d’une réconciliation sincère, elle fit changer le lit de la reine en une couche nuptiale et mettre deux oreillers sur le traversin. […] C’en était assez pour déterminer ces dames à changer leur toilette.
Necker tout à fait changé, et le ministre, désavouant tacitement ce qui n’était plus sa pensée, s’abstint de paraître à la séance du 23 juin. […] Quand Mirabeau sut que la reine avait eu de lui cette pensée, il changea de visage. […] La Marck dit qu’il ne doute pas que Mirabeau a cru bien faire en parlant ainsi, pour donner le change à l’Assemblée et trouver plus de crédit dans des circonstances plus graves encore. […] Je serais indigne du nom de notre mère, qui vous est aussi cher qu’à moi, si le danger me faisait fuir loin du roi et de mes enfants. » Et un autre jour, aux discours qu’on lui rapporte de Vienne, et qui feraient supposer que son frère la considère comme menée par La Fayette ou tel autre personnage du dedans, elle s’indigne, elle se révolte (20 janvier 1791) : « Nous sortons tous d’un sang trop noble, écrit-elle à M. de Mercy, pour qu’aucun de nous puisse soupçonner l’autre d’une telle bassesse ; mais il y a des moments où il faut savoir dissimuler, et ma position est telle et si unique que, pour le bien même, il faut que je change mon caractère franc et indépendant. » Elle chargeait le comte de Mercy de réfuter en bon lieu ces bruits malveillants que semaient les émigrés exaltés et la cabale du comte d’Artois, afin de donner prétexte et carrière à leurs plans aventureux.
Or, bien que nous soyons, nous et le monde, dans un flux perpétuel, et qu’il y ait d’ailleurs quelque plaisir à changer (d’abord on jouit ainsi des choses en un plus grand nombre de façons, et puis cette faculté de recevoir du même objet des impressions diverses peut aussi bien passer pour souplesse que pour légèreté d’esprit), toutefois, et je le dis à ma honte, je n’ai pas assez changé dans cet espace d’une année pour avoir rien d’essentiel à ajouter à ce que j’ai dit déjà. […] Le monde a changé en seize ans : lui ne bouge ; il ne lève plus de dessus son papier à copie sa face congestionnée. […] Zola eût dit : « la peur du mâle » ; c’est tout ce qu’il y a de changé ici.)
Il n’y a qu’une exception : c’est quand Joad, éclairé tout à coup d’une vision prophétique, s’écrie : Comment en un plomb vil l’or pur s’est-il changé ? […] Mais encore une fois ce n’est pas son but ; et quand il arrive au génie, il oublie ses deux images, il brise ses deux miroirs, et, au lieu de contempler son objet spirituel dans un emblème physique, il change d’inspiration, il se sert d’expressions abstraites ; il parle des accès d’une sainte manie , de l’ardeur qui le possède ; il prend ses figures à toutes sources : rien n’est suivi ; c’est une manière fragmentaire et hachée. […] Ainsi la statue de Pygmalion prend vie et devient Galatée sans changer de forme. […] Dans la science des nombres, on peut multiplier les deux termes d’un rapport sans que le rapport change ; on a ainsi deux rapports égaux et une proportion ; et si on répète la même opération plusieurs fois, on obtient une suite de rapports, tous identiques, quoique sous des formes différentes, c’est-à-dire une progression, qui peut s’étendre à l’infini.
L’individu qui s’est attiré la malveillance ou les rancunes plus ou moins intelligentes d’une de ces sociétés — tout en étant contraint par des raisons économiques, je suppose, d’y rester attaché — cet individu aura beau changer de résidence ; il retrouvera dans sa nouvelle résidence les mêmes hostilités, la même mauvaise note administrative, sociale et mondaine qui l’aura suivi ; la même défiance, le même mot d’ordre hostile, la même mise en quarantaine. […] Ici, les choses changent. […] Pourtant l’extrême conséquence, possible et logique après tout de la loi sociologique de la multiplication des groupes serait la possibilité de changer de parti à volonté, selon son intérêt du moment ou même son caprice ou simplement par désir d’affirmer sa liberté ou enfin afin d’éviter la formation d’un groupe ou d’un parti trop puissant. […] L’idéaliste qui aspire à une société plus sincère et plus vraie s’aperçoit bientôt que la société nouvelle qu’il souhaite et à l’avènement de laquelle il travaille peut-être, il s’aperçoit que cette société porte déjà en elle le germe logique et nécessaire des mensonges nouveaux qui remplaceront les mensonges anciens et périmés, que tout régime politique et social est menteur par essence (Vigny), que la duperie mutuelle est la loi de toute société et que le mensonge de groupe ne fait que changer de forme.
L’art et la science I Force gens, de nos jours, volontiers agents de change et souvent notaires, disent et répètent : La poésie s’en va. […] Ceci va changer. […] Shakespeare change-t-il quelque chose à Sophocle ? […] Tout remue en elle, tout change, tout fait peau neuve.
L’éclat de nos armes rajeuni ; la bonne foi de nos négociations attestée par nos juges les plus prévenus ; la France replacée, parmi les autres nations, au rang qui lui appartient ; le trône à jamais raffermi sur un sol qu’aucune secousse n’ébranlera plus ; et le crédit public s’élevant à un degré de prospérité inouï parmi nous : voilà des faits réels, constants, irrécusables, qui ont ouvert bien des yeux et changé bien des cœurs. […] La Révolution, disent-ils, a tout changé parmi nous, les institutions et la société, les principes et le caractère : il faut que la littérature, expression naturelle de toutes ces choses, participe au changement universel. […] Les genres ont été reconnus et fixés ; on ne peut en changer la nature, ni en augmenter le nombre : on les confond, on les accouple monstrueusement, et l’on croit en avoir créé de nouveaux. […] La sensibilité se change tantôt en une exaltation fébrile, tantôt en une langueur vaporeuse et visionnaire.
