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472. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre II. La Renaissance. — Chapitre IV. Shakspeare. » pp. 164-280

La teinte rouge du ciel au soleil couchant, la pâle obscurité que la nuit répand sur le paysage, se changent en rougeurs et en pâleurs de honte, et le misérable homme qui parle et qui pleure voit le monde entier chanceler avec lui dans l’éblouissement du désespoir. […] Je m’en souviens bien. —  Cela fait onze ans aujourd’hui depuis le tremblement de terre. —  De tous les jours de l’année, c’est justement ce jour-là, —  je m’en souviens bien, qu’elle fut sevrée. —  J’avais mis de l’absinthe au bout de mon sein, —  et j’étais assise au soleil contre le mur du pigeonnier. —  Monseigneur et vous, vous étiez alors à Mantoue. —  Oh ! […] Un rayon de soleil égaré sur un vieux mur, une folle chanson jetée au milieu d’un drame les occupaient aussi bien que la plus noire catastrophe. […] Les amants errent aux bords des ruisseaux « qui courent en babillant sous les racines antiques. » On aperçoit, en les écoutant, de légers bouleaux dont la robe de dentelle s’illumine sous le soleil incliné qui les dore, et la pensée s’égare en des allées de mousse où s’amortit le bruit des pas. […] Aussi vrai que je vis de pain, j’ai rencontré un bouffon qui s’était couché et se chauffait au soleil, et maudissait madame la Fortune en bons termes, en bons termes choisis.

473. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — C — Cros, Charles (1842-1888) »

Lisez encore ces choses, ni poèmes en prose (titre et forme bien affadis depuis ces maîtres, Aloysius Bertrand, Charles Baudelaire, Stéphane Mallarmé, Arthur Rimbaud), ni contes, ni récits, ni même histoires, le Hareng saur, angélique enfantillage justement célèbre, et le Meuble, que j’ai toutes raisons d’environner de sympathies même intrinsèques pour ainsi parler, l’ayant possédé, ce meuble, du temps où je possédais quelque chose au soleil de tout le monde.

474. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — L — Louÿs, Pierre (1870-1925) »

Soyez sûrs que les cendres de Gautier ont frémi de joie, à l’apparition de ce livre, et que, dans le paradis des lettrés, l’ombre de Flaubert hurle, à l’heure qu’il est, des phrases de Pierre Louÿs, les soumet à l’infaillible épreuve de son gueuloir, et qu’elles la subissent victorieusement… Enfin voilà donc un jeune, un vrai jeune — Pierre Louÿs n’a pas vingt-six ans — qui nous donne un beau livre ; un livre écrit dans une langue impeccable, avec les formules classiques et les mots de tout le monde, mais rénovés et rajeunis à force de goût et d’art ; un livre très savant et où se révèle, à chaque page, une connaissance approfondie de l’antiquité et de la littérature grecque, mais sans pédantisme aucun et ne sentant jamais l’huile et l’effort ; un livre dont la table contient sans doute un symbole ingénieux et poétique, mais un symbole parfaitement clair ; un livre, enfin, qui est vraiment issu de notre tradition et animé de notre génie et dans lequel la beauté, la force et la grâce se montrent toujours en plein soleil, et inondées d’éclatante lumière !

475. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — M — Mérat, Albert (1840-1909) »

Albert Mérat, parisien jusque dans la moelle des os, est ardemment épris de la modernité ; il connaît sa ville jusque dans les moindres recoins, l’été, l’hiver, le matin, le soir, sous la pluie, sous le soleil.

476. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — T — Tailhade, Laurent (1854-1919) »

Armand Silvestre, du soleil et des hymnes religieuses.

477. (1893) Thème à variations. Notes sur un art futur (L’Académie française) pp. 10-13

Quels plus beaux hymnes au Soleil, que les paysages de Monet, de Signac, de Cros ?

478. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Chapitre premier, premières origines du théâtre grec »

Prométhée, évanoui dans les nuages du Caucase, remonte sur son rocher et rouvre sa plaie cicatrisée au vautour : Agamemnon sort de son tombeau d’Argos pour se rejeter sous la hache de Clytemnestre : Œdipe remonte de sa sépulture ignorée au soleil des vivants qu’il revoit encore ; il revient remplir de ses lamentations le palais de Thèbes, et mourir, une seconde fois, sur le Cythéron.

479. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre II. La Renaissance. — Chapitre I. La Renaissance païenne. » pp. 239-403

Qu’est-ce qu’un lever de soleil pour un homme ordinaire ? […] Que ce soleil est triste lorsqu’il se lève dans le brouillard au-dessus « des sillons mornes !  […] « Ses lèvres, dit Greene, sont des roses toutes trempées dans la rosée,  — ou pareilles à la pourpre de la fleur du narcisse. —  Ses yeux, ces beaux yeux, ressemblent aux pures clartés — qui animent le soleil ou égayent le jour. —  Ses joues sont comme des lis épanouis plongés dans le vin,  — ou comme des grains de belles grenades trempés dans le lait,  — ou comme des fils de neige dans des réseaux de soie cramoisie,  — ou comme des nuages splendides au coucher du soleil. »  — « Quel besoin de comparer là où la beauté surpasse toute ressemblance ?  […] Un jour, dans une fraîche fontaine solitaire où le soleil étalait ses rayons, Chrysogone baignait son corps parmi les roses et les violettes d’azur. Elle s’endormit lassée sur l’herbe épaisse, et les rayons du soleil épanchés sur son sein nu la fécondèrent333.

480. (1898) Ceux qu’on lit : 1896 pp. 3-361

Connue à travers une dentelle rousse, et déchirant ce délicat réseau, plongeait la rudesse du soleil. […] Quant au Soleil, il n’a plus rien dans le ventre. […] — Vous manquez de respect à la critique. — Le Printemps et le Soleil : J’te crois ! […] Hervé, du Soleil, entendu dans la matière, ne prendrait-il pas l’initiative de cette proposition ? […] « L’excuse de la campagne, s’écrie-t-il, c’est l’air et le soleil » ; mais hélas !

481. (1881) Études sur la littérature française moderne et contemporaine

Les soleils peuvent mourir et renaître ; mais nous, une fois que notre courte lueur est éteinte, il nous faut dormir une nuit éternelle. […] L’eau du fleuve pétille au soleil. […] C’est le même soleil, le même ciel d’été Versant les mêmes feux splendides. […] Jupiter ne darde pas continuellement le soleil ni la foudre. […] L’éphèbe, frotté d’huile, luttait tout nu en plein soleil.

482. (1892) La vie littéraire. Quatrième série pp. -362

Il n’a qu’un soleil, tandis que beaucoup de systèmes en ont deux ou trois. […] On croit avoir remarqué que Vénus ne présente jamais qu’une face au soleil. […] Au coucher du soleil, il frappait à la porte de son château. […] Tandis qu’il fréquentait à Nicomédie les tombeaux des martyrs, il méditait sur les mystères de la bonne déesse et sur la divinité du Soleil. […] Ses idées sur le Soleil et sur la mère des dieux sont tirées de Porphyre et de Jamblique.

483. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Appendice — I. Sur M. Viennet »

Qu’on ne vienne plus dire que l’École poétique moderne a triomphé sur toute la ligne ; que Lamartine plane d’en haut ; que Victor Hugo, de son rocher de Guernesey, règne dans son soleil couchant et triomphe avec sa Légende des siècles ; M. 

484. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — A — Aicard, Jean (1848-1921) »

Ô soleil !

485. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — V — Van Lerberghe, Charles (1861-1907) »

Van Lerberghe note ainsi sur l’amour, l’ingénuité de l’amour, sur la mort, sur l’attente de l’espérance de la découverte, des lieds imprécis et charmants, où les syllabes semblent du silence enchanté, et c’est ainsi : La Ménagère, Dans la pénombre (un poème de seize absolument charmant), La Barque d’or que connaissent bien les lettrés : Mais une qui était blonde,         Qui dormait à l’avant, Dont les cheveux tombaient dans l’onde,         Comme du soleil levant Nous rapportait sous ses paupières         La lumière.

