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1843. (1888) La critique scientifique « La critique scientifique — Analyse sociologique »

Ainsi, ce n’est point une assertion inexacte de prétendre déterminer un peuple par sa littérature ; seulement il faut le faire non en liant les génies aux nations, mais en subordonnant celles-ci à ceux-là, en considérant les peuples parleurs artistes, le public par ses idoles, la masse par ses chefs.

1844. (1896) Les origines du romantisme : étude critique sur la période révolutionnaire pp. 577-607

Les romantiques, qui sont les domestiques chargés de satisfaire les goûts intellectuels de la classe régnante et payante, prétendirent ne peindre dans leurs chefs-d’œuvre que « l’homme de tous les temps », « que les passions de l’être humain invariable à travers les siècles ».

1845. (1856) Cours familier de littérature. I « Ier entretien » pp. 5-78

La malignité, qui prétend tout expliquer, insinuait qu’il avait été Jésuite, et sa prodigieuse instruction classique avait donné quelque vraisemblance à cette rumeur.

1846. (1914) Boulevard et coulisses

En conviant cette fois-ci à être votre président de table un simple homme de lettres, j’ai deviné tout de suite que ce n’était pas de l’éloquence que vous attendiez de lui ; je crois même que vous me garderiez une secrète rancune d’y prétendre devant vous, et cette pensée me met bien à mon aise.

1847. (1900) Le rire. Essai sur la signification du comique « Chapitre III. Le comique de caractère »

Elle consiste à prétendre modeler les choses sur une idée qu’on a, et non pas ses idées sur les choses.

1848. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME DE STAEL » pp. 81-164

Les adversaires et les critiques qui se servent volontiers d’une supériorité pour en combattre une autre dans tout grand individu trop complet à leurs yeux33, qui prennent acte du talent déjà prouvé contre le talent nouveau auquel il prétend, rendent sur ce point à Mme de Staël un hommage intéressé et quelque peu perfide, égal, quoi qu’il en soit, à celui de ses admirateurs. […] » Mais, sans nous hasarder à prétendre que Mme de Vernon soit en tout point un portrait légèrement travesti, sans trop vouloir identifier avec le modèle en question cette femme adroite dont l’amabilité séduisante ne laisse après elle que sécheresse et mécontentement de soi, cette femme à la conduite si compliquée et à la conversation si simple, qui a de la douceur dans le discours et un air de rêverie dans le silence, qui n’a d’esprit que pour causer et non pas pour lire ni pour réfléchir, et qui se sauve de l’ennui par le jeu, etc., etc., sans aller si loin, il nous a été impossible de ne pas saisir du moins l’application d’un trait plus innocent : « Personne ne sait mieux que moi, dit en un endroit Mme de Vernon (lettre xxviii, 1re partie), faire usage de l’indolence ; elle me sert à déjouer naturellement l’activité des autres… Je ne me suis pas donné la peine de vouloir quatre fois en ma vie, mais quand j’ai tant fait que de prendre cette fatigue, rien ne me détourne de mon but, et je l’atteins ; comptez-y. » Je voyais naturellement dans cette phrase un trait applicable à l’indolence habile du personnage tant prôné, lorsqu’un soir j’entendis un diplomate spirituel, à qui l’on demandait s’il se rendait bientôt à son poste, répondre qu’il ne se pressait pas, qu’il attendait : « J’étais bien jeune encore, ajouta-t-il, quand M. de Talleyrand m’a dit, comme instruction essentielle de conduite : N’ayez pas de zèle ! 

1849. (1926) La poésie pure. Éclaircissements pp. 9-166

Lucien Fabre, s’est élancée du tremplin de ces lignes, prises dans divagations, de Stéphane Mallarmé : je sais, on veut à la musique limiter le mystère, quand l’écrit y prétend… (p. 288). " la poésie, proche l’idée, est musique par excellence… (p. 277) " cette musique aboutissant à « la divine transposition », pour l’accomplissement de quoi existe l’homme… (p. 121.) […] Car il faut distinguer entre le sujet plastique, déterminé par un choix des formes-dans ce choix le rôle de la raison est important, et le sujet proprement cérébral fourni par une anecdote qui peut être indifféremment artistique ou littéraire, poétique ou prosaïque, avec laquelle la raison prend une initiative abstraite, séparée, fort dangereuse pour l’art qu’elle prétend servir.

1850. (1923) Paul Valéry

Le prétendu mystère de la Joconde vient de toute autre chose que du mystère, « Ce n’est pas d’imprécises observations et de signes arbitraires que se servait Léonard. […] Et à propos du prétendu abîme de Pascal il dit de Léonard : « Un abîme le ferait songer à un pont.

1851. (1891) Impressions de théâtre. Cinquième série

Les chefs-d’œuvre les plus aimés, sinon les plus surprenants, sont encore des histoires d’amour… La conclusion, c’est que les diverses passions humaines étant, dans la réalité, constamment enchevêtrées, l’auteur dramatique qui, en haine du banal et par un goût prétendu de vérité, ne nous montre que les luttes de la cupidité et de l’ambition, fait une œuvre aussi artificielle que celui qui ne nous veut montrer que l’amour. […] Quelquefois, l’auteur dramatique, tout en nous montrant des personnages qui peuvent être assez vrais pris en eux-mêmes, prétend nous rendre sympathiques des créatures d’une bonté fort douteuse, ou exciter notre indignation contre des êtres si pareils à nous que nous leur devons un peu d’indulgence. […] Je ne vous retire rien ; je vous empêche seulement de prétendre à ce que vous ne pouvez acquérir sans mensonge, sans trahison et sans crime. […] Car c’est comme si, atteint de daltonisme, je prétendais juger le tableau d’un peintre à rétine normale, étant donné que tout le sens et l’effet de ce tableau est dans l’opposition des couleurs. […] Là-dessus, notre comtesse de steppes, qui met volontiers une sorte de solennité religieuse dans ses façons d’agir, assemble tout le château et dénonce publiquement le prétendu crime de Constance et du comte.

