Vangelas, le premier de nos grammairiens corrects et polis, était venu de Savoie en France ; Saint-Réal en était et y retourna, écrivain concis, et, pour quelques traits profonds, précurseur de Montesquieu. […] La douce malice du Voyage se répand et se suit dans toutes les distractions de l’autre, comme il appelle la bête par opposition à l’âme ; l’observation du moraliste, sous air d’étonnement et de découverte, s’y produit en une foule de traits que la naïveté du tour ne fait qu’aiguiser. […] L’idéal est dans le choix, dans la délicatesse du trait et dans un certain ton humain et pieux qui s’y répand doucement. […] Quelque délicats, quelque élevés que puissent sembler certains traits ajoutés, l’idée seule de rien ajouter est malheureuse. […] Les Prisonniers du Caucase, par la singularité des mœurs et des caractères si vivement exprimés, semblent déceler, dans ce talent d’ordinaire tout gracieux et doux, une faculté d’audace qui ne recule au besoin devant aucun trait de la réalité et de la nature, même la plus sauvage.
Au lieu de vouloir enfoncer dans les cœurs la vérité toute nue, à la manière de La Rochefoucauld, comme un trait acéré, La Bruyère nous la présente comme un fruit de notre propre sagesse, et par là nous dispose à nous l’appliquer. […] C’est par ces traits communs à l’espèce humaine que chaque individu se reconnaît dans tous les caractères. […] Beaucoup de ses traits sont à la fois si frappants et si rapides, que la réflexion qui suit l’impression n’ajouterait pas beaucoup à l’effet produit. […] Les traits qu’il a réunis et groupés dans une personnification vivante, nous les avons vus éparpillés sur un certain nombre d’originaux dont son art a fait un type. […] Certains portraits de La Bruyère sont excessifs, moins encore par l’exagération que par le trop grand nombre de traits ; chaque original en porte plus que sa charge : ce sont les Hercules du ridicule.
Ma mère écoutait ces belles choses avec un plaisir infini et les croyait peut-être, lorsque la pythonisse lui dit : mademoiselle, approchez vos yeux ; voyez-vous bien ce petit trait ; là, celui qui coupe cet autre ? — Je le vois. — Eh bien ce trait annonce… — Quoi ? […] Viennent-elles tout entières à la fois, ou est-ce le résultat successif du tâtonnement et de plusieurs traits isolés ? […] Dans ces dernières y aurait-il certains traits fins, subtils et cachés, faciles à sentir quand on les a sous les yeux, infiniment difficiles à retenir quand on ne les voit plus, impossibles à rendre par le discours ; ou serait-ce de ces physionomies rares et des traits spécifiques et particuliers de ces physionomies que seraient empruntées ces imitations qui nous confondent et qui nous font appeller les poëtes, les peintres, les musiciens, les statuaires du nom d’inspirés ? […] Sa femme, vue de profil est assise, en allant vers la gauche ; c’est une assez jolie mine, elle a de l’ingénuité et de la finesse avec des traits qui ne sont pas les nôtres.
Un auteur gâte tout quand il veut trop bien faire ; Non qu’il faille bannir certains traits délicats : Vous les aimez ces traits, et je ne les hais pas. […] Quelques gros partisans… Voilà un bon trait de satyre, et il est plaisant de faire parler ainsi le petit poisson. […] La morale dans la bouche de celui qui vient d’être châtié, fait ici un effet d’autant meilleur que le trait est saillant et l’épigramme excellente.
Un poète se peint dans ses écrits ; à la rigueur, un critique s’y peint aussi, mais le plus souvent c’est en traits affaiblis ou trop brisés ; son âme y est trop éparse. Il faut que la tradition nous aide à rassembler ses traits et nous mette sur la voie, si nous voulons recomposer avec quelque certitude sa figure et son caractère. […] Sur Corneille, sur Racine, sur Molière, Geoffroy a des remarques excellentes ; il marque en plein les traits vrais de leur génie. […] Deux ou trois traits au plus et qu’on affaiblit encore, voilà tout ce qu’autorisent les convenances. […] Il fallait voir comme il jouissait de tout, de lui-même et des autres, comme son visage aussitôt s’éclairait d’un souvenir, d’un trait heureux, que ce fût lui ou un autre qui l’eût dit.
Je parle des humains ; car, quant aux animaux… Voilà un excellent trait de satire déguisée en bonhommie. […] Du milieu de ces idées si étrangères au génie de La Fontaine, il sort pourtant des traits qui le caractérisent, tel que ce plaisant hémistiche : Jamais un roi ne ment. […] Voilà un de ces traits qui caractérisent un poète supérieur à son sujet ; nul n’a su s’en jouer à propos comme La Fontaine. […] J’en vois quelques traits confus, comme, par exemple, que nombre d’hommes se permettent ce qu’ils interdisent aux autres, l’effet de leurs discours anéanti par leurs actions ; mais cela ne vaut guère la peine d’être dit. […] Voilà pourtant La Fontaine qui trouve le secret de mêler un trait de son caractère, au récit d’une aventure qui y est le plus opposée.
Certains traits de cette Comédie auroient pu mieux être développés ; d’autres ne sont qu’effleurés, & il lui en a échappé plusieurs, qui auroient pu la rendre encore plus piquante. […] On peut du moins espérer que ces traits ne seront pas perdus pour d’autres. […] L’impression a dédommagé de la représentation, & c’est toujours beaucoup d’être à portée de juger, à la lecture, que cette nouvelle Comédie a des traits encore supérieurs à celle des Philosophes. […] Les traits les plus ingénieux de ce Poëme ne vont point à l’ame ; ils ne font tout au plus rire que l’imagination.
Ses héros sont concentrés et fixés à n’être qu’un penchant, une attitude, une phrase, un trait de caractère sans lequel ils n’existeraient pas plus qu’un morceau de bois qui cesserait d’être ligneux. […] La cour où est introduit David Copperfield au début de ses études de droit, la salle triste où siègent immobiles des juges raides et chuchotants, est un lieu d’un calme languissant, et tous les traits du tableau servent à développer cette impression de somnolent repos. […] Taine l’a abondamment constaté, sont permanents, immuables en leurs traits constituants, et ceux-ci sont fort peu nombreux et d’autant plus accusés ; ce sont des personnages sans importance, puérilement conçus, qui, sauf M. […] De sorte qu’il ne faut point s’étonner qu’un écrivain affectif soit redondant dans les traits de caractère qu’il donne à ses personnages et dans les développements par lesquels il en trahit l’impression. […] Par contre, ni les merveilleux paysages qu’il dut voir au-delà de l’Atlantique ou ailleurs, en Écosse, dans le pays de Galles, ni les monuments artistiques qu’il visita plus tard en France et en Italie, ni les traits de mœurs réalistes qui durent le frapper, ne lui inspirent de longs commentaires.
Or le manque de nuances est un des traits les plus constants de l’esprit sémitique. […] Chefs-d’œuvre de haute raillerie, ses traits se sont inscrits en lignes de feu sur la chair de l’hypocrite et du faux dévot. Traits incomparables, traits dignes d’un fils de Dieu ! […] Les traits d’Épiphane et plusieurs de ceux du Talmud peuvent, du reste, se rapporter à une époque postérieure à Jésus, époque où « pharisien » était devenu synonyme de « dévot. » 925.
Raynouard, quelques-uns des traits essentiels de sa personne, et à faire sentir, s’il se peut, le grain de son originalité. […] Il était de son pays aussi par la gaieté, par le trait, par le petit mot pour rire. […] Pourtant ce fut, avec le grand maître, le rôle intéressant, l’un théâtral et grandiose, et l’autre pathétique sous les traits de Talma. […] Ces traits spirituels sont rares dans sa critique écrite : il les réservait d’ordinaire pour sa conversation. […] Les traits piquants qu’on pourrait raconter à son sujet seraient nombreux, et il faudrait être un Fontenelle pour les présenter avec la discrétion qui sied.
Au milieu de ses succès de commerce, il avait gardé de l’enfance un trait de son caractère qui semblait en tout l’opposé de l’esprit d’entreprise. […] Ce trait distinctif lui est commun avec les hommes distingués qu’on a compris sous le nom de doctrinaires, et qui ont essayé, en leur temps, de donner une nouvelle façon, un nouveau pli à l’esprit français. Un autre trait que M. […] « Ses traits ne ressemblent à ceux de personne ; la forme de son visage est extraordinaire. » C’est sa femme qui disait cela, et d’autres qu’elle l’ont également remarqué. […] La langue, cette fois, a servi l’écrivain observateur avec une précision rare ; il était en face de son objet, et il a fait son dessin trait pour trait
Il en a marqué la différence dans une phrase sur les femmes, qui les classe d’un seul trait, du reste : « Les femmes aiment ce qui brille, — dit-il, — elles n’aiment pas ce qui resplendit. » Le livre de l’Homme est partout semé de mots semblables. […] La Fantaisie, c’est la Convention avec soi-même. » Le charme puissant de ce livre de l’Homme est d’être, par de semblables traits, une suggestion perpétuelle pour le cœur et pour la pensée. […] Il se contente de ramasser un trait frappant ou plusieurs traits épars de leurs physionomies, opposées aux physionomies des grands hommes qui ne sont pas des Saints. Dans le livre de moraliste chrétien intitulé : l’Homme, où la pénétration allait à fond, d’un trait souvent éblouissant comme une étoile filant dans la nuit, Hello est monté jusqu’à l’hagiographe. […] Et, de toutes, l’habile physionomiste a fait jaillir le trait, indiscerné jusqu’à lui et saisissant, qu’il découvre aussi bien dans l’ombre que dans la lumière.
Doué d’un sentiment vif des ridicules et du tact social le plus pénétrant, il démêlait les moindres nuances, et les fixait d’un trait léger, ineffaçable. […] Ses vers, loués pourtant de Voltaire qui s’est chargé de les faire oublier, loués même par Boileau qui dut écrire cette lettre de politesse en grondant, sont tout à fait passés pour nous et à peu près illisibles : ce ne sont qu’enfilades de rimes où se détache un trait heureux par-ci par-là. […] Ce sont de ces traits qui peignent au naturel une race fine, mais fortement trempée. […] À Turin, la galanterie commence ; les belles dames y sont nommées par leur nom, et c’est un autre trait de mœurs encore que ces Mémoires aient pu paraître en 1713, c’est-à-dire du vivant d’Hamilton, avec tous ces noms propres et ces révélations galantes, sans qu’il en soit résulté aucun éclat. […] On noterait deux ou trois traits pareils d’un goût équivoque, et ce ne serait que justice chez un railleur qui ne passe rien.
On a vu dans la querelle du quiétisme156 le trait principal de Fénelon. […] Ce sont là des traits de ressemblance frappants entre Fénelon et les écrivains du dix-huitième siècle. […] Il a d’autres traits qui lui sont propres. […] La vérité manque souvent à ces caractères formés de traits qui appartiennent à des civilisations différentes. […] Homère et Virgile avaient trouvé les traits de leurs dieux, comme Raphaël l’ineffable beauté de ses Vierges, au fond des esprits et des cœurs de leurs contemporains.
Il a tous les traits du génie autochtone de son pays, et même les vices de ce génie. […] C’est Hogarth le moraliste, Hogarth pour l’inspiration, le jet, la manière de regarder les hommes et les choses ; car pour le détail, pour l’appuyé du trait, pour la netteté, pour l’ordre de la composition, ce n’est plus Hogarth, le positif et réaliste Hogarth, brutal, mais réfléchi, profondément réfléchi, et froid dans sa brutalité. […] Il a, de temps en temps, et souvent même, un trait, un coup à percer la toile et l’homme ou la chose qu’il retrace ; puis il glisse et devient confus. […] Heureusement que le trait caricaturesque savait crever chez Carlyle ces deux brouillards superposés. […] Est-ce là de la pauvreté d’imagination, qui abuse d’un trait heureux et ne peint qu’une fois pour toutes ?
Certains traits seront conservés, d’autres altérés, d’autres complètement omis. […] Cette couleur est encore bien plus frappante dans Empédocle, qui représente trait pour trait le théurge oriental. […] Les uns me demandent des oracles, les autres, le remède des maladies cruelles dont ils sont tourmentés. » Les procédés par lesquels se forme sa légende miraculeuse rappellent trait pour trait ceux de l’Orient. […] L’œuvre belle est celle qui représente, sous des traits finis et individuels, l’éternelle et infinie beauté de la nature humaine. […] Je ne relèverai qu’un trait entre plusieurs.
Énergie, grandeur, grossièreté, vices et bassesses, ces traits en eux de la nature romaine corrompue sont envisagés d’un coup-d’œil ferme et recueillis dans une parole en quelque sorte latine elle-même, sobre, positive, et qui n’ajoute rien de moderne aux choses. […] Mais c’est le trait de caractère, la singularité la plus naïve, la plus empreinte de vraie couleur. […] Mais il fallait finir ; le but était atteint, la Corse était peinte ; l’auteur n’a pas craint de se trahir dans le dernier trait et de laisser voir le jeu. […] Le trait est tiré des Nuits attiques (liv. […] Il est aussi une certaine atmosphère intellectuelle, soit pour les sociétés, soit pour les individus ; notre auteur en tient trop peu de compte et, dans les traits précis où il est maître, il s’en passe volontiers.
Sans doute on ne peut pas plus comparer La Bruyère à Molière qu’on ne compare le talent de peindre les caractères à celui de les faire agir et de faire sortir leurs traits de la situation où l’art sait les placer ; mais, supérieur à Molière par l’étendue, la profondeur, la diversité, la sagacité, la moralité de ses observations, il est son émule dans l’art d’écrire et de décrire, et son talent de peindre est si parfait, qu’il n’a pas besoin de comédiens pour vous imprimer dans l’esprit la figure et le mouvement de ses personnages. […] Ce duc avait dit en conversation, à l’occasion de Chapelain et de Cottin, bafoués par Boileau, qu’il faudrait envoyer les poètes satiriques rimer dans la rivière ; et Boileau avait parodié, en 1667, ce trait d’humeur de Montausier. […] Madame de Sévigné, capable d’écrire et qui a écrit des phrases dignes de Racine par leur tendresse et leur pathétique, était assurément aussi capable que La Harpe d’apprécier les beaux traits de cet admirable poêle. […] Mais qu’est-il nécessaire de tant discourir pour prouver que madame de Sévigné n’était en butte aux traits ni de la comédie, ni de la satire des grands poètes du temps ? […] Soyons certains que quand madame de Sévigné ménageait à son ami le cardinal de Retz la lecture de la sa lire de Boileau, elle en avait d’avance la clef, et savait à qui le poète consentait (tout au moins) qu’on appliquât les traits de sa satire.
C’est ainsi que j’ai péri par la plus lamentable mort… » Ce dernier trait si vrai, si vrai à la fois quant à l’image physique et quant au contraste moral qui en ressort (le Roi des rois tué, assommé comme le bœuf qui mange !) […] Parmi les autres femmes qu’aima Méléagre, et dont il nous a déjà énuméré un groupe assez complet, il n’est pas impossible de ressaisir les traits, au moins de quelques-unes, et même des différences assez sensibles de physionomie. […] L’une tombe penchée sur les genoux de la mère, l’autre dans ses bras, l’autre à terre, l’autre à sa mamelle ; une autre, effarée, reçoit le trait en face ; une autre, à l’encontre de la flèche, se blottit ; l’autre, d’un œil qui survit, regarde encore la lumière. […] J’ai tâché de la calquer ici trait pour trait ; mais il est un certain lustre original qui ne se rend pas : idylle sur le printemps. […] Ainsi le printemps de Méléagre n’était pas un idéal dans lequel, comme dans presque tous nos Avril et nos Mai, l’imagination, éveillée par le renouveau, assemble divers traits épars, les arrange plus ou moins, et les achève.
Moyennant ces traits seulement, la valeur avait cours. […] Sa plume court, légère et rapide, lançant le trait malin, mais courant encore. […] C’est ainsi qu’il peint d’un seul trait M. […] Cela, il le fallait, et ce trait était nécessaire. […] C’est là le trait original de M.
Ces grands traits signalent les mœurs ; et c’est à les choisir dans cet ordre rare et élevé que se distingue le génie épique. […] qui ne reconnaît la nature à ces traits de réelle mélancolie ? […] Ce trait d’imagination est sublime. […] Son allure, libre et dégagée, ira droit aux choses ; tous ses traits seront nets, et ses tours concis. […] et l’autre par ce beau trait : enfant déjà héros !
Ce trait allait directement à l’adresse de Mme de Pompadour, qui était à la veille de son établissement à Versailles, et auprès de laquelle Duclos allait avoir accès par son intime ami l’abbé de Bernis. […] Pourquoi omet-il ce trait qu’avait ajouté le docte abbé, et qui caractérise un goût de Louis XI : « Il fit venir ses livres de Dauphiné ? […] Comparé à son devancier, Duclos ne saurait être défini qu’un abréviateur avec trait. […] Ici il ne fait pas comme avec l’abbé Le Grand, il ne prête pas du trait, il en ôte plutôt. […] Duclos, qui ne le cite guère que pour le critiquer, aurait dû dire : « Je l’abrège, je le tronque, je le copie à chaque page, et, si je vous intéresse en y mêlant çà et là quelques traits de moi, honneur avant tout à lui !
J’essayerais vainement d’en donner l’analyse, car c’est une analyse déjà, mais dont chaque trait est groupé, rapporté à son lieu et serré dans une trame. On comprend en effet que les femmes du xviiie siècle, tout en ayant quelques traits communs ne restent pas les mêmes pendant toute cette durée et se distinguent entre elles par des nuances infinies. […] Elle se dérobe à l’absolu de la ligne ; elle sort, pour ainsi dire, du trait où elle était enfermée ; elle s’échappe et rayonne dans un éclair. […] Nous allons essayer, après tant d’autres, de repasser, nous aussi, sur les traits de ce caractère et de cette figure digne de mémoire et qui mérite la gravure. […] Je dois dire pourtant que, dans la pensée de l’auteur, ce portrait de la maréchale d’Estouteville se rapportait bien plus en réalité à la maréchale de Beauvau ; il n’est pas défendu de croire que la maréchale de Luxembourg, qu’on crut généralement y reconnaître, y était pour quelques traits.
Considérons leurs traits. […] Soit par exemple un dessin au trait. […] Quelques traits noirs sur du papier blanc. […] Il marquera par exemple le contour des objets par un trait. […] Il en a simplement indiqué la masse par un grand trait régulier.
