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1650. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Nouveaux documents sur Montaigne, recueillis et publiés par M. le docteur Payen. (1850.) » pp. 76-96

Quand les partis n’ont pas de chef ni de tête, quand ils se présentent par leur corps seul, c’est-à-dire par leur réalité la plus hideuse et la plus brutale, il est plus difficile et aussi plus hasardeux de se montrer envers eux si équitable et de faire à chacun sa part jusqu’au milieu de l’action. […] Et il continue de les montrer travaillant jusqu’à l’extrémité, même dans leur douleur, même dans leurs maladies, jusqu’au moment où la force leur manque : « Celui-là qui fouit mon jardin, il a ce matin enterré son père ou son fils… ils ne s’alitent que pour mourir. » Tout ce chapitre est beau, touchant, approprié, se sentant à la fois d’une noble élévation stoïque, et de cette nature débonnaire et populaire de laquelle Montaigne se disait à bon droit issu et formé.

1651. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Madame de Maintenon. » pp. 369-388

Quand, plus tard, elle sera devenue la personne indispensable de l’intérieur de Versailles, la compagne du roi, la ressource des princes, celle dont nul dans la famille royale ne pouvait se passer un seul instant, elle se montrera capable de miracles en fait de sujétion et d’ennui. […] Femme, elle avait des mots énergiques pour peindre cette satiété de tourments et d’angoisses qu’elle s’était donnés et qu’il lui fallait dissimuler par le sourire : « J’en ai quelquefois, comme l’on dit, jusqu’à la gorge. » On sait son mot, un jour qu’elle regardait de petits poissons bien malheureux et bien agités dans leur bassin propre et dans leur eau claire : « Ils sont comme moi, ils regrettent leur bourbe. » Mais c’est à Saint-Cyr que Mme de Maintenon aimait surtout à se réfugier dès qu’elle avait un moment, à se cacher, à s’épancher, à se plaindre, à se faire plaindre, à rêver sur son incompréhensible élévation, à se montrer en victime portant en elle seule tous les chagrins du royaume : « Oh !

1652. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « La princesse des Ursins. Lettres de Mme de Maintenon et de la princesse des Ursins — I. » pp. 401-420

Louville, l’un des principaux agents de l’influence française auprès de Philippe V avant l’arrivée de Mme des Ursins, s’est montré injuste et injurieux contre elle, et en a parlé comme un rival évincé, avec toutes sortes d’outrages, dans les Mémoires qu’on a publiés sous son nom et d’après ses papiers : les Mémoires de Noailles, rédigés par l’abbé Millot, sont plus équitables. […] Mais les lettres qu’on a de ce roi montrent qu’il n’était nullement besoin de cette extrême incartade pour l’indisposer contre Mme des Ursins.

1653. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Le duc d’Antin ou le parfait courtisan. » pp. 479-498

Les Mémoires que nous lisons, et qui ne sont guère qu’un examen moral et chrétien de conscience, nous le montrent au fond meilleur à bien des égards que ne le jugeait le monde et que les observateurs sévères ne le soupçonnaient. […] D’Antin, tout plat courtisan qu’il est, a donc une idée morale supérieure ; et, puisque j’en suis ici, non pas à le réhabiliter, mais à le montrer au vrai et sans que nous en puissions tirer orgueil, qu’on sache bien que la forme du courtisan n’a fait que changer ; elle a changé comme la forme même du souverain.

1654. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Paul-Louis Courier. — I. » pp. 322-340

Et ici j’aborderai franchement l’objection avec Courier, et je ne craindrai pas de montrer en quoi je le trouve étroit, fermé, négatif et injuste. […] On ne se fait pas un nom par là, mais on passe doucement la vie… En supposant que toutes les lettres qui portent la date de ces années aient été réellement écrites alors telles que nous les avons, il imitait, en effet, les anciens sans fatigue et avec un art adorable dans de petits sujets, soit qu’il adressât à sa cousine, Mme Pigalle, du pied du Vésuve des contes dignes de Lucius et d’Apulée (1er novembre 1807), soit qu’aux bords du lac de Lucerne, du pied du Righi, il envoyât à M. et à Mme Thomassin (25 août et 12 octobre 1809) des idylles malicieuses et fraîches où il aime à montrer toujours, à côté des jeunes filles joueuses ou effrayées, le rire du Satyre44.

1655. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Œuvres de Frédéric le Grand (1846-1853). — II. (Fin.) » pp. 476-495

Sa lettre à Algarotti au moment où il recevait cette nouvelle, nous l’a montré dans la première vivacité de sa plaie toute saignante. […] Pourtant les lettres à Jordan nous montrent qu’il ne l’a voulu que par point d’honneur, par amour pour un fantôme de réputation qu’il ne sait comment définir : Tu me trouveras plus philosophe que tu ne l’as cru.

1656. (1891) Journal des Goncourt. Tome V (1872-1877) « Année 1873 » pp. 74-101

Dimanche 16 mars Alphonse Daudet, qu’on m’avait montré applaudissant Henriette Maréchal, je le retrouve chez Flaubert. […] Ils se firent alors un plaisir de lui montrer, dans les plus grands détails, leur exposition.

1657. (1899) Esthétique de la langue française « Le vers libre  »

Qu’on veuille bien remarquer que, sauf le cas d’élision, cet élément, l’e muet, ne disparaît jamais même à la fin du vers ; on l’entend fort peu, mais on l’entend.  » Il a fallu citer ce passage pour montrer combien l’analyse des sons est difficile puisqu’un poète tel que M.  […] J’ai seulement voulu montrer qu’à huit siècles de distance on retrouve, en des circonstances peu analogues, la présence d’un vers qui souffre mal l’analyse prosodique, et qui est essentiellement différent de toutes les formes du vers, latines ou françaises.

