A cette époque d’anémie poétique où l’on s’épuise le tempérament à faire des sonnets et où, pour pouvoir dire quelque chose, on se met à décrire jusqu’aux brins d’herbe qu’on a sous les pieds, on est content de rencontrer une poitrine assez bien organisée pour souffler, d’une seule haleine, fût-ce une bulle de savon de cinq mille vers, sans s’y reprendre à deux fois avec son fuseau ! […] Les deux seuls ouvrages, en résumé, qui, dans l’ordre poétique, méritent de tirer la Critique de son abîme d’indifférence réfléchie, et d’être mis par elle l’un à côté de l’autre, comme on y mettrait deux cariatides de marbre ou d’airain différents. […] Poème humain, poétique humaine ; car elle est pleine d’une bonté pour la faiblesse humaine, poétique très étonnante de la part d’un jeune homme si fort ! Du coup de cette poétique, en effet, et de sa seule autorité privée, Gustave Rousselot affranchit la poésie française de ses règles séculaires, dans l’intérêt de ceux qui n’ont pas assez de vigueur pour les subir, et dans le sien, à lui, qui s’en croit tant ! […] Quant à Gustave Rousselot, qui a l’âge de la candeur, s’il est candide, il est, comme je l’ai dit et comme je viens de le prouver, aussi inconséquent à son orgueil, dans la misérable conception de sa poétique, qu’insolent pour la poésie elle-même.
Je serais désolé de perdre ou de négliger, n’importe où et n’importe quand, la moindre parcelle poétique. […] Jongleur de mots et de rimes, il étonne, en impose par ses merveilleux tours d’acrobatie versificatrice, sauf à communiquer le divin frisson poétique. […] L’auteur des Destinées me semble en effet avec Chateaubriand être le départ de toutes les routes poétiques dont Victor Hugo voulut être l’aboutissement. […] quelles variétés du rythme et de la broderie poétique ! […] C’est l’âme la plus naturellement poétique des temps modernes avec Byron, Shelley, Ronsard, Le Tasse.
Cette difficulté a tellement frappé Platon, que, ne sachant comment la résoudre, il prétend que dans les divins transports de l’enthousiasme poétique, Homère put voir dans l’avenir ces mœurs efféminées et dissolues. […] Nous assurons à Homère le privilège d’avoir eu seul la puissance d’inventer les mensonges poétiques (Aristote), les caractères héroïques (Horace) ; le privilège d’une incomparable éloquence dans ses comparaisons sauvages, dans ses affreux tableaux de morts et de batailles, dans ses peintures sublimes des passions, enfin le mérite du style le plus brillant et le plus pittoresque. […] Aussi ni la philosophie, ni la poétique ou la critique, qui vinrent plus tard, n’ont pu jamais faire un poète qui approchât seulement d’Homère. — 6. […] Il ne pouvait être regardé comme le fondateur de la civilisation grecque, puisque, dès l’époque de Deucalion et Pyrrha, elle avait été fondée avec l’institution des mariages, ainsi que nous l’avons démontré en traitant de la sagesse poétique qui fut le principe de cette civilisation. […] La sagesse poétique avec ses fables fournit seulement aux philosophes l’occasion de méditer les plus hautes vérités de la métaphysique et de la morale, et leur donna en outre la facilité de les expliquer.
Manifeste d’une nouvelle école poétique. […] Manifeste d’une nouvelle école poétique. […] Il parut cinq ans après la mort de Marot, et deux ans après l’Art poétique de Sebilet. […] Abrégé de l’Art poétique. […] Abrégé de l’Art poétique.
Franchement, quelques strophes de Malherbe, très belles de formes et d’expressions, quelques odes aussi harmonieuses, mais moins poétiques de J. […] Les triomphes de notre jeune école poétique sont au contraire fort contestés. […] Mais l’ombre d’André Chénier ne devait être évoquée que par une voix toute poétique : M. […] Alfred de Vigny, sont des preuves de la prééminence du génie poétique ; d’un autre côté, J. […] Cet abbé, avec tout son esprit et tout son talent, a singulièrement appauvri la langue poétique, en croyant l’enrichir, parce qu’il nous donne toujours la périphrase à la place du mot propre.
Depuis dix ans, la main-d’œuvre poétique s’est divulguée ; les procédés que la nouvelle école avait cru rendre plus rares et plus difficiles ont été saisis du second coup par une foule de survenants qui, à chaque saison, pullulent. La forme et le style poétique sont encore une fois tombés, en quelque sorte, dans le domaine public ; il coule devant chaque seuil comme un ruisseau de couleurs ; il suffit de sortir et de tremper. […] Avec un peu d’habitude, on s’y endurcit ; et mon ami, bien qu’il ait le cœur poétique et tendre, en est venu à ne plus mesurer ce champ d’oubli qu’à la toise. […] Il est vrai qu’une littérature poétique a malaisément deux grands siècles. […] L’imagination et la sensibilité, quand on les possède, ont vite reconnu leurs traces, et la vraie poétique est trouvée.
Que la poétique du Christianisme se divise en trois branches : Poésie, Beaux-arts, Littérature ; que les six livres de cette seconde partie traitent spécialement de la Poésie. […] Une voix poétique s’élève des ruines qui couvrent la Grèce et l’Idumée, et crie de loin au voyageur : « Il n’est que deux belles sortes de noms et de souvenirs dans l’histoire, ceux des Israélites et des Pélasges. » Les douze livres que nous avons consacrés à ces recherches littéraires composent, comme nous l’avons dit, la seconde et la troisième partie de notre ouvrage, et séparent les six livres du dogme des six livres du culte. Nous jetterons d’abord un coup d’œil sur les poèmes où la religion chrétienne tient la place de la mythologie, parce que l’épopée est la première des compositions poétiques. […] Toute espèce de ton, même le ton comique, toute harmonie poétique, depuis la lyre jusqu’à la trompette ; peuvent se faire entendre dans l’Épopée.
Ce qu’il en a dit montre que le principe de cette œuvre n’est nullement original — et qu’elle ne doit se développer que comme très intelligente et curieuse compilation recréée par un esprit poétique, délicat et éminemment subtil, des conceptions idéales à priori. […] Développement poétique déduisant au cours les nécessités directrices selon l’universelle harmonie, quant à l’Individu, et quant à l’Association des Individus, et au livre dernier promulguant les lois rationnelles et nécessaires. […] * * * L’Instrumentation poétique. […] L’Instrumentation parlée était chose désormais indéniable — et scientifiquement était avérée la trouvaille qu’en avait faite antérieurement ma pure intuition poétique. […] À mesure qu’il s’est précisée et que la vérité d’idée et d’art qui me guide me faisait un devoir très haut de me retirer — courtoisement, de tout le présent poétique, qui ne me satisfaisait pas dès l’entrée en l’art ?
Le Portugais est un aventurier, l’aventurier national, héroïque et poétique des temps modernes. […] On peut être proverbial chez nous sans être poétique. […] C’est un instrument poétique qui a toutes les notes graves ou douces du clavier. […] L’épître ici est égale à la tragédie, et les deux écrivains amis sont, dans des ordres de poésie différents, au même niveau de diction poétique. […] Berriat Saint-Prix a recueilli de nos jours et a mis à leur date et à leur vraie lumière chaque syllabe de cette vie poétique ou familière.
Principes de la théologie poétique. […] Poétique. […] Principe des caractères poétiques. […] Suite de la poétique.
Nous aurons donc ainsi, dans un format distingué, élégant, et qui n’est plus le démocratique format Charpentier, toute l’œuvre poétique de M. […] Sainte-Beuve une unité de substance poétique, un effet d’ensemble dans le sentiment et la couleur, tout-puissant sur l’imagination, puisqu’il la frappe toujours à la même place, et bien préférable à une discordante variété. […] Sainte-Beuve a été le Geoffroy Saint-Hilaire d’une vraie tératologie poétique, avant que M. […] Sainte-Beuve, accru et mûri par la vie, eût toujours eu avec lui-même cette sincérité poétique du Joseph Delorme, quel poète ne serait-il pas devenu, quelles autres émotions ne nous eût-il pas données encore ! Mais cette sincérité poétique… Nous examinerons tout à l’heure Les Consolations et les Pensées d’août, — et vous allez voir ce qu’il en a fait !
On y sent l’âme poétique : « Il n’est plus ! […] N’y a-t-il plus rien de poétique désormais que les merveilles de l’industrie et les inventions du mécanisme habile ? […] La même époque, un peu plus avancée, le même état du ciel allaient éveiller une autre âme poétique. […] Quoi qu’il en soit, la renommée poétique d’Heredia demeurait grande parmi tous les changements de ces républiques équinoxiales. […] Quelques détails de sa vie diront comment se forma cette âme poétique.
Les théories de l’« Art poétique » L’Art poétique répondit aux doutes de ceux qui avaient pu hésiter sur le but des Satires : Boileau y exposait toute sa doctrine, ramassée en un corps de préceptes. […] Jamais écrit n’a été plus populaire et plus incompris que cet Art poétique, et il n’y a pas d’ouvrage doctrinal dont on ait plus méconnu ou défiguré le sens. […] Et de là, d’abord, vient le reproche si souvent adressé à Boileau, de n’avoir point fait à l’imagination sa part dans l’œuvre poétique. […] On comprend maintenant la portée que prend, dans l’Art poétique, après la Satire II, l’éternel débat de la rime et de la raison. […] On ne s’apercevrait guère, à lire l’Art poétique, qu’il a fait un Repas ridicule ou des Embarras de Paris.
C’est ainsi que procèdent naturellement les génies synthétiques et poétiques. […] L’acte poétique n’appelle par lui-même ni châtiment, ni récompense. […] Ce talent si national est dans son essence le contraire de l’imagination poétique. […] Qu’est-ce que la figure, l’image poétique ? […] Le sentiment poétique touche de près au sentiment religieux, de si près qu’ils se confondent parfois ; et tout sentiment religieux constitue l’âme dans l’état poétique.
Et, hormis cette prétention dernière qui est tout une Poétique sur laquelle nous allons revenir, tout est vrai dans ce que dit là M. […] Et voilà que nous nous retrouvons une cinquantième fois devant une vieille poétique abattue, qu’on n’oserait peut-être pas relever en littérature, mais qu’on croit pouvoir très bien relever en histoire, et qui est vraie partout, ou qui ne l’est pas plus en histoire qu’en littérature ! III Cette vieille poétique, qui est probablement « la poétique de l’avenir », comme la raison philosophique de la Grèce doit être « la raison de l’avenir », cette vieille poétique n’est autre que la littérature des Grecs passée, après coup, à l’état de théorie, et qui a droit de retour et de despotisme si elle a l’absolu d’une vérité ; Or, pour M. […] Et, de fait, il doit avoir raison encore, notre très logique commentateur : si le génie grec est le plus beau génie qu’il puisse y avoir parmi les hommes, sa poétique doit participer de la beauté incomparable de ce génie. […] Girard et comme Thucydide, cette poétique ne crée qu’un art insuffisant aux besoins de pensée, de sentiment et d’émotion des sociétés qui n’en sont plus à la civilisation de Périclès, ce ne sera plus un avantage d’être si Grec.
Car, je le répète, au lieu d’un moyen âge inventé, improvisé, et mi-parti de vision ou de système, on aurait eu un fond solide et des éléments poétiques vrais. […] L’imagination poétique française est prise désormais et enchevêtrée dans le réseau d’une logique étroite et pédantesque. […] Omettre Régnier ou ne le nommer qu’en courant, ce serait négliger une tes formes les plus pleines et les plus essentielles denotre langue poétique. […] A Mellin de Saint-Gelais, il semble qu’il n’y avait pas encore de style poétique d’un tissu ferme et suivi ; et, à Boufflers, il semble qu’il n’y en a plus […] Et ce qui vaudrait mieux que toutes les Poétiques, ce serait un exemple nouveau et vivant.
C’est la tentative suprême de l’école de la Forme par la main d’un de ses meilleurs ; suprême, en effet, car on peut défier d’aller plus loin dans la vacuité de l’expression poétique et savante, de l’expression pour l’expression. […] La Critique, positive comme l’Histoire, et qui, pour l’instant, tient en sa possession les poésies complètes et avouées de Banville, en d’autres termes toute sa moisson poétique de 1841 à 1854, vannée, triée par lui et engrangée pour l’immortalité, s’il y a lieu, la Critique a bien moins à se préoccuper des chances d’un avenir incertain qu’à juger des efforts accomplis et du talent prouvé par l’œuvre même. […] Assurément, des facultés poétiques d’un ordre très élevé peuvent apparaître dans une école, mais elles s’y fourvoient toujours un peu et s’y diminuent. […] Banville n’a jamais l’idée poétique, le sentiment poétique, la sensation poétique que de son école, — et le compte de cela est bientôt fait ! […] C’est un grand rhétoricien poétique ; ce n’est pas un poète.
De la métaphysique poétique § I. […] La sagesse poétique, la première sagesse du paganisme, dut commencer par une métaphysique, non point de raisonnement et d’abstraction, comme celle des esprits cultivés de nos jours, mais de sentiment et d’imagination, telle que pouvaient la concevoir ces premiers hommes, qui n’étaient que sens et imagination sans raisonnement. […] Ces peuples, durent être tous poètes, puisque la sagesse poétique commença par cette métaphysique poétique qui contemple Dieu dans l’attribut de sa Providence, et les premiers hommes s’appelèrent poètes théologiens, c’est-à-dire sages qui entendent le langage des dieux, exprimé par les auspices de Jupiter. […] De même que la métaphysique poétique s’est divisée en plusieurs sciences subalternes, poétiques comme leur mère, cette histoire des idées nous donnera l’origine informe des sciences pratiques cultivées par les nations, et des sciences spéculatives étudiées de nos jours par les savants. […] Faute de connaître la chronologie raisonnée de l’histoire poétique, on n’a pu saisir jusqu’ici l’enchaînement de toute l’histoire du monde païen.
Une Sainte-Alliance menaçait notre nationalité poétique. […] Or, à quelle date se placent les débuts poétiques d’Alfred de Vigny ? […] Leurs balbutiements poétiques doivent avoir été contemporains. […] Mais je dois me borner aux œuvres poétiques. […] Le Symbolisme a-t-il délivré l’esprit poétique ?
Il n’y a de pensée élevée que la pensée religieuse, la pensée poétique. […] On s’est imaginé que l’homme créait la poésie : la poésie consiste à dire des faits ou des doctrines poétiques par eux-mêmes. Un homme de talent, quel que soit d’ailleurs son talent, ne peut rendre poétique une chose qui ne l’est pas, une chose qui n’est pas déjà de la poésie. […] Si j’avais à écrire une poétique appliquée à l’âge actuel de l’esprit humain, il faudrait que je discutasse les doctrines de M. de Chateaubriand et celles de M. de Marchangy. […] Les Allemands nous ont donné l’exemple de conceptions poétiques puisées dans des intérêts privés.
C’est la base même de notre phrase poétique et de notre système de la strophe. […] D’ailleurs employer les ressources de l’ancienne poétique reste souvent loisible. […] Mockel et de Souza ont discernée à leur tour, en étudiant le rythme poétique et qu’ils dénomment l’accent oratoire. […] Donc pas encore de prosodie, à peine une poétique, et mieux encore, simplement, des réflexions personnelles sur la technique. […] Tous ces efforts partiels tentés scientifiquement convergeront à justifier la dernière synthèse du rythme poétique.
Tout est poétique à qui sait voir et sentir. […] Nous trouverions partout que c’est l’émotion qui est la mesure de la poésie dans l’homme ; que l’amour est plus poétique que l’indifférence, que la douleur est plus poétique que le bonheur, que la piété est plus poétique que l’athéisme, que la vérité est plus poétique que le mensonge ; et qu’enfin la vertu, soit que vous la considériez dans l’homme public qui se dévoue à sa patrie, soit que vous la considériez dans l’homme privé qui se dévoue à sa famille, soit que vous la considériez dans l’humble femme qui se fait servante des hospices du pauvre et qui se dévoue à Dieu dans l’être souffrant, vous trouveriez partout, disons-nous, que la vertu est plus poétique que l’égoïsme ou le vice, parce que la vertu est au fond la plus forte, comme la plus divine des émotions. […] Fénelon reprit à Sarlat sa passion d’apostolat lointain et poétique pour la conversion des peuples. […] Ces vers avaient la mollesse et la grâce de la jeunesse ; ils n’avaient pas la virilité de l’âme véritablement poétique. Il le sentit lui-même et se résigna à la prose ; mais il ne cessa pas d’être le génie le plus poétique de son temps.
S’il fallait assigner une origine à cette innovation aussi poétique que la première l’était peu, nous dirions que les ouvrages de J. […] C’est par là qu’il rend poétiques les idées philosophiques les plus tristes et les plus abstruses. […] Mais il semble qu’il soit impossible d’affectionner davantage cette manière que ne fait notre nouvelle école poétique, qui se dit fille d’André Chénier. […] On sent combien cette manière, qui est le dernier degré du symbolisme de style, est compréhensive, poétique, précisément parce qu’elle est indéfinie, mais en même temps vague et obscure. […] Hugo en particulier, ont encouru le reproche de faire de la poésie pour les yeux et d’introduire une sorte de matérialisme poétique.
En exprimant ce qu’on éprouve, on peut avoir un style poétique, recourir à des images pour fortifier des impressions ; mais la poésie proprement dite, c’est l’art de peindre par la parole tout ce qui frappe nos regards. […] Les faits, les caractères, les superstitions, les coutumes des temps héroïques étaient singulièrement propres aux images poétiques. […] Homère a recueilli les traditions qui existaient lorsqu’il a vécu, et l’histoire de tous les événements principaux était alors très poétique en elle-même. […] Les prêtres et les législateurs avaient tourné la crédulité des hommes vers des idées purement poétiques ; les mystères, les oracles, l’enfer, tout, dans la mythologie des Grecs, semblait la création d’une imagination libre dans son choix. […] Rien n’est moins poétique que la plupart des coutumes modernes ; et chez les Grecs ces coutumes ajoutaient toutes à l’effet des événements et à la dignité des hommes.
