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53. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 1, de la necessité d’être occupé pour fuir l’ennui, et de l’attrait que les mouvemens des passions ont pour les hommes » pp. 6-11

Il est facile de concevoir comment les travaux du corps, même ceux qui semblent demander le moins d’application, ne laissent pas d’occuper l’ame. […] La premiere maniere de s’occuper dont nous aïons parlé, qui est celle de se livrer aux impressions que les objets étrangers font sur nous, est beaucoup plus facile.

54. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Le buste de l’abbé Prévost. » pp. 122-139

Le mérite du style lui-même est d’être si coulant, si facile, qu’on peut dire en quelque sorte qu’il n’existe pas. […] Mais, même dans ces besognes obligatoires que la nécessité lui imposait, une fois la plume à la main, que ce soit la grande compilation de l’Histoire générale des voyages qu’il entreprenne (1746) que ce soit un simple Manuel lexique ou Dictionnaire portatif des mots français obscurs et douteux (1750), un de ces vocabulaires comme Charles Nodier en fera plus tard par les mêmes motifs ; que ce soit le Journal étranger, ce répertoire varié de toutes les littératures modernes, dont il devienne le rédacteur en chef (1755) ; de quelque nature de travail qu’il demeure chargé, remarquez le tour noble et facile, l’air d’aisance et de développement qu’il donne à tout ; il y met je ne sais quoi de sa façon agréable et de cet esprit de liaison qui est en lui. […] L’abbé Prévost a l’apologie persuasive : ici le cas était léger ; M. de Maurepas se laissa fléchir, et le fugitif, en retrouvant sa place auprès du prince de Conti, reprit sa même vie, ses mêmes sociétés faciles, et ses habitudes plus que jamais laborieuses. […] Homme bon, entraînant, fragile, cœur tendre, esprit facile, talent naturel, langue excellente, plume intarissable, inventeur invraisemblable et hasardeux, qui sut être une fois, comme par miracle, le copiste inimitable de la passion, tel fut l’abbé Prévost, qu’il ne faut point juger, mais qu’on relit par son meilleur endroit et qu’on aime.

55. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Vicq d’Azyr. — I. » pp. 279-295

Il représente une phase nouvelle et un progrès social dans la science qu’il cultivait avec succès ; il contribua plus que personne en son moment à la rendre facile, accessible, même élégante de forme, en la laissant sérieuse et solide ; à la tirer des écoles, sans la rendre pour cela frivole et sans la profaner. […] La diffamation alors ne l’effrayait pas ; il la méprisait avec ce courage facile que donne la jeunesse, et qui se fondait sur une confiance encore entière dans l’opinion des honnêtes gens. […] Il faut qu’à une mémoire sûre ils joignent une élocution facile et un jugement exercé ; il faut que leurs idées s’offrent comme à volonté et dans le plus grand ordre à leur esprit. […] À les lire aujourd’hui, on a besoin, pour en comprendre tout le succès, de se replacer en scène, au vrai point de vue, et de se représenter cet auditoire mobile, sensible aux moindres allusions, avide de connaissances faciles, riche d’espérances en tout genre, des plus complaisants à l’admiration, et qui savait très bien s’éprendre d’une correction ornée à défaut d’une plus haute éloquence.

56. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Sylvain Bailly. — I. » pp. 343-360

Il aimait tendrement ce fils, en qui il ne voyait qu’un facile successeur. […] Mais les grands bergers astronomes de Bailly, sur le haut plateau de l’Asie, ou peut-être plus loin encore vers le nord (en ce temps où le Nord n’avait point de glaces), étaient bien autre chose : ils avaient amassé durant des milliers d’années, et dans des conditions naturelles plus faciles, toute une science égale peut-être à la nôtre, ou même supérieure, et que nous autres modernes nous avons été réduits pour notre compte à réinventer péniblement à la sueur de nos fronts. […] Après avoir plus ou moins établi qu’il se rencontre chez les anciens peuples connus de l’Asie des ressemblances d’idées, d’institutions, et particulièrement de notions ou mesures astronomiques qui sont d’une singularité frappante, Bailly se demande d’où peut provenir une telle similitude, et il ne voit pour l’expliquer qu’un de ces trois moyens : ou une communication libre et facile de ces anciens peuples entre eux ; ou une invention spontanée et directe, dérivant essentiellement de la nature humaine en chacun, ou enfin une origine, une parenté supérieure et commune à tous : et il discute ces trois suppositions. […] Sur le premier point, par exemple, dont il veut se débarrasser, sur cette communication de peuple à peuple qui lui paraît un moyen d’explication insuffisant, voici comment il débute en sa cinquième Lettre : Est-ce donc une chose si facile, monsieur (c’est toujours à Voltaire qu’il s’adresse), que la communication des idées ?

57. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Les Gaietés champêtres, par M. Jules Janin. » pp. 23-39

C’est tâche facile, puisque tout le monde cette fois est au fait là-dessus autant que nous et nous devance. […] ils ont adopté pour leur usage personnel cette heureuse définition du bonheur dans une cité paisible : un facile travail, une pauvreté contente, une joie ingénue et sérieuse, une patrie honorée, un ciel clément, des hommes et des dieux indulgents. […] Pour lui, écrire un feuilleton est devenu trop facile, il veut plus, il veut quelque chose qui lui coûte : « Car enfin, disent les coquettes de profession, s’il n’y avait pas un brin de peine, où serait le plaisir ?  […] Rien de plus simple, on le voit ; c’est le début de Manon Lescaut, ou de Daphnis et Chloé demeurant rue Saint-Denis, et de tant d’autres romans où la passion n’ira pas si loin ; c’est le commencement de toutes les faciles amours.

58. (1889) Méthode évolutive-instrumentiste d’une poésie rationnelle

* * * Cependant, sur le tard, la quarantaine passée, comme si tout ce que d’épars ils avaient produit n’eût été que pour se faire prendre patience à eux-mêmes, tant ils sentaient le mal de leurs poésies sans lien en même temps qu’ils n’acceptaient de sortir du malaise Baudelairien par aussi quelque facile acceptation du néant : esprits très rares, MM.  […] Donc, nous avons vu que, malgré comme une velléité très sincère mais peureuse d’accepter pour le poète l’aide scientifique (et remercions du moins de cette velléité), ce livre n’est que déviations mystiquement amoureuses du Catholicisme étrangement mêlées à de faciles conceptions de transmigration des âmes — rêveries à la Camille Flammarion. […]   Helmoltz me donnait donc exactement la concordance, par le pareil nombre d’harmoniques les faisant se répondre, — entre les instruments de musique proprement dits et les voyelles et diphthongues : et celles-ci, il m’était facile de les constituer intégralement comme véritables instruments, en représentant par les consonnes à chacune appropriées les rumeurs et bruits qui dans chaque instrument proviennent du mode spécial de production du son, ces rumeurs, spirantes, susurrantes, vibrantes, explosives, martelantes et stridentes. […] Or, que l’on n’aille pas parler de poésie imitative, cette invention facile et inutile ; puisque, nous l’avons vu, la voix humaine est scientifiquement un instrument à note variable, avec ses harmoniques par quoi sont tirés de naturels et immatériels timbres : timbres naturels dont, au contraire, ceux des matériels instruments ne sont qu’une exagération et un grossissement.

59. (1888) La critique scientifique « La critique scientifique — Analyse psychologique »

Si la comparaison est ampliative, comme chez Chateaubriand, elle témoigne de l’accolement facile dans l’esprit de l’écrivain d’images relativement lointaines, douées d’un caractère constant de noblesse et de beauté, avec celles que lui présentaient ses souvenirs ou le cours de ses idées. […] L’interprétation psychologique des émotions indiquées et suggérées dans ces œuvres est facile. […] Il en est d’autres encore, tels que celui des écrivains mercantiles, des auteurs de contes pour les enfants, des feuilletonistes écrivant pour une classe définie de la société, des peintres et des musiciens soucieux de plaire au public plus qu’à eux-mêmes, en un mot des artistes qui emploient certains moyens ou certains effets, non pas d’instinct, mais volontairement, et dans un but étranger à l’art ; il sera facile de se tirer d’affaire pour les œuvres de cette sorte, en considérant qu’elles n’intéressent que par la personnalité qu’elles affectent de manifester et qu’il sera toujours facile de distinguer.

60. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « M. Armand Pommier » pp. 267-279

Oui, la facilité ; rien n’est facile comme le monstrueux, parce qu’il renverse les lois connues de la nature, et qu’il n’est jamais difficile de rêver le renversement d’une loi. Rien n’est facile comme de produire des effets, très-grands, je le veux bien, d’admiration ou de terreur, en cassant toutes les cordes de l’organisation humaine, cette lyre divinement accordée… Byron les produisit un jour dans son Vampire ; mais, on doit en convenir, même à part les vers, Conrad et Lara ont coûté plus de génie à lord Byron que lord Ruthwen, et l’émotion qu’ils produisent est d’un tout autre pouvoir sur l’imagination et sur le souvenir… Et c’est cette facilité d’invention dans l’anormal à outrance, dans le phénomène physiologique, devenu pathologique, et devant lequel la Science elle-même se tait comme devant une question insoluble, c’est cette grossièreté dans l’étonnement ou dans la terreur que produit toute monstruosité, ardemment ou puissamment décrite, qui a perdu aujourd’hui M.  […] … J’ai pris le somnambulisme comme exemple des facilités misérables qu’un phénomène physiologique peut offrir aux esprits abaissés vers les choses faciles, et de la magnifique difficulté qu’il peut présenter aux esprits vigoureusement et fièrement amoureux de la difficulté !

61. (1889) L’art au point de vue sociologique « Préface de l’auteur »

De ces cas maladifs, qui sont les plus faciles à connaître, on passera peu à peu aux phénomènes d’influence normale entre les divers cerveaux et, par cela même, entre les diverses consciences. […] Loin d’être, comme le croit l’école de Spencer, un simple « jeu de nos facultés « représentative », l’art est la prise au sérieux de nos facultés sympathiques et actives, et il ne se sert de la « représentation », encore une fois, que pour assurer l’exercice plus facile et plus intense de ces facultés qui sont le fond même de la vie individuelle et sociale.

62. (1870) Portraits contemporains. Tome IV (4e éd.) « M. THIERS. » pp. 62-124

Lui-même, on se demande s’il les a vues, tant il est habile et prompt à les éluder, tant l’on va sur ses pas à la persuasion d’un train facile. […] Thiers, est ce dont on se préoccupe le moins en le lisant ; il vient de source, il est surtout net, facile et fluide, transparent jusqu’à laisser fuir la couleur. […] Arriver à être court en restant facile et sans cesser d’être abondant par le fond, ce résultat obtenu résumerait la perfection de sa manière. […] Tous deux bienveillants d’imagination et optimistes par nature, tous deux larges, faciles de talent, également alors ennemis de l’affectation, et tout au plus négligés, ils n’étaient pas, au milieu de leurs nombreuses différences, sans quelque rapport d’inclination et de manière. […] « Il est jeune, favorisé de la fortune et de la gloire, entouré d’amis qui l’admirent, d’un public qui l’applaudit avec une complaisance toute particulière ; mais la vie ne saurait être si facile ; il faut un tourment à M.

63. (1841) Matinées littéraires pp. 3-32

Nous vivons dans un temps où l’ignorance n’est plus permise, et qui cependant offre peu de moyens faciles pour s’instruire et pour s’éclairer. […] Rien n’est plus funeste à encourager que cette perspicacité facile qui saisit le mal du premier coup d’œil. […] C’est par l’analyse et la critique qu’ils procèdent, et il nous semble que le moyen le plus sûr et le plus facile de prouver les beautés d’un livre, c’est de les montrer. […] C’est un fait facile à constater. […] On ne la trouve nulle part résumée dans un enseignement facile ; et c’est cet enseignement que nous avons voulu créer par la fondation des Matinées littéraires.

64. (1888) Demain : questions d’esthétique pp. 5-30

Je vous remercie de la courtoisie du fait et des termes, sans prendre pour moi les ironies légères qui relèvent votre prose, et qui vous sont un moyen facile et louable de faire agréer du « Grand Public » certaines idées dont la gravité l’effaroucherait si elle ne se masquait de sourire. […] Cette époque fut, chez nous, celle de la floraison de la raison pure et il est assez facile de la reconnaître sous sa livrée chrétienne, cette raison qui ne s’était pas abdiquée, bien qu’elle prît gloire à servir la messe. […] Mais cette tâche des Naturalistes, des trois la plus courte sinon la plus facile, Flaubert était un trop grand poète pour s’y tenir.

65. (1760) Réflexions sur la poésie

Peut-être notre siècle mérite-t-il beaucoup moins qu’on ne pense, l’honneur ou l’injure qu’on prétend lui faire, en l’appelant par excellence ou par dérision le siècle philosophe : mais philosophe ou non, les poètes n’ont point à se plaindre de lui, et il sera facile de le justifier auprès d’eux. […] Il se contente presque dans celle-ci d’un style coulant et naturel, qui n’ait rien de bas ni de choquant ; il exige de plus dans les vers une expression noble et choisie sans être recherchée, une harmonie facile, et où la contrainte ne se fasse point sentir ; il veut enfin que le poète soit précis sans être décharné, naturel et aisé sans être froid et lâche, vif et serré sans être obscur. […] Il est facile de lui répondre par l’exemple des grands maîtres, qui ont su allier dans leurs vers la beauté du sens à celle de l’harmonie.

66. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « M. Roger de Beauvoir. Colombes et Couleuvres. »

Presque à partir de cette époque, il avait montré ces facultés dangereusement faciles, souples, variées et résonnantes, qui s’attestèrent par des romans, des nouvelles, des pièces de théâtre, des voyages et des conversations pour lesquelles, hélas ! […] Il doit laisser là les vers de tambours de basque et de castagnettes, ce facile Carnaval de l’Espagne, les amabilités aux danseuses et le marivaudage des albums, et se maintenir dans une région plus haute et moins exploitée par les petites gens de la poésie contemporaine qui vivent depuis vingt ans des miettes tombées de la table d’Alfred de Musset. […] Comme la plupart des poètes faciles et naturels, M. 

67. (1889) Les œuvres et les hommes. Les poètes (deuxième série). XI « Hector de Saint-Maur »

Art facile, du reste ! […] Saint-Maur a, pour qualités premières, l’abondance Lamartinienne, la souplesse, l’aisance du nageur dans le rythme, la largeur de la touche et du développement, la difficulté facile des vrais poètes et le secret de leur magie ; car il y a deux facilités, et l’autre s’appelle la facile difficulté, — et c’est le trompe-l’œil des imbéciles !

68. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « M. Paul Féval » pp. 145-158

C’est facile cela… facile comme une vengeance. […] Féval pourrait se garder des dangers de la production trop facile, en portant et eu creusant longtemps ses idées, et surtout, surtout en renonçant à un genre de composition qui abaisse la portée de son talent.

69. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre sixième »

Est-ce le nouveau par l’invention que cherchent, après Molière, les auteurs de comédies, ou bien le plus facile où ils se rabattent ? […] Inventer des situations, comme le veut Diderot, est plus facile que de créer des caractères. Faire contraster les situations avec les caractères, où Diderot voit plus de vérité et d’intérêt dramatique, est seulement plus facile. […] Son désir secret, c’est de rendre l’accès du théâtre plus facile. […] Sa tirade nous paraît d’une légèreté moins travaillée à travers la cavatine qui n’est pas moins spirituelle, et qui semble plus facile.

70. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Maucroix, l’ami de La Fontaine. Ses Œuvres diverses publiées par M. Louis Paris. » pp. 217-234

Il ne faudrait pourtant pas voir là-dedans une retraite par désespoir, un acte de sacrifice comme on le raconte d’un Rancé ou d’un Comminges : Maucroix n’avait point une si grande fermeté ni élévation de sentiments ; en pensant au canonicat, il cherchait une vie agréable, un arrangement honnête et facile, et la suite de ses relations avec la marquise de Brosses le prouva trop bien. […] Quand Maucroix traduisait dans son français large, facile et pur, les homélies d’Astérius ou de saint Jean Chrysostome et un traité de Lactance qu’on venait de recouvrer, il faisait certainement quelque chose d’aussi contraire que possible à certains petits vers qu’on a de lui ; et pourtant il n’était pas hypocrite, il ne parodiait rien en idée, il payait une dette publique à l’état qu’il avait embrassé et à des croyances qu’il n’avait jamais songé à mettre en question. […] Sa manière, qui se rapporte bien à celle des traducteurs de son siècle, qui ont Perrot d’Ablancourt pour chef, est large, facile, coulante, naturelle : « Il n’y a rien de gêné, disait Boileau d’une des traductions de Maucroix ; tout y paraît libre et original. » Maucroix aimait cette habitude et ce train de traduire, même lorsqu’il l’appliquait à des matières assez ingrates : Pour écrire, disait-il, il me faudrait un grand fonds de science et peu de paresse. […] S’il avait vécu à Paris, sa plume élégante et qui cherchait des sujets où s’employer, eût peut-être aspiré à l’histoire, l’histoire écrite en beau style et traitée comme on l’entendait alors : « Je me serais hasardé à composer une histoire de quelqu’un de nos rois. » Mais vivant en province, loin des secours et des riches dépôts, il finit par s’accommoder très bien de cet obstacle à un plus grand travail, et sauf quelques heures d’étude facile dans le cabinet, il passa une bonne partie de sa vie à l’ombre dans son jardin, au jeu, aux agréables propos et en légères collations.

71. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Œuvres inédites de P. de Ronsard, recueillies et publiées par M. Prosper Blanchemain, 1 vol. petit in-8°, Paris, Auguste Aubry, 1856. Étude sur Ronsard, considéré comme imitateur d’Homère et de Pindare, par M. Eugène Gandar, ancien membre de l’École française d’Athènes, 1 vol. in-8°, Metz, 1854. — I » pp. 57-75

M. de Lamartine avait du premier coup fait jaillir une source de sentiments élevée, abondante, et qui s’épanchait en une large et facile harmonie. […] Il est de belle taille, de mine élégante, alerte et adroit aux exercices du corps, le front ouvert, l’air noble et généreux ; il a la conversation agréable et facile. […] Dans cette seconde période de sa carrière et de son talent, on voit Ronsard devenu un poète assez facile, et plutôt trop facile ; il manie avec une grande aisance le vers alexandrin et y dit ce qu’il veut, mais avec quelque prolixité et longueur.

72. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre II : La littérature — Chapitre III : La littérature du xviiie et du xixe  siècle »

Enfin il est facile de voir que la critique classique s’est réconciliée avec la critique romantique dans ce que celle-ci avait de judicieux et de conforme au bon goût, lorsqu’on lit ce jugement si délicat et si juste de M.  […] Il est facile de le comprendre : Jean-Jacques Rousseau, c’est l’esprit d’indiscipline et de révolte, c’est en outre l’esprit d’utopie, c’est en un mot tout ce qu’il y a de plus contraire au principe de la tradition et de la discipline. […] Il a eu de mauvais imitateurs, soit ; mais nos plus grands écrivains modernes ne viennent-ils pas de lui en droite ligne et par une filiation facile à saisir ? […] Mais nous croyons en même temps qu’il y a bien des places dans la maison du Seigneur ; qu’un certain classique n’est pas tout le classique ; que le parfait a toujours quelque imperfection qui permet de concevoir un autre genre de parfait ; que, par exemple, le classique du xviie  siècle n’est qu’une forme de classique qui n’est pas sans défaut ; qu’on pourrait soutenir très-fortement que le classique grec lui est supérieur, et peut-être aussi que le classique anglais ou allemand (si l’on peut employer une telle expression) lui est égal ; que, pour comparer en toute justice ces différents genres de chefs-d’œuvre, il faudrait lire Goethe et Shakespeare avec la même préparation que nous lisons Racine ou Corneille : il faudrait se faire Anglais ou Allemand, tandis qu’il nous est si facile d’être Français.

73. (1911) Lyrisme, épopée, drame. Une loi de l’histoire littéraire expliquée par l’évolution générale « Chapitre premier. Le problème des genres littéraires et la loi de leur évolution » pp. 1-33

Plusieurs des grands auteurs se présenteront alors dans une lumière nouvelle ; et l’étude des sources, qu’on pratique aujourd’hui avec une érudition trop facile, cessera d’être un simple rapprochement de textes, pour devenir une analyse psychologique et esthétique. […] Or, les règles et les formes ont bel et bien fini par remplacer les lois et les genres, l’esprit paresseux de l’homme préférant toujours le facile au difficile, la ressemblance extérieure à la parenté profonde. […] Il me serait facile de citer un grand nombre de cas typiques ; toutefois cette discussion nous mènerait à l’esthétique pure, et je ne veux faire, ici, qu’une esquisse historique. […] J’entends une objection ; on me dit : ces trois « visions » de la vie, qui se succèdent le plus souvent chez le même homme, c’est un fait facile à constater, par l’expérience personnelle ; mais pourquoi un groupe d’hommes (la nation, ou la société tout entière) les connaîtrait-il nécessairement ?

74. (1899) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Septième série « Casuistique. » pp. 184-190

Il est très facile, mais complètement inutile — et d’ailleurs quels titres y aurais-je ? […] (Meurtriers pleins de gentillesse et de fantaisie quelquefois : on m’en a signalé un qui invite de temps en temps une de ses faciles amies à venir le voir « opérer » dans sa clinique, et qui lui offre, pour divertissement, le spectacle des pauvres filles endormies dont il taille les chairs secrètes.)

75. (1868) Alexandre Pouchkine pp. 1-34

Avant lui, on se demandait s’il était facile d’écrire des poèmes en russe, et toute une école de critiques autorisés soutenait, « par vives raisons », qu’on devait employer pour la poésie la langue slavone, c’est-à-dire celle dans laquelle sont traduits les livres saints, la langue de la liturgie et de la chaire. […] La rime, importation étrangère, et certainement inutile dans un idiome où chaque mot a un rythme très marqué, et chez un peuple qui chante en quelque sorte en parlant, la rime est toujours facile en russe, et grâce à l’accent prosodique avec lequel elle se combine, elle ne prend jamais une importance exagérée. […] Des vers faciles et bien tournés, des tableaux pleins de feu et d’une témérité juvénile ne peuvent faire pardonner la licence du sujet et de l’exécution. […] Après avoir été quelque temps le roi de la mode, il prend en pitié ses faciles succès ; le monde l’ennuie, et, blasé avant trente ans, il va vivre à la campagne, fort mal vu de ses voisins, qu’offense sa supériorité. […] Rien n’est forcé, tout est simple, facile, mais revêtu du plus admirable coloris.

76. (1890) L’avenir de la science « XVIII »

Mais l’essentiel est de découvrir le meilleur, et ce n’est pas chose facile. […] Aucun problème social n’est abordable de face ; du moment où une solution paraît claire et facile, il faut s’en défier. […] Il nous est facile aujourd’hui de railler Paracelse, Agrippa, Cardan, Van Helmont, et pourtant sans eux nous ne serions pas ce que nous sommes. […] Il leur est facile, à eux qui ne tentent rien et nous laissent faire les expériences à nos dépens, de rire quand nous faisons un faux pas sur ce terrain inconnu. […] Je suppose, par exemple, que la chimie découvrît à l’heure qu’il est un moyen pour rendre l’acquisition de l’aliment si facile qu’il suffit presque d’étendre la main pour l’avoir ; il est certain que les trois quarts du genre humain se réfugieraient dans la paresse, c’est-à-dire dans la barbarie.

77. (1868) Curiosités esthétiques « IV. Exposition universelle 1855 — Beaux-arts » pp. 211-244

Il me serait trop facile de disserter subtilement sur la composition symétrique ou équilibrée, sur la pondération des tons, sur le ton chaud et le ton froid, etc. […] Je commence donc par une tâche plus facile : je vais étudier rapidement les principaux maîtres de l’école française, et analyser les éléments de progrès ou les ferments de ruine qu’elle contient en elle. […] Il a, en somme, l’admiration assez facile, le caractère assez éclectique, comme tous les hommes qui manquent de fatalité. […] Généralement les femmes de Delacroix peuvent se diviser en deux classes : les unes, faciles à comprendre, souvent mythologiques, sont nécessairement belles (la Nymphe couchée et vue de dos, dans le plafond de la galerie d’Apollon). […] Il est déjà facile, au point de sa carrière où il est parvenu, de l’affirmer sans trouver trop de contradicteurs.

78. (1765) Articles de l’Encyclopédie pp. 5482-9849

Il est à remarquer que si l’élégance a toûjours l’air facile, tout ce qui a cet air facile & naturel, n’est cependant pas élégant. […] Le pinceau du Correge est facile. […] Bossuet est plus véritablement éloquent & plus facile que Flechier. […] La facile Cléopatre se donna à Antoine aussi aisément qu’à César. Le facile Claude se laissa gouverner par Agrippine.

79. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Quatrième partie. Élocution — Chapitre IX. Précision, brièveté, netteté »

Au reste, un style doux, facile, élégant peut être bref : Racine est concis, malgré l’ampleur de ses périodes. […] Mais comme l’abus de ces termes de liaison donne au discours un air pesant et pédant, et comme d’autre part il paraît facile de s’en passer, on ne se donne pas la peine d’en connaître l’énergie et les propriétés.

80. (1854) Nouveaux portraits littéraires. Tome I pp. 1-402

Pour La Fontaine, la parenté n’est pas moins facile à établir. […] Dans cette dernière composition, la progression dramatique est plus facile à saisir. […] Il serait trop facile de relever çà et là quelques négligences ; je renonce à les signaler. […] Hugo est, comme il était facile de le prévoir, une antithèse. […] Avec moins de mots, il lui eût été facile de dire davantage.

81. (1902) Les œuvres et les hommes. Le roman contemporain. XVIII « Gustave Flaubert »

Ce n’est pas un esprit facile, et c’est même un compliment que je lui fais là. Les esprits faciles, après des commencements charmants, restent médiocres et finissent par se noyer toujours dans le crachat de leur facilité. […] Malheureusement, si Flaubert a le bonheur de n’être pas un esprit facile, il n’a nullement celui d’être un esprit fécond. […] Dans sa Tentation de saint Antoine, il fait partout ce que les enfants font sur les murs, et cela lui est d’autant plus facile que, son mur, c’est l’imagination de saint Antoine, et que sur ce mur-là il peut peindre tout ce qu’il veut : il est dans le rêve, le cauchemar, l’hallucination, la folie ! […] pas facile.

82. (1919) L’énergie spirituelle. Essais et conférences « Chapitre VI. L’effort intellectuel »

Pour simplifier l’étude, nous examinerons les diverses espèces de travail intellectuel séparément, en allant du plus facile, qui est reproduction, au plus difficile, qui est production ou invention. […] L’objet est d’obtenir de la mémoire le rappel instantané et facile. […] Il est vrai que le rappel ne sera plus immédiat et facile. […] Ce travail d’interprétation est trop facile, quand nous entendons parler notre propre langue, pour que nous ayons le temps de le décomposer en ses diverses phases. […] Or, il est facile de voir que les choses se passent de même dans tout effort pour apprendre et pour comprendre, c’est-à-dire, en somme, dans tout effort intellectuel.

83. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Florian. (Fables illustrées.) » pp. 229-248

Son Arlequin, toujours simple et bon, toujours facile à tromper, croit ce qu’on lui dit, fait ce que l’on veut, et vient se mettre de moitié dans les pièges qu’on veut lui tendre : rien ne l’étonne, tout l’embarrasse ; il n’a point de raison, il n’a que de la sensibilité ; il se fâche, s’apaise, s’afflige, se console dans le même instant : sa joie et sa douleur sont également plaisantes. […] Le talent de Florian s’y montre au complet, avec son naturel gracieux, sa diction facile et spirituelle, avec une morale aimable et bienveillante, mais qui n’exclut ni la raillerie, ni la malice. […] Les Fables de Florian sont bien composées, d’une combinaison ingénieuse et facile ; le sujet y est presque partout dans un parfait rapport, dans une proportion exacte avec la moralité. […] C’est là la véritable épitaphe de Florian, de cet homme heureux, de ce talent facile et riant, que tout favorisa à souhait dès son entrée dans le monde et dans la vie, mais qui ne put empêcher un jour l’inévitable douleur, l’antique douleur de Job, qui se renouvelle sans cesse sur la terre, de se faire sentir à lui, et de lui noyer tout le cœur dans une seule goutte d’amertume.

84. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre VII. Maurice Barrès et Paul Adam » pp. 72-89

Et j’ai dit souvent comme il faut aimer la maestria facile de Paul Adam. […] Elles sont ingénues et audacieuses, ces histoires, dégingandées et précieuses, avec des récitatifs faciles, d’anecdote et de chronique, ascendant à des pages culminantes, à des morceaux d’un imprévu nécessaire. […] Outre que son lyrisme lui confère la vertu suggestive et enlevante des chants en vers, elle dépeint le réel avec la fidélité facile d’un cristal grossissant, et elle évoque le possible avec l’autorité d’une prédication.

85. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Troisième partie — Section 4, de l’art ou de la musique poëtique, de la mélopée. Qu’il y avoit une mélopée qui n’étoit pas un chant musical, quoiqu’elle s’écrivît en notes » pp. 54-83

" Diodore De Sicile écrit que Philippe, après avoir pris trop de vin la journée dont nous venons de parler, fit plusieurs choses indecentes sur le champ de bataille, mais que les representations de Démadés, athenien, et l’un des prisonniers de guerre, le firent rentrer en lui-même, et que le repentir qu’il eut de s’être oublié, le rendit plus facile, lorsqu’il fut question de traiter avec l’ennemi vaincu. […] Le premier étoit, comme on va le voir, plus facile que l’autre, et la raison porte à croire que de deux arts qui ont à peu près le même objet, celui dont la pratique est la plus aisée, ait été trouvé le premier. […] Dans cette supposition, il n’y avoit rien de plus facile à comprendre que la mécanique de la composition et de l’execution de la declamation des anciens, et saint Augustin aura eu raison de dire qu’il n’en traiteroit point, parce que c’étoient des choses connues du comedien le plus chetif.

86. (1818) Essai sur les institutions sociales « Chapitre IV. Des changements survenus dans notre manière d’apprécier et de juger notre littérature nationale » pp. 86-105

Les rapports ne sont pas aussi frappants pour la poésie dans la prose française ; mais ils n’en existent pas moins, et il me serait facile de citer des exemples qui ne laisseraient aucun doute à cet égard. […] Alors aussi, et par suite du mouvement général de l’Europe, cette Italie, si une d’esprit et de mœurs, produira un troisième siècle littéraire dont il n’est pas facile d’apercevoir encore les éléments épars. […] Enfin, je n’ignore point que souvent les royaumes de l’Orient ont présenté le spectacle de deux siècles littéraires sur le même sol et dans la même langue ; mais il serait facile de démontrer combien doivent différer tous les éléments de calcul dans les considérations qui s’appliquent à l’Orient.

87. (1874) Premiers lundis. Tome II « Mort de sir Walter Scott »

Écrivain, poëte, conteur avant tout, il a obéi, dans le cours de sa longue et laborieuse carrière, à une vocation facile, féconde, indépendante des questions flagrantes, étrangère aux luttes du présent, amoureuse des siècles passés, dont il fréquentait les ruines, dont il évoquait les ombres, y recherchant toute tradition pour la raviver et la rajeunir. […] D’un naturel bienveillant, facile, agréablement enjoué ; d’un esprit avide de culture et de connaissances diverses ; s’accommodant aux mœurs dominantes et aux opinions accréditées ; d’une âme assez tempérée, autant qu’il semble ; habituellement heureux et favorisé par les conjonctures, il s’est développé sur une surface brillante et animée, atteignant sans effort à celles de ses créations qui doivent rester les plus immortelles, y assistant pour ainsi dire avec complaisance en même temps qu’elles lui échappaient, et ne gravant nulle part sur aucune d’elles ce je ne sais quoi de trop âcre et de trop intime qui trahit toujours les mystères de l’auteur.

88. (1874) Premiers lundis. Tome II « Deux préfaces »

Quand on étudie quelque grand écrivain ou poète mort, La Bruyère, Racine, Molière, par exemple, on est bien plus à l’aise, je le sens, pour dire sa pensée, pour asseoir son jugement sur l’œuvre ; mais le rapport de l’œuvre à la personne même, au caractère, aux circonstances particulières, est-il aussi facile à saisir ? […] L’écrivain est toujours assez facile à juger, mais l’homme ne l’est pas également.

89. (1899) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Septième série « Pour encourager les riches. » pp. 168-175

C’est que les personnes très riches sont privilégiées de plus de façons encore qu’il ne paraît à première vue ; c’est que, en même temps que la charité sous sa forme la plus élémentaire, qui est l’aumône en argent, semble devoir être plus facile aux gens qui en ont beaucoup, ceux-ci, à mérite égal — et en vertu de leur richesse même, qui les signale à l’attention et leur permet des largesses d’un chiffre imposant — sont singulièrement plus assurés de la reconnaissance publique que les gens de condition médiocre ou petite, et, ainsi, ne manquent guère de recevoir, dès ici-bas, la récompense de leur bonne volonté. […] Certes elle l’est : mais qu’elle est douce aussi, et facile à séduire !

90. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — P. — article » pp. 439-450

Si le plan des Philosophes ressemble un peu trop à celui des Femmes Savantes, pour laisser à l’Auteur la gloire de l’invention, il a du moins su se procurer celle qui doit être le prix du ton de la bonne Comédie, d’une versification heureuse, énergique, & facile. […] Si nous avions sérieusement à nous défendre de cette imputation, il nous seroit facile de prouver que les Trois Siecles étoient presque achevés quand ses Mémoires parurent ; nous ferions observer qu’un seul volume de la premiere édition des Trois Siecles en auroit fait deux plus gros que ne l’étoient alors ses Mémoires ; nous défierions enfin M.

91. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Gibbon. — II. (Fin.) » pp. 452-472

Il fit durant les six mois qu’il resta à Paris une conquête plus difficile que ne l’était celle de Mme Necker : il acquit la bienveillance de Mme Du Deffand, si susceptible en fait d’ennui, et qui trouva sa conversation « charmante et facile ». […] Gibbon ; depuis huit jours qu’il est arrivé, je l’ai vu presque tous les jours : il a la conversation facile, parle très bien français ; j’espère qu’il me sera de grande ressource. […] Gibbon, j’ai tort ; je lui crois beaucoup d’esprit ; sa conversation est facile et forte de choses ; il me plaît beaucoup, d’autant plus qu’il ne m’embarrasse pas. […] Gibbon ; c’est véritablement un homme d’esprit ; tous les tons lui sont faciles ; il est aussi Français ici que MM. de Choiseul, de Beauvau, etc.

92. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Seconde partie. De l’état actuel des lumières en France, et de leurs progrès futurs — Chapitre V. Des ouvrages d’imagination » pp. 480-512

Des ouvrages d’imagination Il est facile de signaler les défauts que le bon goût fait toujours une loi d’éviter dans les ouvrages littéraires ; mais il ne l’est pas également d’indiquer quelle est la route que l’imagination doit se tracer à l’avenir pour produire de nouveaux effets. […] Voltaire met sans cesse en opposition ce qui devrait être et ce qui était, la pédanterie des formes et la frivolité des esprits, l’austérité des dogmes religieux et les mœurs faciles de ceux qui les enseignaient, l’ignorance des grands et leur pouvoir. […] Il est facile d’attaquer sérieusement ce qui est coupable en soi ; mais ce qui est piquant, c’est de jeter habilement sur l’immoralité le vernis de la sottise ; et cela se peut. […] Pour réussir par les ouvrages d’imagination, il faut peut-être présenter une morale facile au milieu des mœurs sévères ; mais au milieu des mœurs corrompues, le tableau d’une morale austère est le seul qu’il faille constamment offrir.

93. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série « Jules de Glouvet »

Et, par exemple, il y a des livres qui sont d’un artiste incomplet, où il serait facile de signaler des fautes et des lacunes, et qui plaisent néanmoins par la sincérité avec laquelle ils laissent transparaître l’homme qui les a composés, son caractère, son tour d’esprit, ses habitudes, sa condition sociale. […] En général, l’œil de M. de Glouvet décompose, mais ne résume pas : il nous laisse faire ce travail et se contente de nous le rendre facile. […] Je sais que cet exercice est assez facile, pour l’avoir pratiqué une fois par hasard, et j’ai connu des élèves de rhétorique qui y réussissaient mieux que dans le français d’aujourd’hui. […] Je laisse même de côté des figures vivantes, mais d’une invention facile, telles que la fermière Rose Chandoux, la terrible mère qui veut faire un notaire de son fils, et Geneviève Bourgeois, la vieille fille héroïque, gardienne jalouse de la terre familiale, dont la vie n’est qu’un amer et silencieux sacrifice aux derniers du nom, et qui meurt sur ce cri : « Il n’y a plus de Cassoire ! 

94. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Essai sur Amyot, par M. A. de Blignières. (1 vol. — 1851.) » pp. 450-470

Amyot a rendu des services, 1º un service inappréciable à la langue, en la répandant et en la popularisant dans ses meilleurs tours, dans son économie la plus ample et la plus facile, dans sa diction la plus large et la plus sincère, à l’aide de l’intérêt qui s’attachait aux Vies de Plutarque ; 2º il a rendu un service non moindre à la raison et au bon sens public en faisant circuler Plutarque, et ses trésors de vertu antique et de morale, dans toutes les mains, à l’aide d’une langue si claire, si facile, si diffuse, si courante et si riante. […] Bon, facile, amateur de musique, un peu timide en public, un peu perdu dans les détails, vif d’humeur, mais revenant aisément, franc, ouvert et candide, tel on nous peint et tel aisément on se figure en effet le bon Amyot, que le malheur, vers la fin de son existence heureuse, vint tout à coup visiter. […] C’est dans l’étude de ce petit tableau qu’il est plus facile de se rendre compte du procédé d’Amyot quand il traduit.

95. (1874) Premiers lundis. Tome I « A. de Lamartine : Réception à l’Académie Française »

La renommée des œuvres fut prompte à mûrir durant l’absence du poète ; la postérité commença vite pour lui : on le relut avec larmes et délices ; son nom devint cher et familier à tous ; on se montra presque facile à reconnaître le génie de celui qui était absent et qu’on ne voyait plus. […] Voix sonore et retentissante, timbre éclatant et pur, geste simple ; puis une parole facile, abondante, harmonieuse ; une manière de style étrangère à toute affectation, à toute enflure ; un laisser-aller plein de ressources ; un art heureux de diriger, de détourner sa pensée, de la lancer chemin faisant dans les questions, et de l’arrêter toujours à propos ; un penchant à s’étendre sur les moralités consolantes quand il y a jour, et, sitôt qu’on arrive aux hommes, un parfait mélange de discrétion et de loyauté, voilà ce qui nous a surtout frappé dans l’éloquent discours de M. de Lamartine.

96. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Quatrième partie. Élocution — Chapitre VI. De l’emploi des figures et de la condition qui les rend légitimes : la nécessité »

Il est plus facile de dire ce qu’on désire, que le moyen d’obtenir ce qu’on désire, de rendre l’impression confuse qu’on ressent en présence d’un objet, que de faire connaître l’objet lui-même. […] Il est plus facile à un orateur politique d’écraser ses ennemis, de conjurer des spectres, de contenir des torrents, de figurer vivement le mal que fera le parti contraire, et le bien que son parti fera, que d’indiquer en termes propres un seul moyen d’écarter le moindre des dangers et de produire le plus léger des biens : on manque d’ordinaire à la transformation des métaphores en idées.

97. (1906) La nouvelle littérature, 1895-1905 « Deuxième partie. L’évolution des genres — Chapitre VI. Conclusions » pp. 232-240

Si l’on personnifie, en Voltaire, la Raison critique, indépendante, saine, la logique et l’ironie, l’esprit de réforme contenu dans le culte du goût, de tradition légitime et de nécessité, le respect de la langue, il deviendra facile d’identifier Rousseau à cet esprit de révolte, d’instinct brutal, de mépris pour la forme, de lyrisme hors de propos, d’orgueil maladroit qui semble nous dominer aujourd’hui. […] combien l’erreur est séduisante et facile.

98. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série « (Chroniqueurs parisiens II) Henry Fouquier »

Vous avez une bonne douzaine de chroniqueurs, jeunes ou vieux, chez qui vous retrouverez le même échauffement artificiel, le même désir vulgaire d’étonner, la même outrance facile, le même claquement de cravache, au reste le même vide et souvent la même insuffisance de style et, par endroits, de syntaxe. […] Celui-là est facile à « discerner », s’il reste malaisé à définir. […] C’est l’esprit le plus facile, le plus alerte, le plus adroit, le plus prêt sur toutes choses.

99. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — L — Lamartine, Alphonse de (1790-1869) »

Sainte-Beuve Lamartine n’est pas un homme qui élabore et qui cherche : il ramasse, il sème, il moissonne sur sa route ; il passe à côté, il néglige ou laisse tomber de ses mains ; sa ressource surabondante est en lui ; il ne veut que ce qui lui demeure facile et toujours présent. […] Il restera une foule de ces vers admirables qui n’empêchent pas les poèmes d’être médiocres, et qui sont les dernières fleurs dont se parent les poésies mourantes ; il restera le souvenir de grandes facultés poétiques, supérieures à ce qui en sera sorti ; il restera le nom harmonieux et sonore d’un poète auquel son siècle aura été trop doux et la gloire trop facile, et en qui ses contemporains auront trop aimé leurs propres défauts. […] Philarète Chasles C’était la plus étonnante créature de Dieu, la plus instinctive, la moins apte à conduire les affaires ou à juger les hommes, la mieux douée pour s’élever, planer, ne pas même savoir qu’il planait, tomber dans un abîme et un gouffre de fautes, sans avoir conscience d’être tombé ; sans vanité, car il se croyait et se voyait au-dessus de tout ; sans orgueil, car il ne doutait nullement de sa divinité et y nageait librement, naturellement ; sans principes, car, étant Dieu, il renfermait tous les principes en lui-même ; sans le moindre sentiment ridicule, car il pardonnait à tout le monde et sc pardonnait à lui-même ; un vrai miracle, une essence plutôt qu’un homme ; une étoile plutôt qu’un drapeau ; un arome plutôt qu’un poète, né pour faire couler en beaux discours, en beaux vers, même en actes charitables, en hardis essors, en spontanées tentatives, les trésors les plus faciles, les plus abondants d’éloquence, d’intelligence, de lyrisme, de formes heureuses, quoique trop fluides ; de grâces inépuisables, non pas efféminées, mais manquant de concentration, de sol et de virilité réfléchie.

100. (1842) Essai sur Adolphe

Sans doute il eût été facile à une imagination plus active et plus exercée d’encadrer le sujet de ce roman dans une fable plus savante et plus vive, de multiplier les incidents, de nouer plus étroitement la tragédie. […] Ellénore, après la confusion de la défaite, ouvrira les yeux, et cherchera vainement autour d’elle les félicitations respectueuses sur lesquelles elle avait compté ; au fond de son cœur elle rougira de son inconstance, et doutera d’un bonheur si facile à changer. […] Mais le mensonge, d’abord si riche en métamorphoses, si habile à se déguiser, si fécond en ressources, devient de jour en jour plus maladroit et plus facile à surprendre : il n’est plus qu’une habitude, et se passe de volonté.

101. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Les Confidences, par M. de Lamartine. (1 vol. in-8º.) » pp. 20-34

M. de Lamartine, dont la disposition habituelle est plutôt le contentement et la sérénité, rentre bien vite dans le vrai de sa nature, lorsqu’il nous peint sa libre et facile enfance, sa croissance heureuse sous la plus tendre et la plus distinguée des mères : « Dieu m’a fait la grâce de naître dans une de ces familles de prédilection qui sont comme un sanctuaire de piété… Si j’avais à renaître sur cette terre, c’est encore là que je voudrais renaître. » Il aurait bien tort, en effet, et il serait bien injuste s’il croyait avoir à se plaindre du sort à ses débuts dans la vie. […] Son génie facile, abondant, harmonieux, s’épanchait sans économie au gré de tous ses rêves. […] Au moment où l’on s’impatiente et où l’on désespère, tout à coup le talent reparaît vif, facile, plein de fraîcheur, et l’on se sent reprendre avec lui.

102. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Chefs-d’œuvre de la littérature française (Collection Didot). Hamilton. » pp. 92-107

À côté de La Bruyère on trouverait d’autres exemples moins frappants, mais aussi peut-être plus coulants et plus faciles. […] Rien n’égale cette façon de dire et de conter, facile, heureuse, unissant le familier au rare, d’une raillerie perpétuelle et presque insensible, d’une ironie qui glisse et n’insiste pas, d’une médisance achevée. […] En attendant, c’est profit de se remettre en goût de temps en temps avec ces auteurs faciles qu’on a sous la main, et qui n’ont rien de vieux.

103. (1842) Discours sur l’esprit positif

Aucune science ne peut mieux manifester que l’astronomie cette nature nécessairement relative de toutes nos connaissances réelles, puisque, l’investigation des phénomènes ne pouvant s’y opérer que par un seul sens, il est très facile d’y apprécier les conséquences spéculatives de sa suppression ou de sa simple altération. […] En outre, la sage réserve avec laquelle l’esprit positif procède graduellement envers des sujets très faciles doit faire indirectement apprécier la folle témérité de l’esprit théologique à l’égard des plus difficiles questions. […] Mais, quoiqu’un tel office ait dû faire exagérer beaucoup l’importance effective de cet esprit transitoire, il est cependant facile de reconnaître que le progrès naturel des connaissances réelles donnait seul une sérieuse consistance à sa bruyante activité. […] L’école positive y devra donc trouver naturellement un accès plus facile pour son enseignement universel, et une plus vive sympathie pour sa rénovation philosophique, quand elle pourra convenablement pénétrer dans ce vaste milieu social. […] Cet état doit être facile, au contraire, soit aux penseurs, soit aux opérateurs, d’après leur commun affranchissement spontané des soucis relatifs à l’emploi des capitaux, et indépendamment de la régularité naturelle de leur vie journalière.

104. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « Molière »

Ainsi ces génies rares, de grande et facile beauté, de beauté native et génuine, triomphent, d’un air d’aisance, des conditions les plus contraires ; ils se déploient, ils s’établissent invinciblement. […] Non ; leurs œuvres, aussi promptes, aussi multipliées que celles des esprits principalement faciles, sont encore combinées, fortes, nouées quand il le faut, achevées maintes fois et sublimes. […] C’est dans la récidive, dans la production facile et infatigable, que se déclare le don dramatique. […] Dix ou quinze ans plus tard seulement, au temps où paraissaient les Caractères, cela lui eût été moins facile. […] On en plaisanta dans le temps beaucoup plus qu’il ne fallait, et ce rire facile couvrit les louanges dues à l’ensemble du très-estimable Commentaire

105. (1926) L’esprit contre la raison

Dans la grande aventure qu’est toute lutte de l’esprit pour l’esprit, l’être, s’il veut devenir digne de la liberté, son égide, doit avant tout renoncer au secours facile des apparences et n’accepter rien de ce qui est astuces, gestes composés, charme. […] Le non-sens d’une telle formule est trop facile à éprouver et même, en dépit de sa grise humilité, comment admettre que ladite raison puisse épouser la matière, suivre les contours des choses ? […] Adjudant de l’intelligence, ses attributions l’empêchent de voir large, d’aller à l’essentiel, mais parce qu’il est trop facile de s’absorber dans des détails, la lutte injuste entre elle et l’esprit ne cesse de se poursuivre. […] Ils essaient de se rattraper aux branches secondaires, de dessiner des arabesques, d’oublier le fond pour la forme, de ne plus penser au pourquoi, mais au plus simple, au plus facile comment. […] Un tel éloge, méritent de le partager, les meilleurs d’aujourd’hui qui ne se sont souciés ni des secours de la forme ni des faciles séductions des couleurs.

106. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Benjamin Constant. Son cours de politique constitutionnelle, ou collection de ses divers écrits et brochures avec une introduction et des notes, par M. Laboulaye »

Si l’on avait à discuter, il y aurait à démontrer par les faits et par l’expérience que l’homme n’est pas si essentiellement raisonnable, que la société n’est pas une œuvre si naturelle, si facile, et où tout marche nécessairement de soi, qu’elle a été une création plus artificielle que ne l’imaginent des publicistes trop confiants, et que ce qui a été si pénible à construire et à élever n’est sans doute pas si simple à entretenir, tellement qu’il suffise de laisser faire et dire à tous les membres d’une nation tout ce qu’ils croient le mieux, pour que tout aille et tourne au mieux effectivement. […] Laboulaye de nous avoir rendu plus facile la lecture d’écrits si anciens déjà et en partie oubliés. […] Ouvrez la brochure des Réactions politiques (1797), on y voit « une tendance de l’esprit humain à englober dans ses regrets tout ce qui entourait ce qu’il regrette » ; on y voit « un mouvement rétrograde qui, se prolongeant au-delà de ses bornes nécessaires, ne laisse enfin pour vestige du changement qu’on voulut opérer, que des débris, des larmes, de l’opprobre et du sang. » Depuis lors, la langue de Benjamin Constant se rompit et se brisa ; elle devint facile, et parut encore plus élégante qu’elle ne l’était. […] De plus, tout en étant facile et clair, il a trop peu de ces traits vifs qui réveillent.

107. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Lamartine — Lamartine »

Lamartine n’est pas un homme qui élabore et qui cherche ; il ramasse, il sème, il moissonne sur sa route ; il passe à côté, il néglige ou laisse tomber de ses mains ; sa ressource surabondante est en lui ; il ne veut que ce qui lui demeure facile et toujours présent. […] — Le jeune Lamartine ne laissa cette vie domestique que pour aller à Belley, au collége des Pères de la Foi ; moins heureux qu’à Milly, il y trouva cependant du charme, des amis qu’il garda toujours, des guides indulgents et faciles, auxquels il disait en les quittant : Aimables sectateurs d’une aimable sagesse, Bientôt je ne vous verrai plus ! […] Un jour, c’était au temps des oisives années, Aux dernières saisons, de poésie ornées Et d’art, avant l’orage où tout s’est dispersé, Et dont le vaste flot, quoique rapetissé, Avec les rois déchus, les trônes à la nage, A pour longtemps noyé plus d’un secret ombrage, Silencieux bosquets mal à propos rêvés, Terrasses et balcons, tous les lieux réservés, Tout ce Delta d’hier, ingénieux asile, Qu’on devait à quinze ans d’une onde plus facile ! […] Si, en effet, Lamartine resta tout à fait étranger au travail de style et d’art qui préoccupait alors quelques poëtes, il ne restait nullement insensible aux prodigieux résultats qu’il en admirait chez son jeune et constant ami, Victor Hugo ; son génie facile saisit à l’instant même plusieurs secrets que sa négligence avait ignorés jusque-là.

