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2329. (1881) La parole intérieure. Essai de psychologie descriptive « Chapitre III. Variétés vives de la parole intérieure »

Nous venons de citer des exemples types : dans le premier, l’imagination domine évidemment ; dans les trois autres, la passion semble pure de tout mélange ; mais rarement la passion s’éveille sans éveiller en quelque mesure l’imagination ; la raison en est que rarement l’objet de la passion est purement intellectuel, c’est-à-dire d’ordre général, scientifique ou politique ; quand je n’ai d’autre société intérieure qu’une société abstraite, consistant dans des concepts que parcourt mon entendement, mêlés à des noms propres de personnages ou de pays que je ne connais que par ouï-dire et qui valent pour mon esprit des abstractions, alors je suis, à vrai dire, seul avec ma pensée, je n’ai point de société véritable, et, d’ordinaire, je reste calme228 ; l’émotion, presque toujours, me fait rentrer dans la vie réelle, dans la vie sociale ; ce qui m’émeut en joie ou en tristesse, c’est quelque objet concret de la nature, le plus souvent quelque personne humaine, dont mon souvenir reproduit l’image plus ou moins nette, et, avec cette image, le son spécifique.

2330. (1904) Essai sur le symbolisme pp. -

Et si vous tiriez au clair les derniers sentiments qui se cachent en lui, vous trouveriez qu’il n’est pas un seul homme qui ne soit infiniment inconsolable à la pensée qu’il y ait quelque part, dans le pays le plus reculé de l’univers, une petite source où il n’ait pas encore bu ! 

2331. (1853) Histoire de la littérature dramatique. Tome II « Chapitre premier. Ce que devient l’esprit mal dépensé » pp. 1-92

Vingt ans, ce n’est pas assez pour accomplir une révolution littéraire, dans un pays comme la France, plus fidèle à ses poètes qu’à ses rois. […] Despréaux que Molière, qui peint avec tant de force et de beauté les mœurs de son pays, tombe trop bas quand il imite le badinage de la comédie italienne. » Et Fénelon cite, pour finir, les deux vers de Boileau à propos du sac ridicule où Scapin s’enveloppe.

2332. (1769) Les deux âges du goût et du génie français sous Louis XIV et sous Louis XV pp. -532

Il fallait ces couleurs brutes & locales pour peindre ce pays barbare. […] Le chant est si naturel à l’homme qu’on a chanté dans tous les pays de la terre, depuis le fond de la Laponie jusqu’au centre de l’Amérique, depuis le Masulipatan jusqu’au Monomotapa. […] Ses Musiciens nous prouvent que le génie est de tous les pays, & que l’art pour se perfectionner n’a besoin que des secours du génie.

2333. (1893) Des réputations littéraires. Essais de morale et d’histoire. Première série

Les voix de la multitude, sincères ou non, intelligentes ou niaises, font nombre, et quelle que soit la valeur individuelle de chacune, leur masse a une puissance souveraine, qu’il n’est pas permis de mépriser en pays de suffrage universel. […] La femme d’esprit sage et modeste, de grande et aimable culture, qui signe Léo Quesnel dans les revues, constate, à la fin d’un article sur Robert Buchanan, poète anglais, que le succès de cet écrivain dans son pays est loin d’égaler ses mérites : anomalie qu’elle explique par cette considération que Buchanan, animé de sentiments désintéressés et généreux, d’un souci ardent de la justice sociale et d’une pitié immense pour les faibles, « n’a pas les passions de son peuple ». […] Ainsi rêve la critique lorsqu’elle s’amuse à supposer des changements d’époques, des mutations de pays et autres combinaisons de circonstances différentes de celles que nous présente l’histoire.

2334. (1890) Nouvelles questions de critique

L’abus de la rhétorique, voilà le défaut des avocats, dans tous les temps et dans tous les pays, parce qu’il leur faut presque toujours surfaire, pour la plaider éloquemment, la cause qu’ils ont entreprise. […] C’est ce qu’essaya « l’École du bon sens », dont on s’est tant moqué, dans un pays où jusqu’alors le bon sens ne s’était jamais séparé du génie qu’au détriment de tous deux.