[Bibliographie] Les Élévations poétiques (1892). […] Raymond Février (dans les Élévations poétiques) est chaste, grave, religieuse… Sa langue poétique est très ferme, très solide, et — chose plus rare — les pensées abondent sous sa plume.
L’aveu de Mallarmé n’a qu’une valeur poétique. […] La vie, l’expression poétique, sont à ce prix. […] Toute circonstance le ramène à son obsession, qui est le fait poétique. […] (Et quelque chose d’analogue se passe d’ailleurs dans toute organisation poétique.) […] Le poème Las de l’amer repos est son Art Poétique d’alors.
Si l’âme ne se fait belle, elle n’aperçoit point la beauté, a dit Plotin ; j’ajoute : Si l’âme ne se fait poétique, elle n’aperçoit point la poésie. […] C’est une fantaisie poétique qui passe devant notre imagination et disparaît, nous laissant le souvenir d’une brillante vision. […] Cette comédie a beau être en prose, c’est une composition poétique. […] Un discours politique, un plaidoyer, un sermon, peuvent offrir les mêmes beautés de composition : pourtant ce ne sont point des œuvres poétiques. […] Les deux derniers actes en sont plus poétiques que les premiers.
Boileau même, dans son Art poétique, est-il aussi à la portée de tout le monde que dans son Lutrin ? […] Boileau, dans son Art poétique, a passé sous silence une infinité d’objets qui font néanmoins partie d’une poétique ; de là vient qu’en parlant de la Tragédie, il n’entre dans aucun détail sur la division des Pieces en Actes, des Actes en Scenes ; sur l’exposition, l’intrigue, le dialogue, les surprises, la catastrophe. […] La description de l’âge d’or, par Boileau, ne cesse pas d’être poétique pour admettre les termes de bled, de bœuf, de Vigne, de grappes, de lait : Hélas ! […] Faites un Poëme sur la Peinture, l’Agriculture, la Déclamation, l’Art de la Chasse, l’Art de la Guerre, &c. ; ayez un génie vraiment poétique, & vous saurez ennoblir chaque terme pour exprimer chaque objet ; & vous traiterez les choses les plus difficiles d’une maniere aussi claire que poétique.
Les poésies homériques, incontestables d’antiquité et de génie, quel qu’en soit l’auteur, supposent, avant elles, un monde déjà poétique, des fêtes religieuses, des chants, des oracles, tout ce mouvement lyrique naturel à l’âme humaine quand elle s’élève ou se passionne. […] Le docte voyageur recueille d’autres souvenirs, qui marquent combien avait été répandue cette tradition d’Orphée, religieuse plus encore que poétique. […] Lus et relus, les vers épars conservés sous son nom jusqu’à nous semblent comme un indice de cette poétique ardeur qui couvait partout dans la Grèce. […] Chios, Délos, Lesbos, étaient autant de cités poétiques dans la commune patrie. […] Alors même elles ont cependant une antiquité relative et une valeur poétique dont il ne faut pas faire dédain.
Quant à l’effet hautement poétique et religieux des monuments d’alentour sur une jeune vie commencée entre Notre-Dame et la Sainte-Chapelle, comment y penser en ce temps-là ? […] Le drame mis à part, on peut considérer Malherbe et Boileau comme les auteurs officiels et en titre du mouvement poétique qui se produisit durant les deux derniers siècles, aux sommités et à la surface de la société française. […] En effet, la théorie poétique de Boileau ressemble souvent à la théorie religieuse des évêques de 1682 ; sage en application, peu conséquente aux principes. […] Si de la théorie poétique de Boileau nous passons à l’application qu’il en fait en écrivant, il ne nous faudra, pour le juger, que pousser sur ce point l’idée générale tant de fois énoncée dans cet article. […] Dans une lettre à Brossette, on lit encore ce curieux passage : « L’autre objection que vous me faites est sur ce vers de ma Poétique : De Styx et d’Achéron peindre les noirs torrents.
Où donc est la victoire, peut-on dire, et qu’avez-vous produit, vous, École poétique nouvelle, qui soit si supérieur et si à l’abri d’un revers ? […] Le didactique et le descriptif ne sont que l’abus et l’excès de ce genre dans sa décadence, et quand l’esprit poétique s’en est retiré. […] Ce qui est vrai à mon sens, c’est que le genre de style poétique de Boileau et même de Racine avait besoin d’être modifié après eux pour être vraiment continué. […] Vers 1809, un Nouvel Art poétique, par M. […] Les choses ont bien changé, et de grands revers ont suivi ce triomphe alors unanime, d’un nom poétique qui du moins vivra.
Port-Royal voulait faire de son élève un avocat : mais la vocation poétique s’éveilla, encore indécise et prête à tenter toutes les voies. […] Il est poète, et dans toutes les actions qu’il met en scène, il saisit une puissance poétique qu’il dégage. […] Cela veut dire que chacun de ses sujets éveille en lui une vision poétique. […] Totalement dépourvus de sens poétique, ils traitent les plus merveilleux sujets de la poésie antique avec une sorte de bon sens bourgeois, asservi et étréci par les préjugés de leur monde. […] Robert, la Poétique de Racine, 1890, in-8.
Excepté dans l’Odyssée, il n’a point d’invention poétique comparable à cette histoire des anciens jours. […] La souveraineté l’enivre, le sang l’allèche, l’amour le corrompt ; mais il ne perd point son génie poétique avec sa vertu ; il est à lui-même son propre barde. […] Il paraît que la forme poétique et versifiée de cette langue alors consistait principalement dans la répétition ou dans l’écho de la même pensée, se retrouvant dans la même phrase, à peu près dans le même nombre de mots, de manière à se faire consonance à elle-même, comme l’écho fait consonance au cri qu’on lui jette. […] Dans toutes ses odes l’artiste en gloire suit la même marche : une invocation et un récit qui paraît étranger d’abord au sujet, et auquel il rattache les plus poétiques aventures des dieux et des hommes. […] On sent le génie sublime, mais le génie attelé au char olympique et soumis au frein de l’or ou de la vanité poétique.
La poétique du dix-septième siècle avait contribué à cette méprise du dix-huitième. […] L’Art poétique enseigne au poète les genres et leurs conditions, comme des limites où il l’enferme, plutôt que comme des espaces qu’il lui ouvre. […] L’Art poétique est surtout l’art d’écrire en vers. […] Les poètes avaient besoin d’une autorité pour justifier certaines franchises de leur poétique. […] Au temps où Boileau donnait la poétique de l’idylle, nous n’en avions que le lieu commun ingénieux dans les églogues de Segrais et de Racan.
En ce temps-là avait paru l’Art poétique, direct et rude coup pour les contempteurs de l’antiquité. […] Charles Perrault ne sembla pas d’abord pressé d’accepter l’héritage de Desmarets, et la chose se passa d’abord en escarmouches entre ses deux frères et Despréaux ou Racine, jusqu’à ce que, rendu par la disgrâce à la littérature, il donna son Saint Paulin, orné d’une Préface où l’Art poétique était saisi par son côté faible, je veux dire par son insoutenable théorie du merveilleux païen. […] Il est vrai qu’en cinq pages Boileau disait plus de vérités que Perrault en quatre volumes : mais enfin, avec toute la vénération possible pour l’antiquité, l’auteur de l’Art poétique et des Réflexions sur Longin confessait qu’il était réellement un « moderne ». […] Mais si l’on songe que jusque-là, dans l’Art poétique et ailleurs, Boileau n’avait jamais regardé les œuvres littéraires que dans leur relation au genre, sorte de type analogue aux idées platoniciennes, seul élément d’estimation, et seul principe de classification, dont chaque ouvrage tirait et sa raison d’être et sa valeur, selon qu’il le réalisait plus ou moins complètement : si l’on songe qu’il n’avait jamais demandé que la connaissance des règles et le génie pour la création des chefs-d’œuvre poétiques, et ne croyait pas avoir besoin d’une autre considération pour expliquer que la Pucelle n’égale pas l’Iliade, on comprendra tout le chemin que Perrault fit faire à Boileau. Selon ses nouvelles vues, à vrai dire, toute son œuvre était à refaire : il y avait un autre Art poétique à écrire.
. — Empédocle (vision poétique), suivi d’autres poésies (1829). […] Sainte-Beuve Jean Polonius n’est pas un précurseur de Lamartine ; il l’a suivi et peut servir très distinctement à représenter la quantité d’esprits distingués, d’âmes nobles et sensibles qui le rappellent avec pureté dans leurs accents… La langue poétique intermédiaire dans laquelle Jean Polonius se produisit, a cela d’avantageux qu’elle est noble, saine, pure, dégagée des pompons de la vieille mythologie, et encore exempte de l’attirail d’images qui a succédé ; ses inconvénients, quand le génie de l’inventeur ne la relève pas fréquemment, sont une certaine monotonie et langueur, une lumière peu variée, quelque chose d’assez pareil à ces blancs soleils du Nord, sitôt que l’été rapide a succédé. […] [Souvenirs poétiques de l’école romantique (1880).]
Les vers des comédies modernes par exemple, ou de Molière, n’ont rien de poétique ni ceux de la plupart des poèmes didactiques, des fables, de plusieurs épopées. […] Brièvement, on peut dire cependant, en somme, que tout spectacle, toute scène passionnelle et spirituelle qui peut être et qui est exactement décrite, analysée par le menu, cessera d’être poétique ; qu’au contraire, tout spectacle qui reste obscur et diffus, étrange et lointain, dont la représentation toute générale et suggestive, mais cohérente cependant, laisse le champ libre aux émotions qui lui sont associées et à celles même qui résultent de son idéalisation, sera poétique. […] C’est qu’en effet ces artistes sont à l’extrême limite du poétique. […] À l’autre confin des lettres, l’esprit « tout en idées » des frères de Goncourt, leur plaisanterie poétique, lumineuse, voltigeante, certaines « parades » de Ch. […] Mais on ne saurait considérer ces œuvres poétiques comme célèbres, ni même comme connues du public.
Charles Morice Louis Dumur, d’origine suisse et italienne, versifie selon une poétique nouvelle, du moins renouvelée de poétiques étrangères — aussi — et classiques… Sans accorder ni refuser au système de Louis Dumur plus ni moins de confiance qu’aux autres poétiques nouvelles dont la nouveauté consiste à démembrer le vieux vers français, je constate son effort et je l’inscris comme un des signes les plus nets qui marquent le désir d’une nouveauté, en effet, dont l’avènement plane autour de nous.
Souchon, Paul (1854-1923) [Bibliographie] Les Élévations poétiques (1898). — Hymne aux Muses (1900). […] Georges Pioch Ma lecture des Élévations poétiques me confirme le talent sonore de M. […] Charles Maurras Il y a dans cette joie, dont l’expression semble exagérer la vivacité, il y a, si je ne me trompe, un arrière-fond d’élégie ; et, de plus, au ton familier du discours, en dépit de la solennité de l’alexandrin, se dessine, dans une forme vague encore, comme une aspiration au système d’une poésie plus intime, l’idée d’un retour à Parny… Mais voilà qui va me rendre odieux à la jeune lyre des Élévations poétiques.
Les anciennes Sagas d’Islande, la Voluspa, le poëme des Niebelungen, sont les rameaux immortels de cette minière poétique du Nord : nous n’avons pas essayé d’y pénétrer. […] Est-il besoin de dire ce qu’une telle vie, dans le siècle des grandes prétentions et des petites choses, dut nourrir de feu poétique et de verve originale au cœur du poëte anglais ? […] Il n’en demeure pas moins un des rares talents, une des âmes poétiques du dix-huitième siècle. […] Il n’aura pas à plaisir désordonné sa vie pour la rendre poétique, et tiré des nuits de Venise, des conciliabules de Ravenne ou des orages de l’Épire quelque rajeunissement pour l’imagination. […] Retranchée derrière son océan et ses flottes, l’Angleterre a été trop heureuse pour être si poétique.
Pensées d’un humoriste ou Mosaïque extraite de la Poétique de Jean-Paul Or, ces vapeurs dont je vous parle, venant à passer du côté gauche où est le foie, au côté droit où est le cœur, il se trouve que le poumon, que nous appelons en latin armyan, ayant communication avec le cerveau, que nous nommons en grec nasmus, par le moyen de la veine cave que nous appelons en hébreu cubile, rencontre en son chemin lesdites vapeurs qui remplissent les ventricules de l’omoplate ; et, parce que lesdites vapeurs ont une certaine malignité, qui est causée par l’âcreté des humeurs engendrées dans la concavité du diaphragme, il arrive que ces vapeurs… ossabandus, nequeis, nequer, potarinum, quipsa milus. […] La comédie pose sur la tête de l’Humanité une couronne de fleurs, et la conduit souriante aux Petites-Maisons. — Moins une nation ou une époque est poétique, plus elle change facilement la comédie en satire. […] Poétique, § 25. […] La nation du persiflage par excellence (la France) est en même temps celle qui, pour l’humour et le comique poétique, est la moins comparable à la sérieuse Angleterre. […] Les métaphores du soleil plastique et de la lune romantique sont partout dans la Poétique de Jean-Paul.
Donnez-moi des images poétiques semblables à celles de la ceinture de Vénus, à celles des prières dans Homère, de la Renommée dans Virgile, de Didon mourante et ouvrant les yeux pour les refermer, et mille autres aussi belles que je pourrais citer encore, j’admirerai le poète avec enthousiasme. […] Je crois que toute image poétique, pour être vraiment belle, doit renfermer une pensée ; et sur ce pied-là je préfère les vers d’image, dignes de ce nom, aux vers qui ne renfermeraient qu’une pensée sans image, quoique ces derniers puissent avoir aussi beaucoup de mérite. […] Voyez Horace, qui nous fournit des modèles de beautés poétiques de toute espèce : vous trouvez dans ses épîtres et ses satires, des vers qui ne sont que pensés ; dans quelques-unes de ses odes le sentiment domine, dans d’autres ce sont les images. […] Quant aux tragédies en prose, cette discussion nous mènerait trop loin ; et si j’y entrais avec vous, j’ose croire que vous ne seriez pas mécontente de moi : mais quant à la sévérité des lois poétiques, je n’en voudrais rien relâcher ; et quant à la rime, malgré la monotonie qu’elle cause dans nos vers, je la crois indispensablement nécessaire à notre poésie, qui sans cela ne me paraîtrait plus distinguée de la prose. […] Je sais aussi que Pascal a dit qu’il n’y avait point de beauté poétique, mais j’en suis fâché pour l’honneur de ce grand génie, qui après tout était peut-être excusable, s’il ne jugeait de la poésie que sur le grand nombre de vers de son temps.
Pour se maintenir dans les régions poétiques, elle a besoin d’un perpétuel effort de volonté. […] Par cette grande élégie sur l’Italie, il a montré que toute sa destinée poétique n’est pas renfermée dans la satire. […] Évidemment ce but, selon la poétique de M. […] Hugo n’avait pas annoncé en écrivant sa poétique. […] Or, M. de Vigny n’a encore soumis qu’à deux épreuves, assez éloignées l’une de l’autre, ses habitudes poétiques.
Victor Hugo L’autre jour, j’ouvris un livre qui venait de paraître, sans nom d’auteur, avec ce simple titre : Méditations poétiques. […] On cessera de louer en lui ce titre de novateur qui a fait sa première gloire, et on regrettera même de l’avoir vu appliquer les efforts de sa muse à changer les détails d’une langue poétique fixée par l’autorité d’un grand siècle. On continuera à louer en lui ces images vives et brillantes que sa muse a répandues ; toutefois on ne le considérera plus comme notre seul et premier peintre poétique ; on n’oubliera pas que La Fontaine, Racine, Fénelon, et même Boileau, avaient ouvert, bien avant lui, la pure et vraie source des comparaisons et des images, sans jamais tomber dans la prodigalité ; on n’oubliera pas non plus que Chénier vécut dans un siècle descriptif et que ce don de peindre ou même de colorier les objets, qu’il a perfectionné sans doute, a pourtant été celui de plusieurs de ses contemporains. […] Madame de Beaumont avait connu André Chénier chez « la belle Madame Hocquart » et avait su apprécier sa vive et puissante organisation poétique.
L’intérêt d’une mort prématurée — et même poétique — ne doit pas faire oublier à la Critique impartiale et sévère qu’elle s’adresse à ceux qui survivent, et que la seule question qu’il y ait pour elle n’est jamais qu’une question de littérature. Cette mort fut poétique, en effet, dans un temps où la vie ne l’est plus, et elle parle plus haut à l’imagination que les œuvres de celui-là qui s’appellera Gabriel Ferry dans l’histoire littéraire du xixe siècle. […] Malheureusement c’était l’Amérique et les américains, et l’Amérique n’est poétique, intéressante et belle que sans eux. […] Pour échapper au mortel ennui de cette civilisation hypocrite, vaniteuse, âpre au gain, qui est la civilisation américaine, Cooper s’est rejeté à la vie sauvage, et il a été le peintre de ces vieux patriarches des prairies, aussi poétiques que ceux de la Bible ou des Burgraves du désert, dont les forteresses terribles et menaçantes sont un bout de buisson immobile, un carré de hautes herbes qui frissonnent, un lac étincelant dont la surface ne fait pas un pli aux tranquilles rayons du soir.
