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411. (1853) Histoire de la littérature dramatique. Tome II « Chapitre IV. Que la critique doit être écrite avec zèle, et par des hommes de talent » pp. 136-215

Ce n’est pas lui, certes, qui entrerait volontairement en cette terre consacrée. […] Quelle est la récompense suprême de Jupiter, sur la terre des héros ? […] Vous parcourez la terre en Cupidon monté sur une paire de torches. […] La terre ne pourrait assourdir à son cœur la trompette qui, de sa voix sonore et triomphante, lui dirait que la terre n’est que l’esclave de Louis !  […] La terre ne me convient pas — on n’en retire jamais sa rente.

412. (1817) Cours analytique de littérature générale. Tome III pp. 5-336

Là du moins s’exécute le voyage merveilleux du poète qui passe des profondeurs de l’enfer jusqu’aux sommités du ciel, et qui redescend sur la terre en héros de sa fiction terrible. […] Celle-ci n’est pas projetée dans l’enfer, mais dans le ciel, et s’exécute aussi sur la terre, non pas par les démons, mais contre eux-mêmes, de qui triomphe le Messie. […] « Rempli du Dieu par qui sont inspirés ces mots ; « Salut, s’écria-t-il, terre longtemps promise ! […] fuis ces lieux cruels, fuis cette terre avare, « J’y péris immolé par un tyran barbare. […] « La terre me reçut, et dans mon sein plongée « Leur moisson homicide en arbres s’est changée.

413. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre IV. L’âge moderne. — Chapitre II. Lord Byron. » pp. 334-423

—  Nos sens étroits, —  notre raison fragile, —  la vie courte, —  la vérité, une perle qui aime l’abîme, —  toutes les choses pesées dans la fausse balance de la coutume ; —  l’opinion, souveraine toute-puissante, qui jette — sur la terre le manteau de ses obscurités, jusqu’à ce que le juste — et l’injuste semblent des accidents, et que les hommes pâlissent — de la crainte que leurs propres jugements n’éclatent au jour, —  et que leurs libres pensées ne soient des crimes, et que la terre n’ait trop de lumière. […] Toute la nuit il entend leur long galop monotone, et à la fin sa force s’abat : « la terre s’enfonçait, le ciel roulait ; —  il me sembla que je tombais à terre : — je me trompais, j’étais trop bien lié ! […] Les oiseaux sauvages criaient, —  et dans leur épouvante venaient tomber à terre — et battaient l’air de leurs ailes inutiles. […] Plus d’amour ; —  la terre n’avait plus qu’une pensée, celle de la mort, —  de la mort présente et sans gloire, et la dent — de la famine mordait toutes les entrailles. […] Mais par malheur Juan est en mer, et le mal de cœur commence. « Oui, dit-il, le ciel se confondra avec la terre avant que… —  (Ici il se trouva plus malade.) — Ô Julia !

414. (1895) Histoire de la littérature française « Première partie. Le Moyen âge — Introduction. Origines de la littérature française — 2. Caractère de la race. »

La forme dégradée du type français, c’est l’esprit gaulois, fait de basse jalousie, d’insouciante polissonnerie et d’une inintelligence absolue de tous les intérêts supérieurs de la vie ; ou le bon sens bourgeois, terre à terre, indifférent à tout, hors les intérêts matériels, plus jouisseur que sensuel, et plus attaché au gain qu’au plaisir.

415. (1882) Qu’est-ce qu’une nation ? « III »

Voilà qui fera sourire les transcendants de la politique, ces infaillibles qui passent leur vie à se tromper et qui, du haut de leurs principes supérieurs, prennent en pitié notre terre à terre. « Consulter les populations, fi donc !

416. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre quatrième. Du Merveilleux, ou de la Poésie dans ses rapports avec les êtres surnaturels. — Chapitre IX. Application des principes établis dans les chapitres précédents. Caractère de Satan. »

L’imagination du Dante, épuisée par neuf cercles de tortures, n’a fait de Satan enclavé au centre de la terre qu’un monstre odieux ; le Tasse, en lui donnant des cornes, l’a presque rendu ridicule. […] Échappé de l’enfer, et parvenu sur la terre, il est saisi de désespoir en contemplant les merveilles de l’univers ; il apostrophe le soleil77.

