Comment un peuple, qui possédait un Montesquieu, a-t-il été prendre un J. […] Rousseau, et où peut-il mener son peuple ? […] Malheur au peuple qui chercherait ainsi son gouvernement dans les nues ! […] Dieu est le sujet du peuple ou du roi ! […] Le peuple, plus il est peuple, c’est-à-dire plus il est gouverné par les instincts de la nature, tient à ce droit d’aînesse avec plus de ténacité que l’aristocratie elle-même.
Le Verbe s’était fait peuple, pour nous servir d’une expression sacrée, et ce peuple était la France. […] Un peuple ne vit pas plus longtemps qu’un poète sur le trépied. […] Les généreuses illusions sont toutes brûlantes au premier moment dans l’âme du peuple ; elles animent les premiers orateurs qui sortent du sein de ce peuple ; elles élèvent un instant ce peuple au-dessus de lui-même. […] On ne reconnaît plus le peuple de la veille : exagération ou défaillance, c’est le nom de ces secondes assemblées. […] Elle répudia du cœur la langue, les idées, la littérature d’un peuple dont le gouvernement avait pour premier ministre le bourreau.
Telle est l’unité sociale ; réunissons-en plusieurs, mille, cent mille, un million, vingt-six millions, et voilà le peuple français. […] Pendant des années, le gouvernement parlera au peuple comme à un berger de Gessner. […] Au nom de la souveraineté du peuple, on retire au gouvernement toute autorité, toute prérogative, toute initiative, toute durée et toute force. Le peuple est souverain, et le gouvernement n’est que son commis, moins que son commis, son domestique. — Entre eux « point de contrat » indéfini ou au moins durable, « et qui ne puisse être annulé que par un consentement mutuel ou par l’infidélité d’une des deux parties ». — « Il est contre la nature du corps politique que le souverain s’impose une loi qu’il ne puisse jamais enfreindre. » — Point de charte consacrée et inviolable « qui enchaîne un peuple aux formes de constitution une fois établies ». — « Le droit de les changer est la première garantie de tous les autres. » — « Il n’y a pas, il ne peut y avoir aucune loi fondamentale obligatoire pour le corps du peuple, pas même le contrat social. » — C’est par usurpation et mensonge qu’un prince, une assemblée, des magistrats se disent les représentants du peuple. « La souveraineté ne peut être représentée, par la même raison qu’elle ne peut être aliénée… À l’instant qu’un peuple se donne des représentants, il n’est plus libre, il n’est plus… Le peuple anglais pense être libre, il se trompe fort ; il ne l’est que durant l’élection des membres du Parlement ; sitôt qu’ils sont élus, il est esclave, il n’est rien… Les députés du peuple ne sont donc ni ne peuvent être ses représentants ; ils ne sont que ses commissaires, ils ne peuvent rien conclure définitivement. […] À la souveraineté du roi, le Contrat social substitue la souveraineté du peuple.
Le peuple est bien plus sage que les philosophes. […] Le capitaine marchait à leur tête, et le peuple suivait en chantant avec eux l’Ave, maris Stella. […] Le peuple était persuadé que nul ne commet une méchante action, sans se condamner à avoir, le reste de sa vie, d’effroyables apparitions à ses côtés. […] Enfin, les vents, les pluies, les soleils, les saisons, les cultures, les arts, la naissance, l’enfance, l’hymen, la vieillesse, la mort, tout avait ses saints et ses images, et jamais peuple ne fut plus environné de divinités amies, que ne l’était le peuple chrétien. […] Ce qu’il y aura d’étonnant pour les sophistes, c’est qu’au milieu des maux qu’ils auront causés, ils n’auront pas même la satisfaction de voir le peuple plus incrédule.