Mais la mère de Mme Tastu, à une faculté poétique naturelle et remarquablement élevée, unissait beaucoup de mérite sérieux et un caractère qui semble avoir eu de l’analogie avec celui de Mme Roland. […] Jusqu’à quel point cette discipline morale, régulière, contractée de bonne heure, et toujours observée dans la suite, favorise-t-elle ce qu’on appelle talent poétique, et ce qu’admire le monde sous ce nom ? […] A seize ans, la lecture de Gessner, d’Ossian, de Bernardin de Saint-Pierre, de M. de Chateaubriand surtout, la connaissance particulière qu’elle fit de Mme Dufrenoy, et jusqu’aux conseils qu’elle reçut de Mollevaut, contribuèrent à fixer la vocation poétique de Mme Tastu. […] Il y a un moment unique où toutes les pensées, tous les rêves chastes et poétiques à la fois, se rencontrent dans l’âme de la jeune fille, de la jeune femme ; c’est à la veille ou au lendemain du jour qu’embaume pour elle la fleur d’oranger. […] Bien qu’il nous reporte vers un passé plus brillant, bien qu’il s’élève moins haut que la poétique apparition de la jeunesse, il vient dignement après, et honore le talent en même temps que la vie de celle qui peut si fermement se résigner et si délicatement se plaindre.
Il lui fallait les larges plans, les vastes horizons d’une grande composition dessinée par elle-même comme poète et compositeur tous ensemble… Mlle Holmès a montré de très bonne heure les plus grandes dispositions poétiques et musicales. […] Cette glorification poétique et musicale de la Patrie c’est, en effet, elle seule qui l’a conçue. C’est elle qui l’a coulée dans le moule poétique et qui l’a revêtue de cette superbe pourpre musicale.
Leur religion poétique enchaînait leur imagination ; ils étaient toujours gouvernés, ou par une autorité de leur choix, ou par un tyran qui les asservissait entièrement. […] Les personnages obscurs de Shakespeare parlent en prose, ses scènes de transition sont en prose ; et lors même qu’il se sert de la langue des vers, ces vers n’étant point rimés, n’exigent point, comme en français, une splendeur poétique presque continue. […] Ces formes poétiques, empruntées du paganisme, ne sont pour nous que l’imitation de l’imitation ; c’est peindre la nature à travers l’effet qu’elle a produit sur d’autres hommes. […] Le véritable objet du style poétique doit être d’exciter, par des images tout à la fois nouvelles et vraies, l’intérêt des hommes pour les idées et les sentiments qu’ils éprouvaient à leur insu ; la poésie doit suivre, comme tout ce qui tient à la pensée, la marche philosophique du siècle. […] La philosophie, en généralisant davantage les idées, donne plus de grandeur aux images poétiques.
Littérairement, car il n’en est pas à ses débuts poétiques, nous le connaissions. — La Bretagne le compte dans ce groupe de poètes qui s’ouvre à Brizeux et se ferme à La Morvonnais. — Achille du Clésieux est de la vieille garde des poètes qui avaient le feu sacré, comme les grenadiers de Napoléon. […] Achille du Clésieux n’est pas un jouvenceau poétique, et la Critique ne doit pas avoir pour lui des sentiments de jouvencelle attristée. […] l’accent tout puissant d’amertume et d’ironie de l’Ajax poétique qui s’appelle lord Byron ; mais il n’en a pas moins l’accent du désespoir de la vie, sans lequel nulle grande poésie ne peut exister, dans ce monde où l’idéal entrevu nous fuit de toutes parts ! […] La langue de Racine a presque disparu, et fait l’effet maintenant de ce spectre charmant de Francesca, dans un des poèmes de Byron, à travers la main pâle de laquelle passe un clair rayon de la lune… Et ce n’est pas dire pour cela que la langue de Racine dût être l’idéal — éternel et immobile — de la langue poétique. […] Il est impossible que le fond de la langue poétique ne soit pas pur quand on a cette pureté dans l’inspiration.
Ils ont fait vaillamment leur métier d’éditeurs, quel qu’ait été le motif qui les a fait agir, curiosité simple d’éditeurs consciencieux ou enthousiasme poétique. […] Indépendamment de sa valeur poétique, qu’il ne faut pas outrepasser, mais qu’il ne faut pas diminuer non plus, d’Aubigné, ce poète guerrier, ce poète d’action, à l’antipode du rêveur que sont tous les autres poètes, a dans ses vers comme dans sa vie un charme de violence irrésistible. […] Plus heureux en cela qu’André Chénier, le guillotiné de génie dont toute la vie fut dans la mort, Agrippa d’Aubigné eut une vie poétique jusqu’à sa dernière heure, et cette heure fut tardive. […] Il n’y a plus qu’une corde de la lyre, — la corde d’airain ou de fer, mais, après tout, une seule corde de l’instrument qui en a sept, — tandis qu’en ce troisième volume il y a toutes les faces de d’Aubigné, toutes les cordes de sa lyre, toutes les palpitations de son âme, de sa vie, — plus poétique encore que son âme ! […] La grande force poétique d’Agrippa d’Aubigné ne peut pas être isolée de son siècle.
La poétique de Lamartine exige la noblesse de l’expression et la mélopée continue du style. […] est-il beaucoup de recueils poétiques qui en renferment autant ? […] Tout se développe également mélodieux, pareillement élevé, divinement poétique. […] Rachel était la transfiguration poétique de Minna Moré. […] Cet homme a contenu et déployé l’âme poétique de tous les temps.
. — Études poétiques (1820). […] Chênedollé, dans le Génie de l’homme, a développé moins de philosophie, mais plus de talent poétique. […] Chênedollé est, en général, très correct ; il est toujours harmonieux et s’élève fort souvent aux plus hautes formes poétiques ; c’en est assez pour faire concevoir que c’est un poème didactique recommandable (Le Génie de l’homme) ; il faut avouer aussi qu’il participe au malheur de presque tous les poèmes didactiques modernes : il est extrêmement pénible à lire de suite.
Le détail où je vais entrer sur chacun d’eux fera voir en quoi cette retenue a été utile à la langue poétique. […] Bertaut nous a laissé, sur ses premières inspirations poétiques, quelques détails qui nous aideront à l’apprécier. […] Le succès dans cette entreprise devait donner la première gloire poétique durable : cette gloire fut celle de Malherbe. […] Malherbe en nettoya la langue poétique. […] C’était l’ode, de toutes les formes poétiques la plus propre à rendre sensibles ses réformes ; rien n’étant lu de plus près, ni avec plus d’attention aux détails.
Vraie renaissance poétique. […] Plus quelques-uns de ses monuments poétiques avaient été liés à la liberté de ses villes, à leurs fêtes religieuses, à leur ancien héroïsme, plus ils restaient admirés, en paraissant désormais impossibles à imiter. […] Par deux points, ce souvenir touche à notre sujet : par l’influence de la tradition littéraire, et par l’effort de la rénovation poétique. […] On pourrait le supposer, en trouvant dans un jeu poétique de Théocrite, dans l’Épithalame d’Hélène, une rencontre si heureuse, ou plutôt une si visible imitation des brûlantes images du voluptueux monarque de Judée. […] Évidemment, sur cet écho malheureux des paroles de Jéhovah et de ses prophètes, le scrupule a pris plus tard aux compilateurs poétiques d’Alexandrie.
Dans l’ordre poétique, de même. […] Le Voyage en Orientdonna l’éveil ; par sa préface de Jocelyn, l’auteur attacha un sens voulu à beaucoup de parties du poëme qui seraient, sans cette indication, demeurées vagues, je le crois, et qui auraient passé sur le compte de la licence poétique. […] À tant de variations diverses, religieuses, philosophiques, politiques et poétiques, que nous notons, il en est une à ajouter encore, celle même que nous autres critiques, en les remarquant, nous subissons. […] Ces pages sont elles-mêmes une esquisse poétique et vivante de son intérieur de Saint-Point. […] Quant au génie poétique de M. de Lamartine, qui, malgré tant de déviations récentes, n’a jamais été plus puissant dans son jet et dans sa source, c’est à lui de voir si, par ce cri d’alarme, nous signalons un naufrage ou si nous le prévenons.
Tout est poétique à qui sait voir et sentir. […] Nous trouverions partout que c’est l’émotion qui est la mesure de la poésie dans l’homme ; que l’amour est plus poétique que l’indifférence ; que la douleur est plus poétique que le bonheur ; que la piété est plus poétique que l’athéisme ; que la vérité est plus poétique que le mensonge ; et qu’enfin la vertu, soit que vous la considériez dans l’homme public qui se dévoue à sa patrie, soit que vous la considériez dans l’homme privé qui se dévoue à sa famille, soit que vous la considériez dans l’humble femme qui se fait servante des hospices du pauvre et qui se dévoue à Dieu dans l’être souffrant, vous trouveriez partout, disons-nous, que la vertu est plus poétique que l’égoïsme ou le vice, parce que la vertu est au fond la plus forte comme la plus divine des émotions. […] La sensualité et l’intellectualité de son être devaient s’associer à un certain degré dans son langage poétique. La partie sensuelle ou musicale de ce langage poétique devait peut-être prédominer alors sur la partie intellectuelle et immatérielle de la pensée. […] Même quand on rit en vers, non seulement le rire n’est jamais poétique, mais encore il est l’opposé de toute poésie, car il est l’inverse de tout enthousiasme et de toute beauté.
On a son Epitre à Sapho, dans laquelle il s’attache à lui déconseiller la gloire, et à l’édifier sur l’amour : c’est une très-ingénieuse pièce contre l’immortalité poétique. […] Dans ses meilleurs et ses plus poétiques moments, Mme Des Houlières a fait de jolis airs : c’est ainsi qu’elle appelle un simple couplet, une idée tendre, fugitive, un sentiment rapide qui nous arrive comme à travers un son de vieux luth ou de clavecin. […] Les premières élégies de Mme Dufrénoy commencèrent de paraître dans les recueils poétiques aux environs de 89. […] Je la trouve également attribuée à Fontenelle ; en un si grave procès je ne décide pas. — Les Annales poétiques l’attribuent même en troisième lieu au poëte Ferrand ; de sorte, me disait un plaisant, que votre pauvre M. […] Viollet-le-Duc, dans sa Bibliothèque poétique (1843), article Coutel, cite au long la pièce de ce dernier et remet le point d’interrogation.
La traduction poétique de Lamotte, en effet, lors même qu’il était assez content de l’original et voulait seulement l’orner un peu, devenait une parodie. […] Il en reçut, non l’âme poétique qui ne se donne pas, mais de belles parures de langage, quelques grains d’or pur, qu’il étendit en feuilles minces et brillantes dans le tissu de sa diction laborieuse. […] Sa pensée poétique est empreinte d’une gravité sainte, qui annonce presque cette foi pieuse que l’apôtre a définie « la réalité des choses qu’on espère et l’évidence des choses qu’on ne voit pas ». […] Voltaire n’a pas manqué de trouver cette autorité poétique frivole et peu concluante. […] Par là, sa pensée si hardiment poétique se rapproche encore davantage de la gravité calme et de l’esprit paisible et réglé du prêtre chrétien.
Il avait senti, sans nul doute, qu’elles étaient l’expression définitive, ardemment cherchée, de sa maturité poétique, que passé ce niveau il ne s’élèverait plus, et qu’au contraire, image de la vie, son expression baisserait sous sa plume au lieu d’y monter. […] Parti de lord Byron avec la fougue que lord Byron communique à tous ceux qui l’aiment, il a fini par aboutir, dans son ralentissement d’ardeur, à Gray et à sa mélancolie ; mais, dans ce détiédissement d’un rayon qui n’est plus que doux et qui avait été brûlant, il n’a jamais dépouillé cet air que j’appelle l’air poétique anglais, et qu’il a encore dans les cendres de son Couvre-feu quand il caresse la tête de ses deux enfants et qu’il rabat jusqu’à eux et à leur souvenir cette hautaine idée de la gloire comme nous l’avons dans la jeunesse. […] Nous en trouvons, de ces parties de poète, de ces fragments qui classent un homme quoiqu’ils ne soient que des fragments ; nous en trouvons dans tous les livres de vers publiés par lui ; mais surtout dans les deux qui ouvrent et ferment sa carrière poétique et qui la consacrent : Les Confidences et Le Couvre-feu. […] C’est une âme sincèrement poétique avant d’être artificiellement un poète de langage. […] Avec une telle manière de sentir et de concevoir la beauté poétique, l’auteur du Couvre-feu, qui, nous devons en convenir, a, pendant ces dix dernières années, accompli un rude travail de lime sur lui-même, a eu beau se polir, se dépouiller, s’élever, — et qui s’élève se simplifie !
Cette conception poétique est mauvaise. […] Laforgue loue quelque part Corbière d’avoir été, plus que nul autre artiste en vers, « dégagé du langage poétique : chevilles, images, soldes poétiques ». […] La vieille conception poétique tombant en ruines, ils s’efforcèrent de la restaurer. […] Mais il nous importe surtout de considérer le symbolisme poétique de Gustave Kahn. […] De même que son style, son inspiration est strictement littéraire et poétique.
ils aiment le drapeau, ils aiment la chose poétique en elle-même, et ils ont raison de l’aimer, car elle leur a souvent porté bonheur. […] J’ai regret surtout aux pensées poétiques ; les autres se retrouvent, se renouvellent ; l’une remplace l’autre : la pensée poétique, seule, ne se remplace point. On peut faire mieux, on peut faire autrement ; on ne remplace pas plus une pensée poétique qu’on ne remplace une âme : chaque création de ce genre, pour autant qu’elle est poétique, est unique et irréparable ; ce qui a été dit par un poëte, un autre ne le redira pas. » De nos jours, où toutes les vocations sont remuées et où tous les numéros, même incomplets, ont chance de sortir, combien ne savons-nous pas de ces âmes poétiques qui essayent de s’exprimer partout où elles sont, en province, dans le fond d’un bureau, au creux d’une vallée, au bord de leur nid enfin, et cela sans trop de manie d’imitation, sans trop de rêve de gloire, mais pour se satisfaire humblement et se suffire ! […] Marie est le livre poétique le plus virginal de notre temps, c’est même le seul véritablement tel que je connaisse.
Il y a là, dans la jolie vallée de Bièvre, tout un coin, un foyer d’action, qui mériterait sa place dans la chronique poétique des dernières années. […] ô susceptibilité poétique !) […] l’école poétique moderne a réussi. […] Paul Ackermann, qui est très-français malgré la tournure germanique de son nom, et qui, à cette distance, s’occupe à fond de l’école et de la question poétique moderne, comme pourrait faire sur une phase accomplie un érudit systématique et ingénieux. […] S’il est équitable en même temps que vrai génie, s’il est généreux, il dira à qui il doit le plus, et ce qui lui en semble parmi ceux qui lui auront frayé la route, qui lui auront préparé la langue poétique continue ; et sa parole fera foi.
En effet c’est une propriété innée de l’âme humaine d’aimer l’uniformité ; lorsqu’elle est encore incapable de trouver par l’abstraction des expressions générales, elle y supplée par l’imagination ; elle choisit certaines images, certains modèles, auxquels elle rapporte toutes les espèces particulières qui appartiennent à chaque genre ; ce sont pour emprunter le langage de l’école, des universaux poétiques. […] C’étaient encore des universaux poétiques qui servaient à désigner les diverses espèces d’objets qui occupaient l’esprit des héros ; ils attribuaient à Achille tous les exploits des guerriers vaillants, à Ulysse tous les conseils des sages96. […] Lorsque l’esprit humain s’habitua à abstraire les formes et les propriétés des sujets, ces universaux poétiques, ces genres créés par l’imagination (generi fantastici), firent place à ceux que la raison créa (generi intelligibili), c’est alors que vinrent les philosophes ; et plus tard encore, les auteurs de la nouvelle comédie, dont l’époque est pour la Grèce celle de la plus haute civilisation, prirent des philosophes l’idée de ces derniers genres et les personnifièrent dans leurs comédies.
Il montra un très louable souci du métier poétique. […] Ils acceptèrent des données et des moyens poétiques antérieurs et y ajoutèrent peu, se contentant d’en user avec discernement, propriété et science. […] Dans son beau drame poétique d’Axël, Axël est grand jusqu’au jour où il consent une minute à ce qu’existe une réalité en dehors de celles qu’il se crée à lui-même. […] Personne, qui l’ait étudiée, ne niera que Mallarmé n’ait été un esprit de haute et suprême culture et qu’il n’ait mis au jour d’importantes vérités poétiques. […] L’impression poétique ne naîtra donc pas chez le lecteur d’une sorte d’obligation mentale ; elle résultera bien plutôt désormais d’une sorte de connivence spirituelle.
Toute sa vie, dans tous les domaines de son activité, il s’est tenu au carrefour de deux routes, à l’angle de deux directions cardinales, il a oscillé entre le judaïsme, le christianisme et une sorte de paganisme poétique ; entre la France et l’Allemagne ; entre tous les genres, en prose et en vers. […] Son humour ressemble singulièrement parfois à celui de l’auteur du Chat Murr ; c’est la même plaisanterie tragi-comique, le même rire nerveux de maniaque, une fantaisie ailée, poétique, à écarts subits, voltigeante et comme immatérielle, puis sénile et grotesque. […] Elle n’est pas une gaieté légère, ailée, purement fantaisiste comme l’ironie spirituelle de Mercutio et de Rosalinde, comme le joli sourire poétique de quelques comédies de Musset. […] De même que les gens privés de patrie par une éducation errante et des goûts composites, professent le cosmopolitisme et dénigrent les nations avec équité, il eut un mépris égal pour le judaïsme et le christianisme, s’étant composé une foi poétique ornée de toutes les légendes païennes. […] Dans cette longue et désastreuse lutte, dans ce perpétuel envisagement de la fin, Heine porta le même sourire acerbe, la même ironie prime-sautière et poignante que dans ses mélancolies poétiques.