Son histoire commencée en 1581, ne va que jusqu’en 1625, après la mort de Barneveldt ; et cette histoire que je viens de lire n’a changé en rien mon opinion sur Mme Stern en particulier, ni sur son sexe en général, à, qui je ne reconnais pas le droit, démontré par la puissance, d’écrire l’histoire. […] Sans initiative par elle-même, sans idée qui lui appartienne, elle ne change rien à ce courant qui l’entraîne. Livrée aux préjugés orgueilleux de l’esprit moderne, mais sans conviction réfléchie et profonde, elle a, entre le Catholicisme et le Protestantisme de ce temps dont elle écrit l’histoire, — entre Philippe II et Guillaume d’Orange — l’impartialité de l’indifférence ; car elle regarde les choses religieuses au point de vue de cette Libre-Pensée qui dit, comme les Médecins de Molière, que « tout est changé » quand il n’y a rien de changé !
Pour moi, je crois bien qu’il n’y a qu’une seule loi qui gouverne ces esprits de premier ordre qu’on appelle des hommes de génie, — et cette loi, évidente dans l’œuf du génie de Joseph de Maistre aussi bien que dans l’œuf du génie de Bossuet, par exemple, n’est peut-être que l’apparition instantanée d’une seule idée qui va se préciser et faire l’unité et la puissance de leur vie intellectuelle, à ces esprits étonnants qui ne changent pas, mais se développent, mobiles dans l’immobilité comme Dieu, dont ils sont bien plus près que nous ! […] Et voilà pourquoi il remporte (à mes yeux du moins) sur Bossuet même ; car le génie, c’est ce qui ne change pas, mais ce qui se tient immuablement — stat — dans l’ordre de la vérité ! […] Je parle de son esprit même, de cet esprit que des lettrés superficiels, convertis à sa tendresse de cœur par les délicieuses choses qu’il a écrites, mais rétifs et résistants à la douceur de son génie, non moins réelle que la tendresse de son âme, continuent d’appeler un esprit absolu et dur parce qu’il ne croit pas que la vérité se plie et se chiffonne comme une de nos loques matérielles ; parce que, ne pouvant y rien changer et historien de la Providence, il proclame le dogme de l’Expiation, — dont il n’est pas l’auteur plus que de cette mort par laquelle l’homme expie ses fautes ! […] Restent donc, au compte de ce tortionnaire innocent, quelques épigrammes bien appliquées, pour sa défense personnelle, à des hommes qui l’avaient, comme Condillac et Locke, férocement ennuyé, et ce rictus épouvantable établi sur la bouche de Voltaire, mais qui, ma foi, n’en a pas beaucoup changé le sourire, et qui ne l’a pas, pour que l’on s’en plaigne, si prodigieusement défiguré !
L’observation de conscience, comme l’observation sensible, peut donc, en se perfectionnant, distinguer plusieurs objets là où elle n’en remarquait qu’un seul, changer les notions vagues en notions précises, les notions incomplètes en notions complètes, les notions fausses en notions exactes. […] Il n’y aurait qu’une notation à changer. […] Ceci peut s’appeler la métaphysique des métaphores ; des fautes de style font ici des fautes de science ; le langage faux produit la pensée fausse ; en comparant des qualités et des pouvoirs à des êtres, on les change en êtres ; l’expression pervertie pervertit la vérité. […] Par un raisonnement semblable, vous avez distingué ces facultés des faits, et vous les avez changées en choses réelles, forces actives attachées autour de la substance, invisibles créatrices des faits visibles.
Ou le traducteur se donne la liberté de changer les figures et d’en substituer d’autres qui sont en usage dans sa langue, à la place de celles dont son auteur s’est servi ; ou bien il traduit mot à mot ces figures, et il conserve dans la copie les mêmes images qu’elles présentent dans l’original. Si le traducteur change les figures, ce n’est plus l’auteur original, c’est le traducteur qui nous parle. […] En effet, qu’on change les mots des deux vers de Racine que nous avons déja citez.
Le livre que voici donne une opinion de plus sur Byron, mais ne change pas, par un fait nouveau, mais ne modifie pas d’un iota, d’un atome, d’un atome d’atome, l’opinion faite de longue main sur Byron, Historiquement, biographiquement, littérairement, tout ce qui est dit ici a été dit ailleurs sur le grand poëte anglais, dont la vie ressemble à ces fragments sublimes interrompus du Giaour, plaques de lumière et d’ombre ; et sa destinée est peut-être de rester mystérieuse, comme celle de ces Sphinx de l’Action, — Lara et le Corsaire, — ces Mystères vivants qu’il a chantés ! […] Elle n’y change rien nulle part, et elle le cite partout. […] Elle a cru qu’elle allait changer le Byron de l’opinion faite et en nous l’affirmant sans preuves et sans notions nouvelles à l’appui de son affirmation, nous faire son Byron, — à elle, — son Byron purifié et rectifié ; car le sens du livre qu’elle publie, c’est, ne vous y trompez pas, je vous prie, une délicate purification de Byron…… J’ai parlé plus haut de petites chapelles, élevées discrètement et chastement, tout le long du livre, à la mémoire de Byron ; j’ai dit même que je comprenais très bien qu’elles y fussent élevées… Mais je les crois trop en albâtre… Il y en a à la religion, à l’humanité, à la bienveillance, à la modestie, à toutes les vertus de l’âme de Byron (textuellement), à son amour de la vérité, mais c’est aussi par trop de chapelles… Les vertus de Byron font un drôle d’effet… Sont-ce les cardinales ?
Mais, en attendant qu’il le dise, on ne saurait trop présumer d’un historien qui introduit dans l’Histoire un point de vue aussi puissant et aussi renversant que celui qu’il vient d’y ouvrir, et qui, s’il est vrai absolument et sans réplique, comme il doit l’être, bouleverse l’Histoire telle qu’elle est écrite et acceptée, et en change instantanément tous les aspects. […] Fustel de Coulanges, — les magistratures n’étaient pas des fonctions, mais des pouvoirs. » La révolution de 509, qui, suivant nos ineptes phraséologies, changea la Royauté en République, ne changea pas la nature de l’autorité comme, à Rome, on la comprenait.