Mais leur importance se marque encore mieux par un autre trait. […] Si dans ce faisceau on omet tous les traits personnels, le reliquat est la race, c’est-à-dire un caractère présent dans cet individu et dans beaucoup d’autres. […] Les idées générales qui sont des modèles I Une autre classe d’idées générales présente d’autres traits et se forme par un autre procédé. […] Y a-t-il quelque part un groupe d’unités réelles auquel s’adapte, trait pour trait, ce groupe d’unités mentales ? […] Nous le détachons et nous le notons au moyen de symboles, qui tantôt sont les noms de surface, ligne et point, tantôt sont une classe d’objets sensibles, fort maniables, choisis pour tenir lieu de tous les autres, la surface réelle d’un tableau noir ou d’un papier blanc, le mince tracé d’un trait de craie ou d’encre, la très petite tache que laisse sur le papier ou sur le tableau l’attouchement momentané de la plume ou du crayon. — La tache étant exiguë, nous sommes tentés de ne point faire attention à sa longueur ni à sa largeur, qui sont réelles ; par cette omission, nous en faisons involontairement abstraction, et nous n’avons pas de peine à traiter la tache comme un point. — Le tracé étant fort effilé, nous sommes disposés à ne point nous inquiéter de sa largeur, qui est réelle ; par cette omission, nous la retranchons, et, sans efforts, nous en venons à considérer le trait comme une ligne. — Le tableau et le papier étant tout à fait plats et unis pour notre œil et notre main, nous n’éprouvons aucune sensation qui nous avertisse de leur épaisseur ; par cette omission, nous la supprimons, et nous sommes tout portés à regarder le tableau et le papier comme de vraies surfaces. — De cette façon, le tableau, le trait étroit, la petite tache de craie deviennent des substituts commodes.
Ils ont sçu l’orner par des traits de poësie nouveaux, et qui paroissent néanmoins tellement propres au sujet, qu’on est surpris que le premier peintre qui a medité sur la composition d’un crucifiment, ne se soit pas saisi de ces idées. […] Cependant le Poussin introduit dans son tableau du crucifiment un mort sortant du sepulchre, sans tirer de l’apparition de ce mort le trait de poësie, que Monsieur Coypel en a tiré. […] Le genie de La Fontaine lui fait rencontrer dans la composition de ses fables, une infinité de traits qui paroissent si naïfs et tellement propres à son sujet, que le premier mouvement du lecteur est de croire qu’il les eut trouver aussi bien que lui, s’il avoit eu à mettre en vers le même apologue.
On le peint à grandes touches, on en exagère les traits. […] Ses bras admirables ; ses tons alternativement familiers, perçans & précipités ; ses gestes, peut-être désordonnés ; cet oubli d’elle-même auquel elle a recours, & qui, en certaines occasions, est le dernier effort du sentiment ; mille traits vraiment sublimes, mais gâtés, selon quelques critiques, par des petitesses, la caractérisent dans Rodogune, Cornélie, Athalie, Mérope, Sémiramis. […] On en voit, surtout parmi les missionnaires, qui, par des tons trop familiers, avilissent la dignité de la chaire. » A ces traits peut-on ne pas reconnoître la plupart de nos prédicateurs ? […] Il avoit des traits uniques. […] Quant aux célèbres prédicateurs vivans, il doit les étudier, se souvenir que les qualités qu’on estime le plus dans un prédicateur, sont une expression noble & vraie, les traits du visage, une belle prononciation, un débit aisé, naturel, intéressant.
Ce sont de ces traits qui valent un tableau tout entier. […] Puis vient ce trait de satire contre l’homme et contre ses prétentions à l’empire sur les animaux, reproche qui est assez grave à leurs yeux pour justifier leur roi d’avoir mangé le berger même. […] C’est à ce trait et à quelques autres de la même espèce que La Fontaine fait allusion en parlant du lion de cette fable. […] Ce sont là de ces traits qui n’appartiennent qu’à un grand poète. […] C’est une peinture de mœurs qui est encore fidèle de nos jours ; et ce dernier trait : Pour se faire annoncer ce que l’on desirait, développe les derniers replis du cœur humain.
Il n’est pas vrai, malheureusement, qu’on ne soit jamais entraîné que par les qualités qui promettent une ressemblance certaine entre les caractères et les sentiments : l’attrait d’une figure séduisante, cette espèce d’avantage qui permet à l’imagination de supposer à tous les traits qui la captivent, l’expression qu’elle souhaite, agit fortement sur un attachement, qui ne peut se passer d’enthousiasme ; la grâce des manières, de l’esprit, de la parole, la grâce, enfin, comme plus indéfinissable que tout autre charme, inspire ce sentiment qui, d’abord, ne se rendant pas compte de lui-même, naît souvent de ce qu’il ne peut s’expliquer. […] Ce funeste trait de lumière frappe la raison avant d’avoir détaché le cœur ; poursuivi par l’ancienne opinion à laquelle il faut renoncer, on aime encore en mésestimant ; on se conduit comme si l’on espérait, en souffrant, comme s’il n’existait plus d’espérances ; on s’élance vers l’image qu’on s’était créée ; on s’adresse à ces mêmes traits qu’on avait regardés jadis comme l’emblème de la vertu, et l’on est repoussé par ce qui est bien plus cruel que la haine, par le défaut de toutes les émotions sensibles et profondes : on se demande, si l’on est d’une autre nature, si l’on est insensé dans ses mouvements ; on voudrait croire à sa propre folie, pour éviter de juger le cœur de ce qu’on aimait ; le passé même ne reste plus pour faire vivre de souvenirs : l’opinion qu’on est forcé de concevoir, se rejette sur les temps où l’on était déçu ; on se rappelle ce qui devait éclairer, alors le malheur s’étend sur toutes les époques de la vie, les regrets tiennent du remords, et la mélancolie, dernier espoir des malheureux, ne peut plus adoucir ces repentirs, qui vous agitent, qui vous dévorent, et vous font craindre la solitude sans vous rendre capable de distraction. Si, au contraire, il a existé dans la vie un heureux moment où l’on était aimé ; si l’être qu’on avait choisi était sensible, était généreux, était semblable à ce qu’on croit être, et que le temps, l’inconstance de l’imagination, qui détache même le cœur, un autre objet, moins digne de sa tendresse, vous ait ravi cet amour dont dépendait toute votre existence, qu’il est dévorant le malheur qu’une telle destruction de la vie fait éprouver ; le premier instant où ces caractères, qui tant de fois avaient tracé les serments les plus sacrés de l’amour, gravent en traits d’airain que vous avez cessé d’être aimé ; alors, que comparant ensemble les lettres de la même main, vos yeux peuvent à peine croire que l’époque, elle seule, en explique la différence, lorsque cette voix, dont les accents vous suivaient dans la solitude, retentissaient à votre âme ébranlée, et semblaient rendre présents encore les plus doux souvenirs ; lorsque cette voix vous parle, sans émotion, sans être brisée, sans trahir un mouvement du cœur, ah ! pendant longtemps encore la passion que l’on ressent rend impossible de croire qu’on ait cessé d’intéresser l’objet de sa tendresse : il semble que l’on éprouve un sentiment qui doit se communiquer ; il semble qu’on n’est séparé que par une barrière qui ne vient point de sa volonté ; qu’en lui parlant, en le voyant, il ressentira le passé, il retrouvera ce qu’il a éprouvé ; que des cœurs qui se sont tout confiés, ne peuvent cesser de s’entendre, et rien ne peut faire renaître l’entraînement dont une autre a le secret, et vous savez qu’il est heureux loin de vous, qu’il est heureux souvent par l’objet qui vous rappelle le moins ; les traits de sympathie sont restés en vous seule, leur rapport est anéanti. […] Si la beauté leur assure des succès, la beauté n’ayant jamais une supériorité certaine, le charme de nouveaux traits peut briser les liens les plus doux du cœur ; les avantages d’un caractère élevé, d’un esprit remarquable, attirent par leur éclat, mais détachent à la longue tout ce qui leur serait inférieur.
En effet, la nature ne nous montre que des masses lumineuses ; le trait n’existe pas en soi et suppose l’effort de l’homme qui l’abstrait du milieu ambiant, — je ne prétends pas donner cela comme une découverte ; — le trait implique un geste caché. […] Par ce mot attitude, et faute d’un autre, je veux désigner la pose stable et harmonieuse ; composée, certes, de traits subjectifs, elle nie chacun d’eux en leur opposant leur propre unité par la proportion. […] Si nous supposons deux peintres maîtres de leur art, usant de la même technique — car il ne s’agit pas ici de la « manière » — et placés devant le même site ou devant le même groupe de personnages, ils en restitueront également les proportions et dans leurs tableaux les rapports des tons lumineux, les « valeurs » seront identiques ; mais les deux œuvres différeront par les qualités du trait et par le coloris. […] Il en est dont les traits matériels s’adoucissent jusqu’à disparaître, mais pour suggérer au fond des pâles brumes du souvenir une incertaine silhouette lentement dressée ou qui s’incline, on le dirait, sans se mouvoir. […] Vielé-Griffin regarde plus immédiatement autour de lui ; sans la copier, en la résumant par des traits significatifs, c’est dans la vivante nature qu’il trouve les formes de ses symboles et les paysages dont elles s’environnent.
J’en crois voir quelques traits, mais leur ombre m’abuse. Il ne faut pas voir quelques traits de la moralité d’un Apologue, il faut voir l’image toute entière. […] Mais nous avons déjà vu plusieurs traits sanglans de satire contre l’humanité : et ce dernier montre assez ce qu’il pensait des hommes. […] C’est-là un trait charmant d’amitié, de ne pas croire à l’oubli, aux torts, au refroidissement de ses amis. […] Mais ce qui est au-dessus de tout, c’est ce trait de poésie vive et animée, qui suppose que des arbres coupés et, pour ainsi dire, mis à mort, vont revivre sur les bords du Styx.
On oublie l’allégorie ; et ce n’est plus un homme percé d’une métaphore, mais un homme percé d’un trait réel qu’on aperçoit. La première fois que vous rencontrerez sous vos yeux, la Saison de l’Albane où ce peintre a fait descendre Jupiter dans les antres de Vulcain, au milieu des Amours qui forgent des traits, et que vous verrez ce dieu blessé au milieu du corps d’un de ces traits, par un petit Amour insolent, vous me direz l’effet que vous éprouverez à l’aspect de cette flèche à demi enfoncée dans le corps et dont le bois paraît à l’extérieur.
Tout cela est raconté avec charme, poésie et vérité, hors pourtant deux ou trois traits qui déparent ce gracieux tableau. […] En ce qui est de cette mère de Charlotte, c’est à la fois un trait de mauvais goût et l’indice d’un cœur médiocrement touché. La fin de l’épisode de Charlotte est gâtée par d’autres traits de mauvais goût encore et de fatuité. […] il supprime d’un trait tant de femmes tendres, dévouées, qui lui ont donné les plus chers et les plus irrécusables gages. […] Il écrit à Céluta pour lui dire qu’il ne l’aime pas, qu’il ne peut pas l’aimer, et, connaissant la nature du cœur des femmes, il se sert de ce moyen pour lui lancer un dernier trait, pour l’émouvoir et la remuer davantage.
Tous ses traits annoncent un grand caractère. […] C’est un des traits curieux de la vie de Rulhière et l’un des témoignages les plus frappants de la folie de Jean-Jacques. […] À ce dernier trait un peu chargé, ne dirait-on pas que c’est déjà le Rousseau de la comédie qui parle ? […] Domergue, me rend perplexe à cet égard. » — « Comme il vous plaira, monsieur, comme il vous plaira ; bonsoir. » Toute cette scène est très agréablement contée ; elle fait plus d’honneur pourtant à l’esprit de Rulhière qu’à son cœur, et lui-même il nous apparaît en tout ceci comme un homme qui cherche partout trop visiblement des traits et des embellissements pour l’ouvrage qu’il compose. […] Rulhière, vers le même temps, put retrouver quelques-uns de ces traits de méfiance dont il prenait note, dans un Rousseau plus jeune, mais également atteint du soupçon, dans Bernardin de Saint-Pierre qu’il avait beaucoup connu en Russie.
C’est par ce trait qu’il ouvre son livre. […] Est-ce lorsqu’il prononce avec énergie les traits et les gestes des manants grossiers qu’il copie si naïvement ? […] Trouve-t-on là de jolies pointes, de petites équivoques, des traits, et le fini précieux qui les charment ? […] La répétition du même trait annonce que Regnard comptait beaucoup sur sa gaîté. […] » Ce dernier trait n’est point une saillie d’esprit, mais l’ironie profonde du génie.
N’oublions pas surtout ce trait qui donne tant à penser : … Fait périr maint bateau ; Le tout au sujet d’un manteau. […] Trait admirable ; la tortue non contente d’être victorieuse, brave encore le vaincu. […] La difficulté de loger la discorde, parce qu’il n’y avait point de couvent de filles, est un trait imité de l’Arioste, qui la loge chez les moines ; mais La Fontaine qui voulait la loger chez les époux, a su tirer parti de cette imagination de l’Arioste. […] La description de divers changemens que le temps amène dans la toilette de la veuve ; ce vers : Le deuil enfin sert de parure ; Et enfin le dernier trait : Où donc est le jeune mari ?
Ce n’est que dans l’intervalle de ces deux âges, depuis le commencement de la parfaite adolescence jusqu’au sortir de la virilité, que l’artiste s’assujettit à la pureté, à la précision rigoureuse du trait, et que le poco più ou poco meno, le trait en dedans ou en dehors fait défaut ou beauté. […] J’ai connu un jeune homme plein de goût qui avant de jeter le moindre trait sur sa toile, se mettait à genoux et disait, Mon Dieu, délivrez-moi du modèle. […] C’en sera assez pour qu’il sente que les chairs sur les os et les chairs non appuyées ne se dessinent pas de la même manière, qu’ici le trait est rond, là comme anguleux ; et que s’il néglige ces finesses, le tout aura l’air d’une vessie soufflée ou d’une balle de coton.
Mais ses traits ne touchaient qu’aux abus et n’allaient point jusqu’au dogme. […] Ronsard, qui ne l’aimait pas, à cause de ses traits contre les superstitieux d’antiquité, lui en fait une en vers français, dont les derniers sont piquants. […] A-t-il même pris soin de conserver à ses personnages les traits et les proportions qu’il leur a donnés d’abord ? […] De grands défauts l’en écartent aux yeux de quiconque ne sépare pas la supériorité intellectuelle de la supériorité morale, et ne veut pas reconnaître le beau là où il ne se montre pas toujours sous les traits de l’honnête. […] Le trait le plus touchant du caractère de Molière, c’est le contraste du sérieux de son humeur et de la gaieté si franche de son esprit.
Comme les peintures qu’on a données de ce genre de beautés naturelles n’ont commencé que tard dans notre littérature ; comme avant Jean-Jacques, Buffon et Bernardin de Saint-Pierre, on n’en trouve que des éclairs et des traits épars, sans ensemble, il faut bien que la tournure générale des idées et des croyances y ait influé. […] Ils ont ces interminables chants de bienvenue au renouveau, des traits çà et là d’observation naïve. […] Ils vous diront d’un blanc manteau, qu’il est plus blanc que neige sur gelée ; et d’une châtelaine, qu’elle eut plus blanc col et poitrine que fleur de lis ni fleur d’épine ; mais ce sont là des traits et non pas un tableau. […] était-il de peu d’esprit, à part son talent, et, comme il est dit dans d’illustres Mémoires où chaque trait porte, d’un caractère encore au-dessous de son esprit ? […] Bien des pages de Paul et Virginie ne sont que le composé poétique et coloré de ce dont on a dans le Voyage le trait réel et nu.
Les pièces de Garnier offrent d’ailleurs quelques traits de sensibilité et de noblesse, dont il a tout l’honneur. […] Le trop d’esprit est le trait de gens qui ont besoin de justifier leur passion ou de s’exagérer leur devoir. […] Elle y est née de cet amour pour les grandes choses et de cette passion pour les grands hommes, deux traits de notre caractère national. […] Voltaire se tire de l’explication par un trait plaisant, qui d’ailleurs a le mérite de donner une vive idée de ces inégalités du génie de Corneille. […] Qu’est-ce en effet que la force du vers, le raisonnement, le sentiment, sinon autant de traits de ressemblance avec la vie ?
Thalie signifie la verde, agréable et gentille beauté : à savoir celle des linéaments bien conduits et des traits, desquels la verde jeunesse est coutumière de plaire. […] Tout à côté, la dispute du chevrier et du berger, Comatas et Lacon, a comme trait dominant la note aigre, stridente, que racheté aussitôt après la charmante mélodie des deux jeunes bouviers adolescents, Damœtas et Daphnis, qui semblent chanter à l’unisson. […] Virgile en a rendu quantité de traits délicats, non pas tous cependant. […] Les traits qui suivent nous sont connus par Virgile, qui les a semés en plus d’une églogue ; mais ici ils se tiennent, ils se rapportent à l’ensemble des personnages, et leur donnent de la réalité jusque dans l’idéal ; c’est le caractère constant de Théocrite. […] Chaque trait en est de feu, et l’ensemble offre cette beauté fixe qui vit dans le marbre.
Sa tête et le port de sa tête rappelaient trait pour trait en femme celle de l’Apollon du Belvédère en homme ; on voyait que sa mère, en la portant dans ses flancs, avait trop regardé les dieux de marbre. […] Elle y respira à longs traits partout l’enthousiasme qu’elle y répandait elle-même. […] Tout le cœur d’une mère se lisait dans sa physionomie fiévreuse et dans ses traits pâlis. […] Elle aurait été une grande mère pour un fils, elle aurait eu le lait des lions ; car le trait dominant de son caractère, c’était l’héroïsme. […] Ses cheveux étaient aussi touffus et aussi blonds, ses bras aussi beaux, ses traits aussi fins, le regard aussi resplendissant de lumière et d’âme.
Quoiqu’il manie la période excellemment, sa forme préférée, c’est le style aiguisé, incisif, le trait rapide et qui perce : on n’a pas de peine à passer de là à Montesquieu. […] Aussi, tout naturellement, les princes que Fénelon voulut rendre odieux au duc de Bourgogne, pour le détourner de les imiter, eurent-ils tous quelques traits du grand roi : les ennemis intérieurs et extérieurs de Louis XIV eurent raison d’en être frappés. […] L’éducation du duc de Bourgogne et les lettres de direction de Fénelon nous dénoncent un second trait de cette nature, qui n’est à vrai dire qu’une transformation du premier : l’amour-propre devient esprit de domination. […] Le troisième trait qui enveloppe et fond les deux autres, c’est l’amour. […] Des biens de fortune : « Arfure cheminait seule », etc. : le trait final, et le curé l’emporte, est entièrement objectif.
Fontenelle, dans le Dialogue entre Socrate et Montaigne, la touchait en quelques traits supérieurs et comme aurait pu faire un Saint-Évremond. […] Après l’exposé lumineux des systèmes, après maint trait de biographie touchant et simple, de quelle manière Fontenelle s’avise-t-il de terminer sa notice et de la conclure ? […] Les trois ou quatre Lettres du chevalier d’Her…, qui roulent sur le mariage clandestin d’une prétendue cousine, offrent encore un trait caractéristique de cette jeunesse de Fontenelle. […] Un trait vif, léger et malin, serait pardonnable ; mais quatre lettres dans lesquelles il étend son grain de libertinage, c’est trop. […] Tout ce qui n’était pas une idée neuve en réfléchissant, un trait piquant ou une épigramme en causant, ne l’intéressait point.