1852. (1829) Tableau de la littérature du moyen âge pp. 1-332

Bien que l’on ait prétendu que la mémoire seule avait d’abord transmis les grands poëmes homériques, l’exemple des troubadours et des chants populaires de la Grèce moderne, me fait croire que là où la civilisation est peu avancée, la poésie ne fait guère de longs ouvrages. […] Arnaud Daniel, de qui le célèbre Arnaud d’Andilly prétendait descendre, avait beaucoup écrit en latin dans sa jeunesse, et avait composé, en langue romane, un chant qu’il appelait les Visions du Paganisme, « las Phantomarias del Paganisme ». […] Saint Jérôme, qui avait appris l’hébreu à Bethléem, où il traduisit les Livres saints, prétendait y retrouver l’hexamètre latin, et n’indique aucun autre caractère du mètre hébraïque. […] De savants hommes ont prétendu que ces paroles metro et rhythmo, n’étaient pas applicables à des chansons en langue vulgaire, et désignaient des vers latins, ou mesurés ou rimés, selon l’usage du temps.

1853. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Ma biographie »

. — Et puis, voyez-vous, qu’est-ce que ces pertes obscures dont on prétend faire tant de bruit ?

1854. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « DE LA MÉDÉE D’APOLLONIUS. » pp. 359-406

Je ne veux certes point prétendre que Virgile ne soit pas un écrivain plus parfait qu’Apollonius ; mais ici, par cela même qu’il l’imite, il raffine un peu, et, tout en traduisant merveilleusement l’image, il nous la rend un peu moins simple.

1855. (1870) De l’intelligence. Deuxième partie : Les diverses sortes de connaissances « Livre troisième. La connaissance de l’esprit — Chapitre premier. La connaissance de l’esprit » pp. 199-245

L’interlocuteur de Blake le pria de demander à Richard III s’il prétendait justifier les meurtres qu’il avait commis pendant sa vie.

1856. (1859) Cours familier de littérature. VIII « XLVIIe entretien. Littérature latine. Horace (1re partie) » pp. 337-410

Boileau, quoique copiste d’Horace, a traité le même sujet dans son Art poétique avec une grande supériorité sur le poète romain, bien que Boileau fût infiniment moins poète que l’ami de Mécène ; mais Horace ne prétendait qu’à faire une ébauche, Boileau faisait un poème.

1857. (1860) Cours familier de littérature. X « LVIe entretien. L’Arioste (2e partie) » pp. 81-160

Les pairs de Charlemagne décident qu’après un si rude assaut supporté sans défaite par le prétendu Léon, Bradamante doit être le prix légitime de sa valeur.

1858. (1862) Cours familier de littérature. XIV « LXXXIe entretien. Socrate et Platon. Philosophie grecque (1re partie) » pp. 145-224

Elle gouverne tous les éléments dont on prétend qu’elle est composée, leur résiste pendant presque toute la vie, et les dompte de toutes les manières, réprimant les unes durement et avec douleur, comme dans la gymnastique et la médecine ; réprimant les autres plus doucement, gourmandant ceux-ci, avertissant ceux-là ; parlant au désir, à la colère, à la crainte, comme à des choses d’une nature étrangère : ce qu’Homère nous a représenté dans l’Odyssée, où Ulysse, se frappant la poitrine, gourmande ainsi son cœur : — Souffre ceci, mon cœur ; tu as souffert des choses plus dures. » On voit par cette citation, et par mille autres citations d’Homère dans la bouche de Socrate, que ce philosophe était bien éloigné de l’opinion sophistique de Platon proscrivant les poètes de la République, mais qu’au contraire Socrate regardait Homère comme le poète des sages, et comme le révélateur accompli de toute philosophie, de toute morale et de toute politique dans ses vers, miroir sans tache de l’univers physique, métaphysique et moral de son temps.

1859. (1865) Cours familier de littérature. XX « CXVIIe entretien. Littérature américaine. Une page unique d’histoire naturelle, par Audubon (1re partie) » pp. 81-159

Ainsi les noirs, qui seraient tenus hors la loi des marchés à New-York, y subissent et y subiront la loi du mépris, l’ostracisme de la misère, l’extinction de leur race par la faim dans la fédération qui prétend faire la guerre au Sud pour la liberté et l’égalité des noirs !

1860. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre VIII. La littérature et la vie politique » pp. 191-229

Discours, pamphlets, brochures, articles de polémique éclosent avec une formidable abondance ; et, après ces ouvrages inspirés par les circonstances, animés par les passions du jour, adressés aux contemporains et peu soucieux de la postérité, il en apparaît bientôt d’autres plus médités, plus apaisés, plus froids en apparence, mais où il n’est pas difficile de retrouver le feu couvant sous la cendre ; j’entends les mémoires et les histoires qui prétendent transmettre à l’avenir et déjà juger les événements de la veille.

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