486. (1920) La mêlée symboliste. II. 1890-1900 « L’expression de l’amour chez les poètes symbolistes » pp. 57-90

Il porte le reflet de : L’ardent soleil païen qui l’a fait naître un jour De ton écume d’or, ô Beauté suraiguë ! […] Tous y volent, comme Icare, au soleil, au risque de partager le désastre de ses mies fracassées. […] C’est cet amour affranchi des hontes du sexe, que Nietzsche saluait en déclarant : « Nous voulons vivre au-dessus des impurs comme les vents forts, voisins des aigles, de la neige et du soleil. » Voilà ce que dit ou du moins ce que nous fournit à dire M. 

487. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Émile Augier — Chapitre Premier »

Les livres des Proverbes et de l’Ecclésiaste sont pleins de sentences qui, sous leur splendeur orientale, ne recèlent, comme les fruits de la mer Morte, que poison et cendres. « À une grande sagesse se joint un grand chagrin ; augmenter la science, c’est augmenter la douleur. » — « Et j’ai haï la vie, car tout ce qui se fait sous le soleil me déplaisait. » — « J’ai trouvé la femme plus amère que la mort, la femme qui est un piège, dont le cœur est un filet, et dont les mains sont des liens. » — Aux lueurs du bûcher de Sardanapale, les rêveurs de l’inassouvi et de l’impossible entrevoient en lui un ancêtre. […] c’est l’homme qui, sans chagrins dans la vie, ayant contemplé ces beaux spectacles : le soleil, l’eau, le feu, les nuages, s’en est retourné bien vite d’où il était venu. […] M. de Pienne, abaissant devant Diane l’arme insensée de sa gageure, lui aurait dit, en s’inclinant : « Madame, celui qui va mourir vous remercie et vous salue. » En ce temps-là, le duel était une mode, un fanatisme, un délire, et plus il était fou, fantasque et chimérique, plus la fête était belle et plus glorieuse la rencontre. « Je t’ai vu — dit le Mercutio de Shakespeare à Tybalt — chercher dispute à un homme qui toussait dans la rue, parce qu’il avait éveillé ton chien, qui dormait au soleil. « Ainsi faisaient les raffinés de la place Royale et du Cours.

488. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Études sur Saint-Just, par M. Édouard Fleury. (2 vol. — Didier, 1851.) » pp. 334-358

On dirait que le soleil du 10 août, qui se lève déjà à l’horizon, lui donne sur la tête et lui embrase le cerveau : Je vous prie, mon cher ami (écrit-il à un M.  […] Et un écrivain aussi a très bien défini Saint-Just : « C’est un monstre bien peigné et qui débite des apophtegmes. » Dans sa parole brève, concise et coupante, et assez habilement relevée de rares images, il ne doutait de rien : Travaillons enfin pour le bonheur du peuple, disait-il magistralement, et que les législateurs qui doivent éclairer le monde prennent leur course d’un pied hardi, comme le soleil. […] On voit quel est cet ordre d’images : les torrents, l’orage, le tonnerre, le vautour, le soleil, en font les frais.

489. (1892) Journal des Goncourt. Tome VI (1878-1884) « Année 1879 » pp. 55-96

Avec ce quelque chose d’appuyé et de ressenti, que les bien malades mettent dans leurs paroles, elle revenait amoureusement sur ces jours où elle servait de modèle à son mari, du matin au soir, sur ces jours tout pleins de ses peurs de l’eau, et où cependant sans rien dire, elle posait dans un remuant bateau, en robe blanche, frissonnante du froid du coucher du soleil et de la terreur de chavirer. […] Dimanche 6 juillet Tout ce temps, où le soleil ressemble à la lampe, dont les brodeuses s’éclairent avec une boule d’eau, tout ce temps de ciel couvert au fond d’une humidité tépide, me jette dans une tristesse, dans un ennui, dans un gris de l’âme, que n’éclairent, ni la publication de mes livres, ni mes folies japonaises. […] Dimanche 14 septembre Pendant que tout le monde du château de Saint-Gratien est à la messe, et que nous sommes, tous deux, assis dans un rayon de soleil, Anastasi me conte ses maux, son désespoir.

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