Mais vous n’êtes pas ce troisième, et même, à vrai dire, personne ne l’est, puisque les traits sont assez généraux pour convenir à deux ou trois personnes dont aucune ne serait vous. Quant au paragraphe qui suit ces trois portraits, et où vous auriez, m’a-t-on dit, trouvé quelque trait offensant, une lecture un peu moins prévenue vous aurait fait voir qu’il ne s’agissait plus des trois portraits précédents, mais de traits nouveaux s’adressant à d’autres caractères qui ne sont qu’à peine indiqués, et auxquels on ne pourrait, à moins d’être bien devin, rattacher aucun nom propre. […] Au fond, voyez-vous, c’est là ma prédilection secrète, mon courant caché ; et quand toutes mes digressions dans les bouquins me fournissent jour à un sonnet neuf, à un mot à bien encadrer, à un trait heureux dont j’accompagne un sentiment intime, je m’estime assez payé de ma peine ; et, en refermant mon tiroir à élégies, je me dis que cela vaut mieux après tout que tous les gros livres d’érudition, lesquels je veux pourtant faire de plus en plus profession d’estimer. — Mais, il faut en venir, mon cher Béranger, à l’objet de cette lettre.
Il y a d’autres traits du même genre, quoique en petit nombre, dans ces mémoires. […] De profondes différences sont à remarquer entre ces deux monuments, et ces différences sont de nouveaux traits de l’esprit français, de nouveaux progrès de la langue. […] Il remplit les lacunes des témoignages ; il complète une description dont les traits généraux lui ont été fournis : on lui avait donné une ébauche, il en fait un tableau. […] D’autres traits de ses mœurs lui sont communs avec les hauts seigneurs de son temps. […] Je le croirais à plus d’un trait de ressemblance entre la pièce d’où sont tirés ces détails et le Roman de la Rose.
La plûpart sont pleins de traits d’histoire, de pensées de philosophes, d’imaginations poétiques & fabuleuses. […] Il y a peu de ces traits qui peignent d’un mot, de ces expressions de génie qui présentent une vérité commune sous une face toute nouvelle. […] Il y a quelques traits qui choquent, & qui marquent un esprit assez singulier. […] On y rencontre quelques-uns de ces grands traits dignes des beaux jours de l’éloquence françoise ; mais le style ne répond pas toujours à cette élévation. […] Il y a plus de choix dans le Dictionnaire apostolique, moins de choses inutiles, & plus de traits d’une véritable éloquence.
. — Trait de ressemblance entre ce gouvernement et l’état des lettres. — § II. […] Influence du gouvernement de Louis xiv. — Trait de ressemblance entre ce gouvernement et l’état des lettres. […] Chaque chef-d’œuvre réfléchit tous les traits de l’idéal. […] A aucune époque l’amour n’a été mieux peint, ni sous des traits plus nobles et plus touchants. […] C’est par ce trait que se distingue, entre tant de figures imposantes, la figure du grand critique.
Qu’on ne l’accuse point de malignité : il est si naturel à un esprit droit & juste, à un cœur ferme & généreux, d’éprouver les mouvemens du dépit, à la vue des usurpations ; le zele pour la gloire des Lettres & les intérêts de l’équité est si prompt à s’enflammer contre des injustices absurdes & multipliées, que l’esprit vient comme de lui-même au secours de la raison outragée ; & du mélange de sa vivacité unie à la sensibilité du cœur, naissent ces traits vigoureux qui impriment tantôt le ridicule, tantôt l’opprobre sur les travers ou sur les vices. […] Tantôt agréable & piquant, un bon mot lui suffit pour faire sentir l’absurdité d’un Ouvrage : tantôt plein de force & d’énergie, un seul trait parti de sa plume devient le fléau du vice & l’hommage de la vertu. […] N’en trouve t-on pas mille traits dans son Art poétique, où il a eu le talent de répandre les fleurs de l’imagination sur l’aridité des préceptes, d’enrichir les détails de quantité de traits, dont le moindre annonce l’Homme de génie ?
Et que l’idée serait terne, si le trait satirique n’avait l’ample ouverture de l’alexandrin héroïque ! […] L’esquisse de Boileau est fidèle, impartiale, sans méchanceté, relevée tout au plus d’une pointe de gaieté malicieuse : le trait est un peu appuyé, sans devenir une charge. […] Il n’y a même pas d’esprit dans tout cela, ou s’il y en a, c’est de l’esprit de peintre, un esprit qui n’est pas dans les idées, leurs qualités et leurs rapports : il est dans le coup de crayon, dans le trait qui accuse un contour expressif, dans le rendu dont la vigoureuse fidélité fait le comique. […] D’autres fois, le poète ne peut se tenir d’ajouter un trait plaisant à l’image qu’il évoque : c’est comme une intention littéraire en peinture, et cette voix qui veut nous amuser, nous distrait de la contemplation de l’objet qui d’abord avait été seul mis devant nos yeux. […] Soudain le trait devient plus net et plus vigoureux, la couleur plus vive ; on sent je ne sais quelle flamme où se trahit l’allégresse de l’artiste qui sait ce qu’il veut faire et est sûr de le faire.
Mais il manque à ce recueil ce qui fait le principal mérite des récits qui touchent au licencieux, je veux dire la grâce et la délicatesse qui en déguisent les traits les plus grossiers, et permettent de s’en amuser sans embarras. […] La grâce et la délicatesse sont, au contraire, le trait original et le charme de l’Heptaméron. […] Elle lui suggéra l’idée de certains contes qui ne sont pas les moins piquants de l’Heptaméron, où elle poursuit de traits perçants la débauche des moines, leur orgueil, leurs vices, sans oublier leurs faux miracles. […] Il y a beaucoup de traits communs dans la vie de Marot et celle de Villon. […] Nous nous reconnaissons dans Marot à d’autres traits encore.
En effet, combien de traits vraiment éloquents qui n’ont pour but que d’émouvoir, et nullement de convaincre ? […] Les règles ne sont destinées qu’à être le frein du génie qui s’égare, et non le flambeau du génie qui prend l’essor ; leur unique usage est d’empêcher que les traits vraiment éloquents ne soient défigurés par d’autres, ouvrages de la négligence ou du mauvais goût. […] Aussi les traits vraiment éloquents sont ceux qui se traduisent avec le moins de peine, parce que la grandeur de l’idée subsiste : toujours sous quelque forme qu’on la présente, et qu’il n’est point de langue qui se refuse à l’expression naturelle et simple d’un sentiment sublime. […] L’éloquence ne consiste proprement que dans des traits vifs et rapides. ; son effet est d’émouvoir vivement, et toute émotion s’affaiblit par la durée. […] Qu’il soit néanmoins sobre et circonspect dans l’usage de cette finesse même ; surtout qu’il se l’interdise sévèrement dans les sujets susceptibles d’élévation ou de véhémence, qui n’exigent qu’un coloris mâle et des traits forts et marqués ; la finesse d’expression dans ces sortes de sujets en bannirait la noblesse, et ne servirait qu’à les énerver sans les embellir.
Je n’aime pas ces traits qui conviennent également à deux conditions très différentes ; ils ne caractérisent ni l’une ni l’autre. […] Trait charmant, le sublime du genre. […] Quelques traits de plus de cette force, et le joueur serait un caractère. […] Vrais valets de comédie d’ailleurs, copiés sur ce type, mi-parti de traits de convention et de traits de nature, que Molière avait rajeuni. […] Mais il y a des traits de tous ces caractères dans chacun de nous.
Autres traits essentiels. […] La vieillesse a pour trait saillant, au point de vue biologique, le déclin de l’activité vitale produit par le ralentissement des échanges et de la circulation. […] Tous ces traits de l’imagination dépravée se retrouvent dans l’imagination des époques de décadence. […] Tous ces traits et tous ces vices se retrouvent dans les littératures de décadence. […] II. — Un autre trait des décadences, comme nous l’avons déjà dit, c’est l’amour exagéré de l’analyse, qui finit par être une force dissolvante.
Or, ce n’est certainement qu’au moyen d’une licence poétique que M. de Lamartine peut venir se représenter à nous, dès le début, sous ces traits d’une chronologie complaisante et adoucie. […] Le Napoléon des dernières années y est parfois avec des traits où M. de Lamartine a combiné son style nouveau et quelque chose de ses anciennes préventions ; il a retraduit dans sa manière moderne son ancienne poésie. […] Son menton solide et osseux portait bien la base des traits. […] Lubis, appartenant à la Bibliothèque nationale, a été prêté à M. de Lamartine, lequel a jugé à propos d’y marquer d’un trait de plume (pour plus de brièveté) les passages qu’il avait à y emprunter : j’ai entre les mains cet exemplaire avec ces passages indiqués, et le mot fin ou finir là écrit de la main du rapide historien. […] Tous ces portraits séduisent à première vue, et offrent des traits heureux, des couleurs neuves : mais, en général, ils sont outrés et passent la mesure.
Les traits dont les peint Einhard sont d’ailleurs exacts. […] Ces trois traits si précis, communs à l’histoire et à l’épopée, ne peuvent venir à celle-ci que de l’impression directe des faits. […] Tous les traits indiqués dans le récit évangélique devinrent le point de départ d’amplifications plus ou moins poétiques. […] Ici l’imagination populaire a heureusement modifié le modèle, et a créé un trait vraiment fantastique et curieux. […] Il se rattache à cette forme du récit, et s’écarte de celle que nous offre Barlaam par des traits incontestables.
Le Poëte provincial, bien loin de se fâcher de ce trait, ne fit qu’en plaisanter dans les Lettres qu’il écrivoit à Paris ; & lorsqu’il vint y faire un voyage, il alla voir Boileau, soutint devant ce Satirique son caractere enjoué, & ils se séparerent bons amis. On ne lit plus aujourd’hui les Vers ni la Prose de le Pays, quoiqu’on y rencontre des traits divertissans, préférables aux fausses gentillesses qui amusent aujourd’hui.
La complaisance qu’on a pour ses idées, la peine qu’on éprouve à se retrancher, à repousser un trait d’esprit ou une pensée originale, font qu’on manque sans cesse aux lois de la proportion, qu’on développe les parties au gré de sa fantaisie et de son plaisir, non pas selon leur importance, et qu’on produit des œuvres boiteuses, bossues, des monstres difformes qui ne se tiennent pas debout et qui ne sauraient vivre. […] Tout ornement qui n’est qu’ornement, une beauté qui n’est que belle, un trait d’esprit qui n’est mis que pour être spirituel, tout cela est mauvais et doit être écarté. […] C’est pour cela qu’on a dit que les beaux vers étaient la marque des mauvaises tragédies : non pas que les vers des bonnes tragédies ne soient beaux aussi, mais ce sont surtout des vers de situation, des traits de caractère, au lieu que les mauvaises tragédies ont seules ces beaux vers, qui ne sont que de beaux vers, qui ne jaillissent ni de la situation ni des caractères, qui, saisissant l’esprit et la mémoire du spectateur, le divertissent de la pièce avec laquelle ils n’ont pas de rapport nécessaire. […] Que valent ces traits : Rodrigue, as-tu du cœur ? […] Invention de personnages, indication de caractères, exposition dramatique, vivacité piquante ou comique de dialogue, anecdotes amusantes, plaisanteries, traits d’esprit, il n’est rien qui ne pousse en avant le raisonnement et n’ajoute aux résultats déjà acquis.
L’orgueil étant désintéressé, elle se laissa aller à ce que pensait et pratiquait le couvent, soit par cette disposition à sympathiser avec des opinions générales, disposition qui formait un des traits de son caractère, soit par cette ambition d’estime, d’affection, de considération qui lui était propre aussi, et qui commençait à se développer en elle. […] Ce fut alors que le désir de la conserver et de retendre devint en elle une passion qui a formé le trait saillant de son caractère. […] Elle avait tous les traits du visage agréables et surtout la bouche, des yeux et un regard enchanteurs, une taille élégante, qu’elle conserva belle et noble jusqu’à cinquante ans. […] À sa beauté elle joignait la grâce qui faisait passer dans ses traits, dans ses mouvements, dans sa parole quelque chose de l’âme la plus douce, la plus sensible, et de l’esprit le plus sage et le plus délié. […] Si, par la méthode que j’ai suivie, j’ai découvert une autre madame de Maintenon que celle dont nous avons été entretenus jusqu’à présent, si seulement je puis faire remarquer quelques traits échappés aux recherches et à la sagacité d’un biographe tel que M.
Des yeux d’un bleu noir comme ceux de ma mère ; des traits accentués, mais adoucis par une expression un peu pensive, comme était la sienne ; un éblouissant rayon de joie intérieure éclairant tout ce visage ; des cheveux très souples et très fins, d’un brun doré comme l’écorce mûre de la châtaigne, tombant en ondes plutôt qu’en boucles sur mon cou bruni par le hâle (je supprime, j’en demande pardon à l’auteur, quelques détails sur la finesse de la peau)… En tout, le portrait de ma mère avec l’accent viril dans l’expression : voilà l’enfant que j’étais alors. […] Tantôt ses traits sont si délicats, ses yeux noirs ont un regard si candide et si pénétrant ; sa peau transparente laisse tellement apercevoir sous son tissu un peu pâle le bleu des veines et la mobile rougeur de ses moindres émotions ; ses cheveux très noirs, mais très fins, tombent avec tant d’ondoiements et des courbes si soyeuses le long de ses joues jusque sur ses épaules, qu’il est impossible de dire si elle a dix-huit ou trente ans. Un spirituel romancier qui, de nos jours, a inventé un genre, M. de Balzac, a décrit aussi la femme de trente ans, et il ne l’a pas fait avec des traits plus choisis et plus délicieusement disposés ; mais, en la décrivant, il ne décrivait pas une mère. […] Ce premier amour avec Lucy, sous l’invocation d’Ossian, est une jolie esquisse, d’un trait pur et simple ; c’est finement touché : il y a du sourire, un peu de malice ; en un mot, de ces qualités qu’excède aisément le talent de M. de Lamartine, mais qui font d’autant plus de plaisir à rencontrer chez lui. […] Les cœurs s’ouvrent sans défiance, ils se soudent tout de suite… » Est-ce Bernardin de Saint-Pierre encore qui dans cette scène, jolie d’ailleurs, où Graziella, pour mieux plaire à celui qu’elle aime, essaie de revêtir la robe trop étroite d’une élégante de Paris, est-ce lui qui viendrait nous dire, après les détails sans nombre d’une description toute physique : « Ses pieds, accoutumés à être nus ou à s’emboîter dans de larges babouches grecques, tordaient le satin des souliers… » Ce défaut, dont je ne fais que toucher quelques traits, est presque continuel désormais chez M. de Lamartine ; il se dessine et reparaît à travers les meilleurs endroits.
Quoiqu’il n’ait pas eu le dessein de reproduire les traits de Mazarin dans ce qu’ils ont d’arrêté, de gravé, de connu, mais bien plutôt dans ce qu’ils ont de fuyant, de mystérieux encore ; quoiqu’il ait dit, avec cette sobriété et ce tact qui sont le goût : « N’abusons pas de l’oncle en parlant des nièces », l’auteur des Nièces de Mazarin n’a pas cependant pensé qu’à elles seules. En groupant toutes ces têtes de femmes autour du beau visage du cardinal Jules, en l’entourant de cette guirlande de fleurs humaines, il nous a éclairé d’un reflet velouté qui nous les achève les traits charmants de ce ministre de la souplesse, de la grâce insinuante et de la flatterie, qui régna sur la France par une femme, et dont la politique fut la force dans la douceur. […] Seulement, par une particularité qui est peut-être un procédé de l’écrivain, les traits qui nous le font bien voir sont comme épars dans le livre et ne se rassemblent guères que dans la pensée du lecteur. […] Le Mazarin qui est ici n’est pas celui de l’île des Faisans et du traité de Munster, le pacificateur de la France, qui recula devant ses ennemis jusqu’à la fuite derrière la frontière, mais qui revint, a dit un grand peintre dans un seul trait, « ramené par l’amour fidèle d’une femme et tenant Louis XIV par la main ». […] Encore une fois, c’est le sourire qui est le trait de ce livre, le sourire qui entre dans le sérieux, et qui en sort pour y rentrer !
Les écrivains secondaires n’y ajoutent que fort peu de traits. […] Le lieutenant général Mayenne se baisse vers le légat, et lui dit à l’oreille « Ce fol icy gastera tout le mystère. » Excellent trait, qui atteint à la fois les chefs et les auxiliaires d’une mauvaise cause. […] J’y reconnais la gaieté satirique de nos pères : rien n’y manque, ni le trait qui déchire, ni le jeu de mots qui assaisonne le sens, ni la pointe pour les goûts un peu grossiers. […] Il en paraît enfin une image dégagée de toutes les formes qu’elle reçoit dans chaque temps particulier, des religions et des sociétés diverses et composée de ces traits généraux et communs qui constituent l’unité de l’homme, si divers par le temps et le lieu. […] C’est du reste, un trait ajouté dans l’édition de 1594, On s’explique qu’il ait manqué dans les premières copies qui coururent en 1593, avant la mort de ce de Rieux.
J’en crois voir quelques traits ; mais leur ombre m’abuse70 . […] Le français-gaulois, si vif pour tout ce qui est détail familier, fine moquerie, trait d’humeur, idées nées du sol et qui ne nous seraient jamais venues du dehors, y tient sa place à côté de ce grand langage, fruit de l’esprit français, alors qu’il est devenu la plus pure image de l’esprit humain. […] La Fontaine décrit à grands traits, avec la fidélité d’une sensation renouvelée plutôt qu’avec l’exactitude d’un calque. […] Il gémit, et, par un trait de naïveté charmante, il se croit seul à gémir : J’ai beau les évoquer, j’ai beau vanter leurs traits, On me laisse tout seul admirer leurs attraits. […] Les deux premiers y cherchaient plus spécialement la vérité dramatique ; Boileau s’y attachait aux traits satiriques, et, dans la morale, à la partie des défenses et des inhibitions plutôt qu’à la partie qui console, ou tout simplement qui instruit sans rien prescrire.
Il est impossible surtout de savoir si les circonstances choquantes d’efforts, de frémissements, et autres traits sentant la jonglerie 740, sont bien historiques, ou s’ils sont le fruit de la croyance des rédacteurs, fortement préoccupés de théurgie, et vivant, sous ce rapport, dans un monde analogue à celui des « spirites » de nos jours 741. […] Ces traits sont surtout caractéristiques dans Marc, qui est par excellence l’évangéliste des miracles et des exorcismes. […] Nous admettrons donc sans hésiter que des actes qui seraient maintenant considérés comme des traits d’illusion ou de folie ont tenu une grande place dans la vie de Jésus. […] L’Évangile apocryphe dit de Thomas l’Israélite porte ce trait jusqu’à la plus choquante absurdité.
Sanlecque, des Vers heureux, de la légéreté, de la finesse, des saillies d’imagination, & des traits de bonne plaisanterie ; mais son sel n’est pas toujours attique, il est souvent fade, ce qu’on ne pardonne jamais à quiconque veut s’égayer aux dépens des autres. […] Un seul trait fera connoître combien il s’inquiétoit peu des commodités de la vie.