108. (1890) L’avenir de la science « II »

Il est facile de montrer que la plupart des préjugés sur lesquels reposait l’ancienne société, le privilège de la noblesse, le droit d’aînesse, la légitimité, etc., sont irrationnels et absurdes au point de vue de la raison abstraite, que, dans une société normalement constituée, de telles superstitions n’auraient point de place. […] Il est certain que la critique de ces premiers réformateurs fut, sur plusieurs points, aigre, inintelligente du spontané, trop orgueilleuse des faciles découvertes de la raison réfléchie. […] En philologie, les grammairiens du temps s’amusaient à montrer l’inconséquence, les fautes du langage, tel que le peuple l’a fait, et à corriger les écarts de l’usage par la raison logique, sans s’apercevoir que les tours qu’ils voulaient supprimer étaient plus logiques, plus clairs, plus faciles que ceux qu’ils voulaient y substituer. […] Les conservateurs de 1789 purent opposer aux révolutionnaires ce que les conservateurs de 1849 opposent aux socialistes : « Vous tentez ce qui n’a pas d’exemple, vous vous en prenez à l’œuvre des siècles, vous ne tenez pas compte de l’histoire et de la nature humaine. » Les faciles déclamations de la bourgeoisie contre la noblesse héréditaire peuvent se rétorquer avec avantage contre la ploutocratie.

109. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « L’abbé de Choisy. » pp. 428-450

« Dès que je serais persuadé de la puissance et de la bonté de Dieu, rien ne me serait difficile à croire. » — « Je n’ai donc, lui répondait Théophile, qu’à vous prouver qu’il y a un Dieu et que votre âme est immortelle, et vous êtes capucin. » Et Dangeau disait· encore, en parlant de cette conversion facile et un peu fragile de l’abbé de Choisy, et quand on lui en faisait compliment : « Hélas ! […] Le facile Choisy se prête à tout, admire tout. […] Il n’en est pas ainsi de notre abbé, et rien ne prouve mieux à quel point son caractère est facile, bienveillant et foncièrement sociable. […] Ses yeux creux, ses sourcils épais et noirs, lui faisaient une mine austère, et lui rendaient le premier abord sauvage et négatif ; mais, dans la suite, en l’apprivoisant ; on le trouvait assez facile, expéditif et d’une sûreté inébranlable.

110. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Rollin. » pp. 261-282

Pour bien comprendre Rollin et les fruits multipliés et faciles de sa vieillesse féconde, il faut remonter à cette vie antérieure durant laquelle il s’était formé, il avait mûri, et où il était, pour tous ceux qui l’approchaient, ce qu’il parut plus tard aux yeux de tous ceux qui le lurent. […] Comme historien, il n’est et ne veut être rien de plus qu’un traducteur abondant et facile d’Hérodote, de Tite-Live, de Xénophon, de tous les grands et bons historiens qu’il rencontre, sur lesquels il s’embarque et navigue, pour ainsi dire, tant qu’il y trouve un courant pour le porter. […] Le mérite, à cette date de 1726, c’est d’avoir donné la Rhétorique classique très large et très facile d’une époque où l’on comptait déjà les excellents et élégants traducteurs, les Gédoyn, les Montgault, les d’Olivet, les Sacy ; il les amène et les introduit dans le courant de son style, sans rien de sec ni d’accablant. […] Notre enfance a vécu là-dessus et s’y est laissé porter comme sur un courant plein, sûr et facile.

111. (1888) La critique scientifique « La critique et l’histoire »

Le siècle de Louis XIV, le XVIIIe précédèrent la défaite facile de la noblesse et de la haute bourgeoisie françaises par une poignée de révolutionnaires. […] La raison de tous ces faits est facile à dire et elle nous permet de rectifier sur un point important la définition, donnée, au début, de l’œuvre d’art. […] Ainsi l’habitude des plaisirs esthétiques favorable à la solidarité humaine, est nuisible à l’existence des nations : et en fait les Etats les plus policés sont les plus faciles à conquérir. […] Au contraire, Tarde parlera plus volontiers du caractère anonyme, non charismatique, de l’innovation : « un nombre considérable d’idées petites ou grandes, faciles ou difficiles, le plus souvent inaperçues à leur naissance, rarement glorieuses, en général anonymes » (ibid.

112. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 35, de la mécanique de la poësie qui ne regarde les mots que comme de simples sons. Avantages des poetes qui ont composé en latin sur ceux qui composent en françois » pp. 296-339

Il est clair par les raisons que nous avons exposées, qu’il est bien plus facile aux écrivains latins de faire des alliances agréables entre les sons, de placer tous les mots d’une phrase auprès d’autres mots qui se plaisent dans leur voisinage : en un mot de parvenir à ce que Quintilien appelle inoffensam verborum copulam, qu’il n’est possible aux écrivains françois de le faire. […] En troisiéme lieu les regles de la poësie latine sont plus faciles à pratiquer que les regles de la poësie françoise. […] Il est vrai que les regles de la poësie latine sont en bien plus grand nombre que les regles de la poësie françoise, à cause qu’elles entrent plus dans le détail de la versification que les regles de la poesie françoise ; mais comme ces regles se dessignent, pour ainsi dire, comme on en fait la figure, en se servant des caracteres differents qui marquent la quantité des syllabes, elles sont aisées à comprendre et faciles à retenir. […] Dès qu’on sçavoit une fois les regles de la poësie latine, rien n’étoit plus facile que d’arranger les mots suivant un certain métre dans cette langue où l’on transpose les mots à son gré.

113. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « X. M. Nettement » pp. 239-265

Nettement n’est rien de tout cela ; c’est un esprit faible, ayant précisément cette vulgarité d’idées à laquelle tous les sots de la terre, quand ils la rencontrent, ôtent leur chapeau comme à une ancienne connaissance ; et, de plus, c’est un livre systématiquement doucereux, qui s’est donné, dans un but facile à discerner, la mission la plus chère aux lâchetés contemporaines, — la mission de la sympathie. […] Non, évidemment, quelle que soit la bonté facile de M.  […] Nettement la pensée du sien, elle avait le facile avantage de raconter une littérature étrangère ; et n’aurait-elle pas eu ce style inouï, ce mirage d’idées, comme disait Byron, qui lui aurait permis de se passer de pensées fortes et d’aperçus vrais, si elle n’en avait pas eu, elle apprenait du moins à la France ce que la France ne savait pas. […] Quant au style, dont il reste à parler, il ne sauvera pas la faiblesse d’une œuvre qui, plus qu’aucune autre, avait besoin, pour arrêter et contenir ce qu’elle a de trop facile et de trop lâché, du ferme tissu d’une langue bien faite.

114. (1868) Curiosités esthétiques « VII. Quelques caricaturistes français » pp. 389-419

Le dessin, généralement facile, est plus riche et plus bonhomme que celui de Carle Vernet. […] Ces athlètes aux bras nus, aux formes robustes, affamés de tortures, sont faciles à reconnaître. […] Son dessin est abondant, facile, c’est une improvisation suivie ; et pourtant ce n’est jamais du chic. […] Comme Gavarni est moins artiste, il est plus facile à comprendre pour eux.

115. (1853) Histoire de la littérature dramatique. Tome II « Chapitre premier. Ce que devient l’esprit mal dépensé » pp. 1-92

Écoutez avec soin cette comédie de L’Étourdi, et vous comprendrez quel sage esprit se cache sous ce vers abondant, ingénieux, facile, net et vif, leste et bien fait. […] — Orchestre, mon ami, rien n’est plus facile à expliquer. […] Ce n’est pas non plus le vers étincelant, pétillant et facile de Regnard ; mais le style du Philinte réussit par d’autres qualités. […] Faites qu’il soit amoureux d’Éliante, il sera aussi facile à vivre que Philinte. […] disait-il, c’est si facile de courir après l’esprit. » « Courir après l’esprit !

116. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « VICTORIN FABRE (Œuvres mises en ordre par M. J. Sabbatier. (Tome II, 1844.) » pp. 144-153

L’Éloge de Montaigne (1812) fut le temps d’arrêt ; un nouveau-venu, à la plume facile et légère, M. […] Il n’était pas facile d’avoir toute sa fraîcheur à l’ombre du cardinal Maury.

117. (1874) Premiers lundis. Tome I « Tacite »

Rollin, dans les nombreux morceaux traduits en ses histoires, nous semble le type de cette manière simple, facile et agréable, quoique faible. […] Qu’on essaie pourtant de traduire, et l’on sentira confusément qu’il y a, malgré la difficulté extrême de les saisir, bien des tours français répondant à ceux de l’historien latin, et que la traduction d’une phrase de Cicéron ou de Tite-Live, si elle est plus facile à commencer, est aussi plus difficile à finir.

118. (1796) De l’influence des passions sur le bonheur des individus et des nations « Section III. Des ressources qu’on trouve en soi. — Chapitre IV. De la bienfaisance. »

Du moins en parlant de bonheur, il est impossible de supposer une situation qui exige des efforts perpétuels ; et la bonté donne des jouissances si faciles et si simples que leur impression est indépendante du pouvoir même de la réflexion. […] Elle n’a rien à faire avec le passé, ni l’avenir ; une suite d’instants présents composent sa vie ; et son âme, constamment en équilibre, ne se porte jamais avec violence sur une époque, ni sur une idée ; ses vœux et ses efforts se répandent également sur chacun de ses jours, parce qu’ils appartiennent à un sentiment toujours le même, et toujours facile à exercer.

119. (1824) Notes sur les fables de La Fontaine « Livre premier. »

Encore de la mauvaise morale : on peut trop louer sa maîtresse, et tout éloge qui n’a pas l’air d’échapper à un sentiment vrai, ou d’être une galanterie aimable d’un esprit facile, déplaît souvent même à celle qui en est l’objet. […] Quelques autres fables, comme celle des animaux malades de la peste, présentent peut-être des leçons plus importantes, offrent des vérités qui ont plus d’étendue, mais il n’y en a pas d’une exécution plus facile.

120. (1879) Balzac, sa méthode de travail

Un compositeur d’imprimerie faisait « son heure » de Balzac, comme un forçat fait son temps, après quoi il se reposait en travaillant à quelque labeur plus facile. […] Le fameux Vingt fois sur le métier remettez votre ouvrage semble un conseil de Boileau adressé à Balzac : il est d’une exécution facile pour un poète qui laisse un volume à la postérité ; mais qu’on pense à cette recommandation prise au pied de la lettre et appliquée aux deux ou trois cent mille pages de l’œuvre du peintre de la Comédie humaine.

121. (1765) Essais sur la peinture pour faire suite au salon de 1765 « Tout ce que j’ai compris de ma vie du clair-obscur » pp. 26-33

Problème simple et facile, lorsqu’il n’y a qu’un objet régulier ou qu’un point lumineux ; mais problème dont la difficulté s’accroît à mesure que les formes de l’objet sont variées, à mesure que la scène s’étend, que les êtres s’y multiplient ; que la lumière y arrive de plusieurs endroits, et que les lumières sont diverses. […] Peut-être n’appartiendrait-il qu’à un grand maître de déchirer le nuage qui enveloppait Enée, et de me le montrer comme il apparut à la crédule et facile reine de Carthage : Circumfusa repente Scindit se nubes, et in aethera purgat apertum.

122. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 23, que la voïe de discussion n’est pas aussi bonne pour connoître le mérite des poëmes et des tableaux, que celle du sentiment » pp. 341-353

Dans les arts, les principes sont en grand nombre, et rien n’est plus facile que de se tromper dans le choix de celui qu’on veut poser comme le plus important. […] Nos deux illustres académies se contentent donc de vérifier les faits et de les insérer dans leurs regîtres, persuadées qu’elles sont que rien n’est plus facile au raisonnement, que de trébucher dès qu’il veut faire deux pas au-delà du terme où l’expérience l’a conduit.

123. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Troisième partie — Section 14, de la danse ou de la saltation théatrale. Comment l’acteur qui faisoit les gestes pouvoit s’accorder avec l’acteur qui récitoit, de la danse des choeurs » pp. 234-247

Il est facile de concevoir que ces danses n’étoient autre chose que les gestes et les démonstrations que les personnages des choeurs faisoient pour exprimer leurs sentimens, soit qu’ils parlassent, soit qu’ils témoignassent par un jeu muet combien ils étoient touchez de l’évenement auquel ils devoient s’intéresser. […] Il étoit facile en voïant executer ces danses de comprendre comment la mesure pouvoit regler le geste sur les théatres des anciens.

124. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Lamartine — Lamartine, Jocelyn (1836) »

Ses derniers écrits, discours ou chants, attestent cette aspiration nouvelle, quoique ses Harmonies, publiées avant Juillet 1830, en puissent également offrir bien des témoignages, et quoique ce développement semble chez lui, comme tout ce qui émane de sa nature heureuse, une inspiration facile, immédiate, une expansion sans secousse, plutôt qu’un effort impatient et une conquête. […] Dans les scènes qui vont suivre, on retrouvera des situations, la plupart connues, toujours faciles à combiner, et par ces moyens simples il obtiendra une attache croissante, il finira par atteindre au pathétique déchirant.  […] Cette invraisemblance se trouve de la sorte plus facile à accepter pour tout lecteur naïf, que ne le serait souvent une réalité plus serrée de près et plus motivée. […] l’élévation libre et facile compense en lui la profondeur. […] Jocelyn, parlant aux enfants du village ou à ses paysans, trouve de faciles et saisissables paraboles ; le poëte de Rydal-Mount a plutôt le don des symboles : voilà en deux mots la différence.

125. (1920) Enquête : Pourquoi aucun des grands poètes de langue française n’est-il du Midi ? (Les Marges)

D’autre part, toute œuvre durable comporte une difficulté vaincue ; cette victoire souvent lente, exige la volonté de travail, la discipline, l’obstination dans l’effort, vertus qui ne sont pas, dit-on, caractéristiques des races du Midi et que, d’ailleurs, les conditions de vie trop facile, dissolvent. […] Vivre est chose plus facile à Nîmes et à Toulouse qu’à Lille et à Paris. […] Jacques Chaumié s’est contenté de dresser un inventaire fort sommaire de la poésie française, sans quoi il lui eût été facile de découvrir des poètes dans le Midi. […] Il serait facile d’en administrer une seconde preuve en publiant la liste des poètes nés dans certaines provinces du Nord. […] C’est pour cela que la Normandie, la Champagne, dont les relations ont été faciles et continues avec le centre intellectuel qu’était et qu’est demeuré Paris, ont fourni à la littérature française tant de poètes et d’écrivains.

126. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome premier — Livre troisième. Le souvenir. Son rapport à l’appétit et au mouvement. — Chapitre premier. La sélection et la conservation des idées dans leur relation à l’appétit et au mouvement. »

Au point de vue mécanique, la mémoire a lieu en vertu du jeu des actions réflexes, où l’excitation extérieure est suivie d’un mouvement de contraction qui, une fois produit, est plus facile à reproduire ; au point de vue psychologique, elle a lieu en vertu de la loi parallèle qui fait qu’une sensation agréable ou désagréable est suivie d’un effort volontaire pour la conserver ou l’écarter, effort qui, une fois produit, est plus facile à reproduire. […] Mais, si l’émotion sert à produire le souvenir en ouvrant des voies à la réaction volontaire et motrice, elle n’est pas cependant par elle-même facile à reproduire et à renouveler, ou du moins la reproduction en est bien plus affaiblie que celle des perceptions. […] En premier lieu, par cela même que la mémoire, au point de vue organique, consiste en voies nerveuses plus faciles qui se sont établies dans le cerveau pour aboutir à des mouvements, le souvenir d’une peine trouve des voies toutes tracées qui ne permettent pas à la peine même (πόνος) de se reproduire. […] Il est facile de se donner des nausées par la pensée de ces nausées, parce que le vomissement est un mouvement de masse distinct, facilement représentable, qui peut se reproduire par l’imagination ; aussi, l’idée seule qu’on va vomir peut provoquer le vomissement.

127. (1853) Portraits littéraires. Tome II (3e éd.) pp. 59-300

plus élevée en apparence que la satire lyrique, présente peut-être une tâche plus facile. […] Depuis Juvénal jusqu’à André Chénier, il est facile de vérifier cette affirmation. […] Cette lacune était facile à prévoir, mais il est utile de la signaler. […] Il a tort sans doute, mais ce tort est facile à concevoir. […] Étant donnée la simplicité des acteurs, il est facile de prévoir et d’affirmer la simplicité de l’action.

128. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre III. Les grands artistes classiques — Chapitre III. Molière »

Elles s’étaient établies sans bruit dans la comédie : il était plus facile d’y réduire les sujets de pure invention dont l’ordonnance est à la disposition de l’auteur. […] Ce n’est pas toujours facile, ni surtout aisément compatible avec la vérité. […] On entrevoit à peine le paysan, naïf et finaud, enveloppant d’innocence son égoïste et vicieuse humanité ; la paysanne coquette et vaniteuse, par là facile à enjôler. […] Il sera facile à tout le monde de distinguer les deux points de vue, et de réduire chaque pièce tantôt à être un tableau de mœurs disparues, tantôt à offrir simplement des types sans date ni existence historique. […] Thomas Corneille et de Visé, qui sont des journalistes, se distinguent par la prestesse avec laquelle ils découpent en pièces faciles et médiocres le scandale ou l’événement du jour397.

129. (1888) La critique scientifique « La critique scientifique — Analyse sociologique »

Il serait facile de multiplier ces exemples à un tel point que le cas d’artistes en opposition avec leur milieu social parût être plus fréquent que le contraire. […] La raison de ce fait est facile à indiquer. […] Mais l’homme tend à persister en son être moral autant qu’en son être physique, et la défense contre le dehors devenant plus facile, la société progressant de l’état sauvage à l’état barbare, s’étendant, se compliquant et se relâchant, il y aura de faibles tentatives d’affranchissement des âmes qui se sentent souffrir de ce qu’aiment leurs proches. […] Il serait facile de multiplier les exemples de ce genre, de rappeler tout ce que nous avons dit et ce qui est notoire sur la diversité des individus qui composent une nation, dans un même pays, de faire remarquer combien les immenses migrations des races indo-européennes, mongoles, ou sémitiques ont peu contribué, en somme, à oblitérer les quelques traits généraux qu’on leur reconnaît. […] Après ces développements, il sera facile d’expliquer comment il faut entendre qu’une littérature et un art représentent la société dont ils sont issus et écrivent son histoire intérieure.

130. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Lettres sur l’éducation des filles, par Mme de Maintenon » pp. 105-120

Lettres sur l’éducation des filles, par Mme de Maintenon16 Lundi 6 novembre 1854 Vivre en plusieurs temps, être en plusieurs lieux, est devenu de jour en jour plus facile. […] Cela bien entendu, elle veut le vrai dans l’éducation dès le bas âge : « Point de contes aux enfants, point en faire accroire ; leur donner les choses pour ce qu’elles sont. » — « Ne leur faire jamais d’histoires dont il faille les désabuser quand elles ont de la raison, mais leur donner le vrai comme vrai, le faux comme faux. » — « Il faut parler à une fille de sept ans aussi raisonnablement qu’à une de vingt ans. » — « Il faut entrer dans les divertissements des enfants, mais il ne faut jamais s’accommoder à eux par un langage enfantin, ni par des manières puériles ; on doit, au contraire, les élever à soi en leur parlant toujours raisonnablement ; en un mot, on ne peut être ni trop ni trop tôt raisonnable. » — « Il n’y a que les moyens raisonnables qui réussissent. » — Elle le redit en cent façons : « Il ne leur faut donner que ce qui leur sera toujours bon, religion, raison, vérité. » Dans un siècle où sa jeunesse pauvre et souriante avait vu se jouer tant de folies, tant de passions et d’aventures, suivies d’éclatants désastres et de repentirs ; où les romans des Scudéry avaient occupé tous les loisirs et raffiné les sentiments, où les héros chevaleresques de Corneille avaient monté bien des têtes ; où les plus ravissantes beautés avaient fait leur idéal des guerres civiles, et où les plus sages rêvaient un parfait amour ; dans cet âge des Longueville, des La Vallière et des La Fayette (celle-ci, la plus raisonnable de toutes, créant sa Princesse de Clèves), Mme de Maintenon avait constamment résisté à ces embellissements de la vérité et à ces enchantements de la vie ; elle avait gardé son cœur net, sa raison saine, ou elle l’avait aussitôt purgée des influences passagères : il ne s’était point logé dans cette tête excellente un coin de roman. « Il faut leur apprendre à aimer raisonnablement, disait-elle de ses filles adoptives, comme on leur apprend autre chose. » Et de plus, cette ancienne amie de Ninon savait le mal et la corruption facile de la nature ; elle avait vu de bien près, dans un temps, ce qu’elle n’avait point partagé ; ou si elle avait été effleurée un moment, peu nous importe, elle n’en était restée que mieux avertie et plus sévère. […] En suivant de près la vie journalière de Louis XIV en ces années (comme cela est maintenant facile avec Dangeau), il résulte clairement que la fondation de Saint-Cyr fut un acte royal lié aux autres circonstances importantes de cette même date.

131. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Les Contes de Perrault »

Enfin cet homme avait du génie, et, comme l’a dit son frère dans une Épître à Fontenelle, en parlant de celui qui a reçu du Ciel ce don indéfinissable ; Éclairé par lui-même, et, sans étude, habile, Il trouve à tous les arts une route facile ; Le savoir le prévient et semble lui venir. […] Ce n’était point par le talent des vers que brillait Perrault, quoiqu’il en fît parfois d’agréables et de faciles ; mais le grand nombre étaient prosaïques et flasques, et d’une facture antérieure à celle qu’avait réglée et fixée Despréaux. […] La manière dont il eut l’idée de recueillir ces Contes achève de nous faire voir à l’œuvre cette aimable, facile et fertile nature.

132. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « Térence. Son théâtre complet traduit par M. le marquis de Belloy »

Dans ces jeux de l’érudition et du goût, l’original sans cesse relu, manié et remanié à plaisir, devenait chose familière, facile, non apprise, mais sue de tout temps et comme passée en nous, on ne l’oubliait plus. […] Tout ce qu’il dit, il le dit avec une douceur, avec un agrément qui n’est qu’à lui. » Prenons-le dans quelques passages faciles, ouverts, et où il n’y ait qu’à l’aborder de plain-pied, pour ainsi dire, sans grand effort d’analyse ni débrouillement d’intrigue, — dans quelqu’une de ses expositions, par exemple. […] » Et elle, donnant aisément à voir que ce n’était pas la première fois, se rejeta sur lui, pleurant aussi tendrement que possible : Tum illa, ut consuetum facile amorem cerneres, Rejecit se in eum flens quam familiariter.

133. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « M. BRIZEUX (Les Ternaires, livre lyrique.) » pp. 256-275

Le vivre plus facile, la popularité courante, au prix de son art chéri, au prix d’une seule des perles de son loisir, il n’en a pas voulu. […] Nul doute qu’il n’eût pu, en se lâchant un peu, en s’assujettissant aussi, prétendre à ces succès plus ou moins faciles, mais où la distinction, après tout, ne nuit jamais. […] Ce cadre heureux fourni par la réalité, le poëte l’a simplement et largement rempli ; il est ici dans sa première manière et s’abandonne avec moins d’art à une sensibilité plus facile et plus courante.

134. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série « (Chroniqueurs parisiens III) Henri Rochefort »

Je ne crois pas qu’il soit très facile de le savoir ; mais je le chercherai librement, n’apportant ici ni prévention ni haine, mais une curiosité qui, parce qu’elle est très éveillée, ne demanderait qu’à se tourner, s’il se pouvait, en sympathie. […] Je ne m’en indigne point et, rassurez-vous, je vous fais grâce ici d’un développement facile. […] Il aime, pour lui-même et pour les siens, la vie large et facile, et son humeur généreuse lui a mis sur les bras des charges de toutes sortes.

135. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Deuxième partie. Ce qui peut être objet d’étude scientifique dans une œuvre littéraire — Chapitre II. L’analyse interne d’une œuvre littéraire » pp. 32-46

Que de lacunes révélatrices et faciles à constater, depuis ceux qui n’ont pas senti la nature extérieure, comme Boileau, jusqu’à ceux auxquels manque le souci de l’au-delà, comme Stendhal ; depuis ceux qui n’ont jamais eu le moindre battement de cœur pour une cause politique et sociale jusqu’à ceux auxquels l’amour de la famille paraît être resté presque tout à fait étranger, témoin l’étrange époux et père que fut notre La Fontaine ! […] Il sera aussi facile de constater laquelle ou lesquelles parmi les facultés intellectuelles a ou ont le plus de part dans une œuvre littéraire. […] Mais quand même il y aurait des ouvrages vraiment indifférents entre le bien et le mal, ils sont à coup sûr peu nombreux et cela n’empêche nullement qu’il n’y en ait une foule d’autres qui inclinent et veulent incliner les esprits dans une direction facile à reconnaître.

136. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Pensées de Pascal. Édition nouvelle avec notes et commentaires, par M. E. Havet. » pp. 523-539

Ses découvertes dès l’enfance sont célèbres ; partout où il portait son regard, il cherchait et il trouvait quelque chose de nouveau ; il lui était plus facile de trouver pour son compte que d’étudier d’après les autres. […] Fénelon, dans sa marche facile, graduelle et mesurée, n’a rien de tel. […] Il continue dans cette voie de déduction large, agréable et facile, mêlée çà et là de petits élans d’affection, mais sans orage.

137. (1759) Observations sur l’art de traduire en général, et sur cet essai de traduction en particulier

On croit communément que l’art de traduire serait le plus facile de tous, si les langues étaient exactement formées les unes sur les autres. […] Corneille doit donc être plus facile à traduire que Racine, et, ce qui peut-être semblera paradoxe, Tacite doit l’être plus que Salluste : Salluste dit tout, mais en peu de mots, mérite qu’une traduction a peine à conserver ; Tacite sous-entend beaucoup et fait penser son lecteur, mérite qu’une traduction ne peut faire perdre. […] Alors la traduction aura toutes les qualités qui doivent la rendre estimable ; l’air facile et naturel, l’empreinte du génie de l’original, et en même temps ce goût de terroir que la teinture étrangère doit lui donner.

138. (1762) Réflexions sur l’ode

Le philosophe de son côté, tout philosophe qu’on l’accuse d’être, reconnaîtra sans peine, que ce n’est pas assez, surtout en vers, de penser et de sentir ; l’expression en est l’âme indispensable, On la veut choisie, et pourtant naturelle ; harmonieuse, et pourtant facile. […] Je me souviens d’en avoir lu il y a quelques années de françaises, faites par un Italien de beaucoup d’esprit ; les idées en étaient nobles, la poésie facile, correcte, et pourtant mauvaise.

139. (1853) Portraits littéraires. Tome I (3e éd.) pp. 1-363

Il est plus facile de provoquer l’étonnement par la singularité des personnages et des incidents, que de produire sur la scène des personnages d’une vérité vulgaire et d’enchaîner notre attention par une action simple et facile à prévoir. […] Qui sait s’il ne renonce pas à la probité pour rendre plus facile le retour de l’infidèle ? […] Ma préférence est facile à expliquer. […] Il est facile, en lisant cette pièce, de se convaincre que M.  […] Malheureusement il est facile de prouver qu’ils sont aussi étrangers à la réalité qu’à l’interprétation.

140. (1911) Lyrisme, épopée, drame. Une loi de l’histoire littéraire expliquée par l’évolution générale « Appendices » pp. 235-309

J’ai vu représenter La Nave à Venise même ; malgré les graves défauts de cette « tragédie », et bien que les prophéties après coup soient un truc un peu facile, j’avoue que cette évocation, toute lyrique, fit vibrer tout mon être du frisson de la beauté. […] L’Éducation sentimentale 50 a été, à mon insu, un effort de fusion entre ces deux tendances de mon esprit (il eût été plus facile de faire de l’humain dans un livre et du lyrisme dans un autre). […] L’abus étrange qu’il fait, au théâtre, du lyrisme, des redondances, des pures sonorités verbales, est facile à constater partout ; je ne citerai que la première page de la première scène de La Nave : (Nous sommes sur une place, dans la Venise du moyen âge ; des ouvriers travaillent à la Basilique ; on lance un navire). […] On pourrait aisément retourner toute l’argumentation de Brunetière et prouver que les souverains sont moins libres que leurs sujets ; les bonnes fortunes leur sont faciles, l’amour-passion leur est interdit, et ils n’ont pas l’air d’en souffrir beaucoup. […] Au décor simultané du moyen âge et de Shakespeare, décor vraiment trop naïf pour nous, le classicisme avait substitué le décor unique ; puis on a ramené la variété et la liberté par les décors successifs ; comme ils ont de grands inconvénients et qu’ils sont fort coûteux, on a imaginé le décor tournant pour en revenir enfin à un décor, non plus unique, mais très simple, un peu vague, et facile à modifier à peu de frais, en quelques minutes.

141. (1889) Écrivains francisés. Dickens, Heine, Tourguénef, Poe, Dostoïewski, Tolstoï « Charles Dickens »

Même quand il s’essaie, comme dans David Copperfield et Les Grandes Espérances, à ce genre, le plus facile de l’analyse psychologique, l’autobiographie, le personnage qui se confesse tout au long de deux volumes en petit texte est plus irréel et plus inexistant encore, se dessine moins visiblement que ne le sont les figures de second plan, en moins d’effusions. […] Et comme l’auteur a soin d’ajouter à cette précise caractérisation conversationnelle quelque mention sans cesse répétée d’une particularité physique ou morale facile à retenir, comme il ne néglige guère, quand son émotion déborde, de prendre la parole lui-même pour dire ce qu’il faut penser des gens qu’il produit, leur aspect moral se trouve excellemment défini et se grave forcément dans la mémoire. […] Ses dessins seront simples et typiques, car la charge qu’il fera de ses personnages est plus importante que leur représentation minutieuse, parce qu’il a pour tâche non de faire connaître des caractères compliqués, mais de faire rire de quelques travers faciles à comprendre. […] Toutes ces scènes sinistres et odieuses dont il serait facile de grossir le nombre, louchent à l’horrible, dépassent presque la satire et montrent jusqu’où Dickens osait aller dans l’expression de sa haine et dans l’évocation audacieuse de celle d’autrui. […] Enfin aucune idée générale n’a eu sur son esprit, pourtant si facile à s’agiter, assez d’ascendant pour l’émouvoir.

142. (1830) Cours de philosophie positive : première et deuxième leçons « Deuxième leçon »

(1) On conçoit aisément d’abord qu’il ne s’agit pas ici de faire la critique, malheureusement trop facile, des nombreuses classifications qui ont été proposées successivement depuis deux siècles, pour le système général des connaissances humaines, envisagé dans toute son étendue. […] Le sujet propre de ce cours étant par là exactement circonscrit, il est facile maintenant de procéder à une classification rationnelle vraiment satisfaisante des sciences fondamentales, ce qui constitue la question encyclopédique, objet de cette leçon. […] Il est clair, d’après cela, que, quoiqu’il soit infiniment plus facile et plus court d’apprendre que d’inventer, il serait certainement impossible d’atteindre le but proposé si l’on voulait assujettir chaque esprit individuel à passer successivement par les mêmes intermédiaires qu’a dû suivre nécessairement le génie collectif de l’espèce humaine. […] Il serait facile, en effet, de rattacher cette sous-division au principe de classification que nous avons constamment suivi, puisque les phénomènes de la vie animale se présentent, en général du moins, comme plus compliqués et plus spéciaux que ceux de la vie végétale. […] Chacune peut offrir des résultats aussi certains que ceux de toute autre, pourvu qu’elle sache renfermer ses conclusions dans le degré de précision que comportent les phénomènes correspondants, condition qui peut n’être pas toujours très facile à remplir.

143. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « M. NISARD. » pp. 328-357

Le rôle de feuilletoniste spirituel, facile, capricieux, malicieux, folâtre, était pris, et M. […] A l’appui de son livre sur les poëtes latins, qui n’a pas été assez lu dans le sens juste où il l’avait écrit, et comme démonstration accessoire, il a exprimé directement sa pensée sur toute une classe d’écrivains modernes par son manifeste contre ce qu’il a appelé la littérature facile. […] Nisard, il a de plus en plus, en effet, accru ses qualités sérieuses, ses connaissances diverses ; il prend intérêt à toutes sortes de choses, peinture, machines, histoire, etc., et y porte une expression abondante, redondante quelquefois, mais facile, claire, sensée, une foule d’observations morales qui plaisent à beaucoup d’esprits modérés et distingués, qui enchantent beaucoup d’esprits solides, qui ne satisfont peut-être pas toujours au même degré quelques délicats, subtils et dédaigneux. […] Je ne vois rien à redire à l’agréable fiction intitulée l’Arbre d’Atedius Melior, à ce badinage ingénieux pour lequel le poëte n’invoque pas Apollon, mais seulement les Faunes et les Naïades faciles.

144. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « L’abbé Prévost »

Ce fut pourtant, si l’on parle un instant avec lui la langue vaguement complaisante de Louis XIV, ce fut, à tout prendre, un heureux et facile génie, d’un savoir étendu et lucide, d’une vaste mémoire, inépuisable en œuvres, également propre aux histoires sérieuses et aux amusantes, renommé pour les grâces du style et la vivacité des peintures, et dont les productions, à peine écloses, faisaient, disait-on alors, les délices des cœurs sensibles et des belles imaginations. […] Riche de savoir, rompu à l’étude, propre aux langues, regorgeant, en quelque sorte, de souvenirs et d’aventures éprouvées ou recueillies qui s’étaient amassées en lui dans le silence, il saisit sa plume facile et courante pour ne la plus abandonner ; et par ses romans, ses compilations, ses traductions, ses journaux, ses histoires, il s’ouvrit rapidement une large place dans le monde littéraire. […] Prévost vivait ainsi, heureux d’une étude facile, d’un monde choisi et du calme des sens, quand un léger service de correction de feuilles rendu à un chroniqueur satirique le compromit sans qu’il y eût songé, et l’envoya encore faire un tour à Bruxelles. […] Je crains même que, comme quelques gens de lettres trop faciles et abandonnés, il ne se soit mis à la merci du spéculateur.

145. (1767) Sur l’harmonie des langues, et en particulier sur celle qu’on croit sentir dans les langues mortes

Or, parmi les voyelles et les consonnes, il y en a de plus ou de moins faciles à prononcer, de plus ou de moins sourdes, de plus ou de moins rudes ; et c’est la combinaison de ces consonnes et de ces voyelles qui fait qu’une syllabe est plus ou moins douce, plus ou moins rude, plus ou moins sourde. […] Quand une langue a un mélange heureux d’expressions douces et d’expressions sonores, il en devient plus facile de composer dans cette langue des phrases harmonieuses. […] Ce qui est certain, c’est que rien n’est si rare parmi nous que de bien imiter le style d’un autre écrivain, encore moins celui de deux ou trois écrivains différents ; pourquoi voudrait-on que cela fut plus facile en latin ? […] Sic cogitabam ipse mecum, animos vestros, longa studiorum intermissione laxatos, paulatim et quibusdam quasi gradibus revocandos esse ad seria, nec protinus gravi tale sermonis alienandos, Nimirùm fastidit animus vel optima quæque, nisi tempestive se offerant ; nec facile admittit severitatem, cum semel occupavit hilaritas.

146. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Léopold Robert. Sa Vie, ses Œuvres et sa Correspondance, par M. F. Feuillet de Conches. — II. (Fin.) » pp. 427-443

Il est facile de penser ce que les imitateurs de l’Antiquité lui reprocheront : il est si rare qu’ils comprennent ce sentiment vigoureux81 ! […] La nature offre bien plus facilement ces dernières qualités que les premières : au moins pour moi, elles me paraissent bien plus faciles à voir, et c’est une observation que j’ai faite depuis longtemps. […] Je crois qu’il est plus facile de trouver chez les artistes des choses faites bien spirituellement et vite, que des idées profondes rendues avec science et sentiment.

147. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Ramond, le peintre des Pyrénées — I. » pp. 446-462

En parlant de la célèbre abbaye de Notre-Dame-des-Ermites ou d’Einsielden, dans le canton de Schwitz, William Coxe, ministre et chapelain anglican, s’était permis bien des ironies sur les pèlerins et leur dévotion qu’il appelait superstitieuse : ici Ramond prend à son tour la liberté d’abréger, dans sa traduction, ces sarcasmes trop faciles, et il exprime pour son compte un tout autre sentiment : Je l’avoue, dit-il, l’aspect de ce monastère m’a ému ; sa situation au milieu d’une vallée sauvage a quelque chose de frappant ; son architecture est belle, et son plan est exécuté sur de grandes proportions ; rien de plus majestueux que les degrés qui s’élèvent à la plate-forme de l’édifice et qui la préparent de loin par une montée insensible… Il est impossible d’entrer dans cette chapelle dont le pavé est jonché de pécheurs prosternés, méditant dans un respectueux silence et pénétrés du bonheur d’être enfin parvenus à ce terme de leurs désirs, à ce but de leur voyage, sans éprouver un sentiment de respect et de terreur. […] À leur sommet on respire si librement, la circulation est si facile, tous les organes transmettent si vivement à l’âme les impressions des sens, que tout est plaisir, que le travail le plus opiniâtre devient facile, et qu’on supporte les incommodités du corps avec courage et même avec gaieté.

148. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « La Divine Comédie de Dante. traduite par M. Mesnard, premier vice-président du Sénat et président à la Cour de cassation. » pp. 198-214

Dans la nouvelle traduction qui nous occupe, je remarque et je loue le soin d’être, autant que possible, coulant et facile en français, d’unir la fermeté du ton à l’aisance du tour et du nombre. […] On est revenu de l’idée de trouver dans les œuvres du passé, fût-ce même dans les chefs-d’œuvre, des modèles parfaits d’idéal et de pure et facile beauté. […] Si Dante apparaît en songe à son nouveau traducteur, je suis bien sûr que ce sera sous un tout autre aspect, et seulement pour lui rendre plus faciles et plus clairs tels ou tels passages obscurs du pèlerinage entrepris32.

149. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Tallemant et Bussy ou le médisant bourgeois et le médisant de qualité » pp. 172-188

madame, il ne tient qu’à vous que je ne passe pour être le plus honnête homme de France. » — Le marquis de Sévigné de même, qui laissait sa charmante femme pour Ninon, était persuadé « qu’on ne peut être honnête homme sans être toujours amoureux. » Ce qu’on voyait pendant les hivers, ce n’étaient donc pas seulement les distractions bruyantes et faciles de toute jeunesse guerrière, c’était une rare émulation chez quelques-uns qui se piquaient d’honnêteté, et des gageures de cette sorte : « Le duc de Candale, qui était l’homme de la Cour le mieux fait, crut qu’il ne manquait rien à sa réputation que d’être aimé de la plus belle femme du royaume ; il résolut donc à l’armée, trois mois après la campagne, d’être amoureux d’elle (Mme d’Olonne) sitôt qu’il la verrait, et fit voir, par une grande passion qu’il eut ensuite pour elle, qu’elles ne sont pas toujours des coups du ciel et de la fortune. » On s’embarquait de parti pris avec quelqu’un, avec quelqu’une, pour se faire honneur dans le monde, pour faire parler de soi, et « parce que les femmes donnaient de l’estime aussi bien que les armes ». […] Mais qu’a-t-on besoin de particularités insignifiantes qui ne révéleront rien de plus caractéristique sur cet homme facile et heureux ? […] Il écrit dans un genre après tout peu élevé, qui semble facile, et qui est médiocrement honorable.

150. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « L’abbé de Marolles ou le curieux — I » pp. 107-125

Enfin, au nombre des ouvrages de toutes sortes qu’il laissait couler chaque année de sa plume facile, il eut la bonne idée, un jour, d’écrire ses mémoires, et s’il les écrivit de ce style médiocre et, pour tout dire, un peu plat, qui était le sien, il y mit tout son naturel aussi, sa naïveté d’impressions, sa curiosité, la variété de ses goûts et de ses humeurs. […] C’est ainsi que ses goûts divers se dessinaient déjà : littérature facile et belles images. […] Un autre jour, comme on débitait la prodigieuse nouvelle qu’un impie ayant tiré un coup de pistolet sur une enseigne de la Vierge au pont Notre-Dame, l’image s’était mise aussitôt à saigner, la princesse Marie, « dont le naturel doux avait toujours été facile à croire aux miracles », pria Marolles d’aller sur les lieux s’informer de la vérité du fait, dont quantité de personnes étaient venues lui parler, se donnant pour témoins oculaires.

151. (1895) Histoire de la littérature française « Troisième partie. Le seizième siècle — Livre III. Poésie érudite et artistique (depuis 1550) — Chapitre II. Les tempéraments »

C’est un doux et fin poète, fluide et facile, d’une grâce sérieuse et souvent mélancolique : aussi dissemblable que possible de Marot, et d’une inspiration toute lyrique et personnelle. […] Il a mené trop loin la réaction nécessaire contre le naturel facile ; au lieu de perfectionner le naturel, il l’a contraint, parfois exclu. […] Chacun se fit un Ronsard à sa mode : l’honnête Vauquelin de la Fresnaye, l’ardent et facile Régnier, pour s’en réclamer ; Malherbe, pour le condamner.

152. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre I. La préparations des chefs-d’œuvre — Chapitre III. Trois ouvriers du classicisme »

Il retarde sur eux : il en est resté à Montchrétien, à François de Sales, aux négligences faciles. […] On ne saurait trop s’attacher à les distinguer, et les formules du Traité des Passions nous en offrent un moyen facile. […] En second lieu, ces actes intellectuels sont toute la vie du philosophe ; le reste ne compte pas dans son autobiographie, et toutes les déterminations de sa vie extérieure, choix d’une profession, voyages, retraite, expatriation, ont toujours pour fin d’assurer un jeu plus facile et plus libre à l’activité de son esprit : par là Descartes est l’homme idéal du xviie  siècle, l’homme-pensée.

153. (1886) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Deuxième série « J.-J. Weiss  »

Or rien de plus facile à embrasser d’un regard que ce qui est rond. […] Il est beaucoup moins facile d’enserrer dans des formules qui les contiennent l’esprit ondoyant et brillant et les opinions multiples de M.  […] Et qu’on ne dise point que le procédé est facile ; car ces aspects nouveaux, c’est bien lui qui les découvre ; nous n’y aurions jamais songé sans lui ; et c’est chose si rare et si précieuse que d’avoir dans la critique littéraire, où la tradition est encore si puissante, des impressions et des vues vraiment personnelles !

154. (1899) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Septième série « Les deux Tartuffe. » pp. 338-363

C’est par les artifices les plus grossiers, les plus faciles à percer, les plus impudents, ou, pour mieux dire, les plus naïfs, qu’il a séduit Orgon ; par des momeries de truand de la dévotion, des « soupirs » et des « élancements » à faire retourner les gens, etc… Il a des affectations purement imbéciles, comme lorsqu’il crie à Laurent de « serrer sa haire avec sa discipline », ou lorsqu’il s’accuse d’avoir tué une puce avec trop de colère. […] Rien de plus facile. […] « Tartuffe, disais-je, n’a aucune finesse… Pour être un goujat et un drôle, il n’en est pas moins un simple d’esprit… C’est par les artifices les plus grossiers, les plus voyants, les plus faciles à percer, qu’il a séduit Orgon. » — Mais, au contraire, Tartuffe paraît fort intelligent en ceci, qu’il a su approprier ses moyens de séduction à la sottise de l’homme dont il a fait sa dupe.

155. (1874) Premiers lundis. Tome II « Loève-Veimars. Le Népenthès, contes, nouvelles et critiques »

dites que c’est là le trait distinctif de la littérature de ce temps, et plus d’un écrivain qu’on lit non sans plaisir et qui vous paraît facile, vous avouera, s’il l’ose, qu’il corrige, qu’il rature et qu’il recopie beaucoup. […] Sachant bien plusieurs langues, rompu aux littératures étrangères dont, le premier, il a produit parmi nous de fantastiques chefs-d’œuvre, habile à se souvenir et à démasquer les larcins, s’inspirant lui-même de ses lectures et l’avouant, laborieux au logis, ingénieux et facile à tout dire, propre à tout, ne se faisant guère d’illusion, croyant peu, capable d’admirer le passé, quoique d’une érudition trop spirituelle pour être constamment révérente, et avec cela toujours maître de sa plume, l’arrêtant, la dirigeant à volonté, un peu recherché et joli par endroits, comme quand l’esprit domine, il a gardé quelque chose de très français à travers son premier bagage d’outre-Rhin et a aiguisé sa finesse au milieu des génies allemands qui avaient ou n’avaient pas de fil : qu’on se souvienne en effet qu’il a passé par Vandervelde avant de donner la main à M. 

156. (1874) Premiers lundis. Tome II « Henri Heine. De la France. »

Béranger, dans la préface de ses dernières chansons, a montré à merveille comment on pouvait condenser le plus de comparaisons et d’images poétiques, sans cesser un seul instant d’être limpide, facile et logique. […] Ils me sont parvenus dans un moment, d’ailleurs, où ce genre de lecture facile et variée est tout ce que je puis supporter, étant encore fort souffrant d’une indisposition assez grave.

157. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre I. La littérature pendant la Révolution et l’Empire — Chapitre I. Influence de la Révolution sur la littérature »

Et il est très facile de lui persuader qu’il doit lire ce livre, voir cette pièce, de l’induire à connaître, et surtout à ignorer. […] En troisième lieu, le journalisme a l’inconvénient de dévorer une foule d’esprits, les plus agiles souvent et les plus ouverts, auxquels il offre une carrière en apparence facile et séduisante.

158. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Première partie. Plan général de l’histoire d’une littérature — Chapitre IV. Moyens de déterminer les limites d’une période littéraire » pp. 19-25

Malgré la confusion créée par ces lents crépuscules, il est relativement facile de distinguer les grandes périodes de notre vie intellectuelle. […] La France est alors offerte aux autres pays d’Europe comme le modèle des peuples paisibles et faciles à gouverner.

159. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome II « Querelles générales, ou querelles sur de grands sujets. — Première Partie. Des Langues Françoise et Latine. — L’orthographe, et la prononciation. » pp. 110-124

Le projet de ces hommes systêmatiques étoit de rendre notre langue plus belle, plus facile à lire &, surtout, à apprendre. […] Le plan qu’ils imaginoient, pour remédier à ce qu’ils appelloient un abus, étoit bon sans doute ; il avoit de grands avantages ; mais l’exécution n’en étoit pas facile.

160. (1905) Les ennemis de l’art d’écrire. Réponse aux objections de MM. F. Brunetière, Emile Faguet, Adolphe Brisson, Rémy de Gourmont, Ernest Charles, G. Lanson, G. Pélissier, Octave Uzanne, Léon Blum, A. Mazel, C. Vergniol, etc… « II »

Il y a quelques-uns de ces paradoxes qui ne sont pas sentis, qui sont simplement des lieux communs qu’on a ramassés et qu’on a présentés à l’envers, au lieu ce les présenter à l’endroit, exercice facile, dans les ouvrages de M. de Gourmont. […] Si elle en était le contraire, pardieu, il serait trop facile de la trouver8. » M. de Gourmont m’a donc fait l’honneur de me consacrer presque tout un volume de critique.

161. (1854) Nouveaux portraits littéraires. Tome II pp. 1-419

Avant la publication faite à Lugano, il n’était pas facile de se les procurer. […] Il est si facile de prendre ses instincts, ses passions, pour la vérité même ! […] Si j’en parle, ce n’est que pour appuyer ma pensée sur un fait facile à vérifier. […] Cette vérité si facile à saisir, M.  […] Ainsi rien n’est plus facile à comprendre que l’union de ces deux partis.

162. (1767) Salon de 1767 « Dessin. Gravure — Beauvarlet »

Pour ses dessins de Mercure et d’ Aglaure , et de la fête de campagne, l’un d’après La Hire, et l’autre d’après Teniers, tous les deux destinés pour le burin, ils sont faciles et bien.

163. (1881) La parole intérieure. Essai de psychologie descriptive « Chapitre VI. La parole intérieure et la pensée. — Second problème leurs différences aux points de vue de l’essence et de l’intensité »

Les images qui se détachent le plus naturellement dans la conscience ne sont pas toujours les plus faciles à représenter par des mouvements musculaires ; souvent une des images secondaires peut être imitée promptement et sans effort, tandis que l’image principale ne saurait l’être qu’au prix d’un travail assez long et assez délicat. […] C’est ainsi que, aux origines du langage audible, les images sonores ont détrôné peu à peu les images visuelles de leur prééminence légitime ; les images sonores sont devenues les principales pour la conscience, parce qu’elles seules pouvaient servir de modèle à une expression matérielle de la pensée qui fût prompte et facile ; ensuite, la disparition progressive des onomatopées a rétabli à peu près dans la pensée l’équilibre qu’avait détruit leur création. […] L’avènement du langage conventionnel n’a pas entièrement corrigé nos pensées de cette habitude, en définitive, vicieuse : une fois l’homme convaincu que le son en général est de toutes les sensations la plus facile à imiter et qu’il est la matière naturelle du meilleur de nos systèmes de signes l’élément sonore de la pensée prend à nos yeux une valeur toute nouvelle, et l’attention le favorise à notre insu, même au hasard et sans dessein particulier d’imitation. […] Dans bien des cas le signe intérieur naturel subsiste sans affaiblissement notable, et ce n’est pas lui que reproduit le langage audible ; celui-ci n’est donc pas vraiment adéquat à la pensée ; les images visuelles restant le signe intérieur le plus fréquent, bien qu’inexprimé, de la pensée individuelle, au langage audible, si facile à inventer, il est juste d’ajouter, quand on le peut, un autre langage, plus lent, plus difficile, mais plus vrai, le langage visible, l’écriture idéographique. […] Cette théorie soulève de graves objections : un tel langage est un mauvais instrument pour la première éducation de l’esprit, et ses avantages ne peuvent être réels que pour une élite de lettrés adultes ; — quand un effort est nécessaire pour comprendre, le contre-sens est trop facile ; — dans la vie pratique, et même dans la spéculation, il importe souvent de comprendre vite et sans effort ; — et, en fait, la langue chinoise a-t-elle fait des esprits plus vivants que la langue grecque ?

164. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — L — article »

Ses Pastorales sont très-variées, & offrent un agréable tissu de pensées naturelles, naïves, délicates, embellies par une versification douce, simple, facile, & qui forme le vrai caractere de cette espece de Production, dont la tendresse est l’ame, & l’aménité le coloris.

165. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — H — Haag, Paul (1843-1911) »

Théodore de Banville Plus que tous les récents recueils de poèmes, il (Le Livre d’un inconnu) paraît répondre au véritable idéal actuel, car le poète s’y montre réaliste dans le beau sens du mot, et il est facile de voir que toutes ses descriptions sont vues, que tous les sentiments qu’il exprime ont été éprouvés et non supposés.

166. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — B — article »

Ceux qui ont eu le courage de lire quelques-uns de ses Ecrits, ont été dans le cas d’éprouver qu’un style correct & facile ne suffit pas pour intéresser ; qu’il faut dire des choses, éviter la confusion & le verbiage.

167. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — B — article »

La Poésie en est douce, simple, facile, souvent gracieuse, & toujours naturelle ; l’expression fidele du sentiment y tient lieu de ces images brillantes, de ces hardiesses de style, de ces tours vifs & énergiques qui caractérisent le langage poétique, & que la simplicité du genre n’admet pas.

168. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — D. — article » p. 109

Les Lettres, qu’il aimoit avec passion, lui sont redevables de plusieurs Méthodes, beaucoup plus nettes & plus faciles que les anciennes, pour apprendre l’Histoire, la Géographie, les Généalogies, le Blason, &c.

169. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — M. — article » p. 297

Ses autres Ouvrages annoncent, comme celui-là, un homme d’esprit, un Ecrivain facile, mais caustique.

170. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — C — Collin, Paul (1843-1915) »

Paul Collin a une spécialité, un rare bonheur : ses vers si faciles, si musicaux, d’un rythme si délicat, inspirent, depuis bien des années, une bonne moitié de nos compositeurs, — et pas les moins illustres.

171. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — D — Denise, Louis (1863-1914) »

Camille de Sainte-Croix Nul de ses vers qui ne soit archiplein ; et, s’ils sont encore peu nombreux, c’est que Louis Denise, rétif aux sollicitations de l’Esprit facile, profondément scrupuleux, n’a jamais voulu rien émettre qui ne soit pas de lui.

172. (1863) Causeries parisiennes. Première série pp. -419

Quel style facile, incisif, plein de recherches, et pourtant toujours clair ! […] l’idéal anglais de la justice me paraît préférable au nôtre, et surtout plus facile à réaliser. […] … c’est facile à dire. […] N’était-il pas facile de deviner ce que j’allais dire, rien qu’en lisant ce nom de Pelletan ? […] Il est facile de faire le compte des romans tant soit peu remarquables que l’Italie a produits.

173. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — S. — article » p. 185

Sa Traduction en Vers des Métamorphoses d’Ovide, la moins médiocre de ses Productions, est si infidelle, si dépourvue de talent, si éloignée de la versification douce, élégante & facile de l’Original, qu’elle est une véritable métamorphose des Métamorphoses.

174. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — F. — article » p. 323

La maniere noble, facile, & souvent élégante avec laquelle ils sont écrits, eût été capable d’embellir & de faire goûter des Productions purement littéraires, s’il s’y fût attaché.

175. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — G — article » p. 383

Le style de toutes ses Productions est net, facile, plein de décence ; il n’y manque qu’un peu plus de noblesse & de précision.

176. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — L — article » p. 12

Le Recueil de ses Mémoires offre une diversité de causes intéressantes, bien présentées, & sur-tout un style noble, facile, élégant, propre à servir quelquefois de modele à la plupart des Avocats de la Capitale, quoique M.

177. (1761) Salon de 1761 « Peinture —  Roland de la Porte  »

Mais il faut avouer aussi que le genre est facile et que des artistes d’un talent médiocre d’ailleurs y ont excellé.

178. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « George Sand — George Sand, Indiana (1832) »

Ses premiers mécomptes, la manière naturelle et facile dont Raymon les répare, dont il la fascine et l’enchante ; l’éclair sinistre qu’un mot de sir Ralph sur l’aventure de Noun jette dans l’esprit d’Indiana, le coup qu’elle en reçoit et qu’elle rend à Raymon ; sa croyance en lui, malgré la découverte, sa résolution de fuir avec lui, de se réfugier chez lui, plutôt que de suivre son mari au départ ; cet abandon immense, généreux, inébranlable, sans souci de l’opinion, sans remords, et mêlé pourtant d’un superstitieux refus ; toute cette analyse vivante est d’une vérité, d’une observation profonde et irrécusable, qu’on ne saurait assez louer. […] Que de sourires enchanteurs, que de larmes faciles et hypocrites, dont celui qui les prodigue est dupe jusqu’à un certain point, et qui cachent à tous les yeux, même aux siens, un fonds hideux de personnalisme !

179. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « George Sand — George Sand, Lélia (1833) »

À toutes les époques, sans doute, des personnes du sexe, nées la plupart dans des conditions de loisir où la culture de l’esprit est facile, avaient attiré l’attention par des romans, des lettres, des poésies, des livres d’éducation.  […] On peut plus ou moins aimer cette œuvre, selon qu’on y reconnaît plus ou moins les pensées et la situation de son âme, selon qu’on est plus ou moins facile à la vibration poétique ; on peut la réprouver plus ou moins vivement, selon qu’on est plus ou moins sûr d’avoir trouvé le remède moral et la vérité ; mais on ne peut qu’être émerveillé de ces ressources infinies dans une femme qui a commencé, il y a environ dix-huit mois, à écrire.

180. (1874) Premiers lundis. Tome II « Poésie — Alexandre Dumas. Mademoiselle de Belle-Isle. »

Entre tant de gens de talent qui se fourvoient, et qui semblent, à chacune de leurs œuvres nouvelles, vouloir réaliser sur eux-mêmes la décadence dont parle le vieux Nestor à l’égard des générations successives, c’est un vrai plaisir qu’un succès soudain, brillant, facile, qui, pour l’un d’eux, remet toutes choses sur le bon pied, et montre qu’une veine heureuse n’est point du tout tarie. […] Quoi qu’il en soit de toutes ces remarques du lendemain, la soirée de Mademoiselle de Belle-Isle a été brillante ; succès facile, amusant et mérité d’un talent spirituel et chaleureux, qui a d’heureux coups de main à la scène, qui égale quelquefois ses imprudences par ses ressources, et qui, dans ses quinzaines bigarrées, s’il compromet aisément un triomphe par des échecs, peut réparer ceux-ci non moins lestement par des revanches.

181. (1874) Premiers lundis. Tome II « Poésie — George Sand. Cosima. »

Et puis, il y avait bien des femmes du monde, charmantes, spirituelles, bonnes au fond et même très indulgentes quelquefois, mais railleuses au dehors et très prononcées contre tout scandale de la scène ; elles n’eussent pas été si fâchées d’en voir un, et elles espéraient bien en faire justice à coup d’épigrammes, avec cette espèce de cant si naturel et si facile au beau monde de tous les pays. […] Au lieu de cela, Geffroy l’a débitée comme la chose du monde la plus simple et la plus facile à penser et à dire, et le succès du passage en a été troublé.

182. (1875) Premiers lundis. Tome III « L’Ouvrier littéraire : Extrait des Papiers et Correspondance de la famille impériale »

Au contraire, rien n’est plus facile que d’y influer efficacement, sinon de la diriger. […] On vit au jour le jour ; l’or coule par flots, puis il tarit ; mais aussi, comme l’ouvrier parisien, on a l’heureuse faculté de l’imprévoyance : on a sa guinguette, on a ses soirées ; on a le théâtre ; on rencontre, on échange de prompts et faciles sourires ; on nargue la famille ; on est en dehors des gouvernements ; même si on les sert, on sent qu’on n’en est pas.

183. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — R — Rostand, Edmond (1868-1918) »

Il est toujours facile de dénigrer le plus incontestable mérite en substituant à la définition de ses qualités celle des défauts qui en sont l’excès. […] Cette force lyrique et dramatique ne se gouverne pas et va dans l’excès ; elle donne souvent sur ses deux écueils : le précieux caché et le facile des situations.

184. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre II. La commedia dell’arte » pp. 10-30

Une imagination vive, un langage souple et harmonieux leur rendaient facile l’improvisation qui était, du reste dans les habitudes de la nation. […] Cette persistance de chaque acteur dans son personnage rendait plus facile l’obligation d’improviser le dialogue, ce qui était, comme nous l’avons dit, une condition essentielle de la Comédie de l’art.

185. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Préface. de. la premiere édition. » pp. 1-22

Dès-lors, il a été facile de voir que ce qui avoit pu échapper à leur plume, & être regardé comme les effets d’un délire momentané, de la démangeaison d’écrire, du desir de la singularité, étoit assez souvent réalisé dans leurs démarches. […] Il seroit facile de donner plus d’étendue à ce tableau, mais tous les travers philosophiques & littéraires seront suffisamment mis au jour dans le cours de l’Ouvrage que nous publions.

186. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Laïs de Corinthe et Ninon de Lenclos » pp. 123-135

Ce romanesque manuscrit dont nous parle Debay, sans nous dire quelle en était la teneur, sans déterminer où commencent et où s’arrêtent les notions qu’il y a puisées, ne nous apprend que des faits déjà connus ou insignifiants, à l’aide desquels il est facile de composer une mosaïque de pièces de rapport, jointes ensemble par le procédé d’imagination, à présent vieilli et délaissé, de Barthélemy et de Wieland, mais dont il est impossible de tirer le détail intime qui nous illumine une figure, et nous la fait réellement comprendre en la ressuscitant devant nous. […] Le tort des écrivains qui, comme Debay, respectent et admirent les courtisanes, et se persuadent bonnement que les ronds de jambe de ces danseuses-là importent à la postérité, c’est de croire qu’elles subjuguent et entraînent les hommes en vertu d’une habileté quelconque, d’un don de l’esprit ou de l’âme uni à cette beauté du corps qui rend le triomphe si facile.

187. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « Léopold Ranke » pp. 1-14

I « De toutes les œuvres qui tentent l’effort de l’esprit humain, — disait un grand critique anglais, — l’histoire est tout à la fois la plus difficile à réussir et la plus facile à aborder. […] Toute cette glace empilée n’abolit pas le goût du breuvage, facile à reconnaître, que Ranke nous a versé.

188. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « Crétineau-Joly » pp. 367-380

Et d’autant plus que, sur ce point, la méprise est facile. […] Mais, si nous le pouvions, il nous serait facile de faire voir partout, dans le livre de Crétineau, cette ambition qui semblait, chez Louis-Philippe, avoir peur d’elle-même, et qui fut la cause de tant de désaveux, d’empêchements et de reculades sous ce roi quasi-roi, quasi-conscience, quasi-caractère, quasi-tout, puisqu’on avait inventé ce mot bouffon : quasi, pour sa fausse légitimité.

189. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Gérard de Nerval  »

Des jeunes gens, ainsi que lui sans renommée alors, ayant comme lui toute leur vie devant eux et sans autre existence que l’avenir, se réunirent, un jour, à l’allemande, au fond d’une vieille maison de la vieille rue du Doyenné, maintenant détruite, dans un but d’amusement, de rêverie, d’art facile et de libre littérature. […] Nous savons combien, dans cette époque ramollie, il est facile et accoutumé d’introduire l’attendrissement dans toutes les questions… Nous savons la force des pleurards.

190. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « M. Henri Murger. Œuvres complètes. »

Ses meilleurs endroits sont toujours les ébauches faciles, assez gracieuses dans leur facilité, d’un homme qui, peut-être, sera un artiste demain. […] Henri Mürger a cela de particulier que le succès littéraire qui lui fut facile ne lui amena pas, comme c’est son usage le plus souvent, sa sœur, cette vilaine petite sœur, dont on ne peut se passer et qui s’appelle la Fortune.

191. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — B — article » p. 406

Il est facile d’en juger par plusieurs articles de l’Encyclopédie, copiés mot à mot de son Cours des Sciences, auxquels la prudence des Compilateurs n’a pas jugé à propos de mettre son nom : Sic vos non vobis, &c.

192. (1763) Salon de 1763 « Peintures — Guerin et Roland de la Porte »

Le bas-relief en paraît absolument détaché ; cela est d’un effet surprenant, et le peuple est fait pour en être ébahi ; il ignore combien cette sorte d’illusion est facile.

193. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — T — Turquety, Édouard (1807-1867) »

Les stances tombent avec mollesse et harmonie ; son style est imagé et facile ; sa muse se drape d’armements qui peuvent éblouir les yeux, mais la cambrure n’y est pas.

194. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — B — article » p. 248

Rousseau, qu’il est plus facile de prendre le nom d’un homme célebre, que de s’approprier son génie.

195. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — F. — article » p. 332

Si cet Auteur est mort pour son compte, il vivra du moins à la faveur d’une Production étrangere, & son nom pourra figurer parmi ceux des Editeurs faciles & indulgens à l’égard des Ouvrages qu’ils donnent au Public.

196. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — G — article » p. 423

Pourquoi faut-il que le merveilleux en détruise quelquefois l’intérêt, & que les longueurs en déparent le style, d’ailleurs agréable & facile ?

197. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — G — article » p. 460

Les Contes Mogols, les Mille & une heure, les Mille & un quart d’heure, sont le fruit de sa plume facile, & plus attentive à consulter le goût des personnes frivoles & oisives, que l’utilité du Lecteur éclairé & judicieux.

198. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — H — article » p. 488

Ce Traité, formant plusieurs volumes, est écrit d’un style clair, net, & facile.

199. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — C — article » p. 436

Le style en est facile & assez correct.

200. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — D. — article » p. 118

Le style en est vif, élégant, & facile.

201. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — N. — article »

Avec plus de politesse & de discernement, elle eût pu tirer un parti avantageux de son esprit vif & facile, mais trop peu assujetti à la raison & au goût.

202. (1888) Revue wagnérienne. Tome III « VIII »

Tout ceci le disposa à créer un drame « de la longueur ordinaire, avec peu de personnages, peu de mise en scène, et relativement facile » (VII, 159 ; etc.). Il est en effet certain que Wagner croyait vraiment faire une œuvre facile en écrivant Tristan, car, le 29 octobre 1857, il écrit à Fischer que l’œuvre qui l’occupe à ce moment « sera facile à donner ». […] Est-il besoin de mentionner que, dès qu’or, sut que le maître avait en mains une œuvre nouvelle et « facile », il eut l’encouragement de voir accourir chez lui les directeurs de théâtre (Glasenapp, Biogr. […] Aujourd’hui cela est facile à voir, Wagner nous l’a montré. […] Ce passage se trouve immédiatement avant le dernier duo, et motive cet appel à la « mort amie, mort d’amour ardemment invoquée ». — Wagner a une telle crainte qu’on ne prête aux deux amants des divagations métaphysiques, qu’il se donne même la peine de motiver cette autre antithèse, du jour et de la nuit (qu’il était facile de supposer déduite de celle de la vie et de la mort), par la torche allumée le soir à la fenêtre d’Isolde, en signal de danger.

203. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Froissart. — I. » pp. 80-97

Son enfance précoce annonça ce qu’il serait : il s’est décrit lui-même dans des pièces de vers selon le goût du temps, imitées, dans la forme, du Roman de la Rose, allégoriques, et plus faciles et abondantes qu’originales. […] L’âge des chansons de geste était proprement passé, et la grande chanson de geste contemporaine du xive  siècle devait être la chronique pure, la chronique émancipée, et elle devait s’écrire en belle, facile et abondante prose. […] Mais celui des Anglais qui lui rend le plus bel hommage, c’est un génie facile, un peintre au large et courant pinceau, qui n’est pas sans de grands rapports de parenté avec lui, Walter Scott, en ses Puritains d’Écosse.

204. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « DIX ANS APRÈS EN LITTÉRATURE. » pp. 472-494

Mais on est tenté d’oublier ces portions magnifiques quand on songe à tant d’autres récidives simplement opiniâtres, à cette absence totale de modification et de nuance dans des théories individuelles que l’épreuve publique a déjà coup sur coup jugées, à ce refus d’admettre, non point en les louant au besoin (ce qui est trop facile), mais en daignant les connaître et en y prenant un intérêt sérieux, les travaux qui s’accomplissent, les idées qui s’élaborent, les jugements qui se rassoient, et auxquels un art qui s’humanise devrait se proportionner. […] Qu’elle consente à se relâcher un peu de l’absolu de la forme et de la rigueur affirmative, à s’interdire envers les adversaires une chaleur de réfutation trop facile, et qui déplace toujours les questions ; qu’elle permette autour d’elle à bien des faits de détail de courir plus librement sous le contrôle naturel d’un empirisme éclairé, et elle aura permis qu’on s’appuie souvent avec avantage sur elle sans s’y ranger nécessairement ; elle aura fourni un contingent utile à une œuvre pratique d’intelligence et d’indépendance qu’elle est digne d’apprécier ; car chez elle aussi, si je ne me trompe, et derrière ces grands développements de croyances, la maturité personnelle et l’expérience secrète sont dès longtemps venues142. […] cette tolérance, cette union conservatrice, cette ligue de bon vouloir et de bon sens, si regrettable et si loin de nous en politique, il est plus facile de provisoirement l’établir en littérature ; et si les symptômes ne nous trompent, et pour peu que quelque activité y aide, on serait à même, à l’heure qu’il est, de l’accomplir.

205. (1870) De l’intelligence. Première partie : Les éléments de la connaissance « Livre premier. Les signes — Chapitre II. Des idées générales et de la substitution simple » pp. 33-54

À ce moment, si l’on cherche le trait dominant qui règne dans ce monde divers, on ne trouve rien ; on sent bien que tout cela est beau, mais on ne démêle pas encore de quelle beauté ; on est agité par vingt tendances naissantes et aussitôt détruites ; on essaye les mots de voluptueux, de riche, de facile, d’abondant ; ils ne conviennent pas ou ne conviennent qu’à demi. […] Nous n’avons pas d’idées générales à proprement parler ; nous avons des tendances à nommer et des noms. — Mais une tendance prise en soi n’est rien de distinct ; elle est le commencement, le rudiment, l’ébauche, l’approche, plus ou moins pénible ou facile, de quelque chose, image ou nom, ou tout autre acte déterminé, qui est sa plénitude et son achèvement ; elle est l’état naissant de l’acte qui est son état final. — En fait d’actes positifs et définitifs, lorsque nous pensons où connaissons les qualités abstraites, il n’y a donc en nous que des noms, les uns en train de s’énoncer ou de se figurer mentalement, les autres tout énoncés et figurés. […] Artifice admirable et spontané de notre nature : nous ne pouvons apercevoir ni maintenir isolées dans notre esprit les qualités générales, sortes de filons précieux qui constituent l’essence et font la classification des choses ; et cependant, pour sortir de la grosse expérience brute, pour saisir l’ordre et la structure intérieure du monde, il faut que nous les retirions de leur gangue et que nous les concevions à part. — Nous faisons un détour ; nous associons à chaque qualité abstraite et générale un petit événement particulier et complexe, un son, une figure facile à imaginer et à reproduire ; nous rendons l’association si exacte et si étroite que désormais la qualité ne puisse apparaître ou manquer dans les choses, sans que le nom apparaisse ou manque dans notre esprit, et réciproquement.

206. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre I — Chapitre quatrième »

La vaine satisfaction qu’on tirait de ces faciles victoires contribuait à augmenter l’ignorance ; et c’est ainsi que la scolastique, après avoir été un expédient pour quelques intelligences d’élite, devint pour le plus grand nombre un empêchement et un obstacle. […] Il est facile d’apprécier, par les traductions françaises de quelques sermons de saint Bernard au xiie et au xiiie  siècle, combien la langue vulgaire a tiré peu de ressources de la théologie29. […] L’étude des monuments des deux antiquités profane et chrétienne, rendue facile et populaire par l’imprimerie.

207. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Œuvres de Mme de Genlis. (Collection Didier.) » pp. 19-37

Elle se trouva bientôt liée avec la jeune et facile princesse par une véritable amitié, et il fut décidé entre elles qu’elle deviendrait la gouvernante de ses filles, et (contre l’usage) leur gouvernante dès le berceau. […] Ces ouvrages, remarquables par un intérêt facile, de fines observations et des portraits de société, un style coulant et clair, et de justes prescriptions de détail, sont tous plus ou moins gâtés par du romanesque, de la sensiblerie factice, de l’appareil théâtral ; et, sous leur première forme, ils ont fait leur temps. […] Enfin, sous la Restauration, Mme de Genlis ne discontinua pas d’écrire ; mais ses écrits d’alors, productions trop faciles d’une plume qui ne s’était jamais contenue, et qui s’abandonnait plus que jamais à ses redites, reproduisent, en les exagérant, tous les défauts de son esprit et de sa manière.

208. (1868) Curiosités esthétiques « II. Salon de 1846 » pp. 77-198

D’ailleurs la chose est si facile, et tant d’autres l’ont faite ! […] Il me paraît si facile de nous consoler avec les magnifiques Decamps qui ornent les galeries que je ne veux pas analyser les défauts de ceux-ci. […] Sans être un peintre de premier ordre, il a une couleur brillante et facile. […] Kiorboë est joyeuse et puissante, sa couleur est facile et harmonieuse […] Ils ont tous un cachet particulier, et le détail n’en exclut pas une exécution large et facile.

209. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — L — Lavergne, Antonin (1863-1941) »

Antonin Lavergne, m’ont plu par une certaine grâce facile et pourtant élégante, qui n’est pas commune chez les versificateurs d’aujourd’hui.

210. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — R — Rolland, Amédée (1829-1868) »

André Lemoine Amédée Rolland nous appartient comme l’auteur de deux recueils lyriques : Matutina et le Fond du verre, ouvrages spirituels, faciles, mais dans lesquels on trouve plus d’étrangeté que d’originalité.

211. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — B — article » p. 309

Sa Muse, depuis quelques années, garde le silence ; & cependant, après les Amazones, & sur-tout après la Colombiade, elle auroit pu se promettre des succès, sinon dans la Tragédie & le Poëme épique, du moins dans des genres qui ne demandent que le jeu d’une versification facile & quelquefois animée.

212. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — F. — article » p. 326

Il est facile de juger par eux, que M.

213. (1925) Comment on devient écrivain

Aucun genre de production n’offre une plus riche perspective de développements faciles. […] Il est vrai que la poésie espagnole est la chose la plus facile du monde. […] Il sait très bien que rien n’est plus facile que de paraître érudit. […] Évitez surtout la virtuosité facile. […] Rien n’est plus facile à faire qu’un sermon.

214. (1882) Types littéraires et fantaisies esthétiques pp. 3-340

Mon cœur a vraiment bondi en reconnaissant que les jours approchaient où l’héroïsme sera aussi facile à l’âme de l’homme que le sourire est facile au visage de l’enfant1. […] Ils ne sont déjà que trop susceptibles, trop inquiets, trop faciles aux larmes, à l’irritation et à la mélancolie. […] Eh bien, que répond cette enquête facile même faite sommairement et à vol d’oiseau ? […] Il était né avec un cœur riche, chaud, facile à séduire, mais aussi avec une intelligence ferme, sage et grave. […] Certes cette amitié n’était ni facile ni indulgente, elle ne se portait pas sur le premier venu, mais qu’elle était précieuse et rare !

215. (1898) Introduction aux études historiques pp. 17-281

Il serait facile d’énumérer des exemples de restitutions heureuses. […] Pour ces faits beaucoup plus facile à observer elle peut être beaucoup moins exigeante sur les conditions d’observation. […] Ces faits si faciles à constater ont dû s’imposer aux auteurs de descriptions comme les réalités s’imposent aux poètes. […] Cette série d’opérations, facile à concevoir, n’a jamais été qu’imparfaitement exécutée. […] Le classement par les conditions extérieures est le plus naïf et le plus facile.

216. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — B — article » p. 319

C’est un mérite sans doute, que de savoir narrer avec esprit, en vers libres & faciles ; mais ce mérite n’est pas suffisant, quand on aspire à la gloire d’un succès solide & durable.

217. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — H — article » p. 501

On pense bien que, si le Président Hénault n’eût composé que la Comédie du Réveil d’Epimenide, & la Tragédie de François II, il eût été facile de l’égaler & même de le surpasser en ce genre, qui n’étoit nullement le sien.

218. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — J. — article » p. 539

Une latinité pure, élégante, facile, & comparable, à beaucoup d’égards, à celle des Anciens, forme le coloris de tous ses Ouvrages.

219. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — P. — article » p. 519

On a de lui des Traductions de plusieurs Ouvrages Italiens & Anglois, écrites d’un ton qui annonce une plume facile & heureusement exercée.

220. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Troisième partie. Disposition — Chapitre VIII. Utilité de l’étude du plan et de la composition des ouvrages qu’on lit »

Les sermons de Bossuet et de Bourdaloue sont à cet égard d’une étude facile et féconde.

221. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « À mes élèves de l’université de Lausanne »

En souvenir et en reconnaissance de cette constante harmonie qui m’a rendu facile et douce la carrière de professeur en pays étranger, j’ai voulu laisser à ceux et à celles dont je fus le maître un instrument de travail que j’eusse éprouvé par un long usage et qui leur permit de se passer de moi.

222. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — H — article » p. 484

Sa Nouvelle Histoire poétique n’est qu’un Recueil de morceaux traduits d’Homere, d’Ovide, & de Virgile, dont il a fait un corps, auquel il a donné la forme historique, & qu’il a revêtu de son style net & facile, à la vérité, mais souvent inégal.

223. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — J. — article » p. 514

Quelques-uns des nôtres en ont, sans doute, jugé de même ; car il est facile de reconnoître dans leurs Discours plusieurs morceaux de cet Auteur.

224. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — L — article » p. 160

Elle est assez communément noble, facile, ingénieuse, tendre, & délicate.

225. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — P. — article » p. 485

Un style simple, clair, sans prétention ; une narration facile, impartiale, seront toujours d’un grand prix aux yeux de ceux qui savent comment on doit écrit.

226. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — T. — article » p. 352

Tiphaigne de la Roche, [N.ABCD] Médecin de la Faculté de Caen, de l'Académie de Rouen, né dans le Diocese de Coutances, mort en 1774, âgé de 45 ans, a fait plusieurs Ouvrages qui sont écrits d'un style élégant & facile, mais dans lesquels on voudroit plus de justesse dans les idées, & moins d'un certain enthousiasme, qui est plutôt l'effet de la singularité, que le fruit du génie.

227. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — T. — article » p. 360

« Plans simples, & presque toujours pris dans le cœur du sujet ; style facile, uni, coulant, assez concis, mais sans sécheresse, plus délicat que recherché, ne s’élevant qu’avec les choses qu’il traite, en n’ empruntant jamais sa force que de l’énergie même des objets ; & coloris, en général, aussi doux qu’égal : voilà, dit M. de Querlon, l’idée que nous donnerions de son genre. » Nous adoptons cette idée avec d’autant plus de confiance, qu’elle est conforme à la vérité, & que le Journaliste a prononcé ce jugement après la mort de l’Auteur.

228. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — M — Martin, Nicolas (1814-1878) »

Auguste Desplaces Ses stances, toujours faciles, sont traversées de voix claires, de lueurs et d’arômes qui chatoient, embaument et modulent à l’envi.

229. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — B — article » pp. 208-209

Ses Ouvrages annoncent une imagination vive, un esprit facile, une Littérature étendue, un zele ardent pour la défense de la Religion.

230. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — F. — article » p. 327

Ce Poëme est marqué au coin d’un génie aussi facile qu’aimable ; l’Homme de goût, le sage Moraliste, l’Ecrivain élégant, s’y montrent tour-à-tour.

231. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — L — article » p. 78

M. l’Abbé de Laporte a compilé, il est vrai ; mais il a su revêtir de son style, toujours facile & souvent agréable, la plupart des Ouvrages dont il a donné des Abrégés.

232. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — O. — article » p. 429

Il y a un autre Auteur du même nom, Conseiller en la Cour des Monnoies, né aussi à Reims en 1736, dont nous connoissons quelques Poésies fugitives, qui supposent le talent d’exprimer de petites choses d’une maniere aussi facile qu’agréable, & un Dictionnaire des origines, qui donne une idée trop succincte des objets qui en font la matiere.

233. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — S. — article » pp. 216-217

La versification en est douce, harmonieuse & facile, le style pur, débarrassé de ces fadeurs amoureuses qu'on prodigue si maladroitement & jusqu'à la satiété sur le Théatre de l'Opéra : la pompe & le merveilleux y sont amenés par le sujet même, & sans le secours de la Mythologie, mérite qui n'a pas été assez senti, mais qui n'en fait pas moins honneur au talent du Poëte.

234. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre II — Chapitre cinquième »

Ils ont marqué, si même ils ne l’ont pas provoqué, un retour de goût dans le public français ; ils ont rendu plus facile la tâche de Malherbe, qui devait apprendre d’eux à faire mieux qu’eux. […] Il fallait, non plus triompher des extravagances de Ronsard, c’était devenu trop facile ; mais découvrir dans l’ordre, dans la mesure, dans le langage plus choisi de ses deux disciples, les vices secrets que protégeait la timidité même de ce commencement de réforme. […] Admirable conseil, puisqu’il est vrai qu’on ne peut éviter les rimes faciles et rencontrer les difficiles qu’en pénétrant plus ayant dans le sujet, ni rimer richement et sévèrement que par le même travail qui fait trouver les pensées fortes ou délicates. […] C’est seulement en l’entendant de la forme et du fond, que la théorie de Malherbe frappe également la poésie facile de l’école de Ronsard et certains imitateurs de la poésie difficile de Racine et de Boileau.

235. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome premier — Livre troisième. Le souvenir. Son rapport à l’appétit et au mouvement. — Chapitre troisième. La reconnaissance des souvenirs. Son rapport à l’appétit et au mouvement. »

Quand nous soulevons un fardeau, nous sommes obligés d’accommoder notre force à la résistance et nous avons conscience de cette accommodation ; nous apprécions le fardeau par l’intensité de notre sentiment d’effort ; un sentiment analogue nous permet d’apprécier, dans le cours de nos représentations, le facile, le familier, le connu et le reconnu. […] D’un semblable à l’autre, d’une sensation présente à une image similaire il y a transition facile pour notre activité intellectuelle et sensible, sans choc, sans résistance ; l’accommodation se fait toute seule, la première idée s’adapte à l’autre sans effort : la ressemblance produit une facilité de représentation et d’ajustement qui fait que l’objet remplit notre attente. […] Bientôt, à mesure que le cerveau s’organise, la voie devient encore plus facile et plus prompte. […] Par l’effet de l’habitude, des associations si faciles s’établissent entre les mouvements réflexes que le premier suggère et entraîne tous les autres.

236. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre deuxième. Le génie, comme puissance de sociabilité et création d’un nouveau milieu social »

La raison de ce fait est facile à indiquer dans la doctrine même de M.  […] Il n’est donc pas facile de conclure d’une œuvre donnée à la société au milieu de laquelle elle s’est produite, si on veut sortir des généralités et des banalités. […] Nous sommes un peuple à imagination vive et à sympathie facile, un peuple éminemment ouvert de pensée et sociable de sentiment. […] Il serait facile, ajoute-t-il, de « multiplier ces exemples à un tel point que le cas d’artistes en opposition avec leur milieu social parut être plus fréquent que le contraire ».

237. (1853) Histoire de la littérature dramatique. Tome II « Chapitre III. Le théâtre est l’Église du diable » pp. 113-135

Quant aux diverses parties de l’œuvre poétique, il vous sera facile de les reconnaître, à savoir : la proposition, le nœud, le dénouement, l’imprévu, la difficulté, le retard, la péripétie au moment où tout est perdu… où tout est sauvé. […] En vain Ménandre, en vain Térence et Molière ont apporté à cette œuvre brutale, les élégances de leur génie et la politesse de leur esprit, l’œuvre en elle-même est restée une œuvre un peu au-dessous de la philosophie et de la morale la plus facile, c’est-à-dire une œuvre ouverte aux plus violentes et aux plus irrésistibles passions. […] Alors, comme en ceci l’imitation est plus agréable et plus facile que la censure, on ouvre assez volontiers son âme à ces corruptions décevantes, et le rire même est une introduction à ces plaisirs corrupteurs, « Tunc etiam per voluptatem facilius vitia surrepunt. » C’est encore du beau et bon Sénèque ; il conclut ainsi qu’il n’y a rien de plus dangereux pour les bonnes mœurs que l’habitude et l’abus des spectacles11. […] Voilà cette histoire ; elle est bien simple, elle est facile à raconter ; et si vous n’étiez pas venu me chagriner par votre sortie contre Molière, je ne m’en serais pas mal tiré.

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