Et quand la princesse veut lui envoyer un millier de louis pour prix de ses travaux historiques, quelle manière délicate et fine de repousser les bienfaits sous cette forme déjà surannée, sous cette forme qui n’est déjà plus française à cette date ! […] Ravenel, qui s’était occupé, le premier et avant tout autre, de la copie et de la collation exacte des papiers de Neuchâtel, s’est borné à préparer un travail qui n’attendait qu’un éditeur, et que cet éditeur (le goût pour Jean-Jacques s’étant refroidi) n’est jamais venu lui arracher ; car M. […] Félix Bovet, placé à la source, avait, lui aussi, préparé un travail ; il en a donné au public quelques extraits, et en a surtout communiqué les précieux éléments à tous les curieux qui le visitaient.
Si ce volume, qui ne doit pas contenir moins de six mille vers, tombait aux mains de lecteurs qui aiment peu les vers, et ceux d’amour en particulier ; si, d’après la façon austère et assez farouche qui essaye de s’introduire, on se mettait aussitôt à morigéner l’auteur sur cet emploi de sa vie et de ses heures, à lui demander compte, au nom de l’humanité entière, des huit ou dix ans de passion et de souffrance personnelle que résument ces poëmes, et à lui reprocher tout ce qu’il n’a pas fait, durant ce temps, en philosophie sociale, en polémique quotidienne, en projets de révolution ou de révélation future, l’auteur aurait à répondre d’un mot : qu’attaché sincèrement à la cause nationale, à celle des peuples immolés, il l’a servie sans doute bien moins qu’il ne l’aurait voulu ; que des études diverses, des passions impérieuses, l’ont jeté et tenu en dehors de ce grand travail où la majorité des esprits actifs se pousse aujourd’hui ; qu’il s’est borné d’abord à des chants pour l’Italie, pour la Grèce ; mais qu’enfin, grâce à ces passions mêmes qu’on accuse d’égoïsme, et puisant de la force dans ses douleurs, en un moment où tant de voix parlaient et pleuraient pour la Pologne, lui, il y est allé ; qu’il s’y est battu et fait distinguer par son courage ; que, s’il n’y a pas trouvé la mort, la faute n’en est pas à lui ; qu’ainsi donc il a payé une portion de sa dette à la cause de tous, assez du moins pour ne pas être chicané sur l’utilité ou l’inutilité sociale de ses vers. […] Doué d’un génie intérieur qui rencontre difficilement son expression, il s’est de bonne heure voué à d’immenses travaux préparatoires, et, pour arriver à un but élevé, il n’a pas craint les longs et pénibles détours. […] Son humeur sereine, ses douces relations d’amitié, ses habitudes de travail assidu n’en reçurent aucune atteinte.
Il se peut faire qu’un puissant travail général s’accomplisse, et que le niveau des idées, des connaissances et de la civilisation elle-même monte partout insensiblement ; mais, en fait d’art, les maîtres les plus en renom ont disparu ; s’il en survit quelques-uns, ils achèvent de vieillir, et ne sont point remplacés par des autorités équivalentes. […] En été, pendant les travaux de la campagne, il restait peu de monde à la setch ; mais l’hiver y ramenait une garde nombreuse ; et c’est là qu’au premier danger, au premier cri d’appel, accouraient tous les chefs répandus dans les pays d’alentour ; c’est là, comme dans un champ de mai, que se décidaient tumultuairement les grandes entreprises, soit les courses de piraterie par mer sur les rivages de la mer Noire, soit les formidables invasions en Turquie et en Pologne. […] Il s’agit bien vite pour le vieux Tarass, tout fier des jeunes recrues qui lui arrivent, d’initier les deux écoliers émancipés à la vie cosaque, aux travaux guerriers, et, au sortir d’un festin copieux comme on en verra tant, il est décidé que lui-même les conduira dès le lendemain vers la setch.