Un seul trait lui suffisoit pour peindre une action ; cette belle Strophe, sur le passage du Rhin, en est la preuve. […] Le Roi parle : à sa parole, Plus vîte qu'un trait ne vole, On voit nager nos Guerriers, Et leur ardeur est vive, Que déjà sur l'autre rive Ils ont cueilli les lauriers.
Il a ou il avait des éclairs de nouveauté, de passion, des étincelles d’originalité, surtout une foule de traits heureux, spirituels, malins, de mots qu’il arrange, qu’il aiguise, même lorsqu’il les emprunte, car Latouche manque d’invention et emprunte le plus souvent. […] Il a même emprunté à Millevoye ce trait malicieux qui termine une Épitre à un poëte amateur ; ce dernier avait demandé bonnement à Latouche une préface en vers pour mettre en tête de son recueil de poésies, et le malin introducteur mystificateur lui disait : Imprimez-les vos vers et qu’on n’en parle plus ! Latouche s’est rendu célèbre dans la littérature d’il y a quinze ou vingt ans par une foule de traits pareils, malicieux et même (quelques-uns disent) méchants : il a drapé les ridicules de la jeune École d’alors dans un article critique, intitulé la Camaraderie ; mais il a oublié de dire que ces ridicules de coquetterie et de cajolerie poétique, il les avait autant que personne partagés, caressés, — sauf à les dénoncer ensuite avec esprit, avec fiel aussi et âcreté.
On citera des traits surprenants, des inventions ingénieuses d’enfants, de pauvres d’esprit, d’idiots même, dont un grand amour a peu à peu éclairé, parfois illuminé soudainement l’obscure intelligence. […] Mais ils n’ont pas peint leur souffrance en traits impérissables : c’est la faute de leur esprit et non pas de leur cœur. […] Shakespeare, au fond, a procédé de même ; à la peinture extérieure des émotions il mêle des mots, des traits, des couplets qui nous font pénétrer au-delà du trouble grossier et confus des sens, qui organisent ce désordre, nous le débrouillent et nous font comprendre le jeu régulier de ces ressorts que le hasard seul semblait d’abord mettre en branle.
Ce front bosselé, ce nez indigné, cette lèvre inférieure qui va au-devant de l’objection, cette prunelle tranchante, ce sourcil en zigzag de feu, ce tas de cheveux irrités, cette joue mobile sont mieux que des traits éloquents, ils sont l’éloquence même. […] Paul Maritain La sève qui fécondait sa belle intelligence ne s’est pas ralentie un instant ; et dans les pages suprêmes qu’il traçait de sa main défaillante, lorsque les ombres sinistres du trépas commençaient à pâlir son front, on retrouve la pureté harmonieuse, la fraîcheur de sentiments et d’images, la noblesse et l’élévation de pensées qui resteront comme les traits caractéristiques de son génie.
Il faut néanmoins avouer que l’Auteur a su y répandre des traits d’esprit, de la morale, & quelques saillies d’une imagination pleine d’enjouement. […] Les traits en sont ingénieux, & d’autant plus piquans, qu’ils sont tous fondés sur la vérité : ainsi nous ne dirons pas que le Diable ait mal choisi son Secrétaire.
Quand son éducation critique est suffisante, il est capable de démêler sous chaque ornement d’une architecture, sous chaque trait d’un tableau, sous chaque phrase d’un écrit, le sentiment particulier d’où l’ornement, le trait, la phrase sont sortis ; il assiste au drame intérieur qui s’est accompli dans l’artiste ou dans l’écrivain ; le choix des mots, la brièveté ou la longueur des périodes, l’espèce des métaphores, l’accent du vers, l’ordre du raisonnement, tout lui est un indice ; tandis que ses yeux lisent un texte, son âme et son esprit suivent le déroulement continu et la série changeante des émotions et des conceptions dont ce texte est issu ; il en fait la psychologie. […] Là s’arrête la recherche ; on est tombé sur quelque disposition primitive, sur quelque trait propre à toutes les sensations, à toutes les conceptions d’un siècle ou d’une race, sur quelque particularité inséparable de toutes les démarches de son esprit et de son cœur. […] Il y a donc un système dans les sentiments et dans les idées humaines, et ce système a pour moteur premier certains traits généraux, certains caractères d’esprit et de cœur communs aux hommes d’une race, d’un siècle ou d’un pays. […] Nous pouvons dire avec assurance dans quelles circonstances elle devra renaître, prévoir sans témérité plusieurs parties de son histoire prochaine et esquisser avec précaution quelques traits de son développement ultérieur. […] Il y a un système particulier d’impressions et d’opérations intérieures qui fait l’artiste, le croyant, le musicien, le peintre, le nomade, l’homme en société ; pour chacun d’eux, la filiation, l’intensité, les dépendances des idées et des émotions sont différentes ; chacun d’eux a son histoire morale et sa structure propre, avec quelque disposition maîtresse et quelque trait dominateur.
s’écriait-il aussitôt ; son air charmant et majestueux se répand sur toutes ses actions ; sa maison royale emprunte quelques rayons de sa gloire ; son âge est mûr et parfait ; le travail infatigable lui est devenu naturel… Son amour extrême pour nous sacrifie toutes ses veilles à notre repos, et s’il abrège et méprise le temps du sommeil, c’est parce qu’il le passe sans nous… Ne vous étonnez pas, messieurs, du zèle de ce discours : chaque mot est un trait de flamme… Cela paraissait ridicule, dit de ce ton, même alors, — surtout alors62. […] Si votre style est noble, il est encore plus épiscopal (M. de Noyon, pour le coup, était homme à avoir fourni ce trait-là et à l’avoir indiqué de sa main sur le manuscrit). […] Après l’éloquent panégyrique que vous venez de faire de ce grand prince, je n’obscurcirai point par de faibles traits les idées grandes et lumineuses que vous en avez tracées : je dirai seulement que pendant qu’il soutient seul le droit des rois et la cause de la religion, il veut bien encore être attentif à la perte que nous avons faite, et la réparer dignement en nous donnant un sujet auquel, sans lui, nous n’aurions jamais osé penser. […] répondit-il en souriant, j’espère que Votre Majesté m’y logera une autre fois, car pour celle-ci, je ne suis qu’aux faubourgs. » On voit que ce n’était pas précisément d’esprit ni de trait que manquait M. de Noyon ; mais son trait d’esprit partait encore de sa vanité, de sa plénitude. […] Au milieu des plus heureux traits, il ne se donne pas le temps de mettre sur pied ses phrases.
Saint-Simon, dans ses mémoires, a tellement rendu au vif cette entrée de Fénelon à la Cour, cette initiation dans le petit monde particulier de Mme de Maintenon, des ducs de Beauvilliers et de Chevreuse, cette rapide fortune de l’heureux prélat, sitôt suivie de tant de vicissitudes et de disgrâces, tout ce naufrage d’espérances qui est aujourd’hui une touchante partie de sa gloire, qu’on ne saurait que renvoyer à un tel peintre, et que ce serait profanation de venir toucher à de pareils tableaux, même lorsqu’on peut croire qu’il y a quelques traits hasardés. […] La Bruyère aussi a la faculté de l’observation pénétrante et sagace ; il remarque, il découvre toute chose et tout homme autour de lui ; il lit avec finesse leurs secrets sur tous ces fronts qui l’environnent ; puis rentré chez lui, à loisir, avec délices, avec adresse, avec lenteur, il trace ses portraits, les recommence, les retouche, les caresse, y ajoute trait sur trait jusqu’à ce qu’il les trouve exactement ressemblants. […] Dans l’explication de lui que nous lisons dans ce volume, et par laquelle il s’attache à réduire ces expressions mystiques et légèrement étranges à leur juste valeur, je suis frappé d’un tour habituel qui a déjà été remarqué, et qui est un trait du caractère de Fénelon. […] Des traits sérieux et touchants traversent ces jeux de l’esprit. […] Parmi les plaisanteries qu’on y rencontre, il en est quelques-unes qui ont trait à la querelle des Anciens et des Modernes, laquelle était alors flagrante au sein de l’Académie et qui se rallumait de plus belle, précisément quand la paix se signait en Europe.
Comme ces changements n’ont pour objet que des impiétés du premier ordre ou des traits sur des puissances, on n’a pas à craindre que le roi de Prusse se plaigne qu’on a altéré son texte, et le public ne pourra pas le deviner… Mais, en faisant des retranchements, j’ai évité soigneusement de rien substituer au texte. […] Quant au texte, j’ai dit qu’il est pour la première fois exact et fidèle ; on a rétabli bien des traits fermes, bien des phrases énergiques et vives que la prudence ou la pruderie littéraire des premiers éditeurs avait effacées ou adoucies. […] Quand il en vient aux époques de la Réforme, de la guerre de Trente Ans, l’historien-roi définit en peu de mots ces grands événements par leurs traits généraux et dans leurs principes réels ; toujours et partout il démêle le fond d’avec les accessoires. […] Il s’étend sur ce règne avec complaisance ; il va même jusqu’à oser établir un parallèle entre ce petit prince du Nord et Louis XIV dans sa gloire : sauf deux ou trois traits un peu fleuris et trop mythologiques, sauf un léger accent oratoire qui perce çà et là, cette comparaison fournit à une belle page historique et d’une véritable élévation. […] [NdA] Ce trait rappelle le portrait que Xénophon, en sa Retraite des Dix Mille, a tracé de Ménon, qui en était venu, dans la voie du mensonge, jusqu’à regarder les gens vrais comme des gens mal élevés et sans éducation.
Un grand nombre des morceaux de la peinture antique qui nous reste, est executé en mosaïque, c’est-à-dire, en peinture faite avec de petites pierres coloriées, et des aiguilles de verre compassées et rapportées ensemble, de maniere qu’elles imitent dans leur assemblage le trait et la couleur des objets qu’on a voulu representer. […] Il est impossible d’imiter avec les pierres et les morceaux de verre dont les anciens se sont servi pour peindre en mosaïque toutes les beautez et tous les agrémens que le pinceau d’un habile homme met dans un tableau, où il est maître de voiler les couleurs et de faire sur chaque point physique tout ce qu’il imagine, tant par rapport aux traits que par rapport aux teintes. […] Cet auteur raconte comme un point d’histoire important, que ce fut un thébain, nommé Aristide, qui fit voir le premier qu’on pouvoit peindre les mouvemens de l’ame, et qu’il étoit possible aux hommes d’exprimer avec des traits et des couleurs les sentimens d’une figure muette, en un mot, qu’on pouvoit parler aux yeux. […] vt fecit Timanthes… etc. c’est un trait qu’il propose pour modele aux orateurs. […] Quatre ou cinq traits que le sculpteur à sçu placer à propos sur son visage, je ne sçais quoi qu’on remarque dans l’action de ses mains, démentent la naïveté et la sincerité qui paroissent d’ailleurs dans son geste et sur son visage.
Ce n’est pas que la Poésie ne puisse & ne doive accorder son langage avec celui de la raison ; mais la gêne du raisonnement & des preuves énerve son activité, & fait avorter les traits de lumiere & de sentiment, propres à frapper & à convaincre plus vivement que toutes les pensées, les sentences, ou les démonstrations géométriques. […] Evremont ne sont pas supportables, quoiqu’ils fourmillent de pensées ; tandis qu’un seul trait, un seul tour, une seule image échappée au Génie poétique, attache l’esprit, échauffe le cœur, & y laisse des impressions profondes. […] Si la profondeur des vues, l’intelligence du plan, l’ordonnance des distributions, l’exposition des matieres, l’exactitude des regles, la vigueur des pensées, l’heureuse aisance des tours, la noblesse du style, eussent été capables d’animer les Exécuteurs de ce grand dessein, comme tous ces traits réunis ont réussi à attirer les suffrages & les souscriptions ; toute l’Europe seroit en possession du trésor des Sciences qu’elle attendoit, & M.
On accabla Néron d’une grêle de traits. […] C’est qu’il imaginoit ramener plus aisément tous les poëtes par ce trait de modération, & s’en faire déclarer le chef. […] Plusieurs de ses traits sont uniques.
Notre fabuliste, La Fontaine, en offre mille traits. […] Le plus célèbre exemple qui s’en trouve dans l’histoire est le trait d’Alexandre envers son médecin Philippe. […] Nul écrivain ne fut plus insinuant, plus gracieux, plus suave, ne sut mieux se parer sans fard, et ne toucha le cœur de traits plus pénétrants. […] Du reste il est plein d’excellents morceaux et étincelle de beaux traits, qui m’ont paru dignes d’être imités sur notre théâtre. […] Ses acteurs sont plus éloquents en leurs infortunes, et les traits de leur malheur se gravent plus avant dans les âmes.
Pour ce qui regarde la galanterie de César, elle est constatée par l’histoire comme celle de Henri IV ; c’est un trait de son caractère. […] Il paie, je l’avoue, à quelques traits sublimes, un juste tribut d’admiration ; mais il croit acheter par là le droit d’être aveugle et injuste pour tout le reste. […] On est étonné de trouver dans une pièce jouée en 1642 une foule de traits délicats et de mots heureux, des tirades même du meilleur ton. […] Il est curieux de voir un cardinal de l’Église romaine consoler la scène des rigueurs de l’Église : ce trait mérite sa place dans l’histoire de l’esprit humain. […] il a raison de craindre cette brouillerie : c’est un trait juste et vrai qui peint l’homme, et ce trait ressemble plus à la sagesse qu’à la bassesse.
M. de Schlegel gardait-il rancune à Molière pour le trait innocent du pédant Caritidès sur les Allemands d’alors, grands inspectateurs d’inscriptions et enseignes ? […] Je lis dans Cizeron-Rival le trait suivant, qui éclaire et précise le passage de l’Art poétique : « Deux mois avant la mort de Molière, M. […] Les traits précédents ne portent que sur des conformités assez vagues et générales ou sur de très-simples détails, et en réalité aucun des personnages de Molière n’est lui. […] Non, Alceste n’est pas plus M. de Montausier qu’il n’est Molière, qu’il n’est Despréaux, dont il reproduit également quelque trait. […] Il y a des traits à l’infini chez Molière, mais pas ou peu de portraits.
Ce ne furent pas ses mauvais Vers qui lui attirerent les traits satiriques de Moliere & de Despréaux ; la médiocrité n’excite jamais l’indignation du Génie, quand elle est modeste, sans prétention, sans intrigue. […] Un autre avantage qu’il a encore, c’est d’avoir soutenu d’assez bonne grace les traits de Satire lancés contre lui.
Je sens vos détails et je perds l’ensemble, qu’un seul trait tel que le vera incessu de Virgile m’aurait montré. […] S’il me parle des sourcils, du nez, de la bouche, des joues, du menton, du cou, de la gorge, je les vois ; mais chacune de ces parties qui me sont successivement indiquées, ne s’accordant plus avec l’ensemble des précédentes, il me force soit à n’avoir dans mon imagination qu’une figure incorrecte, soit à retoucher ma figure à chaque nouveau trait qu’il m’annonce. Un trait seul, un grand trait, abandonnez le reste à mon imagination ; voilà le vrai goût, voilà le grand goût.
in-12. a eu peu de succès, parce qu’il y a beaucoup plus de choses ennuyeuses que de traits curieux. […] Il auroit pu néanmoins retrancher plusieurs traits éloignés de son sujet. […] Saurin des traits comparables à ceux de la plus grande force de Corneille. […] Il avoit le talent de saisir les traits essentiels d’un caractère & de le peindre des couleurs qui lui sont propres. […] Au lieu d’images, il y a des traits d’esprit.
C’est là un trait de caractère. […] Il n’est pas de ceux qui, blessés du trait sacré, jettent au ciel la poussière mêlée dans leur sang, et qui versent avec clameur, comme dit Ballanche, leurs entrailles sur la terre. […] Chateaubriand, le grand barde, est celui qui, en y mettant le pied, a le mieux compris l’Attique, et qui l’a décrite, comme au lendemain de Sophocle, en traits immortels. […] Le trait vraiment original du recueil me paraît être (qu’on me passe le terme) au point d’intersection, dans l’âme du poëte, de ses souvenirs de Bretagne et d’Italie. […] Brizeux, sensible à ce trait qui passait inaperçu, l’a voulu consacrer.
C’est, selon nous, bien mal le comprendre et tirer trop de parti d’un trait avant tout spirituel. […] Une âme noble, élevée et stoïque jusqu’en ses faiblesses, un esprit ferme et délié s’y marquent en traits nets et fins. […] Frappé vivement des objets, il les rend comme la glace d’un miroir les réfléchit, sans ajouter, sans omettre, sans rien changer. » Selon moi pourtant, la comparaison du miroir ne grave pas assez pour ce qui est de Mlle Delaunay ; le trait des objets, dès qu’elle les a réfléchis, reste comme passé à une légère eau-forte. […] elle ne se permet qu’une esquisse pure et discrète, un trait délicieux et encore arrêté, fidèle expression de ce sentiment trop contraint ! […] Je ne daignois parler, puisqu’il ne m’entendoit pas ; il me semble même que je ne pensois plus. » Notons ce dernier trait ; il rappelle le vers de Lamartine s’adressant à la Nature : Un seul être vous manque, et tout est dépeuplé.
Il la perça de mille traits, mais dont aucun ne portoit ni sur la religion, ni sur l’honneur. […] Un ennemi de plus n’effraya point un poëte toujours armé des traits de la satyre. […] Il y a des traits qui réjouissent tout le monde, & qui plairont toujours. […] Despréaux se défendit en retournant contre Cotin ses propres traits, en l’accablant de sarcasmes & d’épigrammes, en le rendant le plastron des plaisanteries du public, & même l’objet des huées du bas peuple. […] De-là, ajoute t-il, cette sévérité de mœurs, cette disette de sentimens qu’on remarque dans tous ses ouvrages ; de-là, sa Satyre contre les femmes, ses traits contre Lulli, Quinault, &c., & contre toutes les poësies galantes : de-là encore, selon ce même auteur, son aversion pour les jésuites, la Satyre sur l’équivoque, l’Epître sur l’amour de Dieu ; de-là, son admiration pour Arnauld, ses liaisons avec Port-Royal, & avec les jansénistes.
L’imagination, échauffée par les grands traits de l’éloquence, se livre toute entière à l’admiration du talent ne goûte que les images sensibles, & se refroidit sur les choses invisibles & de pure spéculation. […] Quels traits de force & lumière, quelle diction pure && de lumière, quelle diction pure & coulante dans saint Jérôme ! […] Les sermons y sont aussi froids, compassés & didactiques, qu’ils sont chargés, en Italie, de traits saillans & de pieuses extravagances. […] Des personnes, qui n’avoient guère lu Cicéron ni Démosthène, qui connoissoient à peine de nom ces génies puissans & créateurs, joignirent leur voix à la sienne, pour empêcher tout jeune prédicateur de se remplir de leurs plus beaux traits, & de s’embraser de leur feu. […] Autres traits qui ne sont pas moins certains.