Le passage de Tacite que nous avons cité plus haut, nous porte à croire qu’il en fut de même chez tous les peuples barbares de l’antiquité, et par suite, à conjecturer que la loi salique qui était certainement en vigueur dans la Germanie, fut aussi observée généralement par les peuples du moyen âge. […] Lorsque l’Empire passa des nobles au peuple, les plébéiens qui faisaient consister toutes leurs forces, toutes leurs richesses, toute leur puissance dans la multitude de leurs fils, commencèrent à sentir la tendresse paternelle. […] Ils commencèrent à remédier aux vices, aux défauts des testaments, afin de favoriser la division des richesses qui font toute l’ambition du peuple. […] Le droit de cité ne s’était donné dans les temps anciens qu’à d’illustres étrangers qui avaient bien mérité du peuple romain ; ils l’accordèrent à quiconque était né à Rome d’un père esclave, mais d’une mère libre, ne le fût-elle que par affranchissement. […] Ces lois doivent avoir été postérieures aux décemvirs, auxquels les anciens peuples les ont rapportées, comme au type idéal du législateur.
« Il arrivera que les peuples, les vrais peuples, ceux qui ont l’orgueil de leur indépendance, la vertu de leur patriotisme, le zèle sacré de leur famille, de leur propriété, de leur gouvernement, monarchie ou république, commenceront à s’étonner, puis à s’alarmer, puis à s’irriter de cette invasion de la France, et à se demander si la liberté apportée à la pointe des baïonnettes ou des piques étrangères est bien la liberté ou la servitude. […] La Providence a soufflé pour toujours sur ce principe de l’accroissement indéfini des peuples, et il n’en est resté qu’un peu de noms et beaucoup de cendres. […] Tous ces peuples, d’après vous, en auraient le droit, et cependant la France périrait. […] Les armées sont les remparts vivants des peuples : offensives, elles sont de vils instruments de tyrannie ; défensives, elles sont le droit armé des nations. […] Il n’y eut plus de diplomatie entre les rois et entre les peuples.
Cette corruption curieuse est aujourd’hui répandue à Paris, où le peuple dit le levier. […] Le peuple avoue ne pouvoir les distinguer. […] Ces mots sont devenus des adjectifs parmi le peuple . […] Laissons le peuple dire perclue, puisqu’il le veut bien. […] On exprime par ce terme la tendance du peuple à ramener l’inconnu au connu.
L’estime de son peuple lui restait, mais le cœur de l’Italie était aliéné de lui. […] La guerre servait aux Vénitiens, comme plus tard aux Anglais, à étendre le trafic entre les peuples. […] Les flots semblent inspirer plus d’héroïsme que la terre aux peuples nés au sein des mers. […] Elle imita Rome dans ses premières lois : elle eut son peuple, son aristocratie, ses deux consuls, ses censeurs ; ses comices, composés de tout le peuple convoqué, se tenant sur la place publique. La noblesse donnait les consuls au peuple, le peuple reconnaissait ces consuls pour les tuteurs de ses droits contre la noblesse.
Les éloges funèbres que nous avons vu établir chez tous les peuples, ne furent connus en France que sur la fin du quatorzième siècle. […] Qu’on ne s’étonne pas de ce mot : tous les peuples désirent que leur maître, soit grand, et aiment à se le persuader. […] Il peint la haine et la fureur du peuple, qui aurait voulu arracher ce monstre des mains des bourreaux, pour le déchirer de ses propres mains. […] Le peuple, courbé sous ses travaux, prononce souvent le nom de Henri IV, et attache à ce nom des idées qui l’intéressent. […] Tel est l’hommage qu’au bout de 190 ans la reconnaissance des peuples rend encore aux vertus des rois.
La société ne repose plus sur les mêmes bases, et les peuples ont besoin d’institutions qui soient en rapport avec leurs destinées futures. […] Le dogme de la souveraineté du peuple, enté sur le système représentatif, système ancien dans nos habitudes nationales, mais rétabli dans un autre ensemble d’idées ; le dogme de la souveraineté du peuple, disons-nous, a fait croire que le corps institué comme organe de l’opinion et des besoins actuels du peuple, était investi du droit de concourir à la formation de la loi. […] Je me reportais surtout à cette époque mémorable qui vit tomber le polythéisme au milieu de l’effrayante corruption du peuple romain. […] À présent toute terre est cultivée ; et la science, sortie du sein des cloîtres, du fond des sanctuaires, s’est répandue parmi les peuples. […] L’expression du besoin, chez le peuple, a toujours une énergie sauvage et funeste.