417. (1869) Cours familier de littérature. XXVII « CLIXe Entretien. L’histoire, ou Hérodote »

Après cette étude, il entreprit de longs et lointains voyages pour connaître la terre et les hommes. […] On y lit encore son épitaphe : « Cette terre recouvre le corps d’Hérodote, fils de Tixès, maître en l’art d’écrire. […] Il suppose que ce pays, d’abord semblable au golfe de la mer Rouge, a pu être comblé pendant vingt mille ans par les terres amenées par le courant du Nil. […] Ils étaient chargés de se rendre près d’Amyntas et de lui demander, au nom de Darius, l’eau et la terre. […] Sur terre, les deux armées se chargèrent mutuellement et se mêlèrent.

418. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre cinquième. Le réalisme. — Le trivialisme et les moyens d’y échapper. »

bonne terre, prends-moi, toi qui es la mère commune, l’unique source de la vie ! […] … » — Rentrer dans la terre tandis que d’autres rêvent de monter au ciel, voilà bien les deux conceptions opposées de l’art et de la vie ; mais cette opposition est aussi conventionnelle que celle du nadir et du zénith, placés tous deux sur le prolongement de la même ligne. Qui creuse la terre assez avant finit par retrouver le ciel. […] Une pique du temps des Gaulois ne nous rappelle que la grande idée qui a fait l’arme, quelle qu’elle soit, — l’idée de défense et de force ; la pique, c’est le Gaulois défendant ses foyers et la vieille terre gauloise. […] On a dit avec raison que l’image totale de la terre est obscurément évoquée par chaque paysage de Loti.

419. (1908) Promenades philosophiques. Deuxième série

Il s’agit de façonner avec cette terre un objet creux qui retienne l’eau. […] Ce sont de paisibles fermiers que l’eau, la terre et la forêt comblent de leurs biens. […] Il ne niait pas l’ordre assigné par Moïse à l’apparition sur la terre des trois grandes classes d’animaux, ceux qui vivent dans l’eau, ceux qui vivent sur terre, ceux qui vivent dans l’air. […] Les tribus totémiques disent toujours que leur totem ancestral est né de la terre, sorti de terre ; c’était aussi une croyance juive. […] Voir le tableau chronologique de l’histoire de la terre, dans L. de Launay, Histoire de la terre, 1906.

420. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XXII. Philosophie politique »

Et même quand les grands noms, — et vous, venez de voir si on peut les compter, — quand les noms dignes de leur bruit auraient manqué aussi comme les autres, croit-on que c’eût été un si grand tort de vérité, fait à la terre ? La terre n’a pas déjà tant besoin de philosophie ! […] Fataliste au premier chef et au second inconséquente, l’économique des rêveurs a encore ceci de particulièrement absurde, qu’elle croit au bonheur absolu sur la terre et qu’elle pose l’obligation stricte pour les gouvernements de le réaliser.

421. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « M. de Vigny. Œuvres complètes. — Les Poèmes. »

Mon Dieu vous m’avez fait puissant et solitaire, Laissez-moi m’endormir du sommeil de la terre. […] Ô Seigneur, j’ai vécu puissant et solitaire, Laissez-moi m’endormir du sommeil de la terre ! […] Après Moïse, vous avez Le Déluge, dans lequel je retrouve la même grandeur prise aux sources bibliques, — cette grandeur de touche qui fait entrer une toute-puissante sérénité dans les horreurs de la plus immense catastrophe qu’ait vue la terre.

422. (1864) Cours familier de littérature. XVII « CIIe entretien. Lettre à M. Sainte-Beuve (2e partie) » pp. 409-488

Sur la terre jeté, manquant de lyre encore, Errant, que faisiez-vous de ce don qui dévore ? […] Tu sais l’âge où tu vis et ses futurs accords ; Ton œil plane ; ta voile, errant de bords en bords, Glisse au cap de Circé, luit aux mers d’Artémise ; Puis l’Orient t’appelle, et sa terre promise, Et le Mont trois fois saint des divines rançons ! […] Ce domaine s’étendait sur un terrain plat, entre quelques hauteurs au sud-ouest et le bord uni de la rivière, comprenant dans ses limites un vignoble, un verger, un rucher et d’excellentes terres de pâturages qui permettaient au propriétaire de porter ses fromages à Mantoue, et de nourrir des victimes pour les autels des dieux. […] Il rejoint en chemin Mécène et Horace ; il a pour compagnons Plotius et Varius, et l’agréable narrateur les qualifie tous trois (mais nous aimons surtout à rapporter l’éloge à Virgile) les âmes les plus belles et les plus sincères que la terre ait portées, celles auxquelles il est attaché avec le plus de tendresse. […] La plupart des vétérans en effet, mis d’abord en possession des terres, ne les avaient pas cultivées, mais en avaient dissipé le prix dans la débauche.