2335. (1914) En lisant Molière. L’homme et son temps, l’écrivain et son œuvre pp. 1-315

Les Précieuses ridicules On ne voit pas, quoi qu’en ait dit Voltaire, que les Précieuses ridicules aient été jouées en province avant de l’avoir été à Paris et elles ont bien l’air d’être le premier ouvrage parisien de Molière ; elles sont d’un homme qui arrive dans un pays nouveau pour lui tant il sa quitté depuis longtemps, qui en flaire vite le ridicule le plus sensible et qui fait de ce ridicule le premier gibier de sa chasse. […] Les Amants magnifiques Cette pièce, commandée à Molière par le Roi pour s’adapter à une série de divertissements — il est incalculable combien la faveur du Roi pour Molière lui a fait perdre de temps à des niaiseries et a coûté de chefs-d’œuvre à notre pays — cette pièce ne pouvait guère être bonne et elle ne l’est point. […] Détail : être résigné, n’être pas ambitieux, n’être pas aventureux, n’être pas chevaleresque, n’être pas généreux, ne pas se mêler des affaires des autres, ne pas se dévouer aux autres, être économe, ne pas s’occuper des affaires de son pays, ce qui vous fait des ennemis et des amis aussi, mais qui finissent toujours par vous trahir, à ne pas mentir mais à dissimuler sans cesse les vérités qu’on aurait à dire, les exprimer ne vous mettant que des embarras inextricables, n’avoir aucune passion, ni bonne ni mauvaise, les mauvaises vous mettant très mal en point, mais les bonnes vous faisant presque autant de mal que les mauvaises, n’être pas méchant, mais n’être pas bon, n’être pas vicieux, mais à n’avoir qu’une vertu traitable et une sagesse avec sobriété ; en un mot être médiocre, toujours médiocre, médiocre en tout, médiocre avec persévérance, médiocre avec obstination, implacablement médiocre. […] Le dévouement à son pays ?

2336. (1898) Manuel de l’histoire de la littérature française « Livre II. L’Âge classique (1498-1801) — Chapitre II. La Nationalisation de la Littérature (1610-1722) » pp. 107-277

Et cependant d’être de tous les temps et de tous les pays, non seulement cela ne fait point qu’elles ne soient aussi du leur, mais il semble qu’une part au moins de leur originalité consiste en cela même. […] Cousin, Société française au xviie  siècle] ; — 2º des épisodes contemporains, comme dans sa Clélie, l’histoire de Scaurus et de Lydiane (Scarron et Françoise d’Aubigné) ; le songe d’Hésiode (tableau de la littérature) ; la description du pays de Tendre ; — et 3º une politesse ou une galanterie très supérieure à celles de La Calprenède et de Gomberville. — Finesse de quelques analyses. — Les romans de Mlle de Scudéry sont des romans « psychologiques ». […] III. — Histoire du théâtre français ; — Vie de Corneille ; — Réflexions sur la poétique ; — Description de l’empire de poésie [Cf. la carte du pays de Tendre]. — On y trouve les ligues suivantes, qui allaient évidemment (1678) à l’adresse des Racine et des Boileau : « La Haute poésie est habitée par des gens graves, mélancoliques, refrognés, et qui parlent un langage qui est à l’égard des autres provinces de la poésie ce qu’est le bas-breton à l’égard du reste de la France ». — Les Opéras de Fontenelle, et ses tragédies, dont une en prose, complètent le volume.

2337. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre I. Les origines. — Chapitre III. La nouvelle langue. » pp. 165-234

Chacun traverse à son tour et machinalement le petit pays des chicaniers râpés, s’écorche dans les broussailles des ergotages et se charge d’une dossée de textes : rien de plus ; le vaste corps de sciences qui devait former et vivifier toute la pensée de l’homme s’est réduit à un manuel.

2338. (1870) De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés « De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés — Chapitre VI : Difficultés de la théorie »

Les animaux domestiques que possèdent les sauvages de divers pays ont souvent à lutter pour leurs propres moyens de subsistance, et subissent ainsi jusqu’à un certain point l’action sélective de la nature ; de sorte que des individus doués de constitution un peu différente doivent mieux réussir les uns que les autres sous des climats différents.

2339. (1896) Les époques du théâtre français (1636-1850) (2e éd.)

Voilà des autorités, je pense, nous dit le poète, heureux de notre embarras ; et vous, Messieurs, si vous voulez sentir toute la force de son argument, songez de combien de pièces toute la critique que nous faisons se réduit à demander, d’un air incrédule et moqueur, où, en quel temps, dans quel monde, en quel pays se sont passés les événements ou rencontrés les caractères que l’on nous développe à la scène ? […] C’est l’art prestigieux, — je ne sache pas d’autre mot, — avec lequel Racine crée, pour chacune de ses tragédies, une atmosphère unique, et fait comme circuler, autour de ses personnages, l’air de leur temps et de leur pays.

2340. (1878) Leçons sur les phénomènes de la vie communs aux animaux et aux végétaux. Tome I (2e éd.)

