Fontenelle et les modernes, qui avaient à prendre leur revanche du discours de La Bruyère et de la préface très vive qu’il y avait jointe, firent l’élection de l’abbé de Saint-Pierre : pour eux, c’était un auxiliaire et un renfort ; pour les autres, ce n’était alors qu’un abbé de cour, de mœurs douces et polies, et assez grandement apparenté. […] S’il avait été père, il eût été homme à répondre comme cet utopiste moderne à un ami qui, après une longue absence, lui demandait d’abord : « Comment va ta fille ?
Parmi les jeunes et ceux qui briguent la palme dans un prochain avenir, je suis forcé de négliger un groupe de jeunes amis : Catulle Mendès que son prénom oblige et qui ne paraît pas d’humeur à y déroger, qui se fait un jeu de mêler dans ses composés subtils Gautier, Musset et Benserade, nectar et poison ; — Emmanuel des Essarts que son nom oblige aussi, fils de poëte, un de mes élèves à moi (car j’en ai eu à l’École normale), et qui sait allier la religion de l’antiquité aux plus modernes ardeurs : qu’il ne les sépare jamais ! […] Il a corrigé la monotonie qui s’ensuivrait bientôt, par de jolis sonnets où se mêle la pensée ou la fantaisie ; celui qui a pour titre Sous bois est un bijou, un petit cadre hollandais, ou tout simplement un cadre français moderne.
Les modernes, et surtout Shakespeare, trouvent de plus profondes sources d’émotions dans la nécessité philosophique. […] Blair donnait des leçons à ses écoliers sur l’art de l’éloquence, et indiquait tous les exemples anciens et modernes qui pouvaient appuyer ses préceptes.
Aux anciens, à quelques modernes, comme Racan ou Corneille, Malherbe ou Voiture ; mais, aussi, et d’une façon particulièrement significative, à quelques auteurs nouveaux, de mérite encore contesté ou obscur, et dont surtout on ne s’avisait pas encore qu’ils fussent si différents des autres : un comédien poète qui venait de la province, un jeune tragique encore à ses débuts, un poète négligé qui, n’étant plus jeune, n’avait pas fait grand’chose encore : l’auteur de l’École des femmes, l’auteur d’Alexandre, et l’auteur de Joconde. […] Il y avait plus d’un siècle que se préparait la forme littéraire dont il devait fixer le caractère, et sa doctrine était le terme où l’on devait nécessairement aboutir, lorsque les belles œuvres de l’antiquité païenne eurent éveillé le goût français, et lorsqu’en même temps leur sagesse toute naturelle et toute humaine eut inspiré à la raison moderne la hardiesse de marcher en liberté selon ses lois intimes.
Les acteurs peuvent donc jouer et circuler dans toutes les rues, se cacher, épier, écouter ou surprendre très naturellement des secrets et des mystères qui sont parfois impossibles à mettre en scène sur nos théâtres modernes. » Tel est en effet l’aspect général du théâtre figuré dans les comédies imprimées avec vignettes au seizième siècle, aspect non pas uniforme, cependant. […] La Sposa (l’Épousée), par exemple, qui forme la dixième journée du recueil, devait être quelque chose de tout à fait analogue à notre moderne Chapeau de paille d’Italie.
Ainsi, dans les Cœurs nouveaux, où un critique subjectif aurait le choix entre des thèmes si divers, un esprit susceptible de s’impersonnaliser, ou plutôt de se personnaliser en autrui, discernerait avec netteté : 1º Une peinture réaliste de famille aisée et moderne, avec château et mail-coach, peinture en mouvement juste et de ton nouveau ; 2º Une fiction idéaliste traduisant la position d’un esprit indépendant et d’un cœur de bonne volonté parmi la chose sociale en douleur. […] L’homme des Flandres qui, au xive siècle, suait sa vie à sculpter quatre pierres de la cathédrale de Bruges était-il moins ou plus heureux qu’un moderne ouvrier raffineur ?
Toujours est-il que, dans les bons temps, l’art de vivre, comme l’entendent les modernes, n’a été poussé nulle part ailleurs comme à Paris. […] Tandis qu’une grande actrice y rendait la vie et la fraîcheur aux chefs-d’œuvre, de légers et poétiques talents y introduisaient la fantaisie moderne dans sa plus vive étincelle.
Meibomius parle encore de cette matiere en differens endroits de son recueil d’anciens auteurs qui ont écrit sur la musique, et principalement dans sa préface, où il donne le chant du te deum, écrit suivant la tablature antique et en notes modernes. […] On en a tiré les hymnes à Calliope, à Nemesis et à Appollon aussi-bien que la strophe d’une des odes de Pindare que Monsieur Burette nous a données avec la note antique et la note moderne.
Par opposition à la littérature classique, on a nommé littérature romantique celle où l’on professe une plus grande indépendance des règles, où l’on se permet de nouvelles alliances de mots, et surtout de nouvelles inventions de style ; où l’on secoue les lois de l’analogie, où l’imitation étend son domaine, où la pensée fait effort contre la parole fixée, la parole écrite ; où les sujets sont tirés des traditions modernes. […] Ne sent-on pas qu’elle ne reprendra plus ces attitudes si naïvement majestueuses qui lui furent données par le prophète des temps modernes ?