423. (1898) L’esprit nouveau dans la vie artistique, sociale et religieuse « III — Bossuet et la France moderne »

Mais cinq cent mille environ, échappant aux persécutions, aux menaces, et à la mort parvinrent à gagner les nations voisines, dans l’espoir d’y trouver un coin de terre qui fut à l’abri des bourreaux de la France orthodoxe. […] Il n’y a pas d’harmonie entre le ciel et la terre, mais opposition ; on ne peut aimer à la fois Dieu et le monde, la vie présente et la vie future, etc. […] Bien plus, les rois sont eux-mêmes des espèces de dieux sur la terre. […] On a vu là des sectaires obstinés, j’y vois des gens d’honneur qui par toute la terre ont montré ce qu’était l’élite de la France. […] Aucun péril ne les rebuta, et ce qui les soutint dans la pire détresse, ce fut la volonté invincible d’échapper aux bourreaux de Louis XIV, et de vivre librement leur vie sur une terre de liberté.

424. (1829) Tableau de la littérature du moyen âge pp. 1-332

Rarement les troubadours allaient visiter la terre sainte. […] Un jour on lui montra le portrait d’une dame française de la terre sainte, de la comtesse de Tripoli. […] Fussent-ils trois, quelle que soit leur puissance, ils ne gagneront pas sur moi un pouce de terre. […] Cette terre de Haute-Fort était située près de Limoges. […] Vous croiriez que la terre est de musc ; elle en exhale le parfum et la saveur.

425. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Joinville. — II. (Fin.) » pp. 513-532

Saint Louis, à peine à terre, dans sa foi en Dieu, dans sa ferveur à l’aveugle, voulait courir sus à un gros de Sarrasins qu’il voyait devant luit ; ses chevaliers et prud’hommes eurent à l’en empêcher. […] Bientôt le danger devient inévitable : on n’a qu’à choisir entre l’alternative d’être pris sur l’eau en se rendant aux galères du Soudan, ou d’être massacré par les Sarrasins en débarquant à terre. […] Le comte de Jaffa seul laisse entrevoir un avis différent ; mais il y est trop intéressé, et lui-même en convient, à cause des terres et châteaux qu’il possède en Syrie. […] Saint Louis, à peine à terre, voulait courir sus à un gros de Sarrasins qu’il voyait devant lui ; u. […] Transporté à terre dans un grand état de faiblesse, et ayant senti plus d’une fois le couteau sur la gorge, il est amené, toujours par le secours du bon Sarrasin jusqu’au château où se trouvent les personnes de distinction de l’armée ennemie : ad.

426. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Maine de Biran. Sa vie et ses pensées, publiées par M. Ernest Naville. » pp. 304-323

Après le licenciement des gardes du roi, il se retira dans son Périgord, à sa terre de Grateloup, sorte de château dans le genre de celui de Montaigne, avec colombier et tourelle gothique49. […] j’aurais trouvé sur cette terre les joies du ciel. […] Parce qu’il a été vers la fin un adversaire du gouvernement impérial, on aurait tort de le prendre pour un grand partisan du régime constitutionnel ou parlementaire ; selon lui, le seul bon gouvernement est celui sous lequel l’homme trouve le plus de moyens de perfectionner sa nature intellectuelle et morale et de remplir le mieux sa destination sur la terre : or, sûrement, ajoute-t-il, ce n’est pas celui où chacun est occupé sans cesse à défendre ce qu’il croit être ses droits ; où les hommes sont tous portés à s’observer comme des rivaux plutôt qu’à s’aimer et s’entr’aider en frères ; où chaque individu est dominé par l’orgueil ou la vanité de paraître, et cherche son bonheur dans l’opinion, dans la part d’influence qu’il exerce sur ses pareils. […] C’est une vraie misère de vivre sur la terre. » Il a besoin d’un secours extérieur encore, mais, cette fois, de ce secours invisible qui opère par la grâce et moyennant le canal de la prière. « La plus fâcheuse des dispositions, dit-il, est celle de l’homme qui, se méfiant de lui-même au plus haut degré, ne s’appuie pas sur une force supérieure et ne se livre à aucune inspiration ; il est condamné à être nul aux yeux des hommes comme à ses propres yeux. » Il connaissait bien cet homme-là. […] [NdA] Il faut voir dans le volume d’Épîtres et élégies, par Charles Loyson (1819), deux épîtres (la seconde et la troisième) où est agréablement dépeinte la vie de Maine de Biran à sa terre de Grateloup, et où ce riant domaine obtient aussi sa description familière, dont le ton rappelle l’épître de Boileau À M. de Lamoignon.

427. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Merlin de Thionville et la Chartreuse du Val-Saint-Pierre. »

Enfanté tout d’un jet par un mouvement irrésistible, par l’immense tremblement de terre d’où sortit la génération des modernes Titans, il n’était pas l’homme de plusieurs idées ni de plusieurs régimes. Il rentre dans la vie privée avant quarante ans, se retourne vers la terre avec une sorte de rage, travaille et laboure son champ, améliore son domaine et ne se relève qu’en 1814, devant l’invasion, pour y devenir colonel d’un corps franc ; puis, après un dernier effort patriotique et comme une dernière convulsion, il retombe et rentre derechef dans l’oubli pour mourir obscurément en 1833. […] Les approches de la maison, environnée de terres labourables, de prairies, d’étangs et de belles fermes, offraient, à la vue des sites variés, mais qui manquaient de mouvement, et auxquels la proximité des forêts donnait quelque chose de grave et de mélancolique. […] Derrière se trouvaient les cuisines, les logements des domestiques et des frères lais, chargés des détails de la maison, de la surveillance des jardins, des terres et des forêts. […] » Mais la vue de la récréation aux jours de fête, avec la division tranchée des trois groupes, est d’une belle observation morale et d’un effet lugubre, qui termine bien cette suite de tableaux : « Ces jours-là, après les grâces dites à l’église, les chartreux se promenaient dans le grand jardin, en formant trois groupes séparés : les vieillards excluaient leurs confrères au-dessous de quarante ans, et ceux-ci les confrères au-dessous de trente ; les jeunes erraient pour la plupart seuls, craignant de se communiquer leurs tristes et douloureuses pensées ; la tète baissée, ils regardaient la terre et me semblaient lui demander de se hâter de s’ouvrir pour eux.

428. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Fontenelle, par M. Flourens. (1 vol. in-18. — 1847.) » pp. 314-335

Il a un ami qui n’a point d’autre fonction sur la terre que de le promettre longtemps à un certain monde, et de le présenter enfin dans les maisons comme homme rare et d’une exquise conversation : et là, ainsi que le musicien chante et que le joueur de luth touche son luth devant les personnes à qui il a été promis, Cydias, après avoir toussé, relevé sa manchette, étendu la main et ouvert les doigts, débite gravement ses pensées quintessenciées et ses raisonnements sophistiqués. […] Quand il en vient à l’astronomie en particulier, à la question de savoir si c’est la terre qui est le centre autour duquel tourne l’univers, ou si c’est elle au contraire qui décrit une révolution dans l’espace, il a de ces comparaisons toutes morales et sensibles qui vous remettent d’avance au point de vue : Il faut que vous remarquiez, s’il vous plaît, que nous sommes tous faits naturellement comme un certain fou athénien, dont vous avez entendu parler, qui s’était mis dans la fantaisie que tous les vaisseaux qui abordaient au port de Pirée lui appartenaient. […] On se rappelle involontairement ce magnifique début des Pensées : Que l’homme contemple donc la nature entière dans sa haute et pleine majesté ; qu’il éloigne sa vue des objets bas qui l’environnent ; qu’il regarde cette éclatante lumière mise comme une lampe éternelle pour éclairer l’univers ; que la terre lui paraisse comme un point au prix du vaste tour que cet astre décrit… Au lieu de ces expressions amples et véritablement augustes, Fontenelle, en parlant de l’ordonnance céleste, n’emploie volontiers que des images et des comparaisons rapetissantes. […] Tout cela est vrai, et pourtant il est un point par lequel Fontenelle va reprendre aussitôt sa revanche sur Pascal lui-même ; car, dans cette vue admirablement sentie et embrassée tant au physique qu’au moral, Pascal, à un endroit, a corrigé lui-même sa phrase, l’a rétractée et altérée pour faire tourner le soleil autour de la terre et non la terre autour du soleil.

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