Parcourez aujourd’hui la France ; si la Révolution a diminué les différences de fortune, la centralisation a augmenté les différences de culture : une seule cité maîtresse où fourmillent et pullulent les idées engorgées qui s’étouffent et se fécondent infatigablement par le travail et le mélange de toutes les sciences et de toutes les inventions humaines, alentour, des villes de provinces inertes où des employés confinés dans leur bureau et des bourgeois relégués dans leur négoce vont le soir au café pour regarder une partie de billard et remuer des cartes grasses, bâillent sur un vieux journal, songent à dîner et digèrent sur des cancans ; plus bas encore, des paysans qui ont pour bibliothèque un almanach, lequel est de trop bien souvent, puisque la moitié d’entre eux ne sait pas lire, qui votent en moutons, et trouvent que ce vote est une corvée, ignorants, apathiques, incapables d’entendre un mot aux intérêts de l’Etat et de l’Eglise, habitués à laisser leur conscience et leurs affaires aux mains des gens qui ont un habit de drap. […] Il va au-delà de Marot, comme Béranger au-delà de Collé, par le même travail et grâce aux mêmes ressources, ayant réformé son petit cadre d’après l’art ancien, et l’ayant rempli de toutes les grandes idées de son temps. […] 23 Il avouait lui-même qu’il « fabriquait ses vers à force de temps. » Il n’atteignait l’air naturel que par le travail assidu.
C’est ce travail que nous essayerons de faire ici. […] N’est-ce pas par le travail d’un grand nombre de raisons individuelles, qui ont cherché chacune le vrai à leurs risques et périls et ont mêlé peut-être beaucoup d’erreurs à quelques vérités ? […] Ce travail a été publié à propos de l’Histoire de la littérature française de M.
C’est l’histoire d’un pauvre diable d’artiste qui nourrit de son travail un lapin qu’il aime beaucoup et une maîtresse qu’il adore. […] Rodolphe est presque riche maintenant : avec un travail constant, il ne gagne pas moins de trente-cinq à quarante francs par mois. […] Mais, s’il en est ainsi, d’où vient donc qu’on s’arrête devant les travaux photographiques avec curiosité toujours, avec admiration quelquefois, mais qu’on n’est jamais impressionné ; tandis qu’un paysage réel (le moins compliqué) un coin de verdure, un arbre, un ruisseau, nous fait rêver des heures entières ?
Jeté, à quelque temps de là, dans le monde, sans fortune et sans appui, Chamfort se trouva bientôt réduit à l’état le plus misérable ; il ne subsistait que de son travail pour quelques journalistes et pour quelques prédicateurs, dont il faisait les sermons. […] Il fallait cependant un aliment à l’inquiète activité de son esprit ; sa tragédie de Moustapha et Zéangir, commencée depuis longtemps, abandonnée et reprise vingt fois dans les alternatives de langueur et de force qu’éprouvait sa santé, fut achevée dans cette retraite : plusieurs scènes de cette pièce prouvent avec quelle attention Chamfort avait étudié la manière de Racine, et jusqu’où il en aurait peut-être porté l’imitation, s’il n’eût été sans cesse distrait par ses maux et par des travaux étrangers à ses goûts. […] Son cœur et son esprit étaient remplis de sentiments républicains ; il applaudissait au décret qui supprimait les pensions ; et pourtant toute sa fortune était en pensions, il les remplaça par le travail ; et le Mercure de France s’enrichit de la nécessité dans laquelle on le mettait encore une fois, de se faire une ressource de sa plume.
Vian donne la liste de ces travaux morts et ensevelis, et que la Grandeur et décadence des Romains et L’Esprit des Lois, plus tard, expièrent. […] Même les méthodes de travail de Montesquieu sont détaillées par Vian, et l’on sait qu’une de ces méthodes de travail fut les voyages.
Les mille fleurs de l’imagination et de la fable s’enroulent autour des moindres faits, sous des mains divinement artistes, et il faut ôter ces voiles brillants, cette floraison de vigne enivrante d’autour du rameau sec et nu, pour nous le montrer tel qu’il est, travail difficile qui demande une main habile, un esprit ferme. […] Une critique savante et profonde, enrichie de toutes les découvertes historiques de notre époque, une critique qui, après avoir fait la part du génie grec, ôte avec un tact souverain l’imagination des Allemands de leurs travaux pour s’appuyer sur ce que ces travaux ont de plus solide, voilà ce qui donne au livre de Lerminier un mérite et un poids qu’aucun ouvrage sur la Grèce ne pouvait avoir plus tôt.