Marie-Joseph Chénier M. de Chateaubriand suit la poétique extraordinaire qu’il a développée dans son Génie du christianisme. Un jour, sans doute, on pourra juger ses compositions et son style d’après les principes de cette poétique nouvelle, qui ne saurait manquer d’être adoptée en France du moment qu’on y sera convenu d’oublier complètement la langue et les ouvrages des classiques. […] M. de Noailles M. de Chateaubriand déploya devant nos yeux l’Océan, l’Amérique, la Grèce, la Judée, les levers et les couchers du soleil à l’horizon des mers, les cieux étoilés du Nouveau-Monde brillant sur l’immensité des fleuves et des savanes ; et, par la grandeur et la nouveauté de ses descriptions, il étendit la sphère des images poétiques.
Plus législateur en cela que dans son Art poétique, ses jugements sur les personnes nous dirigent plus sûrement que ses lois sur les genres. […] Mais de Vigny avait le don si rare des beaux vers, et telle est l’excellence de la beauté poétique, que là où elle brille il y a vie et durée. […] Le titre d’Émaux et Camées, que porte un de ses recueils, caractérise et loue tout à la fois l’ensemble de ses œuvres poétiques. […] En lisant les Causeries de Sainte-Beuve on pense à Plutarque et à Bayle, et on les retrouve, avec le trait poétique qui leur manque. […] Les gens de goût ont fait parmi ses œuvres un choix de quelques romans où la beauté morale se joint à la beauté poétique.
Auguste Dorchain Les Aveux (1882) dominent jusqu’ici de très haut l’œuvre poétique de Paul Bourget. […] Paul Bourget n’en restera pas moins Byronien de religion poétique, il ne changera pas l’âme qu’il a et ne se laissera pas étouffer dans d’ineptes systèmes et des poétiques de perdition.
Buchon qu’il m’a fait une querelle inutile, lorsqu’il a supposé que je pouvais lui conseiller, à lui ou à tout autre, de tenter pour les patois de son pays ce que Jasmin a fait pour les patois du Midi, c’est-à-dire de les fusionner dans une sorte de dialecte commun ou composite et de langue littéraire poétique. […] Il appartenait par bien des côtés à l’ancienne école poétique en même temps qu’il avait un pied dans la nouvelle. Ce n’est pas pour rien qu’il s’appelait Évariste : il tenait de Parny, son parrain poétique, plus que d’Alfred de Musset. » — Je compléterai aujourd’hui et préciserai un peu plus ces souvenirs, mais sans m’astreindre a la notice : il suffit ici d’un profil et d’un médaillon. […] Il avait l’exaltation poétique, l’ardeur et la chaleur au front, plutôt que le renouvellement intérieur et l’idée. […] Il y a eu de nos jours des recueils poétiques ainsi composés uniquement (ou presque uniquement) de sonnets ; on cite ceux de M. de Gramont, de M.
Assurément, l’amour réduit au seul plaisir des sens n’a rien de très poétique. […] Cependant la patrie n’a pas épuisé la veine poétique de Béranger. […] Une telle défense, il faut bien le dire, n’a rien de poétique. […] Qu’une ville de province soit pour l’âme poétique une source intarissable de dégoût, j’y consens. […] Cruel dénouement pour ces poétiques amours !
. — Œuvres poétiques (1872-1883). — Promenades autour d’un tiroir (1886). […] Soulary possède à merveille la langue poétique de la Renaissance, et, grâce à l’emploi d’un vocabulaire très large, mais toujours choisi, il a trouvé moyen de dire, en cette gêne du sonnet, tout ce qu’il sent, ce qu’il aime ou ce qu’il n’aime pas, tout ce qui lui passe par le cœur, l’esprit ou l’humeur, son impression de chaque jour, de chaque instant. […] Paul Mariéton Il est le seul de l’école dite « plastique » qui ne soit jamais tombé dans le convenu… Pour quiconque est las des rêveries fades et malsaines, des étrangetés creuses ou des sonorités romantiques, Soulary sera toujours le prince des sonnettistes et, en tous cas, l’un des plus puissants virtuoses de notre langue poétique.
Quelques fragments de ce grand poète, qui est à la langue poétique moderne ce que Rabelais est à la langue de la prose, avaient suffi, en 1830, pour que la vie — la vraie vie — apparût dans ce qu’on croyait la mort, et pour que le génie de la poésie française, révolté enfin des compressions et des mutilations qu’il avait lâchement endurées depuis près de trois siècles, se reconnût, avec orgueil et acclamation, dans Ronsard. […] La plantureuse langue poétique que parle Ronsard, avait, à son aurore, été frappée par la grammaire, — la grammaire sèche, polie, aiguisée comme une hache. […] Trente-sept ans avaient coulé comme l’eau sur une pente1, et, dans ce monde prosaïsé, Ronsard régnait toujours sur ce qui restait de poètes vieillis et sur les facultés plus ou moins poétiques qui déjà alors jouaient au poète. […] Et ce que je dis là s’est produit sans nulle exception, sans nulle interruption, pendant trente-sept ans, et continue de se produire encore, depuis Victor Hugo jusqu’à Leconte de Lisle, le chef de la meute de ces bassets poétiques qui jappent maintenant et qui se sont appelés si fastueusement : le Parnasse contemporain, quoiqu’ils n’eussent rien de Parnasse et encore moins de contemporain ! […] Mais il n’y avait pas eu réellement de vie poétique organisée ; mais d’homme complet dans sa force et dans sa majesté de poète, il n’y en avait pas eu avant Ronsard, Ronsard est l’Adam de la poésie française, et, comme Adam, il est né homme, armé de toutes ses facultés !
… Qui pense à Milton, à cette heure, dans ce monde moderne, attelé aux plus âpres besognes, qui n’est ni religieux, ni poétique, — tout ce que fut Milton, — et qui, tas de fourmis en travail, passe au pied de la statue des plus grands hommes sans avoir même le temps de la regarder ? […] L’irrésistibilité de la vocation du génie est toujours en raison directe de son originalité… La vocation poétique de Milton fut révélée par ses premières œuvres de jeunesse, mais elle fut arrêtée et suspendue par toute une vie de travaux et de préoccupations contraires. […] Les poètes poussent partout, quand ils sont vigoureux, mais aucun poète sous le tournant du soleil ne l’a mieux prouvé que Milton, et on peut l’étudier comme un véritable phénomène de végétation poétique, ce chêne de rocher que rien, rien n’a pu empêcher de devenir, à l’âge où les hommes les plus forts se cassent, le rouvre du Paradis perdu. […] Lui, l’ancien chantre du Comus et du Penseroso, il ne courbait pas seulement son génie poétique, dont il devait être sûr, devant un génie théologique qu’il n’avait pas, mais il alla jusqu’à vouloir écraser l’un par l’autre. […] Mais le Titan poétique était si fort en lui, qu’au moment même où l’on pouvait le plus le croire écrasé, il se leva tout droit et tout grand en rejetant ces affreuses montagnes qu’il avait empilées sur sa tête, et il apparut à l’Angleterre la fleur magnifiquement épanouie du Paradis perdu à la main !
Elle avait inventé des axiomes en poétique, comme elle en inventait jadis en métaphysique et en psychologie. […] Bien qu’on ait parlé plus d’une fois des trois Poétiques 2, il n’y a véritablement qu’une Poétique qui mérite ce nom : c’est celle d’Aristote. […] Dans sa Poétique, telle qu’elle nous est parvenue, il n’est question que de la tragédie et du poème épique. […] En date, la Poétique est le premier monument ; et en mérite, elle est un des plus importants de la critique telle que nous la pratiquons. […] Horace et Boileau, dans leur Art poétique, sont plus parfaits, mais moins sagaces.
Voilà comment, dans quel esprit, sur les traces des anciens et des Italiens, la Pléiade a jeté brusquement la poésie hors des voies anciennes et populaires ; avec un mélange unique de noblesse aristocratique et de superbe érudition, elle a tenté de prodigieuses nouveautés : elle a voulu tout d’un coup renouveler les thèmes poétiques, changer les genres, refaire la langue. […] Ronsard, moins impatient que son ami, et plus artiste en ce sens qu’il s’efforça de réaliser, non de définir son idéal, a semé pourtant ses théories dans ses Préfaces des Odes et de la Franciade, ainsi que dans un Abrégé d’art poétique qu’il donna en 1565. […] La langue Pour la langue, les Romains se faisant d’après les Grecs un vocabulaire philosophique, scientifique et même poétique, indiquaient à la nouvelle école la méthode à suivre : et l’on voit tout de suite le danger. […] Une erreur plus grave de Ronsard, c’est d’avoir méconnu la valeur poétique de ce que M. […] Ce que Villon seul avait fait en deux ou trois endroits, d’exprimer les plus intimes réactions de l’individualité au contact de la vie, de mettre par conséquent une sincérité sérieuse au fond de l’œuvre poétique, Ronsard et son école en firent la loi et comme l’essence de la poésie moderne.
Conclusion J’ai voulu montrer la formation complète d’une oeuvre poétique et chercher par un exemple en quoi consiste le beau et comment il naît. […] Selon que cet esprit est passager, séculaire, éternel, l’oeuvre est passagère, séculaire, éternelle, et l’on exprimera bien le génie poétique, sa dignité, sa formation et son origine en disant qu’il est un résumé. […] Sans doute la fable, le plus humble des genres poétiques, ressemble aux petites plantes perdues dans une grande forêt ; les yeux fixés sur les arbres immenses qui croissent autour d’elle, on l’oublie, ou, si l’on baisse les yeux, elle ne semble qu’un point.
Elle restera donc dans son idéal modeste et mystérieux, celle qui porta comme une couronne sur son autre nom, ce nom poétique et romanesque de Valmore ! […] Je sais bien qu’il est une École qui conteste assez hautainement la supériorité de cette poésie spirituelle, une École puissante et qui mérite de l’être, _ car elle a rendu de grands services à la langue poétique de ce temps. […] Seulement il ne l’est pas assez, de par l’émotion ou de par la passion uniques, pour pouvoir entièrement se passer de la langue poétique et de sa visible beauté. […] Mais comme les autres femmes et plus qu’elles souvent, elle a des qualités poétiques. […] — annonçait, dans ces vers libres ou plutôt lâches, et où la langue s’effilochait comme un tissu usé dans chacun de ses fils, la femme qui, vingt ans plus tard, s’est essayée à se faire un rythme, et qui, en son coin solitaire, a participé, dans la mesure de ses forces de femme, à ce grand mouvement rénovateur du style poétique qui s’est produit avec tant de continuité et de fécondité parmi nous.
Ces Idylles prussiennes, sur lesquelles je veux particulièrement insister, ne sont pas seulement les plus belles poésies du volume, mais elles portent avec elles un caractère de nouveauté si peu attendu et si étonnant, qu’en vérité on peut tout croire de la puissance d’un poète qui, après trente ans de vie poétique de la plus stricte unité, apparaît poète tout à coup dans un tout autre ordre de sentiments et d’idées, — et poète, certainement, comme, jusque-là, il ne l’avait jamais été ! […] Jetez, en effet, dans un mortier, Alfred de Musset et Victor Hugo, broyez et mêlez, et vous aurez une combinaison, une composition poétique qui pourrait bien s’appeler Théodore de Banville. […] Ce qui revient toujours, c’est le tempérament, et le tempérament du lyrique joyeux revient ici grandir, à plus d’une place, les plaisanteries, les parodies, les calembours et les calembredaines, — car M. de Banville descend jusque-là, — et les relève par l’expression d’une verve poétique toujours palpitante et vibrante. […] IV Mais Arlequin et Pierrot, ces deux types adorés de M. de Banville, qui les unit dans sa personne poétique, Arlequin et Pierrot, ces deux innocents, doux et étincelants gouailleurs, vont disparaître de ce volume, et nous arrivons enfin au magnifique et poignant avatar du poète, nous arrivons à ces Idylles prussiennes que j’ai annoncées dès le commencement de ce chapitre, et qui ont fait tout à coup surgir du Banville connu un Banville qu’on ne connaissait pas. […] En lisant ses Idylles prussiennes, j’ai complété la haute idée que j’avais de son talent poétique.
Elles sont moins des poésies qu’une œuvre poétique de la plus forte unité. […] À part quatre ou cinq noms que je me dispense de citer, mais que chacun connaît, je demande si, dans les essais poétiques qui se sont manifestés dans ces dernières années, il est possible de voir autre chose que réminiscences et pastiches. […] Quel profit Voltaire, eût-il eu tout le génie poétique qui lui manquait, pouvait-il attendre de sa Henriade alors que les mémoires sur la Ligue étaient déjà dans toutes les mains ? […] Sa phrase poétique n’est pas, comme celle de M. […] Ils pourront servir de bornes lumineuses à une nouvelle génération de coureurs poétiques.
La Fontaine a dédaigné ou négligé ce récit qui serait une chose charmante, et cette ressource poétique. […] Boileau, à la vérité, a négligé la fable, je ne dis pas La Fontaine, vous allez voir pourquoi, dans l’Art poétique. […] Ailleurs, il félicite La Fontaine de cet instinct poétique et il a bien raison c’est-à-dire de cette spontanéité poétique qui, dit Voltaire, à tort, ne semble devoir rien à l’art et qui est comme une faculté de la nature. […] On dirait, vraiment, que tout, dans la littérature poétique, doit être écrit dans le style de la Henriade. […] Remarquez qu’il a exploité absolument tous les genres poétiques ; tous les genres poétiques ont été cultivés par lui.
Qu’on y réfléchisse, on trouvera que le vrai poétique est vrai métaphysiquement, et que le vrai physique, qui n’y serait pas conforme, devrait passer pour faux. […] Considération importante dans la poétique. […] Dans les axiomes 47, 48 et 49, nous trouvons le principe des caractères poétiques, lesquels constituent l’essence des fables. […] Cet axiome nous explique la formation des pensées poétiques. […] À ce langage naturel dut succéder le langage poétique, composé d’images, de similitudes et de comparaisons, enfin de traits qui peignaient les propriétés naturelles des êtres.
Hugo, l’Immortel de volonté poétique sur la tombe de la poésie morte, — personne n’a conduit la langue française et la langue poétique aussi loin que M. […] Il avait toute sa vie assez montré ce qu’il pouvait faire dans l’ordre de la pensée poétique, et il y reviendra bientôt encore. […] Faire donner à l’expression réduite, autant qu’elle peut l’être, à elle-même, car elle ne vit pas absolument d’une vie qui lui appartienne, mais lui faire donner tout ce qu’elle peut donner, quand elle est réduite à sa propre puissance et à son propre charme, voilà le beau problème poétique qui vient d’être résolu dans une expérimentation de génie. […] Serait-ce là pour lui, trop indéchiffrable d’inscription, la colonne d’Hercule du travail poétique qu’il vient d’achever et auquel il ne souhaite pas qu’on ajoute ? […] Oui, c’est la langue, la langue poétique qui donne à ceux qui l’aiment une fête splendide !
De la physique poétique Après avoir observé quelle fut la sagesse des premiers hommes dans la logique, la morale, l’économie et la politique, passons au second rameau de l’arbre métaphysique, c’est-à-dire à la physique, et de là à la cosmographie, par laquelle nous parvenons à l’astronomie, pour traiter ensuite de la chronologie et de la géographie, qui en dérivent. […] De la physiologie poétique Les poètes théologiens, dans leur physique grossière, considérèrent dans l’homme deux idées métaphysiques, être, subsister. […] Leur esprit précisait, particularisait toujours, de sorte qu’à chaque changement dans la physionomie ils croyaient voir un nouveau visage, à chaque nouvelle passion un autre cœur, une autre âme ; de là ces expressions poétiques, commandées par une nécessité naturelle plus que par celle de la mesure, ora, vultus, animi, pectora, corda, employées pour leurs singuliers. […] Aristote part de ces mœurs héroïques, lorsqu’il veut dans sa Poétique, que le héros de la tragédie ne soit ni parfaitement bon, ni entièrement méchant, mais qu’il offre un mélange de grands vices et de grandes vertus.
Nous ne rassemblons pas ici le reste des refrains épars de ce peuple poétique, chants de guerre ou de fête, chants du marin ou du moissonneur ; mais, l’histoire ne peut oublier ce qui sert à l’expliquer et fit battre des cœurs généreux, même en les égarant. […] Enfin, à l’appui de ce doute, on rappelle quelques strophes, quelques images vraiment d’Anacréon, citées par d’anciens auteurs, et d’un tour bien autrement poétique et hardi que le recueil d’Henri Estienne, placé par Voltaire au-dessous des madrigaux et des chansons du marquis de Saint-Aulaire, N’exagérons rien, cependant. […] Mais tout cela, renommée vulgaire à part, nous laisse bien loin du charme poétique réveillé par le nom du vieillard de Téos. […] va dire à Lacédémone que nous sommes morts ici, en obéissant à ses lois. » Ailleurs c’est encore la même pensée, avec des formes plus poétiques, cette première résistance sur le seuil de la Grèce étant comme l’exemple toujours présent à la nation102 : « Ces hommes, en donnant à leur patrie une gloire ineffaçable, se sont plongés eux-mêmes dans la nuit du trépas ; mais dans la mort ils ne mouraient pas, puisque du séjour d’Adès leur vertu triomphante les ramène au grand jour. » Ou bien encore : « La terre glorieuse a couvert, ô Léonidas !
. — Couronne poétique de Béranger (Paris, 1828). — Le Peuple, ode (1830). — Nos adieux à la Chambre des députés de l’an 1830 ou Allez-vous-en, vieux mandataires, par le père Gérard, patriote de 1798, ancien décoré de la prise de la Bastille, couplets (1831). — Lénore, traduite de Bürger (1835). — Piquilo, opéra-comique, en collaboration avec M. […] Charles Asselineau Gérard avait des idées particulières sur la poétique. […] Il prétendait que l’assonance peut suppléer la rime — la rime surtout était un grand obstacle à la popularité des poésies, en ce qu’elle rendait le récit poétique lourd et ennuyeux.