On sera moins étonné du titre de l’Ouvrage, que d’apprendre que le Cardinal Mazarin qui y étoit maltraité, fit appeler l’Auteur, lui reprocha avec douceur les traits qu’il s’étoit permis contre lui, & lui donna une Abbaye de quatre mille livres. […] Quillet retrancha les traits satiriques contre le Ministre, & ne rougit point de les remplacer par des éloges.
On a de lui une préface2, où il se prononce en défenseur de la langue vulgaire sans mélange de mots étrangers : on y sent, à quelques traits contre ceux qui forgent un langage tout nouveau, le contemporain sévère de Rabelais et de Ronsard. […] Enjouement, moquerie, savoir, mouvement animé et un peu affecté, je le crois sans peine, c’étaient, à ce qu’il semble, les traits de la belle compagnie d’alors. […] Et cependant ce pays a produit des esprits qui, à un certain tour d’idées particulier, ont uni une certaine manière ]d’expression, et qui offrent un mélange, à eux, de fermeté, de finesse et de prudence, un mérite solide et fin, un peu en dedans, peu tourné à l’éclat, bien qu’avec du trait, et dont Mme Necker, dans les manuscrits qu’on a publiés d’elle, ne donnerait qu’un échantillon insuffisant. […] Combien d’heureux traits d’une concision ingénieuse, où la pensée se double, en quelque sorte, dans l’expression, et fait deux coups d’un même jet ! […] Quant aux deux discours sur l’Étude sans terme, nous y pourrions louer longuement le moraliste, et même, dans le premier discours, admirer des traits d’imagination et de pensée colorée, plus forts, plus grands que le didactique du genre n’en permet d’ordinaire à M.
Sa sobriété, son tact à choisir les grands traits de tous les sujets qu’il traite, à sacrifier les détails inutiles, serait un mérite considérable en tout pays, et ce mérite est surtout à louer chez un Russe. […] C’est dans les récits de cette nature que j’admire surtout sa sobriété et l’art qu’il met à choisir les traits les plus frappants en négligeant maint détail qui nuirait à l’illusion. […] Remarquons encore qu’il y a dans toutes un trait qui frappe et qu’on n’oublie plus : trouver le trait qu’il faut, c’est là le problème à résoudre. […] Après avoir longtemps cherché dans le cœur humain tous les vices, toutes les bassesses, pour les flageller et les bafouer, il s’aperçoit tout à coup qu’à côté de ces honteuses misères, il y a des traits sublimes. […] Quelque imparfaite que soit ma traduction, elle permettra pourtant d’apprécier les traits saillants du génie de Pouchkine mieux que je ne pourrais le faire comprendre par une longue dissertation.
Flourens, l’esprit qui convient aux sciences d’observation ; le style y est abondant, naturel, sain, médiocrement élégant, mais souvent spirituel par le bon sens : c’est là un des traits qui caractérisent Malesherbes. […] Fréron avait dû en référer encore à M. de Malesherbes ; c’était sa plaisanterie finale, son trait, sa pointe ; il y tenait plus qu’à tout : Ainsi, monsieur, écrivait-il, je vous prie en grâce de me la passer. […] On m’a dit qu’à l’article Cependant, par exemple, il y avait deux traits, l’un contre Dieu, l’autre contre moi. […] Qu’ils écrivent contre moi tant qu’ils voudront ; je suis bien sûr qu’avec un seul trait je ferai plus de tort à leur petite existence littéraire qu’ils ne pourront me nuire avec des pages entières de l’Encyclopédie. […] Je ne citerai plus qu’un trait qui témoigne de la manière de voir élevée et désintéressée qu’il portait dans la direction des lettres.
Comme eux, il a le trait ; comme eux, il est Français, éloquent, homme d’esprit, patriote et poète. […] Et c’est justice ; il a l’ardeur, l’entrain, et, dans une langue très mêlée, de l’esprit et du trait.
Le premier est un Eloge de Bayard, où l’on trouve des traits d’une éloquence patriotique, dont l’expression est aussi heureuse que les motifs en sont estimables. […] Nous ne dirons pas que dans celle qu’elle a composée sur l’Incendie de l’Hôtel-Dieu, elle ait atteint le sublime & l’énergie de ce genre de Poésie ; mais on ne peut méconnoître dans cette petite Production plusieurs traits de vivacité & de sentiment, préférables au jargon philosophique de la Voix du Peuple, Epître composée par un Académicien sur le même sujet.
La mère était une belle figure des montagnes, usée par ces précoces maternités ; il y avait, sur ses traits amaigris et pâlis, des retours de fraîcheur et de beauté pareils à ces retours de soleil du soir sur les rosiers du jardin après la pluie. […] C’est là qu’enfant Léopold errait dans les herbages, au milieu des pâtres et des troupeaux. » La nature, le ciel, les eaux, les arbres, les animaux, les figures simples, graves et d’une gracieuse sévérité de traits des pasteurs et des faneuses suisses furent ses seuls maîtres et ses seuls modèles. […] La figure humaine, dont la Suisse et dont sa propre famille lui offraient les plus beaux types, l’expression des sentiments simples sur les traits, les attitudes, ces gestes de l’âme, furent sa principale étude dans de nombreux portraits. […] En vain il copie le mâle visage de la sœur aînée de Thérésina, Maria Grazia : cette figure n’a que des passions vraies dans ses traits ; elle enfonce la toile ; elle fait frémir Oswald et pâmer d’effroi les élégantes Écossaises de la société de Corinne. […] Du poète populaire d’abord, belle tête homérique aux traits pensifs et aux yeux rêveurs, où l’inspiration professionnelle flotte sur un visage de chanteur de rues.
On y trouve moins de traits de fantaisie, d’emportements ou de raffinements de plume. […] Par un autre trait qui lui est commun avec Descartes, Buffon ne s’en fie qu’à sa propre pensée, à ce qu’il appelle la vue de l’esprit. […] C’est leur trait distinctif, mais ce n’est pas tout leur mérite. […] Pour dernier trait de ressemblance avec son lecteur, Gil Blas est chrétien et Français. […] Le trait commun à toutes ces définitions, c’est que le vrai n’y est pas nommé.
Car Zeus brûle par toi sous le trait du désir, et il veut posséder Cypris avec toi. […] Qu’il siège maintenant sur les hauteurs, confiant dans le fracas des nues qu’il agite, fier de lancer le trait enflammé. […] Le trait d’union étincelant de son vol relie l’Olympe à la terre. […] Il ajuste et renouvelle sur sa bouche les traits ailés qui frappent droit sur l’esprit du peuple, et le font vibrer comme une cible émue. […] Ses traits sont empreints d’une finesse sereine et d’une riante bienveillance.
Je ne le crois pas, et pourtant je vais refeuilleter sa vie et ses ouvrages avec M. de Cayrol, me bornant à toucher quelques traits çà et là. […] Dans ce courant verbeux, redondant à l’oreille et plus gonflé que léger, on saisit au passage quelques vers dignes d’être retenus, mais aucun de ces traits dont le ton chaud gagne en vieillissant. […] Le Cléon de Gresset jeta le masque, et vint exposer le portrait devant tous les yeux ; il était si frappant par tant de traits qu’on y appliqua à l’instant plusieurs noms, le marquis de Vintimille, le comte de Stainville, et bien d’autres. Le piquant, c’est qu’il y en avait parmi les dénoncés qui ne s’en défendaient pas beaucoup, et M. de Vintimille déclara que, sauf quelques traits de noirceur qui étaient plutôt du scélérat que du méchant, il n’aurait pas été fâché de ressembler à Cléon34. […] « On a prétendu, dit Craufurd dans ses Essais sur la Littérature française, que la duchesse de Chaulnes (depuis Mme de Giac) avait fourni plusieurs traits à Gresset ; et cela est vraisemblable : il ne connaissait pas beaucoup le monde alors, et la conversation de Mme de Chaulnes était semée de traits du genre de ceux qui ont fait le succès du Méchant. » 35.
Quand il part pour la guerre d’Amérique, il nous peint en traits fort gais les officiers généraux les uns après les autres : tout l’état-major y passe. […] Dans la guerre de Corse, un trait assez piquant peint les mœurs françaises d’alors. […] Mais voici le trait essentiel : « Toute l’armée garda le secret de cette charmante étourderie, avec une fidélité que l’on n’eût pas osé espérer de trois ou quatre personnes. » On garda le secret à Mme Chardon parce qu’elle avait été brave, et on la traita comme un camarade qu’on ne veut pas compromettre. Il y a bien de l’ancienne délicatesse française dans ce trait-là. […] Il y a des traits fort spirituels ; il fait surtout plaisir à ceux qui ont connu, non Émilie, comme écrit Mme Necker, mais Amélie, et il fait mal quand on pense que cette excellente femme, recommandée à un Ange pour ses derniers moments, a été livrée au bourreau.
L’abbé Fléchier va nous permettre de vérifier de lui tous ces traits réunis au complet dans les agréables Mémoires, production de sa jeunesse, que M. […] Remarquez que, dans ces Mémoires, toutes les fois que Fléchier veut entrer dans quelque développement prolongé sur les divers chapitres plus ou moins sérieux et les tracasseries de la province, il introduit un personnage et se fait raconter la chose en prêtant à l’interlocuteur toutes ses finesses et ses élégances, et en lui laissant pourtant des traits particuliers de physionomie. […] On chercherait vainement de ces traits sur M. de Novion dans la pièce de vers latins, très-élégants, que Fléchier consacra à ces mêmes Grands-Jours ; les vers latins, pas plus que les oraisons funèbres, ne disent pas tout : « Ne vous souvenez-vous point de ce théâtre dressé dans la salle où il tenoit la comédie à mesdames ses filles, qui avoit toute la mine d’un échafaud, et dont l’aspect faisoit trembler tous ceux qui venoient le solliciter ? […] Un tout petit trait de bon goût qui n’est pas à omettre : pendant ce séjour en Auvergne, Fléchier a prêché deux fois, avec succès, et il ne parle que très-peu de ses sermons.
La seconde querelle de l’abbé d’Aubignac fut avec le grand Corneille, cet homme immortel, dont le nom seul imprime la vénération, & devoit être un rempart inaccessible à tous les traits satyriques. […] Je hais mes traits dans mon miroir ; Je les aime dans son ouvrage. […] L’auteur, au lieu d’y présenter la sagesse sous les traits de l’agrément & de la simplicité, donne dans une ridicule métaphysique de cœur & de sentimens. […] Son attachement pour le surintendant Fouquet, dont il étoit premier commis & confident, est un trait qui fait honneur à tous les gens de lettres.
Mais, à part quelques traits accessoires qu’il aurait pu s’interdire dans l’originalité de sa verve, M. […] Le peuple de juillet n’ira pas calquer trait pour trait l’Amérique, pas plus qu’il ne s’en est tenu au babil satirique d’Athènes.
Il faut que, jusque dans ses moindres traits, elle se moule sur les traits vivants auxquels on l’applique ; sinon elle crèvera et tombera en morceaux. […] En 1808, tous ses grands traits sont arrêtés et définitifs : départements, arrondissements, cantons et communes, rien n’a changé depuis dans ses divisions et sutures extérieures : Concordat, Code, Tribunaux, Université, Institut, Préfets, Conseil d’État, impôts, percepteurs, Cour des Comptes, administration uniforme et centralisée, ses principaux organes sont encore les mêmes ; noblesse, bourgeoisie, ouvriers, paysans, chaque classe a dès lors la situation, les intérêts, les sentiments, les traditions que nous lui voyons aujourd’hui.
Il sait que, si rien n’égale la joie de monter publiquement sur les planches et d’être de ceux que nomme la foule, c’est encore une volupté très appréciable que de contempler les traits de ces privilégiés, de participer à leur gloire par sympathie. […] La première, c’est qu’il nous est absolument impossible de nous représenter exactement les traits et la physionomie d’un seul des comédiens d’autrefois. […] Et pas un trait de commun entre ces deux Clairon !
Le peu d’amis qu’avoit ce professeur royal lui conseillèrent de repousser les traits satyriques lancés contre lui. […] Ils sont adressés à un de ses amis, qui réussissoit aussi bien que lui dans la poësie Latine, & qu’il presse de lancer à son cour des traits contre Montmaur* : Tu chantas les héros ; aujourd’hui l’on t’invite A choisir pour sujet un odieux Thersite, D’un esprit aussi bas que son extérieur, Organe des forfaits, fléau de la pudeur, Que ta muse s’apprête A punir cette malebête. […] Les ennemis de Montmaur, ne sçachant quelle autre voie employer, le trouvant toujours inaccessible à leurs traits, eurent recours à la vengeance des lâches.
Il consiste, comme nous l’avons vu tout à l’heure, dans les ridicules ignorés ou caches, et j’ai dit que ces ridicules ne doivent se trahir que par des traits presque imperceptibles. […] Il n’a emprunté à Plaute que quelques scènes et quelques traits. […] Mais le comique avoué égaye à la fois les spectateurs et le personnage, et Alceste a le front si morose, cinq actes durant, que tous les spectateurs contractent leurs traits par sympathie. […] Ne vous fâchez donc point : plus vous serez mutins, Plus vous me fournirez matière aux traits malins. […] Taschereau, « Ce petit trait d’histoire littéraire est original, mais controuvé.
La premiere raison qui se présente, est que son Ouvrage dut la plus grande partie de son succès aux anathêmes de la Sorbonne & du Parlement qui le proscrivirent, à cause des obscénités qui y sont répandues ; on peut dire ensuite, que les traits satiriques lancés contre les Moines, ne contribuerent pas peu à le mettre en vogue ; ajoutons que les Hérétiques de son temps s’empresserent de combler de louanges un Ecrivain qui sembloit s’accorder avec leurs sentimens, du côté de la phrénésie à tout blâmer & à se moquer de tout. […] Nous n’ignorons pas que les Admirateurs de Rabelais ont prétendu excuser le défaut de plan, de méthode, de suite, de raison, qui choque dans tout son Livre, en croyant trouver dans ses peintures une censure allégorique des mœurs, des usages & des ridicules de son temps ; qu’ils ont vanté avec complaisance certains traits ingénieux qui y pétillent par intervalle ; qu’il n’est pas même jusqu’à son verbiage qui ne leur paroisse mystérieux, & tendre à des allusions, dont leur sagacité regrette de ne pouvoir expliquer l’objet.
Renart sourit de la condition et lui dit, en touchant toujours la corde filiale : « Chante, cousin ; je saurai bien si Chanteclin mon oncle te fut de quelque chose. » Chanteclair chante ; mais il chante comme il dormait d’abord, un œil clos et l’autre ouvert, et il regarde souvent de côté : « Ce n’est pas cela, dit Renart, Chanteclin chantait autrement, tout d’un trait, les yeux fermés, tant qu’on l’entendait par-delà les plessis. » À ce coup Chanteclair n’y tient pas ; il commence sa mélodie en fermant les yeux de toutes ses forces, et Renart, s’élançant par-dessus un chou rouge, le prend au cou et l’emporte. […] Ici le Coq a un trait de génie : tout gêné qu’il est et à demi croqué par celui qui le tient à la gorge, il lui dit : « Eh quoi ! […] Ce dernier fabuliste semblerait s’être souvenu, en vérité, de l’ancien apologue, et en avoir tiré quelques-uns de ses traits. […] C’est une forme mnémonique et qui, à force de retomber sur le même ton, inculque le fait ou le trait dans la mémoire. […] L’envie m’a pris de chercher dans l’Antiquité, parmi les duels mémorables, lequel se pouvait comparer par quelque trait au combat des Trente.
Artificiel et sec, voilà les deux traits du monde, d’autant plus marqués qu’il est plus parfait, et, dans celui-ci, poussés à l’extrême, parce qu’il est arrivé au suprême raffinement. — D’abord le naturel en est exclu ; tout y est arrangé, apprêté, le décor, le costume, l’attitude, le son de voix, les paroles, les idées et jusqu’aux sentiments. « La rareté d’un sentiment vrai est si grande, disait M. de V., que, lorsque je reviens de Versailles, je m’arrête quelquefois dans les rues à regarder un chien ronger un os297. » L’homme, s’étant livré tout entier au monde, n’avait gardé pour soi aucune portion de sa personne, et les convenances, comme autant de lianes, avaient enlacé toute la substance de son être et tout le détail de son action. […] Le caractère du siècle reçoit alors son trait final, et « l’homme sensible » apparaît. […] Trait final qui achève la physionomie du siècle, la sensibilité de salon […] Contre le taureau populaire, leurs armes sont des traits de salon, épigrammes, bons mots, chansons, parodies et autres piqûres d’épingle324. […] Trait suprême du savoir-vivre qui, érigé en devoir unique et devenu pour cette aristocratie une seconde nature, se retrouve dans ses vertus comme dans ses vices, dans ses facultés comme dans ses impuissances, dans sa prospérité comme dans sa chute, et la pare jusque dans la mort où il la conduit.
Le trait qui domine dans cette longue vie de souffrance, de martyre dès les jeunes ans, et toujours de bouleversement et de vicissitudes, est une vérité parfaite, une parfaite simplicité, et, on peut dire, une entière et inaltérable uniformité. […] À cet âge, elle n’avait pas encore dans les traits du visage ces formes prononcées et un peu fortes sous lesquelles nous l’avons vue. […] Ce n’est que le premier jour du procès de Louis XVI, quand elle le voit emmené pour être interrogé à la barre de la Convention, ce n’est que ce jour-là que Marie-Antoinette succombe à son inquiétude et qu’elle rompt son silence généreux : « Ma mère avait tout tenté auprès des municipaux qui la gardaient pour apprendre ce qui se passait ; c’était la première fois qu’elle daignait les questionner. » Dans ce récit tout simple et que nul ne lira sans larmes, il y a des traits qui font une impression profonde, et dont la plume qui écrit ne se doute pas. […] Mais un trait distinctif de Mme la duchesse d’Angoulême est d’être restée complètement étrangère à cette invasion un peu tardive de la sentimentalité publique. […] C’est assez indiquer cette auguste physionomie que nul n’est tenté de méconnaître : solidité, bon sens, bonté, un certain fonds de gaieté, je l’ai dit, une simplicité parfaite, tels sont les traits dont se composait cette nature.
Mais au lieu des guides elle n’attrappe que les traits. […] Un autre examine les traits et la contenance des personnes illustres. […] On merite le nom de poëte en rendant l’action qu’on traite capable d’émouvoir, ce qui se fait en imaginant quels sentimens conviennent à des personnages supposez dans une certaine situation, et en tirant de son genie les traits les plus propres à bien exprimer ces sentimens. […] Il faut avoir une imagination plus féconde, et plus juste, pour imaginer et pour rencontrer les traits dont la nature se sert dans l’expression des passions, que pour inventer des figures emblêmatiques. […] Il faut que le peintre applique encore à la tête qu’il fait ce que les livres disent en general de l’effet des passions sur le visage, et des traits ausquels elles y sont marquées.