Le comte de Gasparin, qui brise superbement les religions constituées, comme les Iconoclastes, ces enfants dans le protestantisme, brisaient les images ; le comte de Gasparin, ce protestant devenu si homme, l’est tellement devenu qu’il veut échapper aux conditions de la réalité humaine, que Jésus-Christ lui-même n’a pas changées, en apparaissant parmi nous. Et, en effet, Jésus-Christ, qui n’est pas venu pour, dans l’ordre religieux, changer la loi, mais pour l’accomplir, n’est pas venu davantage pour la changer dans l’ordre métaphysique du monde.
Sans doute les choses extérieures changent, mais leurs moments ne se succèdent que pour une conscience qui se les remémore. […] Il ne faut donc pas dire que les choses extérieures durent, mais plutôt qu’il y a en elles quelque inexprimable raison en vertu de laquelle nous ne saurions les considérer à des moments successifs de notre durée sans constater qu’elles ont changé. […] En présence de cet espace homogène nous avons placé le moi tel qu’une conscience attentive l’aperçoit, un moi vivant, dont les états à la fois indistincts et instables ne sauraient se dissocier sans changer de nature, ni se fixer ou s’exprimer sans tomber dans le domaine commun.
Les intérêts ont changé, la plupart des hommes sont morts ou ont changé aussi.
Ce qu’on a le plus de peine aussi à supporter dans l’infortune, c’est l’absorbation, la fixation sur une seule idée, et tout ce qui porte la pensée au-dehors de soi, tout ce qui excite à l’action, trompe le malheur ; il semble qu’en agissant, on va changer la situation de son âme, et le ressentiment, ou l’indignation contre le crime étant d’abord ce qui est le plus apparent dans sa propre douleur, on croit, en satisfaisant ce mouvement, échapper à tout ce qui doit le suivre ; mais en observant un cœur généreux et sensible, on découvre qu’on serait plus malheureux encore après s’être vengé qu’auparavant. […] Les âmes généreuses, qui se sont abandonnées à des mouvements coupables, ont fait un tort immense à l’ascendant de la moralité ; elles ont réunis à des torts graves des motifs élevés, et le sens même des mots s’est trouvé changé par les pensées accessoires que leur exemple y a réunies.
Un poëte ne doit aussi rien changer, sans une grande necessité, à ce que l’histoire et la fable nous apprennent des évenemens, des moeurs, des coûtumes et des usages des païs où il place sa scene. […] La circonstance que le poëte change n’est point assez importante pour la conserver aux dépens du pathetique que la vie d’un homme, sacrifiée pour faire une épreuve, jette dans le recit, et de l’embarras qu’il y auroit à raconter cet incident comme le narrent les historiens.
Le secrétaire perpétuel a d’abord cela pour lui qu’il est perpétuel et qu’il dure ; les présidents ou directeurs se succèdent et changent, lui il ne change pas : il est un sous-directeur à vie, autant dire un directeur sous titre modeste. […] Villemain qui vint s’y asseoir dès 1835, l’Académie, comme par enchantement, dépouilla le vieil homme : elle parut, d’un jour à l’autre, avoir changé subitement d’esprit comme de ton. […] J’ai ouï dire à quelqu’un de nos anciens confrères, un peu trop attristé et de trop sinistre présage : « Nous serons les derniers des académiciens français. » Je ne le pense pas ; il y a de bonnes raisons pour que l’Académie subsiste ; mais il importe qu’en vivant elle se rajeunisse et qu’elle se maintienne dans un rapport vrai avec une société qui change. […] La constitution de la société a changé : l’Académie n’entend plus chaque année au mois d’août la messe de la Saint-Louis, et le panégyrique du saint.
L’idée religieuse s’éveilla alors dans son âme ; il recourut à Dieu par la prière ; se trouvant à Southampton, où les médecins l’avaient envoyé pour changer d’air et se distraire, il y eut une heure, un moment, où dans une promenade qu’il faisait aux environs avec quelques amis, par une brillante matinée, s’étant assis sur une hauteur d’où la vue embrassait la mer et les coteaux boisés du rivage, il sentit tout d’un coup comme si un nouveau soleil s’était levé dans le ciel et lui éclaircissait l’horizon : « Je me sentis soulagé de tout le poids de ma misère ; mon cœur devint léger et joyeux en un instant ; j’aurais pleuré avec transport si j’avais été seul. » On a souvent noté, dans les conversions qui tardèrent longtemps à s’accomplir, ces signes avant-coureurs et comme ces premières atteintes, ces premiers coups de soleil de la grâce. […] Il en éprouva une telle consolation et une vue de foi si pleine et si lumineuse, que le médecin craignit que cette brusque transition du désespoir à la joie n’amenât à son tour une crise nouvelle. — « L’homme, a dit admirablement Cowper dans un de ses meilleurs poèmes, est une harpe dont les cordes échappent à la vue, chacune rendant son harmonie lorsqu’elles sont bien disposées ; mais que la clef se retourne (ce que Dieu, s’il le veut, peut faire en un moment), dix mille milliers de cordes à la fois se relâchent, et jusqu’à ce qu’il les accorde de nouveau, elles ont perdu toute leur puissance et leur emploi. » La convalescence se soutenant, Cowper résolut de changer tout son train de vie, et renonçant pour jamais à Londres qu’il appelait le théâtre de ses abominations, et qui l’était plutôt de ses légèretés, il chargea son frère de lui trouver une retraite de campagne dans quelque petite ville, non éloignée de Cambridge. […] Sa veuve fut amenée à changer de résidence ; elle se décida pour le joli pays d’Olney, où l’attirait la présence du pasteur M. […] Alors je pensai qu’il était grand temps de changer cette occupation pour une autre, de peur, dans mes productions suivantes, de compromettre l’honneur que je m’étais si heureusement acquis.