D’où vient le degré de terreur poétique qui accompagne cet acte ? […] Qu’est-ce qui est saisissant et poétique dans ce drame ? […] tout leur charme poétique vient de leurs déguisements mêmes. […] Certes ce n’est pas à elle qu’on ménage les épithètes flatteuses et poétiques. […] Philine est poétique, Aurélie n’est tout au plus que romanesque.
La note chantante d’Alfred de Musset nous était si connue et si chère dès le premier jour, elle nous était allée si avant au cœur dans sa fraîcheur et sa verte nouveauté, il était tellement, avec plus de jeunesse, de la génération dont nous étions nous-même, génération alors toute poétique, toute vouée à sentir et à exprimer ! […] L’école poétique nouvelle avait été volontiers jusque-là religieuse, élevée, un peu solennelle, ou sentimentale et rêveuse ; elle se piquait d’être exacte et même scrupuleuse par la forme : il rompit d’emblée en visière à cette solennité ou à cette sensibilité, et se montra familier ou persifleur à l’excès ; il nargua le rythme et la rime ; il mit la poésie en déshabillé et fit Mardoche, suivi bientôt de Namouna. […] Le succès qu’obtint à la Comédie-Française cette jolie chose poétique prouva qu’il y avait lieu encore, dans le public, à de l’émotion littéraire délicate quand on la savait éveiller. […] Il a eu, il a dû avoir bien des fois le sentiment et comme l’agonie de sa défaillance devant l’idée de cette vérité supérieure, de cette beauté poétique plus sereine qu’il concevait et qu’il n’avait plus assez de force pour atteindre ni pour embrasser. […] … », ce son matinal du cor, et qu’on mette en regard cet admirable et affligeant sonnet final, toute la carrière poétique d’Alfred de Musset m’apparaît comprise entre deux : gloire et pardon !
Il est de ceux qui ont le plus vivement senti alors et embrassé avec le plus de conscience et de labeur l’œuvre d’une régénération poétique en France. […] Lefèvre ; car il y a dans ce livre autant de fonds et de précieuse matière poétique qu’en aucune publication, même célèbre, de ce temps-ci. […] Il avait débuté, comme on l’a dit, au premier rang et à la première heure de la jeune école poétique ; il en eut toutes les ambitions et tout le courage, et il semblait des mieux munis, par son érudition poétique étendue et forte, pour la lutte et pour la conquête. […] Son intime ami Émile Deschamps, à qui nous devons quelques-uns de ces détails particuliers, l’a défini ainsi, tel qu’il était dans son meilleur temps et dans la saison des espérances. « Génie poétique, cœur ingénu, ayant du bel esprit dans la région du sublime. »
Fernand Gregh qui, par ses beaux poèmes la Maison de l’Enfance et la Beauté de vivre, s’est placé au premier rang de la nouvelle génération poétique. […] Il considère l’humanisme comme une philosophie, voire une religion qu’il oppose au déisme, alors que c’est avant tout une esthétique, et même essentiellement une poétique. […] C’est pourquoi mainte théorie, qui n’était d’abord que poétique, a fini par résumer toute la pensée d’une époque : ainsi pour la Renaissance, ainsi pour le Romantisme. […] * * * Les deux dernières écoles poétiques qui aient fleuri en France sont le Parnasse et le Symbolisme. […] De poétique il est devenu scientifique.
Premières manifestations poétiques : Lamartine ; Vigny. […] Nous avons vu, en deux maîtres de la langue, en Rousseau et en Chateaubriand, ces deux grandes tendances se déterminer, et de l’un à l’autre, les facultés discursives, le raisonnement, les idées s’atténuer, l’émotion grandir et la puissance poétique. […] Mais il n’y avait pas d’école romantique : c’étaient deux manifestations isolées du génie poétique, et aucun des deux poètes, à cette heure, pas même Vigny, ne songeait à se poser en théoricien novateur ou révolté. […] Il entend la poésie de telle façon qu’il en élimine l’élément poétique. […] , p. 393, 824. « Vous appelez romantique ce qui est poétique.
Le génie poétique des autres peuples a rempli des saisons entières, créé des chefs-d’œuvre que les nôtres ont égalé mais n’ont pas toujours surpassé. […] Nous avons donc à nous près de quatre siècles de précellence poétique contre deux siècles appartenant à l’Italie, un à l’Angleterre, un demi-siècle à l’Allemagne. […] On s’est plaint très souvent des difficultés rebutantes de notre langue poétique, de l’indigence de nos ressources en fait de versification. […] Gaston Pâris dans son Histoire poétique de Charlemagne, est sortie de nos ébauches d’épopée. […] Quicherat où sont admises toutes les prétendues licences poétiques contraires à la pratique de tous nos bons écrivains en vers.
Quelle différence, en effet, entre les chevaliers si francs, si désintéressés, si humains, et des guerriers perfides, avares, cruels, insultant aux cadavres de leurs ennemis, poétiques, enfin, par leurs vices, comme les premiers le sont par leurs vertus ! […] Qu’un Canadien perce un chevreuil de ses flèches ; qu’il le dépouille au milieu des forêts ; qu’il étende la victime sur les charbons d’un chêne embrasé : tout est poétique dans ces mœurs. […] Or, le vrai et l’idéal sont les deux sources de l’intérêt poétique : le touchant et le merveilleux.
De la morale poétique, et de l’origine des vertus vulgaires qui résultèrent de l’institution de la religion et des mariages La métaphysique des philosophes commence par éclairer l’âme humaine, en y plaçant l’idée d’un Dieu, afin qu’ensuite la logique, la trouvant préparée à mieux distinguer ses idées, lui enseigne les méthodes de raisonnement, par le secours desquelles la morale purifie le cœur de l’homme. De même la métaphysique poétique des premiers humains les frappa d’abord par la crainte de Jupiter, dans lequel ils reconnurent le pouvoir de lancer la foudre, et terrassa leurs âmes aussi bien que leurs corps, par cette fiction effrayante. […] De cette logique conforme à leur nature sortit la morale poétique, qui d’abord les rendit pieux.
Presque tous les chefs-d’œuvre oratoires et poétiques du temps sont sortis de la petite école des adorateurs de l’antiquité. […] C’est contre Desmarets que Boileau, par une malheureuse application de sa doctrine, prohiba au troisième chant de son Art Poétique l’emploi de la religion chrétienne en poésie, et, juste au moment où Milton venait d’écrire son Paradis perdu (ce que, du reste, il ignorait), nia assurément la valeur poétique de Satan. […] C’était la Préface du Saint-Paulin (1680), où Charles Perrault saisissait l’Art poétique par son point faible, par l’étroite théorie du merveilleux païen.
Il en est de ces inexactitudes comme des licences poétiques ; dès qu’elles produisent un grand effet, elles cessent d’être des licences blâmables. […] Sans chercher à pénétrer les motifs de l’Auteur de l’Art Poétique, on pourroit assurer que ce Poëme cesse d’être complet, puisqu’il n’y dit rien de la Fable, genre le plus capable de faire honneur à notre Parnasse & à notre Langue. […] Poétique Françoise, Chap. […] Si Boileau n’a pas fait mention de Lafontaine dans son Art Poétique, il a beaucoup parlé de ce Poëte dans sa Dissertation sur Joconde, où il le propose comme un modele de naturel & de naïveté.
Cette forte éducation poétique va lui servir jusque dans ses heures de facilité. […] Cet essai, resté inachevé, inaugure parmi nous la série moderne des Méditations historiques et poétiques sur les ruines de l’antique Rome. […] Mais, après le piquant, revient le sensible, le vers ému et poétique. […] On y trouverait trois ou quatre très jolis et naïfs sonnets, mais, en général, c’est moins bien que Du Bellay ; c’est à la fois moins poétique et d’une langue beaucoup moins facile. […] Il y en avait dix qu’il avait débuté par sa fière et courageuse poétique de l’Illustration, et depuis lors, dans cette courte et rapide carrière, malgré bien des échecs et des mécomptes, il n’avait pas trop mal mérité de la poésie.
De là cette théorie de la tragédie, dans l’Art poétique, où tout est subordonné à la vraisemblance. […] De là l’importance attribuée dans l’Art poétique au métier, et l’abondance des préceptes de versification, de style et de composition. […] On sait combien il était sévère dans la pratique, et une bonne partie du premier chant de l’Art poétique est consacrée à formuler les lois principales de la versification. […] Et puis, ne conviendrons-nous pas qu’un héros poétique fait mieux de s’appeler Rodrigue que Manco-Capac ? […] Il eût suffi pourtant de se dire que l’idylle, l’élégie, l’ode, le sonnet, l’épigramme, le rondeau, le madrigal, la satire, la chanson, tous ces genres dont quelques-uns sont si minces, ne sauraient se concevoir séparés de la forme poétique.
Catulle Mendès est un des plus jeunes adeptes de la nouvelle école poétique. […] Pendant les dernières années de l’Empire, il a été le centre du seul groupe poétique qui ait poussé après la grande floraison de 1830. […] Je n’ai d’ailleurs pas à raconter ce mouvement poétique, qui a copié en petit et dans l’obscurité le large mouvement de 1830. […] Médée est d’une beauté poétique continue et harmonieuse. […] Mendès, qui a traduit les emportements et les désolations de l’enchanteresse légendaire en une langue poétique d’une réelle puissance et d’une richesse d’images infinie.
Voilà les fictions que les Grecs dégénérés faisaient succéder à leurs belles fables poétiques. […] C’est le caractère même de l’inspiration poétique : c’est la source de l’intérêt et de la variété. […] Satan est un des chefs-d’œuvre de l’invention poétique. […] Le jeune élève lisait aussi dans sa langue les versions poétiques d’Homère et d’Ovide. […] L’étude des modèles anglais et de la littérature latine se mêlait à ces jeux poétiques.
C’était évidemment là que l’Italie littéraire et poétique devait éclore, car l’esprit humain cherche par instinct les terres libres pour dérober, comme l’aigle, ses œufs à la tyrannie. […] Boileau n’en parle pas dans son Art poétique, ou, s’il en parle, dans le passage où il réprouve le merveilleux chrétien en poésie, c’est avec dédain. […] Il a communiqué au mètre français la vibration du mètre toscan ; il a transformé, à force d’art, la période poétique française en tercets du Dante. […] Le fleuve poétique remonte à sa source pour y retrouver ces eaux qui coulent des hauts lieux. […] Ce commentaire rend, en passant, à chacun ce qui lui appartient dans le trésor philosophique et poétique du Dante.
Art Poétique, p. 9. […] Art Poétique, p. […] Art Poétique, p. 62. […] Art Poétique, p. 25. […] Art Poétique, p. 132.
Passons maintenant à la poétique de madame de Staël. […] Voilà en peu de mots le secret et le résultat de la poétique de madame de Staël. […] Et que d’idées morales les anciens savaient attacher à ces emblèmes poétiques ! […] Ce n’est pas qu’il ne connût très bien la langue poétique. […] La langue poétique de Racine est plus correcte et plus pure : celle de Voltaire est plus vive et plus passionnée.
Nous voici parvenus à la sommité poétique des temps modernes. […] C’est au génie à les résoudre, non aux poétiques à les éluder. […] Mettons le marteau dans les théories, les poétiques et les systèmes. […] Du reste, ces règles-là ne s’écrivent pas dans les poétiques. […] Ensuite, ne vaudrait-il pas toujours mieux faire des poétiques d’après une poésie, que de la poésie d’après une poétique ?
Rien ne montre mieux l’horizon poétique ouvert de toutes parts au poëte thébain, et les feux de génie qui sillonnaient le ciel de la Grèce. […] Après Sophocle, et au-dessous de lui, la lyre d’Euripide vint tour à tour se mêler au drame par la passion, et reposer un peu les âmes par le charme pur de la mélodie poétique. […] Quel intérêt n’aurait pas pour nous, postérité lointaine, un témoignage décerné à l’historien Hérodote par ce même Sophocle, dont Thucydide a cité le nom dans les incidents de la guerre du Péloponèse, sans paraître même penser à son génie poétique ! […] Le vers familier du dialogue suffit à son élan poétique. […] Et c’était le Chœur des Bacchantes d’Euripide qui, dans le palais de Sapor, devait un jour mêler une sorte de délire poétique à la joie des barbares vainqueurs d’une armée romaine.
On croirait entendre un de ces myriologues où se plaisait le poétique génie de la Grèce, mais que la mâle douleur d’un guerrier et d’un ami empreint cette fois d’un pathétique plus attendrissant que les larmes. […] Mais la science ne donne pas l’accent poétique. […] Ce titre poétique d’Abélard s’est perdu dans ses querelles, ses malheurs et sa pénitence. […] Et cette forme de tercets rimés continue, sauf quelques interruptions, à reproduire en foule les images que la foi rendait vulgaires sans les rendre moins poétiques. […] Quelques-unes des plus grandes beautés éparses dans la Divine Comédie sont empruntées à ce caractère militant de l’enthousiasme poétique.
Elles imposent des formes fixes, rigides, immuables, à la matière dramatique ou poétique, et nul n’a droit de s’affranchir des procédés connus, de renoncer aux moules usés, aux répliques sans fin des mêmes modèles : le monde a adopté les règles et en fait une partie intégrante de ses convenances. […] Voltaire mort et devenu l’intangible idéal, l’abbé Delille représenta la plus haute forme du génie poétique que le public fût capable de concevoir. […] Il nous fait rire quand il nous parle des « jeux de tonnerre », unis aux « jeux de flûte » dans son « clavecin poétique », ou de « ce je ne sais quoi d’indompté » qui soulève son âme honnête : il ne se flattait pas pourtant ; mais il ne s’est pas répandu dans son œuvre. […] Juliette et son Roméo sont un couple quelconque, des amis d’enfance ; Roméo élevé près de Juliette sous un faux nom : et quand nous le voyons, le doux, le tendre, le poétique enfant de Shakespeare est un « guerrier redoutable », un général vainqueur, enfin l’insipide héros cent fois revu. […] Selon la poétique établie depuis Crébillon, Malcolm, fils de Duncan, est cru fils d’un simple montagnard.
Tout ce que je voudrais, à propos de ce souvenir, de cette carte de visite poétique adressée à quelques amis et à un petit nombre de lecteurs d’élite, ce serait de marquer dans la littérature contemporaine la place d’un poète auquel il me semble qu’on n’a pas jusqu’ici rendu pleine justice. […] Il est retourné aux moyens anciens d’expression poétique, les trouvant sans doute tout à fait suffisants et parfaitement adaptés à son but. […] Ces Idylles prussiennes, sur lesquelles je veux particulièrement insister, ne sont pas seulement les plus belles poésies du volume, mais elles portent avec elles un caractère de nouveauté si peu attendu et si étonnant, qu’en vérité on peut tout croire de la puissance d’un poète qui, après trente ans de la vie poétique de la plus stricte unité, apparaît poète tout à coup dans un tout autre ordre de sentiments et d’idées, — et poète, comme certainement jusque-là il ne l’avait jamais été ! […] Gabriel Mourey M. de Banville — cette perruque chauve — tient un cours de cuisine poétique. […] L’art poétique, universel, idéal, qu’il grava sur les tables de marbre de son temple à Théophile Gautier, peut être considéré comme une manifestation essentielle du génie de Banville.
Sous la Restauration, on se figurait beaucoup trop l’Allemagne littéraire et poétique soumise sans contestation aux pieds de Goethe, l’Allemagne philosophique obéissant de plein gré aux formules de Kant ou de Hégel, l’Allemagne politique sans velléité ni chance de se déclarer. […] Le cant doctrinaire qui menaçait d’envelopper une portion de la jeunesse ; qui faisait fi de tout ce qui sortait du diapason magistral, de tout ce qui était vif, pétulant, spontané, passionné, poétique, et, comme on disait, jacobin ; le cant doctrinaire, si opposé au génie net, actif, entreprenant et accommodant de la France, a cessé de peser sur la société ; ce que les hommes de ce bord ont gagné en pouvoir matériel et temporaire, ils l’ont à jamais perdu en autorité morale. […] Béranger, dans la préface de ses dernières chansons, a montré à merveille comment on pouvait condenser le plus de comparaisons et d’images poétiques, sans cesser un seul instant d’être limpide, facile et logique. […] Il l’avait vu dans les luttes convulsives de tribune ; sa corde poétique avait vibré, et il s’exagère cet homme, comme cela était tout simple sous l’impression du moment.
À la lire, en beaucoup de ses écrits (particulièrement en ses Souvenirs et Impressions littéraires), elle s’est dite ignorante, inconsciente, spontanée, une pauvre tête poétique, quoiqu’elle ne soit pas aussi poétique qu’elle le dit, la rusée ! […] Cette publication, après nous avoir découvert dans le grand Écrivain, comme ses amis l’appellent encore, le prosaïsme fondamental sous la poésie de la surface le sans esprit absolu, la nullité ou la médiocrité des aperçus, le commun insupportable de ces lettres qui tuent le poète plus ou moins artificiel qui est dans ses ouvrages, mais qui ne sort jamais ni du fond de l’âme ni du fond de la vie, cette publication met à bas, tout à coup et du même coup, le masque poétique et grandiose que Madame Sand s’était composé et sous lequel on la voyait, fantaisie errante et féconde, imagination désintéressée ! […] Encore une fois, l’auteur connu, dans Madame Sand, mais l’auteur sans nouveauté d’idées, de verve et d’accent, et la femme peu connue, l’épistolière, donnant à l’auteur un dessous de langage abominablement commun et des métaphores de domestique indiquant l’habitude d’une âme évidemment moins haute, moins désintéressée et moins poétique que celle-là qu’elle affecte d’avoir quand elle parle d’elle, voilà, résumé en quelques mots, ce qu’on trouve en cette Correspondance, qui fera perdre à Madame Sand ses derniers amis et ses derniers admirateurs.