Babou n’a pas appuyé beaucoup sur ce caractère, mais ses traits sont si justes et si pénétrants à la fois que nous avons eu quelque chose d’aussi réel qu’un portrait pris sur le vif d’un homme, et qui sait ? […] Lui, le satirique qui veut être critique aussi par-dessus le marché ; lui, l’esprit malin, taquin et lutin, — car sa grâce tient parfois du prestige, — a certainement bien trop d’entrain et de mouvement dans la moquerie pour pouvoir, la main encore vibrante du trait qu’il vient de lancer, être l’opérateur patient et à la main sûre qui en dépeçant l’œuvre d’un homme n’a pas pour but de le faire souffrir. […] Si vous voulez les reconnaître tous, allez les compter dans ce livre, pieux à l’esprit, qui a l’élégance d’un autel, et où ils tombent et roulent — lourdes victimes — sous les traits déliés de ce Sacrificateur aux Grâces Moqueuses qui, je l’ai dit, a de Voltaire, mais de Voltaire quand il a séché son encre pâle avec cette « poudre des ailes de papillon » dont il prenait parfois une prise dans la tabatière de Diderot. […] Voilà, sans doute, des traits heureux. Mais ce ne sont là que des traits, des percées, et je voudrais, moi, une œuvre complète, inspirée, savante et continue, puisqu’elle est intitulée satirique et critique, cette œuvre à deux faces !
Supposons qu’un historien accepte cette idée générale ou toute autre, et la développe, non pas en termes généraux, comme on vient de le faire, mais par des peintures, par un choix de traits de mœurs, par l’interprétation des actions, des pensées et du style, il laissera dans l’esprit du lecteur une idée nette du dix-septième siècle ; ce siècle prendra dans notre souvenir une physionomie distincte ; nous en discernerons le trait dominant, nous verrons pourquoi de ce trait naissent les autres ; nous comprendrons le système des facultés et des passions qui s’y est formé et qui l’a rempli ; nous le connaîtrons, comme on connaît un corps organisé après avoir noté la structure et le mécanisme de toutes ses parties. […] Cousin contre les traits de ses beaux yeux. […] Faites d’un orateur un historien : il laissera de côté les traits distinctifs et les caractères propres du temps qu’il décrit ; son récit deviendra un panégyrique et une leçon.
Malgré cela, quels traits de grandeur & d’élévation n’y trouve-t-on pas ! […] Dans l’Histoire des Macchabées, tout ce que la guerre a de plus terrible, la politique de plus profond, le courage de plus sublime ; tout ce que les desseins de Dieu sur son peuple peuvent offrir de sagesse, de majesté, de puissance, de bonté, est développé avec des traits qui caractérisent le Génie créateur, dans un genre où le Créateur lui-même se manifeste si énergiquement.
le Sage raconte ainsi ce trait dans son Diable Boiteux. […] Les volumes qui sont de lui, fourmillent de ces traits d’esprit & d’enjouement, qu’il savoit répandre dans toutes ses Productions.
Les plus beaux sentiments n’attendrissent point, quand ils ne sont pas amenés ou préparés par une situation pressante, par quelque coup de théâtre, par quelque trait vif et animé. […] Nos ouvrages dramatiques et nos bons romans sont pleins de traits de cette espèce ; et les Français ont en ce genre poussé très loin la science du cœur. […] Un seul de ces traits suffirait pour faire un grand caractère. […] Or, la vérité paraît poussée au-delà des limites, 1º quand les traits sont multipliés et présentés les uns à côté des autres. […] Un avare, par exemple, ne fait ses preuves d’avarice que de loin en loin ; les traits qui prouvent, sont noyés, perdus dans une infinité d’autres traits qui portent un autre caractère ; ce qui leur ôte presque toute leur force.
Scribe glissait de légères esquisses de mœurs d’un trait plus pur, plus soigné. […] Scribe n’en a saisi et reproduit les traits distinctifs tout en nuances, l’assortiment de positif, d’intrigue et de jouissance, l’industrialisme orné, élégant. […] L’auteur ne dédaigne aucun de ces traits qui courent ; il les ravive par l’emploi. […] Positif et sage (ce qui est un trait de mœurs littéraires à noter), laborieux et jouissant (ce qui est un trait commun aujourd’hui), il s’est dérobé toujours aux ovations de l’engouement et de ce qu’il aurait plus de droit que bien d’autres de nommer la gloire. […] Scribe a toujours faits de l’histoire à la scène, lui donnent un trait d’exception de plus entre les autres auteurs plus ou moins dramatiques du jour, dont la prétention et la marotte sont d’observer la couleur dite locale, et de rester fidèles à l’époque.
Selon moi, des traits pareils se reproduisent assez exactement aujourd’hui. […] Confesse donc enfin une source inconnue, D’où jusqu’à ton esprit la vérité venue S’y peint en traits brillants, comme dans un miroir, Et pour te subjuguer n’a qu’à se faire voir. […] On pourrait multiplier les citations de tels traits ingénieux ; mais ses inspirations les plus familières en avançant, et pour nous les plus pénétrantes, sont celles où respire le pressentiment de sa fin. […] Sans doute ; mais c’est peu aussi d’être amoureux en élégie, si l’on n’est poëte par les images et par de certains traits qui fixent la beauté pour tous les temps. Il en est de la poésie amoureuse comme de Vénus quand elle se montre aux yeux d’Énée, naufragé près de Carthage et à la veille de voir Didon : elle prend les traits d’une mortelle, d’une simple chasseresse ; elle ressemble à une jeune fille de Sparte, et s’exprime sans art d’abord, avec un naturel parfait.
Le caractère habituel de la satire de Lesage est d’être enjouée, légère, et piquante sans amertume ; mais, toutes les fois qu’il s’agit des traitants, des Turcarets, il aiguise le trait et l’enfonce sans pitié, comme s’il avait à exercer quelques représailles. […] Le Diable boiteux précède très bien les Lettres persanes, mais il les précède d’un pas léger, sans aucune prétention au trait et sans fatigue ; il n’y a pas l’ombre de manière dans Lesage. Les traits de Lesage, ce sont de ces mots piquants et vifs qui échappent en courant. […] Il court, il trouve son trait malin, il continue de courir et n’appuie pas. […] [NdA] Cette veine de Turcaret était neuve au théâtre et encore intacte même après Molière : « C’est une chose remarquable, dit Chamfort, que Molière, qui n’épargnait rien, n’a pas lancé un seul trait contre les gens de finance.
On cite de son enfance des réparties heureuses et des traits d’une prodigieuse mémoire : il retint un jour par cœur un sermon de l’abbé Poulle, pour l’avoir entendu une fois, et il l’écrivit au sortir de l’église. […] En voici quelques traits : Depuis votre départ, j’ai passé deux mois en Normandie chez l’abbé de Boismont ; j’ai vu le camp et la mer, deux spectacles très nouveaux et très intéressants pour moi. […] Je pourrais citer des traits piquants, incroyables, que je tiens de témoins dignes de foi, et qui prouveraient de reste son avarice et l’habituelle licence de ses propos. […] C’est bien là la libéralité d’un avare, prise sur le fait ; le trait est de la meilleure comédie. […] Ainsi au chapitre des « Préparations oratoires », dans tout le morceau : « Vous vous promenez seul à la campagne… », il compare très bien le trait d’éloquence non préparé au coup de tonnerre qui éclate dans un ciel serein.
Je dis vite, car la vivacité est son essence ; un trait et un éclair sont ses emblèmes. […] Une partie notable de ce Discours, qui avait trait à la philosophie moderne, n’avait pu d’abord s’imprimer en France, grâce à la défense du ministre de l’Intérieur, François de Neufchâteau. […] Rivarol est plein de ces traits de détail et de ces exemples, de ce que les anciens appelaient les lumières du discours. […] Il y a des traits personnels qui s’élancent de toutes parts comme des flèches, et qui s’adressent à autre chose qu’à une idée et à une théorie. […] Je n’ai pas besoin de dire que ce trait sanglant était injuste.
Par tous ces grand traits Henri Heine tient aux lettres germaniques ; les éléments constitutifs de sa poésie sont allemands, pris à la moelle même de l’art savant ou populaire d’Outre-Rhin. […] Il devint prosateur, journaliste, polémiste ; aussi quelques traits de l’esprit français sont-ils marqués dans toutes ses œuvres. […] Il semble que Heine, — et ce trait lui est commun avec d’autres, — ne peut subir qu’une seule affection, dont le mécanisme devenu prédominant et constamment dispos, a atrophié les autres ; tous les ébranlements transmis par ses sens, causés par ses souvenirs, sont réfléchis suivant un angle mystérieux vers le même point vif de son âme, aboutissent à une même et constante tristesse songeuse. […] La folie a de ces grimacements et certaines agonies laissent sur les traits des cadavres ce rictus sardonique. […] Et grâce à la vive facilité de son imagination, il eut le cerveau peuplé de déesses tangibles et souriantes, de dieux statuaires, majestueusement drapés ou noblement nus, figurant de leurs traits augustes, avec la joie calme qui arque leurs lèvres et éclaire leurs yeux, la plus belle phase de l’humanité intacte.
Le trait est excessif. […] Ce dernier trait peint tout. […] Quelques traits bien circonstanciés suffisent à donner l’intensité et la vie. […] On répétait tous les traits prévus et appris qui constituaient le lieu commun. […] L’auteur a poussé le trait peut-être au détriment de la vérité.
La composition m’a paru aussi assez irrégulière et disproportionnée ; plusieurs fois, l’orateur, après avoir atteint tout d’un trait jusqu’aux limites de son sujet et au terme de la carrière qu’il avait à retracer, a dû revenir sur ses pas et en arrière. […] L’orateur a eu d’heureux traits pour caractériser M. de Tocqueville. […] Littérairement, ce morceau n’a paru qu’un lieu commun trop prolongé, et dans lequel les traits qui, à la rigueur, pouvaient être ressemblants, disparaissaient dans la façon déclamatoire de l’ensemble.
S’il peint à la manière flamande ses premiers plans, choisis avec le discernement et le sentiment d’un Ruysdaël, d’un Potter ou d’un Wouvermans, il n’en lève pas moins parfois les regards vers les cimes ; et par échappées, sur les têtes de ses personnages, un trait plus hardi, plus fier, plus grandement rêveur, nous rappelle la magnifique et immense Nature qui surplombe tous les petits cadres où Topffer s’enferme, des pies nuageux ou irisés de ses sommets. […] Mais ce qui va bien au paysage et à son peintre : la vapeur, les traits indistincts, les lointains fuyants, mal accusés, noyés, perdus, ne va plus au peintre de l’âme, au moraliste, à l’observateur de la nature humaine qui doit voir clair, tout discerner, tout accuser d’une ligne pure et inflexible. […] Sterne va des moindres traits, des moindres linéaments de la Nature jusqu’au fond de l’homme.
Il faut quelqu’un qui puisse faire cela pour les presbytères et les châteaux. » M. de Montalembert a de longs cheveux gris et plats, une face pleine, des traits de vieil enfant, un sourire dormant, des yeux profonds mais sans éclairs, une voix nasillarde et manquant de mordant, une amabilité douce et reposée, une caresse féminine des manières et de la poignée de main, une robe de chambre cléricale. […] L’une a placé cette fortune en terres, elle a aujourd’hui 400 000 francs ; l’autre en rentes sur l’État : avec les réductions et les banqueroutes, son capital est réduit à 560 francs. » Sous les arbres du café de la Comédie, nous sommes rejoints par Théophile Lavallée, aux traits truandesques, aux lèvres rouges et informes des masques de Venise dans les tableaux de Longhi. […] Une porte s’ouvre, et un homme paraît, à la grosse tête carrée, aux gros traits, aux grosses moustaches, à la forte figure des portraits de Frédéric Soulié ; il est en robe de chambre de velours noir, aux grandes manches pendantes d’astrologue. […] Il m’a dit une seule chose qui m’a frappé : « Vous, vous n’avez rien à craindre d’un coup d’épée ou d’un coup de pistolet, vous avez tout à craindre d’un trait de plume ! […] Voyant un jeune homme avec une femme légère du quartier, son trait de plume ne faisait-il pas allusion à la signature de billets ?
Et c’est elle qu’il s’agit avant tout de discerner, en rapprochant attentivement les traits épars. […] Tous les traits psychologiques, tous les tics, tous les gestes furent par lui scrupuleusement choisis, pour particulariser des êtres dont nul ne ressemblât aux autres.
Ces idées furent des traits de lumière pour cette ame si sensible et si féconde, qui, en descendant en elle-même, y trouvait les mouvemens de toutes nos passions, les secrets de tous nos penchans. […] Il a de grands traits ; mais il ne connaît pas les nuances, et c’est par les nuances qu’on excelle dans tous les arts d’imitation. […] Il n’y a pas un trait, pas un coup de pinceau, qui ne soit d’un maître. […] Où sont ceux qui répètent, sans connaissance et sans réflexion, que le ton de Racine est toujours le même ; que tous ses sujets ont les mêmes couleurs et les mêmes traits ? […] Oui sans doute, Racine a dans toutes ses tragédies un trait de ressemblance, une manière qui le caractérise ; et cette manière, c’est la perfection.
Il y a un mois, en Flandre, surtout en Hollande, ce n’étaient que grands traits mal agencés, osseux, trop saillants ; à mesure qu’on avançait vers les marécages, le corps devenait plus lymphatique, le teint plus pâle, l’oeil plus vitreux, plus engorgé dans la chair blafarde. […] Ils ne sont point frappés par la magnificence de la nature ; ils n’en voient guère que les jolis aspects ; ils peignent la beauté d’une femme d’un seul trait, qui n’est qu’aimable, en disant « qu’elle est plus gracieuse que la rose en mai. » Ils ne ressentent pas ce trouble terrible, ce ravissement, ce soudain accablement du coeur que montrent les poésies voisines ; ils disent discrètement « qu’elle se mit à sourire, ce qui moult lui avenoit. » Ils ajoutent, quand ils sont en humeur descriptive, qu’elle eut « douce haleine nette et savourée », et le corps aussi blanc « comme est la neige sur la branche quand il a fraîchement neigé. » Ils s’en tiennent là ; la beauté leur plaît, mais elle ne les transporte pas ; ils goûtent les émotions agréables, ils ne sont pas propres aux sensations violentes. […] 5 Sachez bien qu’on a pu choisir chez eux, embellir, épurer peut-être, mais que leurs premiers traits sont incomparables. […] Le besoin de rire est le trait national, si particulier, que les étrangers n’y entendent mot et s’en scandalisent.
Ces signes consistent autant dans les altérations qui surviennent à la couleur du visage que dans les altérations qui surviennent à ses traits. […] Mais le masque des comédiens anciens cachoit encore l’altération des traits que le rouge nous laisse voir. […] On ne sçauroit démêler ces expressions à une distance de laquelle on peut néanmoins discerner l’âge et les autres traits les plus marquez du caractere d’un masque. […] Or la justesse de la déclamation exige souvent que l’altération des traits dans laquelle une expression consiste, ne soit presque point marquée.
Voilà ce qui m’a décidé à chercher d’abord dans le roman les traits épars du génie russe. […] Et tout cela peint en quelques traits rapides et forts, relevé d’images personnelles qu’on n’a vues nulle part. […] Les biographes agrémentent volontiers de ce trait la vie de tous les grands hommes, c’est un siège fait. […] On n’y rencontre guère l’esprit tel que nous le goûtons, le trait léger et fin qui glisse sans blesser. […] Ce trait n’a été aperçu que du seul Pouchkine.
Essayons d’en marquer quelques traits. […] De l’amie, de la confidente qu’il avait en sa sœur Cornélie, il prend quelques traits pour les donner à la sœur de Gœtz, Marie. […] Notons tout de suite que l’héroïne du livre ressemble trait pour trait à Charlotte Buff, et qu’Albert rappelle aussi beaucoup le personnage authentique de Kestner, bien qu’il soit beaucoup plus jaloux. […] L’on y chercherait en vain quelque trait de sentiment fort, de passion profonde. […] On le lui a reproché comme un trait nouveau de son égoïsme, de son indifférence au bonheur des autres, de son dédain de la vie commune.
Ce Magistrat ne put s’empêcher de rire de ce trait de vivacité ; mais, pour punir l’Auteur, il lui interdit tout Spectacle pendant deux mois. […] Le Public pardonne plutôt ces traits, que de mauvaises Pieces.
Et que de traits caractéristiques n’offrent point ces nations nouvelles ! […] Son gouvernement formé de royauté et d’aristocratie, sa religion moins pompeuse que la catholique, et plus brillante que la luthérienne, son militaire à la fois lourd et actif, sa littérature et ses arts, chez lui enfin le langage, les traits même, et jusqu’aux formes du corps, tout participe des deux sources dont il découle.
Il attrista ses amis par sa mélancolie, écrite sur ses traits. […] Y en a-t-il qui donnent en quelques traits de pinceau une émotion si profonde et si durable au cœur ? […] Combien n’a-t-il pas fallu de génie expressif pour traduire tant d’âme et tant de nuances d’âme sur les traits de ces visages ? et, ajoutons, sur des traits toujours beaux ; car, dans Léopold Robert comme dans la statuaire grecque, l’expression n’enlève jamais rien au beau, cette première condition de l’idéal dans l’art. […] Est-ce qu’il y a plus de langage dans un mot écrit que dans un trait peint ?
L’illusion est la même ; ce sont les mêmes rayons de l’essence divine que réfléchissent la page du prédicateur et la muraille dégradée où le temps a effacé les traits du visage divin, sans effacer l’expression de bonté et l’auréole. […] Bourdaloue ne connaît des saints que leurs pensées ; les personnes ne lui apparaissent que sous les voiles mystiques et les traits uniformes des bienheureux. […] C’est un premier trait du rhéteur, dans Massillon, que de négliger le dogme et les mystères, et de donner toute la place à l’enseignement moral. […] Le temps seul donne la science, les solides couleurs, la variété, l’abondance des traits qui permet la sévérité du choix. […] La plupart de ses portraits sont si complexes et si vastes, qu’on dirait une collection de traits mis en réserve pour quelque travail ultérieur de triage et de choix.
Elle a peint en traits expressifs ce premier travail tout intérieur de son imagination. […] Elle garde gravé en traits indélébiles le tableau qui a passé sous ses yeux, elle le conserve inaltéré. […] C’est même cette absence d’un brillant défaut qui donne aux traits de son paysage une si lumineuse précision. […] Car c’est un trait à noter que le silence, cette forme de l’oubli, n’a commencé pour elle qu’après sa mort. […] En abrégeant cette lettre biographique, il me semble que je reproduis quelques traits de sa conversation.