… Est-il permis de manquer d’intérêt et de vie quand il s’agit du peuple le plus curieux et le moins connu, quoiqu’on en ait immensément parlé, de ce peuple magot et falot qui ressemble aux visions produites par l’opium qu’il fume, et qu’on pourrait appeler le plus fantastique de tous les peuples ? […] que cette histoire dépasserait en renseignements et en aperçus les autres histoires insuffisantes, et que nous apprendrions quelque chose de nouveau sur ce peuple étrange, qui, du fond de sa gravité imperturbable, a l’air de se moquer de nous. […] Nonobstant cette petite volée de bois vert, comme disait Figaro, appliquée sur l’échine d’un pédant, — car la Chine est bien quelque peu pédantesque, — les uns ont fait du peuple chinois le plus ancien, le plus grand, le plus spirituel, le plus digne, le plus sage de tous les peuples, philosophique et cependant religieux (ce qui, en Chine seulement, n’implique pas contradiction !) […] Pour ces admirateurs effrénés, la Chine n’a été ni un peuple ni un gouvernement, mais une civilisation tout entière, mais la fleur inconnue jusque-là et splendide d’une civilisation qu’aucun déluge n’avait été assez puissant pour noyer comme un nénuphar (comparaison chinoise !) […] Les détails qu’ils empilent dans leur histoire, toutes leurs manières de voir, leur admiration incessamment trahie, appuieront, sans beaucoup la soutenir, il est vrai, l’opinion qui fait du peuple chinois l’un des plus grands peuples du monde.
La langue est le tableau de la vie ; c’est l’assemblage de toutes les idées d’un peuple, manifestées au-dehors par des sons. […] Malgré les orages de la liberté, les grands intérêts, et le plaisir de gouverner par la parole un peuple libre, il n’y eut pas un orateur qu’on pût citer avant Caton ; lui-même était encore hérissé et barbare. […] Cependant la langue d’un peuple guerrier tendait à la fierté et à la précision ; d’un peuple qui commandait aux rois, à une certaine magnificence ; d’un peuple qui discutait les intérêts du monde, à une certaine gravité ; d’un peuple libre et dont toutes les passions étaient énergiques et fortes, à l’énergie et à la vigueur : et lorsque cette langue fut enrichie de toutes les dépouilles des Grecs, lorsque les conquérants eurent trouvé dans les pays conquis des leçons, des maîtres et des modèles, et que les richesses du monde en introduisant à Rome la politesse et le luxe, y eurent fait germer le goût, alors l’éloquence s’éleva à la plus grande hauteur, et Rome put opposer Cicéron à Démosthène, comme César à Périclès, et Hortensius à Eschine. […] Nous lisons dans Denys d’Halicarnasse, que le fils d’Appius alla trouver les consuls, et les tribuns pour demander la permission de louer son père devant le peuple. […] Il était beau d’attester sur les ruines même de ses palais, l’heure et le jour où le sénat et le peuple l’avait proclamé le père de la patrie.
Bossuet, dans la suite du peuple juif, voit partout le Messie prédit, annoncé, et ne cesse d’y tendre. […] Ici l’on remarque chez le peuple juif un singulier interrègne de prophètes depuis Malachie, le dernier des prophètes de l’ancien peuple, jusqu’à Jésus-Christ. […] tant pis pour ces Pharisiens et pour le peuple gâté par eux ! […] Elle était insuffisante toutefois et devait l’être, l’honneur de convertir les peuples ne lui étant pas réservé. […] C’est que la grandeur et l’immutabilité de ce peuple l’avaient saisi.