Burnouf, lequel y verrait un essai d’acclimatation en français d’une foule d’expressions plus ou moins obscures, et dont, pour l’honneur de la couleur locale, si importante aux yeux des costumiers poétiques, toute cette poésie est émaillée. […] Et c’est là, sans plus, ce qu’est M. le Conte de L’Isle, le poète de Midi, d’Hélios, des Éléphants et de tant d’autres pièces plus plastiques que poétiques et qu’on peut admirer dans le recueil d’aujourd’hui ; il n’y a là certainement qu’un descriptif ! […] On juge, à le voir rouler en se débattant dans cette vacuité de pensées, dans ce vortex du rien où il meurt, de la solidité d’articulations qui était en lui et qui eût pu l’élever dans l’éther du ciel poétique, s’il avait eu seulement un peu d’âme, — un peu d’âme qui est l’haleine du poète et qui lui permet de monter haut ! […] Seulement, qu’il nous croie ou non, les laborieux décalques de la peinture sont un travail poétique inférieur.
— pour s’enrégimenter parmi les travailleurs en poésie, parmi les hommes de la bagatelle poétique qui décrivent pour décrire, et font des vers… pour faire des vers. […] Paul Bourget ne semble pas fait pour jouer aux petites difficultés vaincues du sonnet, à ce sertissage du bijou ou du joujou poétique. […] Paul Bourget n’en restera pas moins Byronien de religion poétique, il ne changera pas l’âme qu’il a et ne se laissera pas étouffer dans d’ineptes systèmes et des poétiques de perdition.
Marmier, Xavier (1808-1892) [Bibliographie] Esquisses poétiques (1831). — Poésies d’un voyageur (1834-1878). […] Marmier a publié deux volumes de vers : Esquisses poétiques (1831) et Poésies d’un voyageur (1834-1878).
Dans les trouvères la finesse naïve du récit tient la place du talent poétique. […] Cette fanfare poétique que vous venez d’entendre, c’est de la banlieue de Limoges qu’elle vient. […] La Bible, dans sa partie humaine et poétique, la Bible, lorsqu’elle n’est que sublime, est arabe. […] Le souvenir des croisades a particulièrement répandu sur lui cet intérêt poétique. […] Ce far-niente poétique était bien loin.
Sans doute, tu lui dis… Ce « sans doute tu lui dis » est Augier tout entier dans un seul mot et donne, sans plus nous faire attendre, une idée de son tour poétique et des ressources de la langue qu’il parle. […] Pas plus que l’auteur des Contes d’Italie, de Namouna et de Mardoche, il ne se soucie de la moralité poétique ou humaine ; mais, au sein de la débauche que sa muse (une sous-lorette !) […] IV Cette imitation des deux à trois grands poètes du siècle, qui résume, en ces derniers temps, le stérile mouvement des imaginations poétiques, Reboul, plus que personne peut-être, était né pour y échapper. […] L’imitation fatale ou libre, mais l’imitation, qui est la débilité de l’esprit poétique, et pourtant une des qualités de sa faiblesse, place ce volume à côté de ceux d’Émile Augier et de Louis Bouilhet, et ce qui l’en sépare n’est que la différence des poètes qu’ils imitent.
Il y a poète dans ce livre… Du fond de ces impressions qui déteignent sur toute vie et sur toute pensée à leur aurore, du fond de toutes ces remembrances dont nous sommes les échos dans notre jeunesse, du fond de toutes les éducations poétiques, mortelles parfois à la poésie, comme bien souvent les femmes sont mortelles à notre faculté d’aimer, nous voyons briller la divine étincelle, qui dague le regard comme une pointe de diamant ou d’étoile. […] … Il devait y croire, en se regardant… Du reste, je l’ai dit aux premières lignes de ce chapitre, Maurice Bouchor est trop près des premières impressions de son éducation poétique pour avoir pu s’en abstraire et les effacer entièrement de sa pensée. […] Anglais de mœurs poétiques, Maurice Bouchor est un shakespearien d’une telle préoccupation qu’il a coupé son poème en vers par des couplets en prose, comme le fait quelquefois Shakespeare dans ses drames, ce que j’ose blâmer, même en Shakespeare ; car ce que je respecte plus encore que Shakespeare lui-même, c’est la beauté dans les œuvres et leur unité, sans laquelle la beauté n’est pas ! Mais ces défauts, que j’explique, et que le devoir de la Critique était de signaler, n’empêcheront pas l’œuvre actuelle de Bouchor d’être ce qu’elle est, c’est à dire quelque chose d’un accent formidable, qui retentira dans le cœur de tous les nobles êtres qui ont encore le cœur poétique.
On sortait, si on se le rappelle, de l’époque où les Méditations de M. de Lamartine et ses Harmonies, d’une valeur poétique bien autrement supérieure, étalaient à la sensibilité publique un christianisme faux et souffrant, mais n’en tenaient pas moins leurs beautés, quand il y en avait, de cette inspiration chrétienne, toute faussée et souffrante qu’elle pût être. […] Excepté l’enjambement renouvelé de Ronsard, des vieux tours duquel on avait tiré une poétique, on ne trouvait pas dans le livre de M. […] Siméon Pécontal, avec le don de simplicité qui est le plus précieux caractère de son talent et cette fraîcheur d’âme dont, à plusieurs places de son Volberg, on avait vu resplendir les teintes frissonnantes et nacrées, devait préférer la ballade à toutes les autres formes de la pensée poétique. […] Pécontal possède plus que personne, mais auxquelles l’esprit de notre époque préfère le rythme, tourmenté, poli, aiguisé, affiné, savant enfin et si souvent vide ; le rythme, dernière expression de la beauté poétique, et que l’Imagination dégoûtée finira par rejeter, pour sa peine d’avoir rejeté l’âme, — comme le roi de Thulé jeta à la mer sa coupe épuisée, quand ses yeux mourants n’eurent plus de larmes pour la remplir !
Les mœurs devenant moins farouches avec le temps, les violences particulières commençant à être réprimées par les lois judiciaires, enfin la réunion des forces particulières ayant formé la force publique, les premiers peuples, par un effet de l’instinct poétique que leur avait donné la nature, durent imiter cette force réelle par laquelle ils avaient auparavant défendu leurs droits. […] Ceci dérive des principes de notre poétique. Les fondateurs du droit romain ne pouvant s’élever encore par l’abstraction aux idées générales, créèrent pour y suppléer des caractères poétiques, par lesquels ils désignaient les genres. […] Les hommes étant alors naturellement poètes, la première jurisprudence fut toute poétique ; par une suite de fictions, elle supposait que ce qui n’était pas fait l’était déjà, que ce qui était né, était à naître, que le mort était vivant, et vice versa.
Même, il t’apparaîtra comme seyant bien à un recueil de poétiques essais. […] On sent qu’il va s’agir pour eux de justifier à la fois les poétiques les plus dissemblables. […] Il défend l’idée d’un Racine dont le génie aurait été poétique plutôt que proprement dramatique. […] Allusion au Rythme poétique : voir supra, note 75. […] Évoqué en tant que dramaturge par Ghéon dans ses « Notes sur le drame poétique » : voir note 21.
Il rédigea ensuite une sorte de traité de critique et de poétique à son intention. […] Eckermann avait commencé d’instinct par être dessinateur ; l’étude des modèles lui avait fait défaut ; mais sa vocation première est ici justifiée : on voit qu’il avait le sentiment du naturel et de la vérité. — Et encore dans des tons toujours naïfs, mais avec des couleurs plus poétiques et plus idéalisées, il dira : « Sa conversation était variée comme ses œuvres. […] Dans une visite que tous deux font à Iéna, il lui parle longuement (18 septembre 1823) de ses idées en poésie, et cet entretien qui nous est conservé forme un des chapitres principaux de la poétique de Gœthe : « Il me demanda si j’avais, cet été, écrit des poésies : c’est ainsi que l’entretien commença. […] Combien d’esprits et de talents poétiques, dans le temps de la vogue des tragédies ou des poëmes descriptifs, s’y sont épuisés, qui auraient pu toucher ou plaire dans des genres moindres et plus vrais ! […] Un sujet particulier prend un caractère général et poétique, précisément parce qu’il est traité par un poëte.
Jean Polonius chante, comme un naturel, dans la dernière langue poétique courante, qui était alors celle de Lamartine ; mais il ne la refrappe pas pour son compte, il ne la réinvente pas. […] Ses Préludes poétiques, publiés en 1827 comme le ballon d’essai d’une Académie provinciale qui protestait contre la centralisation de Paris, n’attirèrent que très-peu l’attention et ne pouvaient la fixer. […] Cousin en fait grand cas, et, en effet, Loyson a le mérite d’avoir, sans appareil d’érudition ni, comme on dit, d’esthétique, démêlé la poétique de Pindare et compris l’espèce d’unité vivante qui animait ses odes. […] La plus remarquable de ces pièces est (tome II, page 51) l’élégie imitée de l’allemand de Grillpanzer, l’Enfant heureux, dont l’idée refleurie avec grâce a fait depuis le plus frais bouton d’or de la couronne poétique de Reboul. […] Sous ce titre : Empédocle, vision poétique, suivie d’autres poésies.
Rességuier, Jules de (1788-1862) [Bibliographie] Tableaux poétiques (1828-1829). — Almaria (1835). — Les Prismes poétiques (1838). — Dernières poésies (1864).
Lysidas a, comme moi, le plus profond respect pour l’antiquité, surtout pour son plus grand philosophe, l’auteur de cette vénérable Poétique. […] Boileau s’étonne que l’on ose combattre les règles de son Art poétique, après qu’il a déclaré que c’était une traduction de celui d’Horace. […] Dans l’Art Poétique. […] Poétique, § 26. […] Poétique, § 26.
[Bibliographie] Œuvres poétiques, publication posthume (1834). […] [Souvenirs poétiques de l’école romantique (1880).]
Ce précepte poétique est aujourd’hui généralement méconnu. […] Sans le talent singulier de Prévost, elle cesserait d’être poétique et ne serait plus qu’un vice. […] Nulle forme poétique n’est donc plus voisine de la vérité que la forme lyrique. […] Aussi le mérite poétique de Notre-Dame de Paris est-il remis en question. […] Ponsard ; son talent poétique n’est pas remis en question.
Il est vrai que voilà bien des années déjà qu’il ne s’est point produit d’œuvre poétique qui ait appelé à un haut degré l’attention du grand public et qui lui ait fait saluer une jeune gloire. […] En un mot, ce n’est pas la matière de la poésie qui manque, ce n’est pas le sentiment poétique ; c’est plutôt la forme et le glorieux accident. […] C’est ainsi (autant que je l’imagine), que sa propre douleur trop morne et trop tristement monotone s’est transformée et colorée comme à travers un prisme en une variété de douleurs poétiques passionnées et touchantes.
Il appartenait, par bien des côtés, à l’ancienne école poétique en même temps qu’il avait un pied dans la nouvelle. Ce n’est pas pour rien qu’il s’appelait Évariste : il tenait de Parny, son parrain poétique, plus que d’Alfred de Musset.
Les connaisseurs faisaient une différence extrême de cette langue poétique de Parny d’avec celle des autres poètes du temps, les Bouliers, les Pezai, les Dorat ; c’eût été une grossièreté alors de les confondre. […] Parny est moins violent et plus simplement amoureux ; il est amoureux d’une personne, nullement d’un prétexte et d’une chose poétique. […] J’en dirai autant de Ma retraite ; on sent ce qui fait défaut à l’aimable poète : il a plus de sentiment que d’imagination, que d’étude et de science pittoresque, que de style et d’art poétique. […] La langue poétique elle-même avait besoin alors d’être refrappée, d’être retrempée ; elle est fluette, mince et atteinte de sécheresse. […] Le vent tourna, l’opinion revint, Parny fut maintenu avec honneur à son rang sur la liste de nos autorités poétiques, et c’est M. de Montahmbert qui en est cause.
Enfin il avait paru au milieu de l’été, entre les chants des rossignols et la plus grande splendeur de la nature épanouie. » La timidité même de notre goût moderne découvre quel trésor d’harmonie, quel éclat d’images, quel renouvellement de la liturgie poétique cette fiction devait amener, sous les mètres nombreux et souples de la muse éolienne. […] Mais cette gloire poétique n’est plus qu’un symbole ; il ne reste de ce génie que quelques lettres éparses de l’inscription brisée sur son tombeau perdu. […] À part deux comédies, sous le titre de Phaon, l’une de Platon le poëte, l’autre d’Antiphane ; il part une comédie, la Leucadienne, par Ménandre, et une pièce d’Antiphane, le Leucadien, on joua dans Athènes six comédies de différents auteurs, portant toutes le titre de Sapho, et pleines d’allusions à sa gloire poétique et aux événements fabuleux ou vrais de sa vie. […] L’ayant achetée de son maître, il l’aurait follement épousée, malgré les éloquents et poétiques reproches dont Sapho avait flétri cette faiblesse, qu’elle se promettait sans doute alors de ne pas imiter. […] Deux vers isolés cependant offrent peut-être la trace, non d’une fiction poétique, mais d’un tourment réel : « Ma douce mère, je ne puis tisser ma toile, toute vaincue que je suis par la pensée de ce jeune homme, grâce à l’entraînante Aphrodite. » D’autres fragments bien courts, et par lit d’un sens douteux, pourront faire croire que Sapho vit le mariage de sa fille chérie, et chanta pour elle : « Heureux gendre, l’union que tu souhaitais s’est accomplie, tu as la vierge que tu aimais !
En recueillant ces précieux débris des âges antiques, on conçoit mieux comment, avec la subtilité des systèmes, l’émotion poétique arrivait à Lucrèce. […] Il faut que tu apprennes à connaître toutes choses et le fond réel de la vérité persuasive, et les opinions des mortels qui reposent non sur une foi véridique, mais sur l’erreur ; et tu connaîtras ainsi, comment il faut marcher prudemment à travers le tout, en faisant l’épreuve de toute chose. » En tête de cette philosophie poétique dont la Grèce allait recueillir les leçons, il reste à placer le personnage demi-fabuleux de Pythagore. […] Séparé de Pythagore à peine par un demi-siècle, Eschyle reçut cette doctrine de ses premiers disciples ; et sans doute il avait pratiqué comme eux cette vie pure, solitaire, rigoureuse, si favorable à la force d’âme et à l’imagination poétique. […] Pindare allait être le chantre inspiré de cette philosophie pythagoricienne, la plus pure doctrine de l’antiquité avant Platon, spiritualiste jusqu’à l’erreur de la métempsycose, morale jusqu’aux plus sévères abstinences, poétique et lyrique, pour prendre plus d’empire sur les âmes, et les épurer par l’enthousiasme. […] Sa peinture des grossiers essais de formation échappés aux seules forces de la nature était le démenti d’une semblable origine pour l’homme ; et on peut supposer que c’est contre une telle erreur qu’il proteste dans un des plus poétiques débris qui nous restent de ses vers : « Mais, ô dieux92, écartez de ma langue la folie de ces hommes, et faites sortir pour moi de quelques bouches saintes des eaux salutaires.
Son titre primitif, quand il fut commencé à Londres en 1799, était d’ailleurs moins poétique, mais plus explicite : des Beautés poétiques et morales de la Religion chrétienne et de sa supériorité sur tous les autres cultes de la terre. […] L’oreille poétique de Chénier est toujours aussi insatisfaite, aussi chercheuse que le crayon de David : sensuelle comme une main de peintre. […] Elle n’a pas déclenché de mouvement poétique. […] Cet ennemi de Napoléon a été le Napoléon d’un impérialisme poétique. […] Mais par la multiplication poétique, par l’espace où il s’accroît en progression géométrique, le thème devient mythe.
— Œuvres poétiques (1837). […] [Souvenirs poétiques de l’école romantique (1880).]
La Bibliotheque poétique, le choix de Poésies morales, les Passe-temps poétiques, historiques & critiques, sont des Compilations qui font honneur à son goût & à ses mœurs.
Selon l’auteur, l’exactitude classique & littérale, ne sert qu’à rabaisser l’essor poétique. […] Ses satyres, ainsi que ses épîtres, sont écrites dans une espêce de prose cadencée & dépouillée de tout l’éclat de l’harmonie poétique. […] Dans tous ses écrits il inspire à ses lecteurs le goût du beau, du simple & du naturel ; dans son Art Poétique, il donne des leçons pour avoir ce goût. […] La traduction, dont j’ai conféré beaucoup d’endroits avec le texte, est exacte, littérale, précise, poétique, & n’en est que plus agréable, sans être moins pure. […] La sécheresse des préceptes disparoît sous le coloris du pinceau poétique.
Substituez alors (la ressource est aisée) Au rhythme poétique une prose brisée. […] L’Art poétique de Boileau, bien autrement poétique par l’exécution que par les préceptes ; les préceptes et la pratique courante de Voltaire, à force de soumettre la poésie à la même raison que la prose et au pur bon sens, allaient à remplacer l’inspiration et l’expression poétique par ce qui n’en doit être que la garantie et la limite. On s’est jeté aujourd’hui dans un excès tout contraire, et l’image tient le dé du style poétique, comme c’était la raison précédemment. […] » Contraste à relever entre ce feu poétique ardent et ce que de loin on s’est figuré de la veine pure et un peu froide de Fontanes ! […] Les petites pièces délicieuses, à la façon d’Horace, nous semblent le plus précieux, le plus sûr de l’héritage poétique de Fontanes.
Chateaubriand (suite) LX Après Atala, il publia dans le Génie du Christianisme le court épisode romanesque, poétique et religieux de René. […] C’était bien le sujet de poëme le plus poétique qu’on pût présenter aux hommes. […] On s’étonnait qu’un si vaste résultat fût produit par une si mince machine poétique, et que le prophète du dix-huitième siècle n’eût pas inventé pour changer le monde quelque chose de plus neuf et de plus grand que la rêverie d’un enfant de chœur, en l’honneur de la croix de son Dieu, au bruit des cantiques sacrés et au parfum de l’encens évaporé du saint sacrifice. […] Avec quelle sainte et poétique horreur j’errais dans ces vastes édifices consacrés par les arts à la Religion ! […] Ce tableau d’assez poétique intention, mais d’exécution médiocre, représentait une vierge en tunique blanche qu’on vient chercher dans son sépulcre ; mais, à la place de la morte, on ne trouve qu’un lit de fleurs dont les gerbes fraîchement nées semblent répandre dans le cercueil merveilleux des parfums et des ivresses du ciel.