La loi des États change selon les temps, on n’y peut donner de maximes certaines ; ce qui est utile à un roi est dommageable à un autre. […] Gardons-nous d’oublier que ceux qui n’ont pas réussi ont contre eux bien des apparences et des commencements équivoques qui auraient un tout autre air moyennant une autre issue : un rayon de soleil tombant à propos change bien les aspects. « Mais pour ce que les histoires, dit quelque part Rohan, ne se font que par les victorieux, nous ne voyons ordinairement d’estimes que les enfants de la fortune. » Tout cela est vrai ; et toutefois c’est bien Richelieu qui dans cette lutte a raison, et qui a la conscience de la grande cause qu’il sert, de la noble monarchie qu’il continue, et de la France incomparable qu’il achève. […] Le ton change, les brouillards cessent, les drapeaux s’arborent ; on y sent à chaque pas l’avantage des situations nettes et des génies qui sont dans leur voie. […] En conseillant au roi de faire impérieusement, et même avec menaces (s’il en était besoin), ces demandes assez singulières à ses alliés protestants pour battre ses sujets protestants, le cardinal, à qui son tact présageait qu’on obtiendrait tout, savait bien pourtant qu’il se mettait en grand hasard auprès du maître si l’on essuyait un refus : Qui se fût considéré lui-même, dit-il dans un sentiment de généreux orgueil, n’eût peut-être pas pris ce chemin qui, étant le meilleur pour les affaires, n’était pas le plus sûr pour ceux qui les traitaient ; mais sachant que la première condition de celui qui a part au gouvernement des États est de se donner du tout au public et ne penser pas à soi-même, on passa par-dessus toutes considérations qui pouvaient arrêter, aimant mieux se perdre que manquer à aucune chose nécessaire pour sauver l’État, duquel on peut dire que les procédures basses et lâches des ministres passés avaient changé et terni toute la face.
En s’approchant du trône, elle ne changea pas ; sa circonspection se raffina de plus en plus ; la dévotion qu’elle avait affichée jusque-là, par contenance plutôt que par componction, s’accrut par l’âge, l’oisiveté, l’habitude, et ne devint que plus étroite en devenant plus sincère. […] « Le seul art dont j’oserais soupçonner madame de Sévigné, dit madame Necker, c’est d’employer souvent des termes généraux, et, par conséquent, un peu vagues, qu’elle fait rassembler, par la façon dont elle les place, à ces robes flottantes, dont une main habile change la forme à son gré. » La comparaison est ingénieuse ; mais il ne faut pas voir un artifice dans cette manière de madame de Sévigné, non plus que dans celle de mesdames des Ursins et de Maintenon : c’est la manière de l’époque et l’un des mérites inséparables de son style.
La comédie romantique d’abord ne nous montrerait pas ses personnages en habits brodés ; il n’y aurait pas perpétuellement des amoureux et un mariage à la fin de la pièce ; les personnages ne changeraient pas de caractère tout juste au cinquième acte ; on entreverrait quelquefois un amour qui ne peut être couronné par le mariage ; le mariage, elle ne l’appellerait pas l’hyménée pour faire la rime. […] Une société dans laquelle un élément aussi essentiel et aussi répété que le sot, est changé à ce point, ne peut plus supporter ni le même ridicule, ni le même pathétique.
celui-là se recueille si longtemps entre deux livres qu’il nous jouera peut-être le mauvais tour de changer dans l’intervalle. […] Si les écrivains se mettent comme cela à changer leur manière, il n’y a plus de sécurité pour le lecteur.
Son nom d’enfance est Tokitaro ; plus tard, il le changea contre celui de Tétsoujiro. […] Depuis, il change son style, en crée un tout nouveau, qui lui est personnel. […] Il changea encore une fois son nom propre et s’appela Tamé Kazou ou I-itsou. […] Signé : Taïto Hokousaï, changé de nom. […] Hokousaï changé de nom.
Combien d’autres pour moi le temps aura changés ! Je n’en murmure pas ; j’ai tant changé moi-même ! […] Voici donc cette réponse : Non, tous n’ont pas changé, tous n’ont pas, dans leur route, Vu fuir ton frais buisson au nid mélodieux ; Tous ne sont pas si loin ; j’en sais un qui t’écoute Et qui te suit des yeux.
Un petit mot glissé en passant change à l’instant l’accent du récit. […] La Fontaine la change en piquante grisette, à figure éveillée et mutine ; il l’ajuste, l’agace et court après elle. […] En ce moment, on n’aperçoit plus sa basse condition, ses moeurs irrégulières ; bien des gens ne changeraient pas son coeur ni sa vie contre le coeur ou la vie du grand roi.
C’est moi qui la tuerai, changé en dragon, N’ai-je pas bien interprété le prodige ? […] Le même groupe reparaît sous le même portique, dans une semblable attitude, mais les figures ont changé. […] Des condoléances équivoques remplacent leurs chants homicides, les furieuses se changent en pleureuses. — « Hélas !
À partir de la seconde moitié du xviiie siècle, le monde, à cet égard, changea ; la déclamation prit le dessus, et un certain faux montant devint nécessaire. […] On sent d’abord combien les idées morales ont changé en ces matières, pour que, même en plaisantant, l’historien puisse faire honneur au héros de ce qui intéresse si fort la probité. […] Quand son héros passe à la cour d’Angleterre, la manière de l’historien change un peu ; on entre dans une série de portraits et dans une complication d’aventures où l’on a quelque peine d’abord à se démêler.
On perfectionna de plus en plus le même genre ; mais on ne le changea pas. […] L’un de ces poètes (ce fut Thespis) eut la hardiesse d’y changer quelque chose, et eut le bonheur de réussir. […] Je me contente de remarquer, par ce que je viens de dire, la différence exacte des expositions du poème épique et de celles des tragédies, afin qu’on distingue nettement ce qu’Eschyle et les tragiques grecs ont emprunté de l’Iliade, et ce qu’ils ont changé quant à l’exposition du sujet.
Il faut changer quelques institutions « Tout bon esprit ne sait-il pas que notre système d’héritage est néfaste ? […] Changeons quelques institutions et ne parlons plus de décadence, d’aveulissement ; laissons là toutes ces vilaines choses et réjouissons-nous, puisque la France est toujours la France. […] Jules Lemaître ajoute : « Il faudrait changer notre âme.
Les horloges ne changent pas ; c’est le Temps qui change. […] Mais cela devient au contraire très simple et tout naturel, si l’on prend pour substitut du temps une ligne de lumière extensible, et si l’on appelle simultanéité et succession des cas d’égalité et d’inégalité entre lignes de lumière dont la relation entre elles change évidemment selon l’état de repos ou de mouvement du système.