Nous n’avons point à faire un travail d’Hercule en sondant les reins ou le cœur des philosophes, ces étables d’Augias humaines. […] Franchement, quand on a lu attentivement son travail, peut-on dire que le métaphysicien, avec les grêles propositions de son analyse habituelle, ait vu réellement et jugé profondément ce mâle onzième siècle qui demanderait tant de vigueur de génie et de largeur d’appréciation ? […] Or, quand un homme personnifie en lui cette physique du catholicisme, l’instrumentum regni par lequel il s’est constitué et a gouverné, n’étudier dans cet homme que le travail de son esprit appliqué aux stériles contemplations de la métaphysique, c’est prouver assurément qu’on est un métaphysicien, mais c’est aussi découvrir en soi la pente fatale à ne voir que les petites choses, quand il y a les grandes à côté.
D’autres que nous, moins gênés par les limites de ce travail qui n’a qu’un but : donner l’envie de lire à ceux qui lisent encore les choses sérieuses, pourront s’appesantir sur tous ces détails, mais nous, moins heureux, nous devons aller exclusivement et de prime saut au point important et central, à la méthode, — la méthode qui, du reste, est l’axe de tout, pour qui sait voir, dans toutes les philosophies. […] Tels sont, indiqués d’une main bien rapide, les points culminants d’un travail qui rétablit la tradition philosophique interrompue et jette la première arche du pont qui doit unir, par-dessus les eaux troubles du xviiie siècle, la philosophie du xviie siècle et la philosophie de notre temps. […] Dans le système de l’abbé Gratry, l’homme moral double toujours l’homme métaphysique, et c’est l’homme moral qui a vivifié ce beau travail de sa chaleur presque rayonnante et qui l’a trempé dans les saintes tendresses de l’onction.
Mirèio, dont nous avons tant parlé, Mirèio et ses douze chants, ce poème de longueur à l’Énéide, est un poème écrit en provençal ; mais, en français, nul grand travail de poésie, de philosophie et d’histoire n’a révélé des noms nouveaux ou consacré des noms déjà connus. […] Francis Wey tient, par son inapaisement dans le travail, à ces malcontents de génie. […] L’homme de lettres, aux travaux considérables, a intercepté le conteur ; mais aujourd’hui, ramené par Christian de l’érudition des livres à l’érudition du cœur, plus intéressante et plus amère, Francis Wey, s’il persévère dans la route où il vient de faire un nouveau pas, devra plus tard effacer l’homme de lettres sous le conteur, — le conteur, plus cher que tout dans les vieilles littératures !
On sait aujourd’hui à quel acharné travail est due la phrase qu’il écrit. […] Julien Girard et Desfeuilles se sont chargés du travail de ce commentaire. […] Cette poésie d’une forme exquise se trouve ne pas être un travail d’exception et de byzantinisme. […] La vie a fait sur l’être son travail meurtrier ou bienfaisant. […] … » Est-il possible de se tromper, quand on a demandé à ses travaux seulement d’être des travaux, c’est-à-dire des étapes de sa vie intérieure ?
Mais comme on n’y peut atteindre, ni s’y soutenir sans de grands efforts, sans le travail qui fait du privilège de bien écrire le plus difficile de nos devoirs envers nos semblables, il n’est pas étonnant que Boileau, qui enjoint le travail, qui immole la liberté de chacun à l’utilité de tous, soit toujours attaqué. […] C’est en négligeant les pensées que l’esprit se repose de l’effort que lui a coûté le travail des mots. […] Pour le poète, qu’a-t-il affaire de tous ces préceptes sur la langue, sur la rime, sur le travail ? […] Choisi par le roi pour historiographe, il en remplit d’autant plus mal les fonctions, qu’il se connaissait peu propre à ce genre de travail. […] On trouve plus d’un diamant de ce genre dans Boileau, et quelquefois, la matière n’y vaut pas le travail.