Comparez une simple description poétique, quelque belle qu’elle soit, à une belle pièce inspirée par une idée ou par un sentiment vraiment élevé et philosophique : à mérite égal du poète, les vers purement descriptifs seront toujours inférieurs. […] La science et surtout la philosophie demeureront donc toujours poétiques, d’abord par le sentiment des grandes choses connues, des grands horizons ouverts, puis par le pressentiment des choses plus grandes encore qui restent inconnues, des horizons infinis qui ne laissent entrevoir que leurs commencements dans une demi-obscurité. […] Mais c’est surtout dans la philosophie qu’il y a un fond toujours poétique, précisément parce qu’il demeure toujours insaisissable à la science : le mystère éternel et universel, qui reparaît toujours à la fin, enveloppant notre petite lumière de sa nuit. […] Il importe de montrer cette sorte d’évolution, en ce moment de décadence poétique où l’on ne s’attache guère qu’aux jeux de la forme. […] Ainsi en arrive-t-il pour Lamartine : quoique le sentiment soit vrai, trop souvent la pensée philosophique et religieuse, au lieu de projeter spontanément son expression vivante, est « traduite en vers », — en vers heureux, faciles, abondants, poétiques, mais qui n’en sont pas moins des traductions et des tours d’adresse84.
. — Études poétiques du cœur humain (1839). — Esquisse de la souffrance morale, 2 vol […] (1836). — Esquisses poétiques de la vie (1841). — Harmonie de l’intelligence humaine (1845).
Espoir et vœu du mouvement littéraire et poétique après la Révolution de 183025. […] Nous n’essaierons pas ici d’aborder ces mystères d’avenir dans toute leur vague étendue, nous y reviendrons souvent par quelques points ; aujourd’hui, nous bornant à ce qui concerne le mouvement littéraire et poétique proprement dit, nous tâcherons de montrer dans quel sens nous concevons le changement inévitable que l’art va subir et pour lequel il est mûr. On saisira en quels termes nouveaux nous pensons que la question poétique et littéraire doit se poser pour l’artiste aussi bien que pour le critique. […] Il fut donc populaire jusqu’à un certain point, populaire dans les châteaux, dans le clergé, au sein des familles pieuses ; sa renommée considérable tenait beaucoup à l’espèce de religion sentimentale et poétique qu’il célébrait avec génie, à l’opposition courageuse dont on lui savait gré, à la défaveur impériale qu’il avait osé encourir.
il nous en a assez coûté pour découronner cette Aimée au teint de topaze du poétique bandeau que l’imagination roule autour de sa tête avec les plis du cachemire… Les choses pittoresques et aimées du regard, les choses lointaines et naturelles ont tant de force et de prestige ! […] Encore une fois, nous le répétons, on peut passer beaucoup à un traducteur, comme à un voyageur qui revient de fort loin, mais il est des bornes pourtant à l’affirmation et à l’enthousiasme, surtout quand le traducteur est un homme de science et d’esprit qui, s’il ne s’agissait pas de son fétiche hindou, aurait le sentiment des choses poétiques tout aussi sûr et aussi net que nous qui le jugeons. […] On sent bien en elle quelque chose de dépaysé, d’étranger, quelque chose qui n’est pas de l’Inde, mais qui sert à faire mieux comprendre que sans remonter jusqu’aux chefs-d’œuvre enfantés par la civilisation chrétienne, le premier poème venu de nos climats, imprégné de Christianisme, la première vie des Saints de nos plus humbles légendes, sont plus purement et plus profondément poétiques que tous les épisodes mis ensemble de la singulière épopée que l’on nous donne pour la gloire de l’esprit humain ! […] En imagination, en invention poétique, comme en raison, en aperçus, en déductions, le génie oriental arrive au nihilisme de tous les côtés à la fois, et le ballon de la supériorité indienne crève enfin jusque sous les lèvres qui avaient le plus d’intérêt à le gonfler !
C’est le manque de poétique, d’une poétique qui serait une méthode, et qui ne peut pas être cette chose emphatiquement vague, tout au plus bonne comme tendance, mais, comme portée, nulle : l’aspiration vers le beau dans l’indépendance de la pensée ! […] Cantel n’en est pas à son premier mot poétique, il a déjà publié un volume ; mais il n’en débute pas moins encore, dans un sens plus profond que celui qu’entend le public, car il cherche, avec les souples articulations d’un talent qui doit grandir, une forme arrêtée, une manière définitive. […] Le paganisme, comme symbolisme poétique, est présentement une de ces sources qui pétrifient ce qu’on y plonge.
Évidemment, l’esprit de l’auteur était hanté par les beaux sujets poétiques, et c’était là une supériorité dans ce temps. […] … Toute l’œuvre poétique de M. […] ajustant le mieux qu’il peut les incorrections d’un style poétique sans puissance à une pensée dont nous ne contestons pas la moralité, mais dont nous contestons la grandeur. […] Autran aux mérites poétiques du xixe siècle, et dénombrait pompeusement les genres de vers que le xixe siècle avait inventés, à peu près, il est vrai, comme M.
Lamartine est le Virgile de la civilisation chrétienne par la profondeur des sentiments, et c’est un Virgile d’une bien autre force poétique par les facultés. […] Sur elles seules, sur les Harmonies seules, quand il n’eût pas fait d’autres œuvres, on pourrait le juger sans qu’il perdît rien de sa toute-puissance poétique, montrée pourtant avec tant de profusion et de munificence ailleurs. […] On ne s’étonne plus de la grâce de bucolique qui, partout, dans ses œuvres poétiques, se mêle sans cesse au lyrisme grandiose de Lamartine, quand on voit de quel nid était sorti le rossignol qui chantait inextinguiblement en lui, quand l’aigle, qui y était aussi, ne criait pas… La première impression que reçut son génie, cette première impression dont nous restons marqués à jamais, fut l’impression de la maison de son père, où il était né parmi les pasteurs, comme Virgile, et les vendangeurs du Mâconnais. […] Héroïque et poétique à la fois, on aurait dit qu’il ignorait son héroïsme et sa poésie ; on aurait dit que la poésie, quelle que fût la forme qu’elle prît en lui, était si profonde qu’il n’en avait plus la conscience.
Déclin de l’imagination poétique, sous l’empire d’Alexandre. — Grandeur qui reste encore à l’esprit grec. — Lyrisme philosophique. […] Mais les mœurs poétiques de la Grèce, sa passion des lettres et de l’éloquence, la variété croissante de son génie, durèrent plus d’un siècle après lui. Platon, dont le génie s’essaya dans des dithyrambes avant d’avoir entendu Socrate, gardait évidemment plus d’un souvenir de la poésie dorienne de Pindare ; et, alors même qu’il eut renoncé à cette ambition poétique de sa jeunesse et jeté au feu ses premiers vers, il en retint cette inspiration lyrique dont il a parfois animé les débuts ou les épilogues de ses entretiens philosophiques. […] Lui-même cultivait parfois, sous la forme la plus sévère, cet art poétique dont il a donné les lois.
Remond de Saint-Mard a composé aussi une Poétique, mais une de ces Poétiques arbitraires, qui, dérogeant aux vrais principes, ne laissent voir que les idées de l'Auteur, contre lesquelles le bon goût doit se tenir sagement en garde.
Latouche s’est rendu célèbre dans la littérature d’il y a quinze ou vingt ans par une foule de traits pareils, malicieux et même (quelques-uns disent) méchants : il a drapé les ridicules de la jeune École d’alors dans un article critique, intitulé la Camaraderie ; mais il a oublié de dire que ces ridicules de coquetterie et de cajolerie poétique, il les avait autant que personne partagés, caressés, — sauf à les dénoncer ensuite avec esprit, avec fiel aussi et âcreté. […] Ce sont d’humbles post-scriptum à ce qu’on imprime à Paris. — Jules Lefèvre est un poëte qui mérite des égards, de la considération : il a quelque chose d’élevé, le culte de la muse et des nobles sentiments ; mais on n’a jamais rien vu de plus fatigué ni de plus manqué en général que ses efforts poétiques. […] — Un autre poëte, moins docte, plus facile et souvent aimable, Ulric Guttinguer, connu de nous pour avoir chanté autrefois notre lac, et qui vient aussi de rassembler ses vers en un seul volume sous ce titre : Les Deux Ages, cite, dans sa préface que nous avons sous les yeux, un passage de Jules Lefèvre, en l’accompagnant d’éloges qui prouvent au moins que tout n’est pas épine dans le sentier : il accorde sans hésiter à son confrère non-seulement la conscience poétique noble et puissante (ce qui n’est que juste), mais encore le génie intime et pénétrant. — Nous ne nous chargeons que de noter en courant : les Aristarques de l’avenir décideront.
Éphémérides poétiques, 1891-1900 1891 — Théodore de Banville : Occidentales. […] Robert de Souza : Le Rythme poétique. […] Paul Souchon : Elévations poétiques.
Or, nos générations, à nous, romanesques et poétiques, n’ont guère eu pour mot d’ordre que la fantaisie. […] Jusqu’alors il avait été plutôt timide et d’une allure toute poétique ; il commença de s’émanciper, et ces vives années de son adolescence purent paraître très-dissipées et très-oisives. […] On aurait à multiplier les remarques de ce genre à propos de la critique de notre ingénieux et poétique érudit. […] Jean Sbogar et Smarra, et Mademoiselle de Marsan, furent, dès cette époque, ses secrètes et poétiques Conquêtes. […] Voici une pièce de lui peu connue, et qui n’a pas été insérée dans son volume de vers : c’est une petite Poétique, telle, ce me semble, qu’à deux ou trois mots près l’aurait pu signer La Fontaine.
La langue poétique et la langue oratoire de la France se trouvaient précisément à ce confluent des différents ruisseaux des idiomes où le génie des langues, un moment indécis, s’arrête comme embarrassé de ses richesses, tente différentes voies, puis, prenant tout à coup son parti décisif, forme ce grand courant original de la langue nationale, qui entraîne tout en purifiant tout dans son cours. […] C’est cette heureuse coïncidence de bonnes fortunes littéraires qui vit et qui fit naître Racine, c’est-à-dire la perfection incarnée de la langue poétique en France ! […] Ainsi, au moment dont nous vous entretenons, la monarchie s’était faite homme dans Louis XIV, la Bible s’était faite homme dans Bossuet, l’Évangile s’était fait homme dans Fénelon, la comédie s’était faite homme dans Molière, la langue poétique moderne s’était faite homme dans Racine. […] Mais le souffle de l’éloquence, qui vient du caractère et du cœur, ne soulevait pas aussi énergiquement cette poitrine que le souffle poétique qui vient de l’imagination. […] Ces deux mauvais vers de son Art poétique étaient toute sa théorie ; toute nouveauté semblait sacrilège à cet esprit timide et étroit qui n’avait foi que dans la routine.
Penquer, Mme = Salaün-Penquer, Léocadie (1817-1889) [Bibliographie] Les Révélations poétiques (1865). […] Sainte-Beuve De vous je ne parlerai non plus, harmonieux poète de la vie domestique et des joies du Foyer (les Chants du foyer), Madame Auguste Penquer, qui avez, depuis, étendu votre vol et enhardi votre essor dans les Révélations poétiques (1865) ; âme et lyre également bien douées, à la note large et pleine, aux cordes sensibles et nombreuses ; que rien de particulièrement breton ne distingue, si ce n’est l’amour du pays natal ; qui avez mérité d’être saluée comme une jeune sœur de ceux que vous nommez « le Cygne de Mâcon » et « l’Aigle de Guernesey », et qui n’avez qu’à vous garder d’un éblouissement trop lyrique en présence des demi-dieux.
. — Station poétique à l’abbaye de Haute-Combe (1847). […] Sa personnalité politique s’y dessine mieux que dans les termes généraux de la satire… La meilleure pièce des Italiennes est celle que l’auteur adresse à Chateaubriand… Veyrat n’est pas seulement une des figures poétiques, c’est une des âmes, un des témoins de ce temps-ci : un Donoso Cortès de la Savoie… Sa lyre et son âme, sa vie et son œuvre sont une même chose.
Les Principes pour la lecture des Poëtes, forment une espece de Poétique, où se trouvent exposés, d’une maniere nette & facile, les préceptes des Grands Maîtres. Ils ne sont, à proprement parler, qu’un long Commentaire de l’Art Poétique de Despréaux, accompagné d’exemples choisis, propres à rendre les remarques plus sensibles.
Quel dommage, que ce Génie poétique ne soit pas né un Siecle plus tard ? […] Ses autres Ouvrages poétiques offrent les mêmes beautés & les mêmes défauts.
— Défauts et qualités du livre. — Les origines du classicisme. — La Poétique de Scaliger. — Du caractère de la critique de Scaliger. — Substitution des modèles latins aux modèles grecs. — Les opuscules de Ronsard sur la poétique. — L’Art poétique de Vauquelin de la Fresnaye. — Tendance générale de la critique au xvie siècle. […] Et, pour le moment, et par l’intermédiaire de Scaliger, en matière de poétique ou de critique, c’est l’autorité de L’Épître aux Pisons qui commence à se substituer à celle de la Poétique d’Aristote. […] Perrault et ses Réflexions critiques sur Longin, pour ne se souvenir que de ce qu’il y a de plus étroit dans son Art poétique. […] Il n’en est pas de même des beautés poétiques, qui appartiennent uniquement à l’imagination. […] De là j’ai passé au romantisme poétique, et par le monde de Victor Hugo, et j’ai eu l’air de m’y fondre.
Rivière la terreur fantastique et ce que nous appelons la réalité poétique. […] Ces Scènes et Proverbes sont comme les différents chapitres d’un poétique de Matrimonio écrit par un poétique Sanchez. […] Feuillet, c’est la plus parfaite et la plus poétique. […] C’est cette richesse poétique, rare et cachée comme l’émeraude, dont M. […] Victor Cherbuliez nous introduisent dans une sphère poétique moins haute.
Il n’y a de certainement vrai, selon lui, dans une légende poétique que la couleur, et encore cette couleur locale, cette vérité sociale et morale n’est point du tout celle des héros et des temps représentés ; elle n’appartient qu’à l’âge du poëte qui raconte et qui chante. […] La supposition de Wolf, qui restituait la vérité en tout ce qui était de l’atmosphère générale homérique, du souffle qui animait alors les chantres, et de la crédulité toute poétique des auditeurs, cette supposition allait pourtant à l’excès lorsqu’elle niait, durant toute la durée de la période anté-historique, la composition possible des poèmes et la prédominance probable de deux ou trois génies supérieurs qui avaient dû s’emparer de la matière courante pour en faire de vraies œuvres. […] J’étais accoutumé à considérer comme un ensemble chacun des poëmes d’Homère, et je les voyais là séparés et dispersés, et, tandis que mon esprit se prêtait à cette idée, un sentiment traditionnel ramenait tout sur-le-champ à un point unique ; une certaine complaisance que nous inspirent toutes les productions vraiment poétiques me faisait passer avec bienveillance sur les lacunes, les différences et les défauts qui m’étaient révélés. » Mais n’était-ce qu’une illusion et une complaisance de sentiment, comme Gœthe paraît le croire ? […] Déjà, avant Pisistrate, Solon, se préoccupant de cette immense richesse poétique flottante et de sa conservation chère à tous les cœurs grecs, avait imposé un ordre fixe de récitation aux rhapsodes de l’Iliade, pour la fête des Panathénées. […] Le génie d’Homère n’est donc pas si morcelé et si épars qu’on l’a dit : c’est un esprit poétique, vaste et exubérant sans doute, mais propre aussi à organiser, et conservant encore, à ce second moment, cette fraîcheur d’observation et cette vivacité de détail qui constitue le charme de la ballade, de la saga, de l’épos primitif.
Ce qu’il y a de vrai dans cette perspective de lointain ne saurait faire qu’en tout temps, même aux âges le plus naïvement poétiques, la poésie, telle qu’elle s’y réalisait, n’ait été en définitive produite par le talent singulier de quelques individus ; la masse ne la possédait qu’alors seulement, et elle se l’appropriait par l’usage, par la jouissance. […] C’est une biographie poétique, composée, distribuée avec art en petits tableaux, mais d’une réalité approchante qui va nous suffire. […] Voilà une filiation poétique tout aussi établie que celle des deux Marot. […] Ce chant est rempli de la peinture légère de la double vie poétique et amoureuse aussi qui le partage, et qui cependant ne l’empêche bientôt pas d’ouvrir son petit salon, pour son compte, sur la belle promenade du Gravier, et de prospérer, d’abord doucement, par la frisure. […] Le procédé poétique de Jasmin, par cela même qu’il se rapproche de la nature et qu’il s’y retrempe directement, rappelle bien souvent celui des Grecs.