Par malheur, les marchands de pardons ne savent pas que tout est changé et que l’esprit est devenu adulte ; il ne récite plus les mots machinalement comme un catéchisme, il les sonde anxieusement comme une vérité. […] Une nouvelle Église paraît, et avec elle un nouveau culte ; les ministres de la religion changent de rôle, et l’adoration de Dieu change de forme ; l’autorité du clergé s’atténue, et la pompe du service se réduit ; elles se réduisent et s’atténuent d’autant plus, que l’idée primitive de la théologie nouvelle est plus absorbante, tellement, qu’il y a des sectes où elles disparaissent tout à fait. […] Sur-le-champ il changea de sujet, et fit le portrait du prélat parfait, portrait qui ne cadrait pas bien avec la personne de l’évêque, et il fut dénoncé pour ce fait. […] First we change our world, when we come from the womb to feel the warmth of the sun. […] So does the fairest beauty change, and it will be as bad with you as me ; and then what servants shall we have to wait upon us in the grave ?
Vous voyez par quel mécanisme Thackeray a changé en satire le roman. […] Il signera une lettre de change de vingt louis à trois mois pour avoir vingt francs tout de suite. […] Tout est changé par l’arrivée de la satire, et d’abord le rôle de l’auteur. […] Ici tout change. […] Changez une vertu de milieu, elle devient un vice ; changez un vice de milieu, il devient une vertu.
Goethe trouva ce caractère satanique tout fait ; il n’eut qu’une voyelle à changer dans le nom de cet infernal personnage. […] XXIII Ici le lieu de la scène est changé ; la nuit s’est écoulée. […] XXVII La scène change de place ; on est de nouveau dans le cabinet d’étude de Faust. […] Il faut laisser cette scène aux enfants et au peuple infatués de la sorcellerie du moyen âge, et ne voir dans le barbet changé en homme, et en homme cachant un esprit démoniaque sous ses formes humaines, que l’inspiration manichéenne du mal conseillant le mal à tout ce qui respire. […] Faust, parcourant la chambre d’un regard avide et enthousiasmé, sent son libertinage se changer en respect de l’innocence dans son cœur.
Mes scrupules étaient hors de mise, et personne ne voulut changer d’avis. […] « Je ne détaillerai pas ce que je répliquai à un aussi étrange discours, et par quels arguments je démontrai combien cette maxime, qu’on peut toujours changer avant d’avoir signé, était inapplicable au cas actuel. […] Si Henri VIII, qui n’avait pas la vingtième partie de ma puissance, a su changer la religion de son pays et réussir dans ce projet, bien plus le saurai-je faire et le pourrai-je, moi. En changeant la religion en France, je la changerai dans presque toute l’Europe, partout où s’étend l’influence de mon pouvoir. […] Tous les autres cardinaux reçurent la même intimation pendant les heures qui se succédèrent ; le lieu seul de l’exil fut ce que le ministre changea.
La musique, qui, étant le plus subjectif des beaux-arts, bénéficie comme la poésie de l’exaltation du sentiment, change de caractère avec la littérature. […] Tel d’entre eux se continue pendant plus de cent ans et change de nature sur la route ; il commence par la gaieté, par la joie de vivre, et finit par l’amertume et la raillerie mordante. […] Car on sait que tout ce qui nous entoure change de minute en minute et l’on envie à la photographie la faculté de saisir des instantanés. […] Les canapés se changent en sophas, en ottomanes, en sultanes, en duchesses, et tous ces sièges à noms variés ont ce caractère commun d’être souples, mœlleux, capitonnés, de cacher le bois sous l’étoffe. […] C’est qu’en effet l’idéal a changé.
Si le son devient trop violent, le plaisir se change en gêne. […] Tout change en eux si vous regardez leurs occasions extérieures ; mais comme leur cause intérieure et profonde est la vie même tendant à se conserver et à s’accroître, vous reconnaîtrez que leur inconstance recouvre ce qu’il y a de plus constant chez l’homme. […] La loi relative aux rapports du sentiment avec la durée consiste en ce que les plaisirs qui durent atteignent bientôt un maximum, puis déclinent et peuvent même se changer en peines. Les douleurs déclinent moins rapidement et ne se changent pas en plaisirs. […] alors la cloche des morts peut sonner ; que le cadran s’arrête, que l’aiguille tombe et que le temps soit accompli pour moi. » L’activité ne change que pour se maintenir, pour s’adapter progressivement à un milieu qui change lui-même, pour accroître enfin ses conquêtes sans perdre ses acquisitions.
Mais, tout à coup, comme pour se faire pardonner par Dieu et par ses amis ces blasphèmes, il change de note, et il exhale l’hymne le plus inspiré et le plus majestueux que la bouche de l’homme ait jamais balbutié au Tout-Puissant. […] que les rochers se meuvent d’indignation et changent de place à cause de toi ? […] Ouvrez les codes indiens, ouvrez les codes de la Chine, ouvrez les codes de la Perse, ouvrez les codes de la Grèce, ouvrez ceux de Bouddha, Zoroastre, Confucius, Pythagore, Socrate, Platon, Moïse, le dogme varie, les mœurs changent ; la conscience est innée et universelle. […] Si son sort est tolérable ou doux, la mort est là, à deux pas de lui, qui change sa félicité même en désespoir par le sentiment de sa brièveté. […] S’il se désintéresse de lui-même pour se dévouer, en vue de Dieu, à l’amélioration de sa race, au progrès de la raison et des institutions humaines, il a la dérision ou le martyre pour récompense ; il s’aperçoit que les hommes, formés, depuis le premier jour jusqu’au dernier, de la même fange, changent de forme sans changer de nature ; qu’on peut les pétrir différemment de limon, mais jamais transformer ce limon en bronze ; que le progrès indéfini sur cette terre est le rêve de l’argile qui veut être Dieu et qui ne sera jamais que poussière.