Ainsi le prince de Ligne, vif, brillant, étincelant de traits, rencontrait le mieux, mais ne s’y tenait pas ; il avait plus d’imagination que de mesure et de goût. […] Ne prenez tout cela que comme la conversation vive et nourrie d’un homme qu’on trouve au lit le matin et qui pense tout haut, et vous en emporterez de tous côtés des traits, des aiguillons, qui vous feront aussi penser, pester, dire oui et non à la fois ; et c’est ce qu’il a voulu. — Et même lorsqu’on approuve, c’est comme dans la conversation encore : il faut suppléer, à tout moment, à ce qui manque. […] Sur Raynal, son ton et sa pesanteur ; sur Beaumarchais, ses mystifications et ses charlatanismes ; sur Duclos, Saint-Lambert, Crébillon fils et cent autres, il a des traits qui sont d’original et comme d’un homme qui a dîné avec eux. […] Mais, au lieu du gros bon sens de la première, l’autre avait une conversation pleine de traits, et avait l’épigramme et le couplet à la main. — Le genre de Mme Geoffrin était, par exemple, une espèce de police pour le goût, comme la maréchale de Luxembourg pour le ton et l’usage du monde. […] C’est en y songeant le moins qu’il nous la peint le mieux, et qu’il nous fait voir d’un même trait sa bonté et sa grâce : Elle s’occupait si peu de sa toilette, dit-il en un endroit, qu’elle se laissa, pendant plusieurs années, coiffer on ne peut pas plus mal, par un nommé Larceneur qui l’était venu chercher à Vienne, pour ne pas lui faire de la peine.
a sur Madame toute la supériorité d’une nature de génie faite exprès pour sonder et pour fouiller dans les cœurs, pour en rapporter des descriptions toutes vives, qu’il nous rend présentes en traits de flamme. […] Ce trait est caractéristique de la part d’une nature d’ailleurs essentiellement bonne. […] En examinant les traits de leurs images, elle se rappelait les traits de leurs actions, et elle se remplissait avec eux des nobles idées de la grandeur romaine. […] Le père Cathalan, jésuite, en prononça une à Laon le 18 mars, et elle nous a fourni quelques traits de caractère.
On comprend la beauté du dernier trait quand on vient d’assister avec lui au morne spectacle de cette enceinte altière, assez voisine de la brèche de Roland, et quand on sait aussi ce qu’il pense scientifiquement de ces hauts monts ruineux, dont il a dit : « Périr est leur unique affaire. » Mais je ne cite que des traits, car l’ensemble des tableaux dépasserait toutes les bornes que je me puis permettre. […] Causeur excellent et plein de traits dans un salon, écrivain élégant et, on l’a vu, éloquent, il n’était pourtant pas essentiellement orateur, ni surtout improvisateur : « C’est une des nombreuses infirmités de ma nature, disait-il, de ne pouvoir dominer qu’à force de temps ces vérités que de meilleurs esprits dominent à force de supériorité. » Cette sorte de lenteur qui tient au besoin d’approfondir, jointe à de la vivacité d’humeur et d’impression, lui fit faire quelques fautes de tribune. […] Elle nous le montre aussi au naturel dans sa conversation et dans sa personne : « On aurait dit que l’âge accroissait encore le feu de ses discours et de ses regards ; et jusqu’à ses derniers moments, ses proportions légères, son tempérament sec, la vivacité de ses mouvements, ont rappelé le peintre des montagnes. » En ce qui était des hommes, des personnages en scène, il les jugeait bien et les marquait en les jugeant ; sa conversation était gaie, piquante ; il avait de ces mots qui restent, du caustique, le trait prompt et continuel4. […] Faisant allusion à certains termes assez impératifs de la lettre de nomination et qui laissaient peu la liberté du refus, Ramond aurait dit en riant : « Je suis préfet par lettre de cachet. » Cuvier n’a pas dédaigné d’égayer sa Notice de ces traits malins et de quelques autres qu’il faudrait avoir été contemporain pour accueillir et présenter dans leur juste mesure, sans rien exagérer ni forcer en les rapportant. — Cuvier et Ramond n’étaient pas au mieux ensemble ; ils avaient été en compétition pour la place de secrétaire perpétuel de l’Académie des sciences.
Cet esprit de Voiture et de son monde n’était pas seulement un esprit de riposte et de trait, c’était aussi un esprit inventif, et qui se mettait en frais d’imagination pour divertir et pour plaire avec abondance et récidive. […] Il a plus tard esquissé, sans le terminer, un éloge du comte duc dans lequel on lit cette magnifique définition de la monarchie espagnole : « Celui-ci, au rebours (des ministres précédents plus favorisés), a toujours cheminé avec un vent contraire : parmi les ténèbres, et lorsque le ciel était couvert de toutes parts, il a tenu sa route au milieu des bancs et des écueils, et durant la tempête et l’orage il a eu à conduire ce grand vaisseau dont la proue est dans l’océan Atlantique et la poupe dans la mer des Indes. » Mais ce n’est là qu’un trait de talent et une belle image, comme l’écrivain doué d’une imagination poétique peut en trouver. […] La première que vous m’avez envoyée était admirable et digne d’un grand ouvrier ; celle que j’ai faite dessus n’était pas non plus de mauvaise main ; mais cette dernière que vous venez de lirer, ultima linea rerum est, elle est au-delà de toutes choses, et pour moi je n’oserais plus jamais faire un trait après cela. […] Il mourut l’année suivante (1648), à cinquante ans ; il disparut à temps avant la Fronde : « Ce fut son dernier trait d’esprit », M. […] Et ce dernier trait de vanité artificieuse va se démontrer dans toute l’histoire à laquelle le personnage de Callicrate est mêlé.
Aujourd’hui qu’à distance il est permis de dégager, d’accuser les traits plus vivement et même crûment, j’essaierai de rendre l’impression que j’ai reçue en repassant les principaux écrits de cette femme-auteur, car il faudrait être bien osé pour prétendre les avoir tous lus. […] Que nous importe après tout telle ou telle circonstance de sa vie, si les traits du caractère se dénoncent ? […] Une telle vocation semblerait indiquer des goûts austères ; mais ici cette vocation sait très bien se combiner avec des goûts romanesques, et c’est un trait encore et des plus essentiels dans le caractère de Mme de Genlis. […] Sa conversation habituelle était des plus agréables, dit-on, sans grands traits et sans vifs éclairs, mais semée d’anecdotes amusantes, et d’un courant très animé. […] Chénier, dans sa jolie satire Les Nouveaux Saints, a pu la railler sur cette disposition de maîtresse d’école, et la cribler de ses traits les plus perçants et les plus acérés : J’arrive d’Altona pour vous apprendre à lire ; et tout ce qui suit.
elle pétille de tant de traits ! […] Avant de déterminer la manière de les rendre, ne serait-il pas à propos de jeter un coup d’œil sur leurs traits les plus frappants ? […] Il n’est pas de nation qui n’ait sur son théâtre un Misanthrope peint à plus grands traits que le nôtre. […] Quel trait profond de caractère ! […] Voici encore un trait que Molière a dédaigné.
L’Histoire de la Félicité, entre autres, est un Ouvrage où l’imagination, les traits ingénieux, les portraits originaux, les pensées saillantes, fourmillent, & amusent le Lecteur en l’intéressant. […] Il ne s’est jamais permis le moindre trait contre la Religion ; mais ce qui honore bien davantage la mémoire de ce véritable Bel-Esprit, comme l’a fort bien remarqué M. l’Evêque de Senlis*, « c’est que pouvant monter facilement aux premieres dignités de l’Eglise qui vinrent le chercher de bonne heure, il résista par probité aux offres les plus flatteuses.
C’est à ces traits qu’on reconnoît le vrai Poëte. […] Souvent une seule Fable réunit la naïveté de Marot, le badinage & l’esprit de Voiture, des traits de la plus haute Poésie, & plusieurs de ces Vers que la force du sens grave à jamais dans la mémoire. […] Qu’on lise avec attention ces traits qui s’offrent à notre mémoire.
Ces traits ne méritoient que du mépris. […] de Voltaire, étant remplie de ces traits de génie & de feu qui décèlent le grand maître. […] Ce contraste frappe surtout ceux qui savent tant de traits honorables pour ce grand poëte.
Satan, caché sous la forme d’une de ces bêtes, contemple les deux époux, et se sent presque attendri par leur beauté, leur innocence, et par la pensée des maux qu’il va faire succéder à tant de bonheur : trait admirable. […] nous avons tué le divin Hector ; c’est de même que les Saliens, célébrant la fête d’Hercule, s’écrient brusquement dans Virgile : Tu nubigenas, invicte, bimembres, etc. « C’est toi qui domptas les deux centaures, fils d’une nuée, etc. » Cet hymen met le dernier trait au tableau de Milton, et achève la peinture des amours de nos premiers pères15. […] Nous avons fait aussi disparaître quelques traits de mauvais goût, en particulier la comparaison allégorique du sourire de Jupiter, que nous avons remplacée par un sens propre.
Cousin, il dépassa la donnée première : les traits ne portèrent plus. […] … Je n’achève pas ce tableau déchirant des périls qui vous menacent, les angoisses d’un long exil, la honte du retour, et l’horreur du pardon. » J’ai voulu noter ce dernier trait : ainsi, même au plus fort de l’attaque et dans son plus vif entrain de persiflage, M. […] De els traits rachètent bien, convenons-en, quelques déductions logiques un peu trop rigoureuses et quelques essais d’équilibre impraticables. […] D’admirables et vigoureuses touches de pinceau et surtout de burin, des traits charmants, des médaillons bien frappés, ornent en mainte page ce narré complexe et précis. […] Un grand fonds de constance morale jointe à un tempérament timide, voilà le trait singulier de ce caractère.
Barton, disserte en plein sur le préjugé de l’honneur, qui est son trait distinctif. Ces traits-là, dans la vie, ne se dessinent qu’au fur et à mesure, et successivement par des faits. […] Puisque nous en sommes à ce qu’il peut y avoir de traits réels dans Delphine, n’en oublions pas un, entre autres, qui révèle à nu l’âme dévouée de Mme de Staël. […] Quant au portrait de Mme de Staël, on voit combien tous ceux qui le crayonnent s’accordent dans les traits principaux, depuis M. de Guibert jusqu’à Œlenschlæger et Werner. […] Leurs défauts mêmes deviennent des traits de peinture et ne sont pas sans charme, comme l’expression autrefois aimée d’un goût qui a fait place à un autre, lequel à son tour passera également.
Barrière de traits d’excellent comique ; mais il y a des moments où l’on doute si Péponet vit. […] Voyons donc sous quels traits se représente l’homme, un romancier, né poète. […] L’idylle, si l’on y regarde de près, se termine par un trait de satire méprisant. […] Et voici un second trait commun de caractère qui est l’effet de cette première éducation. […] Enfin, dernier trait et le plus saillant, Gresset et Piron sont de la province.
Tacite raconte de lui un trait curieux et à peu près dans le même genre. […] Cette ruse, à la vérité, n’est pas un trait héroïque ; mais c’est dans Mithridate un trait de caractère : s’il n’est pas tout à fait digne de la tragédie, il est digne du plus dissimulé, du plus défiant et du plus artificieux de tous les hommes. […] C’est un bon mot, un trait malin qui dépose contre le caractère de Sénèque, et qui ne porte aucune atteinte à l’honneur de Junie. […] Ce ne sont point des conjectures, mais des effets : répondre à de sages réflexions par un persiflage d’étourdi, ce n’est pas un trait de grandeur ni d’héroïsme. […] Une scène très ingénieuse entre le jaloux et sa pupille, quelques traits dans le rôle de la mère, c’est à cela que se réduit tout le mérite du Florentin.
On commence à connoître que quelques traits de Morale & de Littérature, dont les uns sont communs & les autres hasardés ; que des pensées & des réflexions détachées ; que des lambeaux de traduction secs & froids ; que des Eloges écrits d’un style plus imposant & plus maniéré, que solide & vigoureux ; que des Essais sans dessein, sans méthode, sans profondeur, sans vûes, sont de foibles titres pour une célébrité durable. […] C’est pour nous avoir laissé des Lettres qui sont un chef-d’œuvre d’éloquence ; pour avoir enrichi l’esprit humain de pensées profondes, fortes & sublimes ; pour avoir lancé, dans cinq ou six traits de plume, plus de lumiere & de génie qu’on n’en trouve dans tout ce qui paroît accumulé avec tant d’effort dans des volumes de Mélanges de Littérature, d’Histoire, & de Philosophie.
C’est l’unique gloire de notre portrait de rassembler tous ces traits : « Mme de Longueville a naturellement, dit-il, bien du fonds d’esprit, mais elle en a encore plus le fin et le tour. […] Voici la traduction chrétienne et moralement rigoureuse de ce trait d’apparence charmante. […] On en rapporte des traits touchants. […] Ce petit portrait pourrait bien être de Nicole ; on sait, en effet, qu’il trouvait à M. de Tréville plus d’esprit qu’à Pascal même : ici on lui accorde plus de trait qu’à Mme de Longueville. […] … » Mais je citerai plutôt quelques extraits de lettres sur la mort de notre pénitente ; on y retrouve surtout ce trait d’humilité que nous avons signalé ; pour qui connaît la rigueur de M. de Pontchâteau, le moindre mot d’éloge dans sa bouche a tout son prix : (17 avril 1679).
Une âme honnête et droite pouvait animer les traits vulgaires de son visage ; il n’y fallait chercher aucune grâce, aucune finesse, nulle expression délicate et poétique. […] Les traits de son visage, trop arrondis et trop obtus aussi, ne conservaient aucunes lignes pures de beauté idéale.” […] Ses yeux étaient beaux et limpides, mais ses traits n’avaient aucune noblesse et aucune distinction naturelle de ces visages desquels la race ou le génie écrit d’avance l’origine. C’était un visage flamand, ayant assez d’analogie avec les traits arrondis et allemands de la comtesse d’Albany elle-même. […] En contemplant Fabre, dont les traits spirituels, quoique vulgaires, rappelaient si fidèlement ceux de son amie, je me suis demandé souvent si la maternité n’était pas involontairement le vrai mot de ce mystère.
On trouverait dans les printemps de Finlande et de Russie, touchés par Bernardin de Saint-Pierre, dans ceux du nord de l’Amérique décrits par M. de Chateaubriand, des traits heureux de comparaison avec ce printemps de la vallée des Aigles. […] Delille, dans l’Homme des Champs, en imitant ce fin et doux tableau, nous l’a tout à fait défiguré par le vague et la banalité des traits : Voyez-vous ce modeste et pieux presbytère ? […] Jocelyn, lorsqu’il s’était informé de la santé de cette mère bienaimée auprès de sa sœur lors de leur retour, avait dit avec cette beauté de cœur qui n’est qu’à lui : Mais, dis-moi, rien n’a-t-il changé dans ses beaux traits ? […] On voit, par ces traits imparfaits, quelles doivent être chez Coleridge la curiosité brillante, l’étincelle perpétuelle du détail, et en même temps l’élévation et la spiritualité des sentiments. […] Un dernier trait seulement.
En trois ou quatre traits, elle caractérise admirablement l’œuvre de Goethe. […] Je dis qu’il y a dans cette agonie des traits qui indiquent la résurrection. […] L’auteur, étant au centre de sa création, ne voit et ne montre que la pointe des traits qui l’ont frappé : il ne voit souvent pas d’où ces traits sont partis. […] J’y trouve trois grands traits, trois traits de la poésie véritable, trois signes d’avenir. J’y trouve le retour à la nature, le sentiment de l’égalité humaine, le sentiment pur de l’amour : ce sont trois traits de Rousseau, qui, comme une image sacrée de l’idéal, ont passé dans l’âme de Goethe, et y vivaient à l’époque où il fit Werther.
La scène est cruelle, mais d’un brio diabolique ; les traits percent, les épigrammes font trou, les personnalités écorchent jusqu’au sang ; c’est un rude railleur que cet Olivier ; il tire les colombes de Vénus avec des balles de gros calibre. […] Pour achever son éducation, son nouvel ami lui esquisse le plan du demi-monde, en traits mordants et profonds qui se gravent dans la mémoire pour n’en plus sortir. […] La situation est poignante ; elle est de celles qui étreignent l’intérêt jusqu’à la terreur : il y a eu là un moment où l’on entendait battre distinctement le cœur de la foule, M. de Nanjac dévore d’un trait, comme du poison, cette lettre maudite et il éclate en sanglots de rage. […] Pour fixer au net les traits douteux et brouillons de son caractère, il faut le revoir grossi, comme au microscope, dans un autre type que l’auteur a, depuis, porté sur la scène, et qui ne fait, au fond, que le répéter sous un aspect différent. […] La voilà peinte d’un trait, c’est un profil au fusain rose que ce mot-là.
Les traits y sont semés partout. […] On trouverait bien des particularités aussi, bien des traits utiles ou pittoresques pour un tableau du Système de Law, et de ses effets dans Paris, sur une nation si neuve aux idées de crédit et si prompte à passer de l’engouement à la panique. […] Il y a de bonnes petites anecdotes, des traits philosophiques, en un mot de tout ce qu’il faut pour plaire, et j’ai bien regretté ma pauvre Mme de Mérigniac, qui en était folle. […] Tous les historiens de la minorité de Louis XIV n’approchent pas de ces Mémoires… Il y a bien des traits singuliers sur Christine, reine de Suède, et sur ses deux voyages en France. […] Malet lui avait conseillé avec une bonne grâce assez piquante de ne plus garder ses ouvrages en portefeuille, de peur que le public ne s’obstinât à lui en attribuer d’anonymes, où il trouverait de l’imagination, de la vivacité et des traits hardis.
Il en eut la pensée dans le temps où il aima la gloire avec candeur, alors qu’elle lui apparaissait sous les traits des jeunes Français de l’âge futur apprenant de lui à admirer, dans l’époque où régna Louis XIV, toutes les grandeurs de leur pays. […] Par exemple, on forme de tous les traits qui appartiennent aux plus grands poètes un type de poésie ; en regard de ce type, on place tel poète qui, pour être au-dessous, n’en a pas moins des traits du grand poète, et on lui en refuse le nom. […] Ce que nous demandons à l’historien, pour en garder une impression durable, ce sont les causes de la guerre exposées et jugées, la situation des deux peuples qui vont en venir aux mains, leurs chefs, les préparatifs de la lutte, les batailles, et, dans les récits de ces batailles, les traits qui caractérisent le commandement chez les généraux et la manière de se battre chez les soldats ; enfin, la justice rendue à tous, avec un peu d’inclination pour tout ce qui peut honorer notre nation à ses propres yeux, et entretenir parmi nous la tradition de la discipline et du courage. […] Je suppose un lecteur qui connaît en gros les principaux traits de cette époque : l’œuvre de Richelieu attaquée et près de périr ; un parlement qui veut régir l’État et ne rend pas la justice ; un Condé, un Turenne menant les armées étrangères contre la France ; des finances mises au pillage ; un premier réparateur, l’Italien Mazarin, plus Français que les Français de la Fronde, mais qui se paye de ses services par des mains qui prennent tout ; que va-t-il demander à l’historien de cette époque ? […] Dans Voltaire, elle est plus près du trait, et le premier qui s’en doute, c’est Voltaire lui-même.
. — Tandis qu’elle versait sur la terre son sang couleur de safran, d’un trait de ses yeux elle saisit de pitié les sacrificateurs, belle comme dans les peintures ; et on voyait qu’elle voulait leur parler, comme aux jours où elle charmait par ses douces paroles les riches festins paternels. […] Cette femme qui m’a suivi, c’est la fleur choisie dans l’amoncellement du butin, c’est le don que m’a fait l’armée. » Ce rôle si court dessine en quelques traits une figure auguste. […] Chaque image reflète une lueur de vision subite, chaque vers part comme un trait dardé. […] Ses traits se calment, ses nerfs se détendent, pareils aux cordes d’une lyre qu’une main violente cesse de tordre pour forcer ses tons. […] Ses traits saillants, l’audace forcenée, la férocité froide, l’ostentation dans le crime, sont, creusés et fixes comme ceux des statues.