Il a, pour les mœurs, pour le déréglement de la vie et de la veine, plus d’un rapport avec les poëtes de ce temps-ci : je lui voudrais pourtant plus de talent eu égard à son malheur. » Je ne me dis simule pas les points nombreux de rapprochement que cette école poétique de Louis XIII peut offrir avec l’école poétique d’aujourd’hui ; mais, loin de m’en applaudir, j’en suis bien plutôt à le regretter, car ces rapports sont en général ceux d’une corruption hâtive et d’une décadence prématurée. […] II, p. 43), nous croirions d’après lui que Pontus de Thiard a eu pour maîtresse poétique Panthée, tandis que c’est Pasithée qu’il faut lire ; Olivier de Magny n’a pas célébré non plus Eustyanire, mais bien Castianire ; de même aussi que, tout à côté de là (p. 31), les Isis nuagères ne sauraient être que des Iris. […] Théophile Gautier y aurait trouvé de nouveaux détails naïfs sur les mœurs et les habitudes du poëte suranné, des doléances de ménage mêlées à des extraits littéraires ; il en aurait pu tirer de nouvelles preuves piquantes de ce paganisme poétique que professait le xvie siècle, et dont lui-même il se montre si épris. […] Racan et même Maynard, avec bien moins de mouvement d’idées sans doute et moins de velléités originales, ont laissé d’eux-mêmes des témoignages poétiques bien supérieurs et encore subsistants51. […] Nombre de pages qu’il y a semées et qui me reviennent à la fois, par exemple, sur Ronsard pédant et poëte, sur le paganisme d’art au xvie siècle, sur ce que les Français ne sont pas une nation poétique, sur ce que les poëtes ne sont que rarement musiciens et réciproquement, etc., toutes ces pages se lisent avec plaisir et se retiennent ; elles sont suffisamment vraies ou auraient peu à faire pour le devenir.
Puis de nouveaux fragments furent publiés, le recueil se grossit par degrés, et l’on put craindre de voir s’étendre indéfiniment l’héritage d’une destinée poétique dont le fil avait été sitôt tranché. […] Fremy entre en matière par se poser sur André Chénier la question solennelle et formidable que voici : « Doit-il être, dès à présent, considéré comme le souverain représentant de la littérature poétique de notre siècle ? […] remy, que « jamais, chez les Anciens, les devoirs de l’hospitalité aient pu dépendre d’un effet de poétique ? […] Je me le suis dit depuis bien longtemps, André Chénier, non pas quant à l’action, mais quant à la couleur, a été pour nous une espèce de Walter Scott antique et poétique : il a donné le ton. […] Mais il s’était appliqué surtout à recueillir les trésors poétiques de ceux des Grecs qui allaient déjà être des Anciens, à en faire un bouquet et, comme on disait, une guirlande.
De l’ail, leur pratique correspond à leur talent : ils traitent chaque sujet comme une succession de thèmes poétiques. […] Car il semble bien que Hardy ait le premier fait jouer des tragédies devant le vrai public, le premier traité les sujets antiques comme des actions dramatiques, et non comme des thèmes poétiques. […] Quoiqu’en ses jours de prétention littéraire il se réclamât de Ronsard, il semble avoir ignoré ou méprisé la poétique de la tragédie savante : il ne fut pas long à se débarrasser des chœurs. […] Tout érudit qu’il était, il ne suivait pas Aristote, mais la raison, lorsqu’il impliquait dans l’unité de temps l’unité de lieu dont la Poétique n’avait rien dit, et lorsqu’il réduisait l’unité de jour à cinq ou six heures pour la rapprocher autant que possible de la durée réelle du spectacle. […] Jamais il ne retrouvera cette couleur pittoresque et chaude, cet éclat de fantaisie poétique : et s’il en retrouve un jour quelque chose, ce sera lorsqu’il rentrera en Espagne, et en ramènera Don Sanche.
Le dessein critique et poétique de Boileau se définirait très bien en ces termes : amener et élever la poésie française qui, sauf deux ou trois noms, allait à l’aventure et était en décadence, l’amener à ce niveau où Les Provinciales avaient fixé la prose, et maintenir pourtant les limites exactes et les distinctions des deux genres. Pascal s’était moqué de la poésie et de ces oripeaux convenus, siècle d’or, merveille de nos jours, fatal laurier, bel astre : « Et on appelle ce jargon, disait-il, beauté poétique ! […] — Et dans ces noms qui suivent, et qui ne semblent d’abord qu’une simple énumération, quel choix, quelle gradation sentie, quelle plénitude poétique ! […] On peut distinguer trois périodes dans la carrière poétique de Boileau : la première, qui s’étend jusqu’en 1667 à peu près, est celle du satirique pur, du jeune homme audacieux, chagrin, un peu étroit de vues, échappé du greffe et encore voisin de la basoche, occupé à rimer et à railler les sots rimeurs, à leur faire des niches dans ses hémistiches, et aussi à peindre avec relief et précision les ridicules extérieurs du quartier, à nommer bien haut les masques de sa connaissance : J’appelle un chat un chat, et Rolet un fripon. […] Enfin comme troisième période, après une interruption de plusieurs années, sous prétexte de sa place d’historiographe et pour cause de maladie, d’extinction de voix physique et poétique, Boileau fait en poésie une rentrée modérément heureuse, mais non pas si déplorable qu’on l’a bien voulu dire, par les deux derniers chants du Lutrin, par ses dernières Épîtres, par ses dernières Satires, l’Amour de Dieu et la triste Équivoque comme terme.
. — Le Rythme poétique (1895) […] Cet exemple nous prouve encore que Poésie et Poétique sont deux objets fort différents.
. — Testament poétique (1901) OPINIONS. […] Sully Prudhomme me semble avoir apporté à l’expression de l’amour le même renouvellement qu’à celle des autres sentiments poétiques… Son imagination est d’ailleurs des plus belles, et sous ses formes brèves, des plus puissantes qu’on ait vues. […] Paul Verlaine De quelques années plus jeune que lui, je n’avais guère produit que de l’inédit et je restai timide devant l’auteur déjà connu des lettrés de ces Stances et poèmes qui, avec Philoméla, de Catulle Mendès, et les Vignes folles, de ce regretté Glatigny, constituèrent les fiers débuts de la Renaissance poétique d’alors et d’aujourd’hui.
Ces messieurs ont le droit de faire bon marché de nos opinions, bien qu’il ne soit pas en leur pouvoir d’en déprécier la valeur ; mais il faut voir comme ils sont penauds d’entendre Bossuet lui-même appeler le style de Télémaque « plat, efféminé, poétique et outré dans les peintures ». On nous déclare ne pas comprendre que « si ce style est outré dans les peintures, il soit aussi incolore, et que, s’il est poétique, il puisse être en même temps plat ». Il n’est pas besoin cependant d’être grand clerc pour voir qu’en voulant outrer l’éclat on n’atteint souvent que la pâleur, qu’on est incolore pour vouloir être coloré et qu’on rencontre la platitude quand on recherche le style poétique, c’est-à-dire, comme l’entend ici Bossuet, quand on écrit une prose qui singe la poésie. D’Arlincourt, par exemple, a visiblement outré le ton et la couleur poétique de Chateaubriand.
je crains fort, pour mon compte, que les amis de Guérin, qui avaient pris pour lui faire trompette un hautbois tortueux aussi peu sûr de ses sons, ne se repentent maintenant d’un choix déterminé par le nom seul de l’instrumentiste ; mais ce que je sais de science certaine, c’est que Guérin n’avait nul besoin que l’auteur des Consolations, qui n’est nullement celui des affirmations et des certitudes, affirmât, sous réserve de s’abuser, un genre de génie que Guérin était bien de force à affirmer tout seul, et que l’auteur des Portraits contemporains ajoutât au mou de ses affirmations le mou de sa manière, en donnant, pour éclairer son œuvre, ce médaillon, vaporeux et gris, d’une biographie, qui, cependant, n’est pas sans charme (le charme du sujet), mais dans lequel je ne trouve que le profil fuyant et énervé de cette individualité poétique, — plus poétique que son talent même ! […] Et comme justement ils différèrent par l’inspiration et l’observation poétique, ils différèrent autant par le langage. […] Et cependant, moi qui connais le langage poétique que Guérin a laissé derrière lui, j’aurais voulu qu’on eût ajouté aux quelques pièces éditées plusieurs autres, inférieures aussi d’art, de rhythme, et même de rime, mais qui n’en serviraient pas moins à caractériser le génie personnel d’un poète qui n’a cherché à imiter personne !
Singulier poète, ou, pour mieux parler, singulière spécialité poétique, qui s’est liée volontairement dans de pareils esclavages, qui a renfermé sa pensée dans la forme étroite au lieu de dilater cette forme autour de sa pensée, je ne le confondrai pas pourtant avec les Vides de ce temps, les poètes de la forme pure, avec les écorces sculptées, qui ne renferment rien, comme les sarcophages des Anciens, qui ne contenaient pas même de cendres, car lui, lui, il a la pensée, il a cette perle malade, mais cette perle de la pensée, dont les feux du diamant de l’art, de la langue et du rythme, ne valent pas le plus pâle rayon ! […] Il a (regardez-y et même vous n’avez pas besoin d’y regarder pour en être frappé) la fécondité, la force, la profondeur, la grâce, la variété dans l’inspiration et cette unité dans le sentiment qui fait l’originalité d’un homme et qui lui crée son moi poétique, mais dans quelle proportion a-t-il tout cela, si ce n’est dans celle qui étouffe, en le restreignant, le génie, le génie à qui la place est nécessaire et qui ne peut jamais se passer d’horizons ! […] Joséphin Soulary au premier rang dans cette École, aux préoccupations mauvaises, qui, confondant l’Art avec la Poésie, fait tenir, de préférence et de système, l’œuvre poétique dans la circonférence d’une médaille ou le tour d’une bague, encore plus étroit, et s’imagine que le fini du détail répond à toutes les exigences. […] Soulary, des plus précieuses facultés poétiques et pour laquelle la Volonté et son effort ont remplacé, dans une époque de décadence littéraire, la naïveté grandiose de l’Inspiration ?
D’abord une césure mobile permet de varier la valeur de chaque partie d’une période poétique. […] C’est une destinée moins romanesque peut-être, mais, en un sens, aussi poétique, sinon davantage. […] C’est vous dire combien peu je redoute, pour la production poétique, l’abandon d’une Démocratie. […] En d’autres termes, il n’y a plus d’expression poétique des sentiments communs à tout un peuple. […] Sa faculté poétique est à peu près nulle.
Chapitre V La Fontaine 1 La Fontaine, son caractère ; sources et formation de son génie poétique. — 2. […] De l’Italie, et de l’antiquité, même de l’antiquité grecque qu’il eut le rare talent de percevoir à travers les insuffisantes traductions, il a tiré son goût délicat, et ce sens de la forme, ce besoin d’une perfection difficile, qui ont réglé l’emploi de ses facultés poétiques : c’est par là qu’il est devenu un artiste, et qu’il a travaillé sa matière en œuvre d’art. Enfin, son originale propriété, l’inexplicable fond de son individualité, c’est, dans une race, dans un siècle peu poétique, la puissante expansion de son tempérament poétique ; c’est cette souplesse de l’âme universellement impressionnable, et capable d’absorber, d’amalgamer et de fondre toutes les autres influences. […] La vérité psychologique, le sentiment poétique, la délicatesse rythmique, voilà les parties essentielles de la Fable, telle que La Fontaine l’a faite.
Empruntons aux monuments grossiers de leur ancien culte quelques vestiges de flamme poétique. […] C’est ainsi que ce mont Albain, où, selon la plaisanterie d’Horace159, les Muses avaient dicté de vieilles prédictions dont il trouvait le style fort barbare, voyait chaque année le retour de fêtes religieuses favorables du moins à l’inspiration poétique. […] Enfin, tout en se mêlant surtout aux choses réelles, à la majesté du culte, aux devoirs de la piété domestique, l’art des Grecs introduisit à Rome ces œuvres de l’esprit qui faisaient partie des fêtes de la Grèce, la mythologie dramatique, et jusqu’à la mélopée du théâtre d’Athènes, mais bien déchues de leur poétique grandeur. […] Quelle poétique énergie, quelle vivacité d’expression dans les prologues et dans bien des scènes de Plaute ! […] poëte Ennius167, qui verses aux mortels, jusque dans la moelle des os, la flamme de tes chants. » À part ce qu’il avait perdu ou retranché du luxe musical de ses modèles, nul doute qu’entouré de leurs richesses, renouvelant leurs poétiques sujets, l’Andromède, le Cresphonte, la Médée, les Euménides, l’Iphigénie, le Thyeste, le Néoptolème, il n’ait eu de grands effets dramatiques et lyriques.
— Œuvres poétiques de Barthélemy et Méry, 4 volumes (1831) […] [Souvenirs poétiques de l’école romantique (1880).]
Mestrallet ne se montre ni absolument décadent ni tout à fait parnassien ; il tient une place entre les deux formules de l’art poétique actuel, et même il ajoute à ces formules quelque chose d’intime dont la douceur sied. […] Cependant plusieurs pièces déjà sont charmantes, en particulier divers sonnets et pièces fugitives, légers tableaux de tendresse intime, qu’enveloppe un certain vague triste et poétique.
Les douleurs de nos puissances infernales sont donc un moyen de plus pour l’imagination, et conséquemment un avantage poétique de notre enfer sur l’enfer des anciens. […] Cependant quelques morceaux excellents, échappés à ces grands maîtres, prouvent que si toutes les parties du tableau avaient été retouchées avec le même soin, nous posséderions des enfers aussi poétiques que ceux d’Homère et de Virgile.
De l’astronomie poétique Démonstration astronomique, fondée sur des preuves physico-philologiques, de l’uniformité des principes ci-dessus établis chez toutes les nations païennes. […] Pour retrouver l’astronomie poétique, nous ferons usage de trois vérités philologiques : I.
Hugo : le type byronien du héros romantique ; médiocrité psychologique et invraisemblance dramatique des drames de Hugo ; l’érudition historique et les visions poétiques ; le lyrisme du style ; le comique. […] Rien d’artistique au reste dans la mise en œuvre, pas de vision poétique : une multitude de menus faits précis et secs, patiemment recueillis et juxtaposés, qui laissent une impression de confusion fatigante et d’enfantine érudition. […] Ils ne s’aperçoivent pas de l’absurdité qu’il y a à loger ce type poétique dans une époque historique connue et caractérisée. […] On sent que tout y arrive par la volonté du poète, en vue d’un effet pittoresque ou poétique. […] Aussi a-t-il beau dresser pédantesquement toute la bibliographie d’un sujet ; la couleur historique jure avec le thème poétique ; elle fait l’effet d’être plaquée ; elle s’écaille.
Qu’on pardonne ces extravagances poétiques en faveur des beautés qui les accompagnent ; à la bonne heure. […] L’intrigue est naturelle, la scène animée par les actions qui s’y passent, les mœurs sentent l’antique ; le langage est noble & poétique sans être affecté, les personnages sont intéressans. […] Sa prose poétique qui dégénere quelquefois en vers héroïques, est semée de tems en tems d’expressions peu françoises. […] Nos productions poétiques sont beaucoup plus châtiées & plus régulieres que celles des Anglois. […] Les ouvrages poétiques de M.
Élevé à l’institution Hix, d’où il suivait le lycée Bonaparte, le jeune de Vigny eut de bonne heure les instincts militaires et poétiques. […] Le début d’Alfred de Vigny en littérature date de 1822 ; son premier recueil poétique parut sans nom d’auteur70. […] Les esprits jeunes, poétiques, exclusivement littéraires, les esprits plus ou moins féminins et non critiques, lui donnaient raison aussi par leur émotion. […] Cela sentait, des pieds jusqu’à la tête, le rhumatisme littéraire, la migraine poétique, dont le poète avait déjà décrit les pointillements aux tempes de son Stello. […] Il revient, vers la fin, à sa maison de berger, qui est, il faut en convenir, un véhicule plus poétique que commode ; mais de beaux vers font tout pardonner.
Girardin, Delphine de (1804-1855) [Bibliographie] Essais poétiques (1824). — Ourika, élégie (1824). — Hymne à sainte Geneviève (1825). — Le Lorgnon (1831). — Contes d’une vieille fille à ses neveux (1832). — Le Marquis de Pontanges (1835). — La Canne de M. de Balzac (1836). — Judith, tragédie (1843). — Cléopâtre, tragédie (1847). — C’est la faute du mari, proverbe en vers (1850). — Lady Tartufe (1853). — La Joie fait peur, comédie (1853). — Le Chapeau de l’horloger (1854). […] [Souvenirs poétiques de l’école romantique (1880).]
Enfin un genre de sport fut quelque temps très en faveur dans les bons coins de la presse littéraire, — peut-être l’est-il encore — il consistait à accoler invariablement ces deux noms jusqu’à donner l’illusion d’une sorte de meilhacalévy poétique, tandis qu’un contresport les plaçait alternativement au-dessus et au-dessous l’un de l’autre. […] L’un deux l’emporte par le talent, l’autre par l’instinct poétique ; chez celui-ci des images plus nouvelles, plus d’inattendu une plus riche variété de rythmes et de gestes ; chez celui-là un sens plus pur de l’attitude, une rigueur plus grande dans l’expression, un style plus noble et plus voisin de la perfection.
Un nouveau problème se pose donc : faut-il raisonner par analogie de l’instinct au génie poétique et affirmer avec M. […] Simplicité et intelligibilité, tel est le premier mérite de la vraie langue poétique. […] À ce prix seulement la science sera devenue poétique et, comme dirait Schiller, « musicale ». […] Legouvé, « L’art poétique d’autrefois et l’art poétique d’aujourd’hui » (dans le Temps). […] Précisément parce que le langage poétique doit être plus voisin de l’action, il doit être plus imagé que la prose.
Il y a dans ce caprice poétique une beauté que tout le monde comprendra. […] Le génie poétique ne s’est-il pas montré à Florence sous les formes les plus variées ? […] Bulwer sur le génie poétique et politique d’Ernest Maltravers. […] Bulwer appelle le Calvaire poétique. […] Bulwer composât une pièce vraiment poétique.
François Coppée, par exemple, et l’art poétique de M. […] Albert Glatigny, voilà une heureuse nature poétique : quel tempérament ! […] Ce jeune homme s’imagine que le vice pur a quelque chose de poétique. […] caprice poétique. […] Non, non, déciment, ils ne sont pas poétiques.