Nos continents semblent bien avoir été produits par une force de soulèvement prépondérante à travers de fréquentes oscillations ; mais les aires où cette même force s’exerce avec prépondérance ne peuvent-elles avoir changé dans le cours des âges ? […] Ainsi, lorsque le sol s’abaisse, si la vitesse d’affaissement est supérieure à la vitesse d’accumulation, non seulement les formes organiques doivent changer de nature et diminuer de nombre, mais la vitesse d’accumulation elle-même doit augmenter progressivement en raison même des lois de la pesanteur, puisque l’inclinaison du courant qui apporte les alluvions est plus forte. […] Si, au contraire, le fond de la mer reste stationnaire, à mesure que la formation devient plus puissante, la vitesse d’accumulation doit progressivement diminuer ; mais elle doit aussi progressivement s’enrichir en formes organiques, et les espèces doivent encore changer, sans que leur changement ait pour cause leur transformation par sélection naturelle. […] Or, de deux choses l’une : ou les espèces changeront, et le dépôt sera probablement interrompu, ou les espèces ne changeront pas, et alors il importe peu que le dépôt continue de s’accumuler. […] Il ne faut pas oublier de tenir compte ici de l’apparition première des continents qui dut changer complétement l’ordre des phénomènes à la surface du globe.
Lettre de change à vûe, à dix jours de vûe. […] Or il faut qu’il y ait une raison de cette nouvelle modification ou changement de terminaison ; car tout ce qui change, change par autrui ; c’est un axiome incontestable en bonne Métaphysique : un nom ne change la terminaison de sa premiere dénomination, que parce que l’esprit y ajoûte un nouveau rapport, une nouvelle vûe. […] L’l final se change en aux, qu’on feroit mieux d’écrire aus : égal, égaus ; verbal, verbaus ; féodal, féodaus ; nuptial, nuptiaus, &c. […] On se sert, dit-il, de ce signe pour marquer que l’ordre des vers vis-à-vis desquels on le met, doit être changé, & qu’on le trouve ainsi dans les anciens auteurs. […] Infra ou intra se change en tra : on dit tra’l pour tra, il entre là.
Elles changent un peu de l’air de roman qu’Aimé Martin a donné à cette histoire d’amour. […] Mais ce qu’il avait négligé de dire, et ce qui change pourtant un peu les choses, c’est que. […] L’action en change de nature. […] Puisque rien ne change rien à rien, qu’on laisse donc aller les choses. […] Changez seulement le titre, c’est toujours le même roman, avec les mêmes qualités.
Lui, il transporte sur la toile la chose comme elle est, comme elle lui apparaît sous un prompt coup d’œil, sans y rien changer. […] Horace Vernet n’avait qu’un langage et qu’une manière, et il n’était guère libre d’en changer. […] Puis tout à coup nous entrons dans le palais du Bey : tout change. […] Qu’on ne lui oppose plus Gros, l’épique et le grandiose, avec ses deux ou trois héroïques figures militaires ; le théâtre comme la tactique a changé.
Parmi les Grecs, à peine ai-je trouvé un homme qui en fût révolté, et les prêtres, dont le fanatisme égale l’ignorance, se montraient nos plus grands ennemis. » À un moment où l’on apprend qu’ils ont reçu de leurs amis de Constantinople quelque somme d’argent, on semble changer de procédés à leur égard, ou plutôt la vexation se déplace ; les croyant riches, au lieu de les charger de pierres on les poursuit, on les agonise de demandes exigeantes ; c’est à qui mendiera près d’eux et leur arrachera quelques pièces de monnaie. […] Le maréchal comprit et changea de ton. — J’ai suivi en ceci la version de M. […] Cretet, en lui développant son programme de travaux et d’améliorations de tout genre à l’intérieur : « J’ai fait consister la gloire de mon règne à changer la face du territoire de mon Empire. […] « Citoyens, La fortune de l’armée navale française a bien changé depuis ma lettre du 11… Je ne connais pas au vrai ma perte.
Catinat, en apprenant la perte soudaine de l’homme qui l’avait toujours apprécié, poussé, protégé et aimé jusque dans les rudesses et brusqueries qu’il ne ménageait à personne, écrivait à Barbezieux, son fils et son successeur (20 juillet) : « Je suis dans une situation où je me fais de grandes violences pour ne me point laisser aller à la vive douleur que je ressens de la grande perte que vient de faire le roi, l’État, et moi de mon protecteur, dont l’affection m’a toujours cent fois plus touché que tous les biens qu’il pouvait me faire. » Louvois de moins, tout changeait ; Catinat perdait un point d’appui solide et puissant ; il dut être porté à en devenir plus circonspect encore. […] Les grâces du roi avaient alors un tel pouvoir de grandir, que le frère de Catinat, Croisilles, si tendrement lié avec lui dès l’enfance, n’osait plus le traiter par lettres sur le même pied qu’auparavant, et qu’il changea de ton aussitôt. […] Il y en a une infinité à me donner la vanité que tu m’inspires dans tes lettres ; mais, de bonne foi, cela ne me change point sur le jugement que je fais de moi-même, et je réfléchis combien aisément la fortune pouvait changer les événements qui m’ont procuré tant d’honneur, et toutes les raisons pour une affaire deviennent bien faibles contre me seule qui les fait manquer.
Arrivé dans le Nord, sa première idée fut qu’il n’avait pour ressource que son pinceau, et, comme tant d’honorables émigrés, il se préparait à en vivre ; mais la fortune changea : il put garder l’épée, et, au service de la Russie, il parvint graduellement au rang de général. […] … M. de Maistre a lui-même composé beaucoup de vers ; mais, malgré les insinuations complaisantes, il a toujours résisté à les produire au jour, se disant que la mode avait changé. […] En parcourant les ouvrages à la mode, il s’est effrayé d’abord, il s’est demandé si notre langue n’avait pas changé durant ce long espace de temps qu’il avait vécu à l’étranger : « Pourtant ce qui me tranquillise un peu, ajoutait-il, c’est que, si l’on écrit tout autrement, la plupart des personnes que je rencontre parlent encore la même langue que moi. » En assistant à quelques séances de nos Chambres, il s’est trouvé bien dérouté de tant de paroles ; au sortir du silence des villas et du calme des monarchies absolues, il comprenait peu l’utilité de tout ce bruit, et l’on aurait eu peine, je l’avoue, à la lui démontrer pour le moment. […] Il écrivait en style moins lyrique à un ami, en se faisant tout petit, non sans malice : « Dans l’impossibilité où je suis de comprendre cette faculté (du poëte) et pour ne pas avouer cette supériorité dans les autres, je pense que les poëtes ont quelque chose dans le poignet qui change la prose en vers à mesure qu’elle passe par là pour se rendre de la tête sur le papier ; en sorte qu’un poëte ne serait qu’une filière plus ou moins parfaite.