Mais ces deux poèmes qui nous sont parvenus, nous forcent de n’admettre cette opinion qu’à demi, et de dire qu’Homère a été l’idéal ou le caractère héroïque du peuple de la Grèce racontant sa propre histoire dans des chants nationaux. […] D’abord l’incertitude de la patrie d’Homère nous oblige de dire que si les peuples de la Grèce se disputèrent l’honneur de lui avoir donné le jour, et le revendiquèrent tous pour concitoyen, c’est qu’ils étaient eux-mêmes Homère. — S’il y a une telle diversité d’opinion sur l’époque où il a vécu, c’est qu’il vécut en effet dans la bouche et dans la mémoire des mêmes peuples, depuis la guerre de Troie jusqu’au temps de Numa, ce qui fait quatre cent soixante ans. — 2. […] C’étaient de pauvres gens qui gagnaient leur vie à chanter par les villes les poèmes homériques, dont ils étaient auteurs, en ce sens qu’ils faisaient partie des peuples qui y avaient consigné leur histoire. — 3. […] Au temps de la jeunesse d’Homère, la fierté d’Agamemnon, l’insolence et la barbarie d’Achille plaisaient aux peuples de la Grèce. […] On a rapporté ces lois au législateur d’Athènes, d’où elles seraient passées à Rome, et l’on n’y a point vu l’histoire du droit naturel des peuples héroïques du Latium ; on a cru que les poèmes d’Homère étaient la création du rare génie d’un individu, et l’on n’y a pu découvrir l’histoire du droit naturel des peuples héroïques de la Grèce.
Les peuples barbares veulent des martyrologes, comme ceux des Scandinaves. Les peuples chevaleresques veulent des aventures, comme celles du Cid ou de Roland. […] Les peuples artistes veulent des harangues et des réflexions, comme celles de Thucydide. Les peuples avilis veulent des obscénités, comme celles de Suétone. […] C’est le Molière grave et politique des peuples en révolution ; le peuple romain pose, non-seulement devant son peintre, mais devant son juge.
Identiques dans la corruption et dans la mort, qui a vu un de ces peuples les a vus tous. […] Il a trop appris par leurs livres même combien les peuples asiatiques méritent peu les recherches de l’histoire et comme c’est prouvé par la leur ! […] … De tous les peuples connus à qui le Christianisme ait offert sa coupe de rafraîchissement, de lumière et de paix, le peuple chinois est celui qui l’a le plus repoussée, le plus rejetée de ses lèvres, le plus renversée sur les mains des apôtres infatigables à la lui offrir ! Pourquoi Dieu, lassé à la fin, n’aurait-il pas sorti ce peuple ingrat de l’orbe de ses miséricordes ? […] La Chine maintenant ne peut plus être cette indifférente séculaire dont nous avons secoué quelquefois la torpeur, avec des rites et des dogmes qui n’étaient au fond que des nouveautés amusantes pour son loisir de peuple ennuyé.
L’Angleterre en est là, un illustre et puissant peuple. […] Sachons, dans l’occasion, dire leur fait aux peuples. […] Flatter les peuples serait pire que flatter les rois. […] Nul peuple n’est plus illustre, plus noble, plus magnifique et plus magnanime que le peuple français. […] Il est moral que les peuples soient bons payeurs en fait de reconnaissance.
Les peuples y combattaient pro aris et focis, expression qui désignait tout l’ensemble des rapports sociaux, puisque toutes les choses humaines étaient considérées comme divines. Les hérauts qui déclaraient la guerre appelaient les dieux de la cité ennemie hors de ses murs, et dévouaient le peuple attaqué. […] Le peuple le renvoya absous, plutôt par admiration pour son courage, que pour la bonté de sa cause . […] Nous retrouvons la même opinion chez les peuples héroïques dans la guerre comme dans la paix. […] Ces sectæ temporum caractérisent la jurisprudence romaine, d’accord en ceci avec tous les peuples du monde.