Voilà l’image de la saillie et du trait chez Duclos : un mot familier, commun s’il se peut, appliqué avec nerf et imprévu, un ressort brusque qui vous part au visage. […] Chaque trait y est net, exact, mesuré, pris sur nature : ce sont des dessins excellents de justesse et de ressemblance. […] Duclos ne tarda pas à faire sensation dans cette société… Le comte de Forcalquier nous est connu par un portrait qu’a fait de lui Mme Du Deffand ; elle l’y montre comme trop dominé par le désir de briller : Sa conversation n’est que traits, épigrammes et bons mots. […] Duclos, qui n’avait que de bons traits, de bonnes anecdotes, de fermes et fines remarques de grammaire, de littérature ou de société, s’y tenait sans viser plus haut. […] Duclos a cinquante-neuf ans : le profil est net, tranché, spirituel, le front beau, l’œil vif, ouvert et assez riant ; la ligne du nez et du menton est prononcée et bien formée sans rien d’excessif ; la lèvre entrouverte et parlante vient de lancer le trait, elle n’a rien de trop mince ; et l’ensemble de la physionomie non plus n’a rien de dur.
J’aurais mieux aimé toutefois, je l’avoue, un peu plus d’impartialité ou de curiosité à sa rencontre, une information plus complète, et que l’éditeur, au lieu de considérer comme réfutées par la présente Correspondance les différentes accusations dont ce guerrier courtisan a été l’objet, daignât les discuter davantage, qu’il opposât le pour et le contre, maintînt en présence les contradictions réelles ; qu’il s’appliquât enfin à combiner les différents traits qui sont transmis à son sujet, et qui contrastent sans se détruire. Le duc de Noailles dont il est question ici et qui mourut comblé de jours, de considération et d’honneurs en 1766, à l’âge de quatre-vingt-huit ans, est celui que Saint-Simon a peint en traits saillants, terribles, très flatteurs aussi à bien des égards, exagérés sans doute sur quelques points ; mais cela précisément appelle la discussion et l’examen. […] … » Je m’arrête ; je n’ai gardé de poursuivre : au fond je réduis toute la contrepartie de ce portrait de Noailles par Saint-Simon, dans tout ce qu’elle a de plus affreux, à un ou deux traits, et je dis : « Somme toute, c’était un courtisan, et un courtisan ambitieux. » Ah ! […] Il se comporta assez ridiculement dans sa terre ; entre autres traits de folie, il portait chape dans sa paroisse et se faisait dire l’office des morts couvert d’un drap mortuaire, pour l’expiation de ses péchés. […] La plupart des traits de cette biographie du duc de Noailles sont forcés ou faux.
Et dans ce long symbole, chaque trait a un sens. […] Je ne sais si je m’abuse, mais il me semble que cette force de représenter tout en emblèmes, exagérée jusqu’au point de ne pouvoir souffrir l’abstraction, est le trait caractéristique de la poésie de M. […] Rousseau veut peindre cette espèce d’obsession de l’artiste à l’approche du génie, ces longs travaux qui précèdent la création, ces fureurs, ces transports pour arriver aux traits de vive flamme : M. […] Il ne s’arrête pas non plus tout à coup, et, par un trait soudain, il ne se contente pas d’écrire le mot génie sur le piédestal de son symbole. […] Ce n’est plus Mazeppa, c’est le génie, mais sous les traits de Mazeppa enchaîné à son coursier et roulant dans les déserts.
Boullée ; voyons s’il n’y a pas à ajouter, à retrancher peut-être quelque chose à ce qu’il dit du d’Aguesseau littéraire, et à faire entrer aussi dans l’idée générale de l’homme quelques traits essentiels que le biographe a jugés incompatibles avec l’ensemble du caractère, et qui, selon moi, ne le sont pas. […] » Ce trait m’en rappelle un autre d’un homme qui a laissé un vif souvenir chez ceux qui l’ont connu, l’abbé Mablini, le plus exquis et le plus attique des maîtres que notre École normale ait jamais eus. […] La piété, la modestie, la pudeur, la délicatesse morale la plus exquise, en font l’âme et les traits. […] C’est à quoi d’Aguesseau fait allusion ; il aimait à citer ce mot de saint Augustin, et si, dans le cas présent, il s’est permis un trait de mauvais goût, ç’a été à condition encore que ce fût d’après un ancien et d’après un Père de l’Église. […] De la modération, du ménagement en toutes choses, une intelligence vaste et tempérée, un sincère et ingénu désir de conciliation, une mémoire prodigieuse, immense, une expression pure, élégante et soignée, cette politesse affectueuse qui naît d’un fonds d’honnêteté et de candeur, c’est ce que témoignent tous ses écrits, et ce qu’on lirait aussi, jusqu’à un certain point, dans les traits de son noble et beau visage, dans ce sourire discret, dans cet œil fin, bienveillant et doux, et jusque dans ces contours si ronds et sensiblement amollis, où rien n’accuse la vigueur.
C’est de ce caractère original, de cette vitalité puissante de femme du monde et de femme d’esprit que je voudrais toucher ici quelque chose, en rapportant Mme Gay à sa vraie date, et en indiquant aussi, en choisissant quelques-uns des traits fins et des observations délicates qui distinguent ses meilleurs écrits. […] Malgré ces invraisemblances, le ton de ce roman, surtout du premier volume, est facile et naturel ; c’est le Gil Blas de Mme Gay, et elle s’y permet sous le masque des traits plus gais, plus vifs, plus lestes si l’on veut, que dans sa première manière. […] Il était impossible qu’une conversation dont elle était tombât dans le nul ou dans le commun ; toujours elle la relevait par une saillie, une gaieté, un trait d’ironie ou de satire, ou même un mot d’une douce philosophie. […] Sa parole, plus forte et plus drue quand elle causait que quand elle écrivait, rappelait parfois le tempérament de certaines femmes de Molière, bien qu’il s’y mêlât plus d’un trait de la langue de Marivaux. […] Ce petit nombre de traits qu’on pourrait multiplier font assez voir à quel point Mme Sophie Gay était une personne de vigueur et de nature, une de celles qui payèrent le plus constamment leur écot d’esprit, argent comptant, à la société.
Jacques Boileau, autrement dit l’abbé Boileau, docteur en Sorbonne, longtemps doyen de l’église de Sens, puis chanoine de la Sainte-Chapelle, était encore de la même humeur, mais avec des traits plus francs et plus imprévus. […] Pour les traits du visage comme en tout, il avait de son frère cadet, mais avec exagération et en charge. […] Cet abbé Boileau me paraît offrir la brusquerie, le trait, le coup de boutoir satirique de son frère, sans la finesse toutefois et sans l’application toute judicieuse et sérieuse. […] Mais cette seule pensée tuait cette foule de beaux esprits et de rimeurs à la mode qui ne devaient qu’au hasard et à la multitude des coups de plume quelques traits heureux, et qui ne vivaient que du relâchement et de la tolérance. […] Il y est traité dans une libre et large manière : l’ample perruque de rigueur est noblement jetée sur son front et ne le surcharge pas ; il a l’attitude ferme et même fière, le port de tête assuré ; un demi-sourire moqueur erre sur ses lèvres ; le pli du nez un peu relevé, et celui de la bouche, indiquent l’habitude railleuse, rieuse et même mordante ; la lèvre pourtant est bonne et franche, entrouverte et parlante ; elle ne sait pas retenir le trait.
Une tiède pâleur, à tout moment, rosée d’animation passagère, le bleu sombre de l’œil pareil à une lumière de nuit, des traits découpés et sculptés dans la chair, une coiffure retroussée à la Diane, découvrant le précieux modelage des joues, des tempes, et une petite oreille au contour transparent. […] * * * — De Nittis m’affirmait, qu’il y avait un onguent particulier pour le visage des papes, fabriqué par une congrégation religieuse : un onguent qui donne la plus extrême fraîcheur à leurs vieux traits, jusqu’au jour de leur mort. […] Des traits — autrefois c’étaient des traits mièvres et tourmentés d’un nerveux duelliste de la cour des Valois, — aujourd’hui la ciselure de ces traits s’est avachie dans de grands plans, solides, carrés, britanniques.
Lui-même en a compris toute la noblesse ; il y a constamment visé, et en a plus d’une fois dessiné les principaux traits. […] Il se délectait à la satire, et décochait ses traits à Gilbert ou à Beaumarchais aussi volontiers qu’à La Harpe lui-même. […] La noble façon dont il adressa mademoiselle Corneille à Voltaire, la respectueuse indépendance qu’il maintint en face de ce monarque du siècle, le soin qu’il mit toujours à se distinguer de ses plats courtisans, l’amitié pour Buffon, qu’il professait devant lui, ce sont là des traits qui honorent une vie d’homme de lettres. […] Enfin, toutes les fois qu’il veut décrire l’enthousiasme lyrique et marquer les traits du vrai génie, Le Brun abonde en images éblouissantes et sublimes.
Il est un autre fleau de l’humanité qui le détruit en détail, poison rongeur de l’ame qui l’attaque au milieu de la pompe & des grandeurs, ou plutôt qui la livre à elle-même, & la contraint à se dévorer, maladie commune aux Grands, sombre vapeur qui étend un voile lugubre autour de nous & flétrit l’Univers, état cruel qui sans avoir les traits aigus de la douleur nous l’a fait presque désirer pour sortir du moins de l’affreux dégoût d’une insipide existence, ce fleau est l’ennui qu’on peut appeller un demi trépas ; l’homme de Lettres a le secret de chasser ce monstre ténébreux. […] Envain la Fortune veut se venger des dons qu’il a reçus de la Nature, envain elle l’accable de ces traits qui flétrissent l’ame, il refusera constamment de plier un genou servile devant ses idoles, ou ses favoris. […] Qui ne sent frémir la partie la plus sensible de lui-même à la touche énergique d’un Tacite, il peint & il écrase les tyrans, & du même trait les dévoue à l’opprobre. […] A ces grands traits la froide dérision est prête à naître sur les lévres de l’homme vulgaire.
On se serait cru transporté aux bords du Gange, si des traits particuliers n’eussent révélé en ce solitaire le dernier descendant des grands prophètes d’Israël. […] Quiconque aspirait à une grande action sur le peuple devait imiter Élie, et comme la vie solitaire avait été le trait essentiel de ce prophète, on s’habitua à envisager « l’homme de Dieu » comme un ermite. […] L’humilité n’a jamais été le trait des fortes âmes juives. […] Il faut observer que, quand Josèphe expose les doctrines secrètes et plus ou moins séditieuses de ses compatriotes, il efface tout ce qui a trait aux croyances messianiques, et répand sur ces doctrines, pour ne pas faire ombrage aux Romains, un vernis de banalité, qui fait ressembler tous les chefs de sectes juives à des professeurs de morale ou à des stoïciens.
Dites que cette littérature est ignorante, sans critique, se jetant à l’étourdie à travers tout, pleine de méprises, de quiproquo et de bévues que personne ne relève, ne prenant les choses et les hommes graves du passé que dans un caprice du moment, s’en faisant une contenance, un trait de couleur, un sujet de charmante et folle fantaisie ; et quand il s’agit d’être érudite, l’étant d’une érudition d’hier, toute de parade, soufflée et flatueuse ; et voilà qu’on peut vous nommer, même dans les jeunes, des esprits patients, analytiques, circonspects, en quête de l’antique et lointaine érudition, de celle à laquelle on n’arrive qu’à travers les langues, les années et les préparations silencieuses d’un régime de Port-Royal. […] dites que c’est là le trait distinctif de la littérature de ce temps, et plus d’un écrivain qu’on lit non sans plaisir et qui vous paraît facile, vous avouera, s’il l’ose, qu’il corrige, qu’il rature et qu’il recopie beaucoup. […] Loève-Veimars l’a rempli avec simplicité et sentiment ; lui aussi il sait peindre ; il nous a peint tour à tour Aloysius Block et l’abbé Joie, portraits à la flamande, et récemment Casimir Périer moribond, en traits historiques qui ont fortement frappé.
Heine est plutôt celui d’un poète que celui de tout le monde ; il n’a pas seulement de ces traits inattendus, saisissants, courts, de ces rapports neufs et piquants qu’un mot exprime et enfonce dans la mémoire ; il a, à un haut degré, l’imagination de l’esprit, le don des comparaisons singulières, frappantes, mais prolongées, mille gerbes, à tout instant, de réminiscences colorées, d’analogies brillantes et de symboles. […] Montaigne, qui fourmille d’images spirituelles à chaque phrase, a soin de rendre son trait aussi court que possible. […] Heine, semblent être des portraits ; mais le peintre n’a point copié la nature avec le scrupule de beaucoup de ses confrères, ni rendu les traits avec une minutie diplomatique.
Recherche délicate, qui demande beaucoup de prudence et de tact, mais qui peut réussir à prouver que tel trait de physionomie ou de caractère est un trait de famille. […] Evidemment non, car c’est précisément un des traits qui distinguent son œuvre de celle des poètes grecs et même des pièces de Corneille.
Il choisit une nuit libérale en pavots : Il n’a été donné qu’à La Fontaine de jeter, au milieu d’un récit très-simple, des traits de poésie aussi nobles et aussi heureux. […] Ce que La Fontaine appelle ici une fable, est un trait de la bibliothèque orientale qu’il a mis en vers très-heureusement. […] Ce dernier trait manque un peu de justesse.
Comme les peintres parlent tous, pour ainsi dire, la même langue, ils ne peuvent pas emploïer les traits célebres, dont un autre peintre s’est déja servi, lorsque les ouvrages de ce peintre subsistent encore. […] Le Poussin a pu se servir de ce trait pour exprimer la même chose, en représentant Agrippine qui se cache le visage avec les mains dans le tableau de la mort de Germanicus. […] Mais Le Poussin auroit été blâmé d’avoir volé ce trait s’il se fût trouvé dans un tableau ou de Raphaël ou du Carrache.
Il faut voir aussi de quels traits M. […] Zola ne se fût pas avisé de ce trait, si la page 655 du tome II de M. […] Dans les portraits les traits d’esprit sont à peine de l’esprit : ils sont des traits de caractère. […] Il y aurait d’ailleurs bien d’autres traits à noter. […] Nos romanciers français la peindront-ils jamais des mêmes traits ?
Mais quand, au contraire, il avait à écrire sur l’impératrice, il allait s’enfermer, pour s’inspirer, dans un cabinet orné de l’image de la souveraine, et écrivait, pour ainsi dire, sous la dictée de ses traits. […] Qu’est-ce qu’une biographie où manquent les principaux traits ?
Voici ce que nous disions de sa comédie la Calomme (mars 1840) : on y trouvera quelques traits qui complètent l’appréciation de son talent. […] L’observation de la société se retrouve dans des traits spirituels et dans des détails heureux bien plutôt que dans l’ensemble de l’action et dans les caractères des personnages.
Charles Maurras Je crois qu’on sentira dans ce livre profond et clair : De la métamorphose des fontaines, les deux traits essentiels du génie de M. de La Tailhède : c’est la force lyrique, d’une part, et, d’autre part, un sentiment d’admiration et d’étonnement religieux devant le secret de la nature des choses. Le premier trait paraît, comme de juste, plus sensible dans les odes, les hymnes, les sonnets.
Le Peintre étoit un sot, dont l’amoureux caprice Nous peignit Cupidon un enfant sans malice, Garni d’arcs & de traits, mais nud d’acoustremens. […] Ce seroit s’exprimer foiblement, que de dire que les Poésies de Desportes méritent encore quelque estime : un Lecteur attentif y trouvera plusieurs traits à admirer.
Le Traducteur n’a pas toujours suivi littéralement son Original, parce que son Original n’est pas toujours propre à se soutenir dans notre Langue ; il a cru devoir adoucir certains traits qui nous eussent paru singuliers, & supprimer des traits ennuyeux ou extravagans, qui refroidissent l’intérêt & choquent les gens de goût.
Quoique nous n’en ayons que les huit premiers Chants, ce Poëme mérite une considération particuliere, par ses rapports avec plusieurs traits de la Henriade, & par les morceaux heureux qu’on y rencontre. […] L’amour trempe ses traits dans le sang, dans les larmes.
Enfin Alvarez, commandant à son fils comme père, et lui obéissant comme sujet, est un de ces traits de haute morale, aussi supérieure à la morale des anciens que les Évangiles surpassent les dialogues de Platon, pour l’enseignement des vertus. […] Un trait seul n’est pas chrétien dans ce morceau : Instruisez l’Amérique, apprenez à ses rois Que les chrétiens sont nés pour leur donner des lois.
À quelques traits de passion on ne peut s’y méprendre. […] Ni fanatique, ni détracteur, c’est une bonne situation d’esprit pour saisir ce trait juste, qui en toute chose est la vérité. […] Connaissez-vous rien de plus gracieux que ce trait de la vie de Béranger ? […] C’est là le trait principal de Molière finement saisi. […] C’est un trait de naturel dont chacun lui sait gré.
Beau trait de Boursault envers Boileau. […] quel est le cœur assez glacé pour y trouver un trait à reprendre, un mot à blâmer ? […] D’aucun trait plus galant se peut-on souvenir ? […] » Le trait peint son cœur, l’exclamation son génie. […] Elle regardait cet endroit comme un trait indigne d’un si bon ouvrage.
Des paroles hautaines, des traits de despotisme se mêlaient à tous les actes de Tibère, et annonçaient la dureté farouche de son règne. […] Antoine et Cassius ne sont pas représentés avec des traits moins profonds et moins distincts. […] Milton avait eu la pensée de mettre en tragédies un grand nombre de traits de l’histoire sainte. […] Ce n’est pas que Milton présente fréquemment des traits de ce naturel bas et effréné qui heurte dans Shakspeare. […] On raconte que le poète a consacré dans cette scène un trait de sa vie, sa réconciliation avec sa première femme.
Dites que cette littérature est ignorante, sans critique, se jetant à l’étourdie à travers tout, pleine de méprises, de quiproquos et de bévues que personne ne relève, ne prenant les choses et les hommes graves du passé que dans un caprice du moment ; s’en faisant une contenance, un trait de couleur, un sujet de charmante et folle fantaisie ; et quand il s’agit d’être érudite, l’étant d’une érudition d’hier, toute de parade, soufflée et flatueuse : et voilà qu’on peut vous nommer, même dans les jeunes, des esprits patients, analytiques, circonspects, en quête de l’antique et lointaine érudition, de celle à laquelle on n’arrive qu’à travers les langues, les années et les préparations silencieuses d’un régime de Port-Royal. […] dites que c’est là le trait distinctif de la littérature de ce temps, et plus d’un écrivain qu’on lit non sans plaisir et qui vous paraît facile vous avouera, s’il l’ose, qu’il corrige, qu’il rature et qu’il recopie beaucoup.