Scribe avait là contre lui ce qu’il y a contre tout homme de talent au moment où il change de lieu et de genre ; on commence par lui dire non. […] Scribe en a changé moins le principe que l’application et les proportions : il était difficile qu’il en advînt autrement ; même en se renouvelant, on se continue toujours. […] En montrant de fort vilaines choses, il ne révolte pas, comme n’ont jamais manqué de faire nos amis les romantiques ; il donne le change en amusant. […] Et dans le cas présent, au chapitre xxii du Siècle de Louis XIV, parlant des rivalités de la duchesse de Marlborough et de sa cousine milady Masham : « Quelques paires de gants d’une façon singulière, dit-il, qu’elle refusa à la reine, une jatte d’eau qu’elle laissa tomber en sa présence, par une méprise affectée, sur la robe de Mme Masham, changèrent la face de l’Europe. » Le grave Pascal n’avait pas pensé autre chose quand il a parlé du petit nez de Cléopâtre.
Si la tragédie morale semble souvent continuer un roman ou s’y superposer, et si son action semble parfois, soit au début, soit dans le cours des pièces, recevoir l’impulsion du dehors, c’est qu’il peint des volontés, comme nous le verrons, et que ces volontés, sûres et constantes, ne changeraient point d’état ou de posture, ne livreraient point de combat, si des accidents de fortune ne leur suscitaient des ennemis dans le moi ou hors du moi. […] Ainsi les volontés, dans le théâtre de Corneille, se créent à elles-mêmes, et les unes aux autres, par leurs actes, des situations qui leur donnent occasion de changer non leurs essences, mais leurs formes, de renouveler, de diversifier, et de croître leur effort. […] Deuxième conséquence : la raison s’éclairant peut changer l’amour. […] De là vient qu’on leur reproche de se démentir, et de pivoter tout d’une pièce : si parfois la raison s’éclairant change de maximes, la volonté suit, et toute l’âme ; ainsi Émilie, à la fin de Cinna : Ma haine va mourir, que j’ai crue immortelle.
Mais cette feinte est vite écartée ; l’entrevue, au premier choc, se change en combat. […] Pour expliquer une métamorphose si monstrueuse, il ne faudrait guère moins que cette baguette de la fée antique, qui changeait en bêtes féroces ses amants. […] Il s’est aliéné à jamais, par une basse insulte, l’héritière dont il convoite la fortune ; l’antipathie qu’elle avait pour lui s’est changée en haine, et l’on dirait qu’il vient d’accomplir un chef-d’œuvre de ruse et de séduction ! […] Au second acte, nous sommes chez le tuteur de mademoiselle de Birague, le comte de Prévenquières, un bonhomme affolé de géographie, qui vit retiré dans l’intérieur d’un globe terrestre, tandis que sa femme, veuve d’un agent de change, fille avec d’Estrigaud le dernier nœud d’une liaison flottante.
Il faut entendre Mme de Caylus raconter cette première aventure : « À peine ma mère fut-elle partie de Niort, que ma tante, accoutumée à changer de religion, et qui venait de se convertir pour la seconde ou la troisième fois, partit de son côté et m’emmena à Paris. » Sur la route on rencontre d’autres jeunes filles d’un âge plus fait, et que Mme de Maintenonréclamait aussi pour les convertir. […] Elle sait changer de ton dès qu’il le faut, et proportionner sa touche à ses personnages : « Mlle de Rambures avait le style de la famille des Nogent dont était madame sa mère : vive, hardie, et tout l’esprit qu’il faut pour plaire aux hommes sans être belle. […] Il y aurait peut-être dans ce mot de charmes et dans cette comparaison avec Hélène de quoi effrayer d’abord et donner le change, si l’on ne savait que ce portrait de Mme de Caylus a été tracé dans les dernières années et après sa jeunesse, et que tout s’y rapporte à l’enchantement de l’esprit. […] Il est vrai que Mme de Caylus est si parfaite, si respectueuse à la fois et si familière ; elle sait si bien la mesure qu’il faut garder en lui écrivant, le degré d’information qu’il faut tenir, les tristes nouvelles du monde, les vérités fâcheuses qu’il ne faut pas lui cacher, et celles sur lesquelles il est inutile de s’étendre ; elle sait si bien être sérieuse en courant : « Je ne vous dis rien de la beauté de vos lettres, lui écrivait Mme de Maintenon(1716) ; je vous paraîtrais flatteuse, et, à mon âge, il ne faut pas changer de caractère. » On prendrait pourtant de Mme de Caylus, si l’on s’en tenait à ses lettres, une idée un peu trop sérieuse.
Voltaire avait mis Rivarol au défi de réussir ; il lui avait dit en plaisantant qu’il ne traduirait jamais Dante en style soutenu, « ou qu’il changerait trois fois de peau avant de se tirer des pattes de ce diable-là ». Rivarol n’a garde de vouloir changer de peau, il est trop content de la sienne. […] À Paris, on n’en était pas dupe : « En vain les trompettes de la Renommée ont proclamé telle prose ou tels vers ; il y a toujours dans cette capitale, disait Rivarol, trente ou quarante têtes incorruptibles qui se taisent ; ce silence des gens de goût sert de conscience aux mauvais écrivains et les tourmente le reste de leur vie. » Mais, en province, on était dupe : « Il serait temps enfin, conseillait-il, que plus d’un journal changeât de maxime : il faudrait mettre dans la louange la sobriété que la nature observe dans la production des grands talents, et cesser de tendre des pièges à l’innocence des provinces. » C’est cette pensée de haute police qui fit que Rivarol, un matin, s’avisa de publier son Petit almanach de nos grands hommes pour l’année 1788, où tous les auteurs éphémères et imperceptibles sont rangés par ordre alphabétique, avec accompagnement d’un éloge ironique. […] Il fait voir d’une manière très sensible comment les questions changèrent bien vite de caractère dans cette mobilité, une fois soulevée, des esprits : « Ceux qui élèvent des questions publiques devraient considérer combien elles se dénaturent en chemin.