— Développement de la physiologie dans les pays voisins. — Les installations de laboratoires. — Ce n’est pas tout : il faut surtout une bonne méthode et une saine critique expérimentale. […] Cette science toute moderne, née en France sous l’impulsion féconde de Lavoisier, Bichat, Magendie, etc., était jusqu’à présent restée, il faut le dire, à peu près sans encouragements, tandis qu’elle en recevait, par contre, de considérables dans les pays voisins. […] L’anatomie headriptive est à la physiologie ce qu’est la géographie à l’histoire, et de même qu’il ne suffit pas de connaître la topographie d’un pays pour en comprendre l’histoire, de même il ne suffit pas de connaître l’anatomie des organes pour comprendre leurs fonctions. […] C’est donc de notre pays qu’est partie l’impulsion ; et si le mouvement de rénovation ne s’y est point développé, tandis qu’il s’étendait en Allemagne et qu’il y portait tous ses fruits, nous pouvons au moins revendiquer le rôle honorable d’en avoir été les initiateurs.

2341. (1882) Études critiques sur l’histoire de la littérature française. Deuxième série pp. 1-334

Or c’est le propre du mysticisme, dans tous les temps et dans tous les pays, que tôt ou tard il mène ses adeptes aux plus honteux excès. […] « On imprime à Paris, dit un édit de 1649, si peu de bons livres, et ce qui s’en imprime paraît si manifestement négligé pour le mauvais papier qu’on y emploie et pour le peu de correction qu’on y apporte, que nous pouvons dire que c’est une espèce de honte et reconnaître que c’est un grand dommage à notre état… » Je lis encore dans un arrêt de 1725 : « Que le roi l’a rendu pour avoir été informé… que la négligence de plusieurs libraires et imprimeurs a donné lieu à différents abus qui ont excité les plaintes du public… et qui portent un préjudice considérable au commerce des livres d’impression de France dans le pays étranger. » Évidemment, l’intérêt du commerce français, l’utilité dont il est pour répandre l’influence et le renom français, le légitime orgueil de ce que l’on peut appeler, dès le commencement du xviiie  siècle, l’universalité de la littérature française, s’ils ne priment pas toute autre considération dans l’esprit des rédacteurs de ces arrêts et de ces édits, cependant ils n’y sont pas inutilement visés ; et, quand même on n’y verrait que des clauses de style, il faudrait pourtant avouer qu’il s’y est insinué quelque autre chose, au début, que le désir de borner la liberté d’écrire111. […] C’est l’art de tout dire sans être mis à la Bastille, dans un pays où il est défendu de rien dire… » L’abbé, secrétaire d’ambassade, conseiller de commerce, un peu ministre enfin, en parlait à son aise. […] Je n’ai pas eu le courage de prendre congé de vous ; ce sont des moments terribles pour un cœur sensible de se séparer pour toujours de ses amis et des personnes qu’on aime et qu’on estime et honore, et qui ont fait le bonheur de ma vie pendant mon séjour dans ce pays-ci.

2342. (1896) Essai sur le naturisme pp. 13-150

Le pays où naquit Werther, la carte du Tendre sont pour nous des choses non moins précises que la figuration de notre jardin ; et nous fréquentons davantage avec Hamlet, Candide et Louis Lambert que nous ne sympathisons avec les plus intimes de notre entourage.

2343. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre V. Les contemporains. — Chapitre V. La philosophie. Stuart Mill. »

Rarement, je vous l’accorde, un penseur a mieux résumé par sa doctrine la pratique de son pays ; rarement un homme a mieux représenté par ses négations et ses découvertes les limites et la portée de sa race.

2344. (1864) Le positivisme anglais. Étude sur Stuart Mill

Rarement, je vous l’accorde, un penseur a mieux résumé par sa doctrine la pratique de son pays ; rarement un homme a mieux représenté par ses négations et ses découvertes les limites et la portée de sa race.

2345. (1900) Molière pp. -283

Fléchier lui-même a écrit un livre prodigieux, étonnant, sous ce rapport, les Mémoires des grands jours d’Auvergne ; c’est un amas d’assassinats, d’empoisonnements, d’infamies de toutes sortes, commis par les seigneurs d’Auvergne contre des notaires, des avocats, des juges et des baillis de ce pays. […] « En 1857, écrivait Weiss vers la fin de sa vie, dans ce coin reculé et isolé du pays de France, palpitait encore au fond des esprits un peu de pure France classique.

2346. (1908) Après le naturalisme

Depuis ses origines et dans tous les pays, la Littérature a déjà traversé nombre de crises semblables de trouble et d’incertitude et toujours elles ont été suivies de périodes de régénération et de richesse nouvelle.

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