1658. (1860) Ceci n’est pas un livre « Une préface abandonnée » pp. 31-76

………………………………………………………………………………… Cela dit, pour vous montrer le danger qu’il y a à publier de bonnes et belles pages, quand elles peuvent tomber aux mains d’un fanatique comme moi, qui n’ai rien de plus pressé que d’écrire sur le verso, Ô Karr, pardonnez-moi ! […] ils voguent gaiement à l’avenir inconnu, répondant par des calembours aux bourrasques du destin ; si l’un d’entre eux vient à faiblir et pleure, les autres lui montrent du doigt — à travers la brume — la maison Hachette…, l’Académie royale de musique… ou le palais de l’Exposition… Et, dans le lointain, le dôme de l’Institut, visible à peine, apparaît par intervalles.

1659. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « Prosper Mérimée »

Après les inexplicables engouements, quand la Critique aura cessé de sonner les cloches comme pour une naissance, la naissance de facultés inconnues et battant neuf dans feu Mérimée, ces lettres, sans amour sincère, sans éloquence de cœur, sans aperçus sur quoi que ce soit, sans un seul jaillissement ou pétillement d’idées ou de mots, montreront un Mérimée bien inférieur à celui de ses œuvres. […] Si donc on ne veut pas montrer la médiocrité ou la pauvreté de son âme, il faut bien se garder d’entrer dans le confessionnal d’une correspondance, où l’on s’accuse sans vouloir s’accuser et quelquefois en se vantant.

1660. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « J. de Maistre » pp. 81-108

Bien avant les abatteurs de frontière, qui dressent sur le pavois, embrassée et entrelacée, la grande figure de l’Humanité, le comte de Maistre, l’anti-philosophe, l’anti-progressif, le retardataire, montrait de son doigt prophétique l’Europe, et par l’Europe le monde, ascendant vers ce but de tout : l’unité ! […] La nôtre était de montrer par ces paroles que le cassant et impérieux comte de Maistre prévoyait sans horreur, et même sans étonnement, de telles circonstances, et qu’il donnait même au gouvernement, que dans son livre il arme contre elles, le conseil de leur obéir.

1661. (1917) Les diverses familles spirituelles de la France « Chapitre iii »

S’est montré constamment les 9 et 10 mai aux endroits les plus dangereux, exhortant les uns, encourageant les autres, pansant les blessés, les faisant ramasser rapidement, en un mot, étant un exemple constant de courage, de bonne humeur et de charité. » (J. […] Il rassure ses hommes, les encourage : « Ne craignez pas : je tomberai dans les premiers, mais vous passerez. »‌ Un grand Christ qui, jadis, étendait ses bras sur la plaine, est là, à l’entrée de la tranchée ; les obus de l’ennemi lui ont arraché le bras gauche ; son bras droit semble montrer le ciel aux soldats qui vont mourir et qui le saluent en passant.‌

1662. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre X : M. Jouffroy psychologue »

Ayant montré que la psychologie est utile, il voulut prouver qu’elle est possible69, et mit dans cette preuve une abondance d’explications, une rigueur de raisonnement, un entraînement de passion et une force de conviction, qui renversèrent toute résistance et parurent lever toute difficulté. […] Jouffroy n’a mieux montré son genre de talent, l’invention circonspecte et féconde, la floraison innombrable d’idées ramifiées et entre-croisées qui s’épanouissent en tremblant, prêtes à se replier et à se fermer au moindre orage.

1663. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « I » pp. 1-8

Sa plume n’a jamais été plus ferme, bien que dans les Affaires de Rome elle se soit montrée plus légère.

1664. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Chateaubriand — Note »

« Chateaubriand. »  En citant de semblables éloges à mon sujet, je n’ai qu’une intention et qu’un désir : c’est de montrer que si, la veille ou le lendemain d’une telle lettre, nous venions à louer M. de Chateaubriand, comme il était tout naturel de le faire dans le milieu de société où nous vivions près de lui, nous ne faisions nullement pour cela la cour à un puissant lettré dont nous eussions besoin, ni une platitude envers un grand nom idolâtré ; il pouvait y avoir de notre part quelque complaisance assurément, mais cette complaisance n’était pas tout entière de notre côté, et elle était elle-même partagée.

1665. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « SUR ANDRÉ CHÉNIER. » pp. 497-504

Aujourd’hui cette école est dissoute ; on se montre, on s’est montré même autour de nous148 bien sévère pour elle, par des raisons judicieuses qu’il serait possible, je crois, d’atténuer plutôt que de détruire.

1666. (1874) Premiers lundis. Tome II « Poésie — Le Comte Walewski. L’École du Monde »

Walewski est dans le cas de nous tous, journalistes et littérateurs par goût, par convenances (qu’il le sache bien, car en bonne compagnie les nécessités mêmes s’appellent des convenances), littérateurs à nos moments perdus (et nous en perdons beaucoup) ; il ne faut pas qu’il s’imagine que nous soyons plus contraints au métier que lui ; nous sommes tous des amateurs, et il est étrangement venu à nous dire : « La presse qui semblait devoir, au moins par générosité, accueillir avec indulgence un homme du monde et lui faire les honneurs de la république des lettres, la presse, c’est-à-dire une partie de la presse, s’est montrée peu courtoise. » La presse ne devait et ne doit rien à M. 

1667. (1875) Premiers lundis. Tome III « Le roi Jérôme »

Capitaine de frégate, ayant ordre, en 1805, d’appareiller avec la Pomone et deux bricks pour se rendre dans les eaux d’Alger et y réclamer du Dey 250 Génois pris par les corsaires algériens et jetés dans les fers, il montra une énergie, une volonté devant laquelle la puissance barbaresque dut plier.

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