« “Tant que nous traverserons les champs et les travaux des hommes, marche rapidement, avec mes suivantes, derrière les mules et le char. […] Je suis riche, très riche, ajouta-t-il ; regardez, j’ai plus de cent écus dans cette bourse ; j’ai ma pension de poète à toucher incessamment par quartiers ; c’est vous qui êtes pauvre, puisque vous avez employé vingt ans de politique à vous appauvrir, et que vous devez vos jours et vos nuits à vos créanciers, que le travail ne solde pas assez vite. […] Nos penchants étaient nés de notre solitude, Et notre amour venait de cinq ans d’habitude, Cinq ans de travail et d’ennuis. […] Ce fut ainsi que nous restâmes unis, moi, réfugié dans le travail, lui, abrité dans son hospice. […] L’an passé encore, en allant de son lit à sa table de travail, il était tombé et s’était brisé l’autre jambe.
S’il n’est pas appelé dans le travail, sitôt l’enfant venu au monde, on ne fait rien sans ses prescriptions. […] Un homme qui s’accuse sincèrement n’a pas cette complaisance de pinceau pour les choses qu’il se reproche, et ne fait pas un travail de variantes pour pousser à l’effet la peinture de ses fautes. […] Certes, les qualités supérieures de l’esprit ne lui manquèrent pas ; ce qui lui manqua, ce fut le talent de se faire une part dans les fruits de son travail. […] Le travail a pu être en certains temps plus ingrat, moins aidé, plus précaire ; mais c’était l’imperfection et non le crime volontaire de la société d’alors, et, comme pour la justifier, on y était plus patient. […] De là des mouvements arrangés, des apostrophes fréquentes, dans un travail pénible et froid, où la chaleur ne vient que d’opiniâtreté.
Quant on songe que cette admirable science ne compte guère encore qu’une génération de travaux et que déjà pourtant elle a amené de si précieuses découvertes, on ne peut assez s’étonner qu’elle soit si peu cultivée et si peu comprise. […] C’est donc par des travaux de philosophie scientifique que l’on peut espérer d’ajouter, dans l’état actuel de l’esprit humain, au domaine des idées acquises. […] Des immenses travaux déjà accomplis par les indianistes modernes, quelques atomes à peine sont déjà devenus de droit commun. Un innombrable essaim de doctes philologues a complètement réformé en Allemagne l’exégèse biblique, sans que la France connaisse encore le premier mot de leurs travaux. […] La grande poésie panthéiste de Goethe, de Victor Hugo, de Lamartine suppose tout le travail de la critique moderne, dont le dernier mot est le panthéisme littéraire.
Au premier acte, tout le rôle de Mme Portal ne porte pas, et je sens le trac de Mme Daudet, qui est devant moi, dans le travail nerveux de son dos. […] Elle veut, la France, qu’à la rémunération tarifée du travail ou du service, il s’ajoute pour le mercenaire, un peu de joie, un peu de bon temps, un peu d’ivresse. […] Se tenir derrière un homme qui met de la terre de bruyère sous des arbustes verts, qui creuse des cuvettes monumentales à des rhododendrons, — être pris par ce travail bête, — et tout ce qui vous appelle d’intelligent dans votre cabinet de travail : lectures, notes, corrections d’épreuves, laisser tout cela. […] Dimanche 19 juin J’avais rêvé pour la fin de ma vie, des dernières années, paresseuses, inoccupées, remplies par la lecture de voyages, et il n’y a guère eu, dans mon existence, d’années plus laborieuses, plus fatigantes, par la multiplicité de petits travaux, et qui me font soupirer après de l’inactivité de la cervelle et des jambes. […] Après dîner, je cause avec Rodin qui me raconte sa vie de labeur, son lever de sept heures, son entrée à l’atelier à huit, et son travail, seulement coupé par le déjeuner, allant jusqu’à la nuit : travail debout ou perché sur une échelle qui l’écrase le soir, et lui donne le besoin de son lit, au bout d’une heure de lecture.