Louis Teste a insisté beaucoup dans sa biographie, avec la préoccupation moderne qui est de voir tout dans la science, sur les habitudes studieuses et la profonde érudition de Léon XIII. […] … Voilà, en Italie, comme en Europe, comme partout dans le monde moderne, les sinistres prémisses du syllogisme formidable posé par les événements, et dont le Pontificat de Léon XIII pourrait être la conclusion.
Mais une tendance générale est plus dangereuse et en dit plus long qu’un fait isolé, et il faut bien la signaler quand on est chrétien : la tendance de l’enseignement par l’Académie est anti-chrétienne… Je me moque bien, pour ma part, du Spiritualisme de la philosophie moderne ! […] La philanthropie du sceptique moderne, M.
Que ceux qui touchent aux événements de l’histoire moderne, de cette histoire qui nous a enfantés dans l’erreur et le trouble, ne se fassent pas de lâche ou de sotte illusion. […] Du reste, religion, papauté, société, ces trois choses peuvent-elles se séparer dans le monde moderne sans qu’aussitôt tout ne croule et ne s’éparpille, comme nous l’avons vu, dans une inénarrable confusion ?
Nous-mêmes, qui ne haïssons pas cependant les béguines, nous n’aurions peut-être jamais parlé du livre de celle-ci sans la circonstance très moderne d’une critique historique qui recherche depuis quelque temps, avec un instinct de satyre dans les deux sens du mot, l’odeur de la femme (odor di femina) dans l’histoire. […] Comme on sent, sous la plume qui se promène avec tant de bonheur en ces purulences, l’envie triomphante du démocrate moderne suivant avec une joie féroce la décomposition de ce sang royal et héroïque, qui a trop duré, mais qui ne s’est pas décomposé si vite que, pour hâter son épuisement et en voir la fin, on n’ait pas employé la guillotine, cette saignée du médecin Marat !
Mais l’Hérodiade moderne, plus stupide et plus sordide que la courtisane de Judée, n’a pas pris plus garde à la tête qu’on lui servait qu’au travail merveilleux du plat sur lequel elle était servie. […] De même, en sensation, ôtez le vestiaire de Don Juan qui traîne partout et les réminiscences de Shakespeare sur lequel nous vivons pour l’instant ; ôtez les Musées et les tableaux décrits, depuis Rubens jusqu’à Watteau, c’est-à-dire la poésie ravalée jusqu’à n’être plus qu’un daguerréotype ; ôtez l’orgie (la moderne et l’antique !)
Panorama dans un éclair, monde dans une goutte de rosée ou de vin de Champagne, bulle d’arc-en-ciel suspendue à un fuseau d’ivoire et enflée par une haleine de cristal et deux lèvres vermeilles ; poudre d’or dansant dans la lumière électrique : vignette du Moyen Âge transposée du missel dans le monde moderne et à la marge de ses romans ; priapée légère, insolence de fillette heureuse, ivre saltarelle, pointe d’un poignard de cristal trempé dans un poison fait avec des roses, grelots de tambour de basque et sifflet d’argent, mais surtout sifflet (le serpent toujours !) […] Le roman, qui est la forme des temps modernes, se détériorera aussi un jour, et la forme de Balzac, qui nous donne actuellement de si prodigieuses jouissances, nous deviendra aussi indifférente que nous l’est maintenant la forme théâtrale de Shakespeare, pour laquelle, il y a trente ans, on s’est si vivement passionné.
Et comme, depuis 1830, le matérialisme du xviiie siècle, interrompu par le spiritualisme philosophique de la Restauration, trop vague pour lui résister, a repris la société moderne qu’il s’est définitivement asservie ; comme Sainte-Beuve, sceptique autant que Planche, lui a survécu et est devenu résolument matérialiste au déclin de sa vie, marquant en lui le progrès des esprits vers cette effroyable erreur absolue dans laquelle le monde presque tout entier verse en ce moment, le succès de Manon Lescaut devait grandir et a grandi. […] Il faut bien les peindre, puisqu’elles sont partout, puisqu’elles envahissent tout, puisqu’elles grimpent à tous les étages de la société moderne, dans cette crue montante des mauvaises mœurs !
Il reçut alors deux titres, optimus dans le sens de très fort (de même que chez les anciens latins, fortis eut le même sens que bonus dans des temps plus modernes) ; et maximus, d’après l’étendue de son corps, aussi vaste que le ciel. […] Cette découverte de l’origine de la poésie détruit le préjugé commun sur la profondeur de la sagesse antique, à laquelle les modernes devraient désespérer d’atteindre, et dont tous les philosophes depuis Platon jusqu’à Bacon ont tant souhaité de pénétrer le secret.
Un vers puissant, facile, moderne sans trop déroger.