« Il n’y a plus de Pyrénées », avait dit Louis XIV, en donnant son petit-fils à l’Espagne ; mais les Pyrénées ne s’étaient pas abaissées à ce mot du grand roi : l’Espagne, qui, depuis Ferdinand le Catholique, combattait et haïssait la France, n’avait pas changé tout d’un coup au gré d’un testament. […] Ici sa correspondance change de ton ; les ironies se cachent sous les compliments ; mordantes en même temps que polies, pleines à la fois de verve et de convenance, elles exercent la résignation chrétienne de cette qui les reçoit et qui pardonne par Charité.
Après l’amour, il n’y a plus rien dans la vie ; la terre semble ingrate et nue ; le ciel est voilé, parfois il s’entrouvre, et l’on espère y voir un signe de salut, y lire un mot mystérieux ; mais toujours quelque nuage obscurcit l’apparition, toujours quelque lettre manque au nom divin ; et voilà pourquoi l’âme du poète est triste, pourquoi son cœur change de place comme un malade dans son lit, pourquoi son inquiète pensée fuit et revient sans cesse, comme une colombe blessée, comme un oiseau de nuit, comme les hirondelles aux approches des tempêtes. […] La scène change ; un autre souvenir se retrace ; il est moins sublime, mais peut-être il risque moins de s’effacer.
Soudain le rythme change, il devient plus vif, plus pressant ; il palpite de sollicitude ; on dirait qu’à cette crainte d’un oubli le poète tombe à genoux, et qu’il prie à mains jointes, avec sanglots, pour obtenir des morts un souvenir miséricordieux : Ah ! […] Après ces flots de larmes et ce débordement de plaintes pieuses, le rythme change encore et revient à son premier mode ; le poète se relève, il reprend confiance, et s’abîme dans une louange éblouissante du Seigneur.
L’observation y est parfaite dans sa finesse et sa subtilité ; chacun a connu et connaît quelque madame de Flamareil, toujours belle, toujours sensible, toujours décente, qui a graduellement changé d’étoile du pôle au couchant, qui en peut compter jusqu’à trois dans sa vie, dont le cœur aimant enfin a suivi assez bien les révolutions inclinées et l’orbite élargi du talent de Lamartine, des premières Méditations jusqu’à Jocelyn. […] A ce moment, le roman change de ton ; le terrible commence et les catastrophes se précipitent.
Mais l’experience apprend bientôt à changer l’objet de l’imitation : aussi les poëtes romains ne furent pas long-tems à connoître que leurs comedies plairoient davantage s’ils en mettoient la scene dans Rome, et s’ils y joüoient le peuple même qui devoit en juger. […] Ils en ont changé la scene et les incidens, et ils en ont plu davantage.
Quand nous disons : « Modifiez tel mot, changez telle image, mettez de la couleur, exprimez autrement ce qui est banal, remplacez les clichés, donnez du relief, de la vie, etc. », c’est comme si nous disions : « Il y a dans votre style choses qui ne sont pas bonnes parce qu’elles ne sont pas assez senties. S’obliger à revoir, à refaire, à travailler, c’est s’obliger à mieux sentir ce qui a été faiblement senti, Quand je veux changer une idée ou un mot banal ; quand je veux l’exprimer autrement on l’exprimer mieux, qu’est-ce donc que je fais ?
Malgré ces quelques livres cependant, auxquels la Critique d’un journal, qui s’écrit toujours un peu debout, devait de s’asseoir pour en parler plus à l’aise, comme dit Montesquieu d’Alexandre, malgré ces productions trop clairsemées et plus distinguées que les autres, tous ceux qui suivent le mouvement littéraire contemporain ont pu s’assurer que la littérature n’a point encore reçu des événements politiques qui ont changé la face de notre pays, et l’ont pénétré de meilleures influences, ce qu’ils se permettaient d’espérer. […] Un pouvoir, si vigoureux et si intelligent qu’il soit, ne change pas tout à coup, même en France, où son action est plus irrésistible qu’ailleurs, l’âme tout entière d’une époque.
comme il fait déjà chaud, nous le mettrons rafraîchir dans un baquet sous la pompe, excepté le bordeaux qui doit se boire tiède ; je vais prévenir Katel. — Et maintenant à mon tour, il faut que je me rase, que je change, que je mette ma belle redingote marron. — Ça va, Kobus… ! […] Et tu voudrais me faire changer tout cela ? […] Voulez-vous changer de souliers ? […] On ne peut pas laisser les ouvriers seuls… Ma femme fait la cuisine, moi, je conduis la voiture… Si le temps changeait, qui sait quand nous rentrerions les foins ? […] Comme les idées d’un homme changent en trois mois !
De plus, le cerveau n’étant jamais tout d’un coup changé dans sa masse entière, il reste toujours dans l’état nouveau quelque chose de l’ancien. […] Enfin, ce qui change l’individualité en une personne consciente, c’est la synthèse des images diverses sous une idée-force, qui est l’idée du moi. […] Il suffit d’un petit ressort pour lever ou abaisser les étouffoirs et pour changer ainsi toute la symphonie. […] Les dessins changent, et ce n’est plus la même trame d’idées, quoique la chaîne demeure toujours la même dans son fond. […] Les malades qui aiment à changer de médecin ou de régime se félicitent pendant quelque temps, après chaque changement, du bien-être qu’ils éprouvent.
Sa pensée, comme sa vie, ressemble au nuage qui change de forme et de route, selon le vent qui le pousse. […] Le génie moderne conserve ce mythe des forgerons surnaturels, mais il lui imprime brusquement un caractère tout opposé et qui le rend bien plus frappant ; il change les géants en nains ; des cyclopes il fait les gnomes. […] Le drame doit être radicalement imprégné de cette couleur des temps ; elle doit en quelque sorte y être dans l’air, de façon qu’on ne s’aperçoive qu’en y entrant et qu’en en sortant qu’on a changé de siècle et d’atmosphère. […] Quand le corps change, comment l’habit ne changerait-il pas ? […] Il a pour habitude de suivre à tout hasard ce qu’il prend pour son inspiration, et de changer de moule autant de fois que de composition.